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L’Occident aime à penser que la "civilisation" vaincra l’État islamique, mais l’histoire suggère le contraire (The Independent)

Nous nous accrochons à notre conviction que la barbarie ne survivra jamais à la puissance des justes.

Hitler a donné le mauvais exemple. Il était le diable. Son régime était le diable. Son Reich a été détruit, les nazis vaincus, le Führer est mort de sa propre main dans les cendres du cauchemar européen. Les méchants perdent. Les bons gagnent. La moralité, les droits de l’Homme, la justice, la démocratie — même si, en parlant de celle-ci, nous devrions peut-être prendre des pincettes — prévalent toujours sur la méchanceté. Voilà ce que la Seconde Guerre mondiale nous a enseigné.

Nous avons grandi dans une société occidentale qui croit en ces si simples, si douteuses leçons historiques. Les grandes religions du monde nous enseignent que la bonté, l’humilité, la famille, l’amour, la foi triomphent toujours. Alors pourquoi ne accrocherions-nous pas — aussi libéraux, agnostiques et cyniques que soyons — à notre croyance fondamentale que la violence et la torture et la cruauté ne survivront jamais à la puissance et aux courage des justes ?

Massacres barbares contre massacres civilisés

L’État islamique (EI) est le diable. Il massacre ses adversaires, abat des civils, décapite l’innocent, viole les enfants et asservit les femmes. Il est “apocalyptique”, selon les Américains, et il est donc condamné. Mieux encore, Ash Carter — le secrétaire américain de la Défense qui a accusé les Irakiens de fuir l’EI — a fait la leçon au Premier ministre irakien la semaine dernière. Son message — j’avais peine à croire à une telle naïveté — était clairement hollywoodien : « La civilisation gagne toujours sur la barbarie. »

Mais est-ce aussi évident ? Il nous suffit de revenir au mensonge de la Seconde Guerre mondiale pour nous convaincre du contraire. Bien sûr, Hitler a perdu. Mais notre allié Staline a gagné. La Révolution russe de 1917 a donné lieu à l’une des pires Gorgones de notre époque : la dictature soviétique, la famine de masse conduisant à la mort de millions de personnes, la barbarie — selon l’échelle de Ash Carter — et le diable se sont incarnés en Russie et en Europe de l’Est pendant plus de 70 ans, dont 40 après la Seconde Guerre mondiale.

Les Romains ont gardé la “barbarie” à distance pendant près de mille ans, mais à la fin ce sont les Goths, les Wisigoths et les Ostrogoths — les islamistes de l’époque — qui gagnèrent. Et la “civilisation” romaine ne valait que si vous n’étiez pas opposé à Rome. Sinon c’était crucifixion, esclavage, torture, massacre (toute la gamme islamiste moins les bandes vidéo), pendant près de mille ans.

Attila le Hun, le Fléau de Dieu, détruisit presque tout entre la Perse et la Méditerranée. Gengis Khan, un acteur incontournable dans ce drame sordide, continua de même jusqu’à sa mort en 1227 — soit 30 ans de plus que l’EI au jour d’aujourd’hui. Son petit-fils Hulagu fut invoqué par le général Angus Maude quand il “libéra” Bagdad en 1917 et apporta la “civilisation” en Mésopotamie. Ash Carter devrait lire la déclaration de Maude à la population de Bagdad : « Depuis le règne de Hulagu, vos citoyens ont été soumis à la tyrannie des étrangers, vos palais sont tombés en ruines, vos jardins ont été plongés dans la désolation, vos ancêtres et vous-mêmes avaient gémi dans la servitude. » Un peu comme l’EI, en d’autres termes. Sauf que, selon les comptes de Maude, cette « tyrannie » dura environ 700 ans.

L’argent parle plus fort que la “civilisation”

Maintenant, voyons d’un peu plus près les années qui suivirent l’intervention de la “civilisation” — encore une fois — à Bagdad, après l’invasion illégale de l’Irak en 2003. Entre deux voyages quotidiens à la morgue de la ville et des visites à des tentes de deuil, les familles en colère nous diraient que la “liberté” que nous leur avons apportée a surtout entraîné l’anarchie. Ils haïssaient le dictateur Saddam qui a massacré ses adversaires — et qui a imposé 24 ans de “barbarie” à son peuple — mais au moins il leur assurait la sécurité. Si vous avez des enfants, nous diraient ces gens, vous voulez surtout qu’ils puissent rentrer de l’école sains et saufs. Vous ne voulez pas qu’ils soient assassinés. Alors, que devons nous préférer, nous demanderont-ils ? La liberté ou la sécurité ? La démocratie ou Saddam ?

Craignant le gouvernement irakien à dominante chiite, dont les milices les ont massacrés, et les dictatures arabes corrompues, qui les ont réprimées, plusieurs centaines de milliers de musulmans sunnites semblent avoir trouvé la sécurité avec l’EI. Pas les chiites, ni les chrétiens, ni les Yézidis. Il n’y a pas de “liberté” comme nous la concevons. Mais à Beyrouth, par exemple, les hommes sunnites irakiens qui transitent entre la capitale libanaise et la capitale syrienne de l’EI, Raqqa, rapportent — dès lors qu’ils ne fument pas, qu’ils ne boivent pas de l’alcool, que leurs femmes sont couvertes et qu’ils ne s’opposent pas à l’EI — qu’ils sont tout à fait libres de faire des affaires, de visiter leurs familles, de voyager en toute sécurité. (Idem sous le régime taliban en Afghanistan.)

Des cartes d’identité sont délivrées par les autorités de l’EI, la police fluviale a des bateaux fraîchement repeints, les impôts sont prélevés, et, oui, les punitions sont barbares. Mais cela ne signifie pas le “califat islamique” va être conquis par la “civilisation”.

Et comment pouvons-nous croire qu’il pourrait en être ainsi, quand notre propre patron en relations publiques délire sur les « valeurs britanniques » — tout en soutenant les hommes vénaux, hypocrites, immensément riches et dangereux qui ont contribué financièrement à la naissance de l’EI. Je veux parler, bien sûr, des Saoudiens dont le culte fou, sunnite wahhabite, a encouragé l’EI, dont le puritanisme grotesque les a amenés à adopter l’extrémisme de la décapitation, celle-là même qui est au cœur de la propre “barbarie” de l’EI. Bien sûr, l’État saoudien tente d’enrayer aujourd’hui la progression de l’EI. Mais ces mêmes Saoudiens sont maintenant en train de tuer des milliers de chiites Houthis au Yémen dans une campagne de bombardement soutenue par nos nations occidentales. Et que fit David Cameron lorsque le vieux roi desséchée de cet état bizarre mourut ? L’argent parle plus fort que la “civilisation”. Aussi ordonna-t-il que les drapeaux britanniques soient mis en berne. Voilà ce que j’appelle les valeurs britanniques !

Pauvre vieux Dave. Il déteste l’EI mais adore l’un de ses “géniteurs” âgés. Pourtant, n’ayez crainte, la “civilisation” peut encore l’emporter sur “la barbarie”. Je soupçonne très fort qu’Ash, Dave et les autres vont essayer d’acheter l’EI, de les diviser en factions et de choisir les plus “modérés” d’entre eux. Ensuite, nous aurons un nouvel État islamique, libéral celui-là — des gens avec qui nous pourrons faire des affaires et un bout de chemin ensemble, toutes fautes pardonnées. Nous pourrons alors établir avec eux des relations aussi bénéfiques que celles établies par les Américains avec les scientifiques de guerre allemands d’Hitler, juste après que la “civilisation” ait vaincu la “barbarie” nazie à l’issue de la Seconde Guerre mondiale.

Ainsi va la “civilisation”.

Robert Fisk

Original : http://www.independent.co.uk/voices/comment/the-west-likes-to-think-th...

Traduction et intertitres par Le Yéti

»» http://yetiblog.org/index.php++cs_INTERRO++post%2F1468
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