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La politique hors-sol

L’on connaissait l’agriculture hors-sol qui engraisse ses animaux enfermés loin des prairies à l’herbe grasse ou du regard doux des enfants et fait pousser des légumes en suspension dans l’air. Le productivisme mâtiné de technocratie arrogante en fut la cause voilà cinquante ans.

L’on apprit à connaître, de plus fraîche date, l’industrie déterritorialisée où les lieux de la production se déplacent au gré de l’aubaine des salaires les plus bas et de l’hyper-concurrence des travailleurs du monde entier. Avec cette « internationale capitaliste » issue de la libéralisation débridée de l’économie planétaire nous pensions peut-être que la déshumanisation de nos sociétés touchait presque à son comble ? Oui, elle « était presque à son comble. Il ne lui manquait plus que la confiscation des lieux où s’ancrent l’histoire et la sociologie des populations humaines. Eh bien, en France les départements vont disparaître, les régions – conséquence relative des ancestrales provinces – vont voir leur nombre fondre comme peau de chagrin. C’est ainsi qu’à l’heure de la finance totalitaire le territoire n’a lui-même plus lieu d’être !

Dans la longue agonie du capitalisme, les « vieux » pays industriels cherchent de l’argent à tous prix. Ils connaissent des déficits budgétaires et un endettement abyssaux. Ils sont ainsi engagés dans une spirale de désengagement de l’Etat. Pour que l’on n’écorne pas trop rapidement ce qu’il reste du « modèle social français », les économistes préconisent depuis des années que l’on s’attaque enfin à ce qu’ils nomment « le millefeuille territorial ». Ce sont des économistes sociaux-libéraux comme aiment à nous le signaler les éditorialistes appointés par les organes de presse les plus en vue. C’est ainsi que Philippe Aghion, Gilbert Cette et Elie Cohen, qui viennent de commettre ensemble une nouvelle offensive – « Changer de modèle » - contre « les retards de la France » dans la course menant au « retour de la Croissance », saluent le courage de Manuel Valls, le tout nouveau Premier Ministre (1). L’homme qui pourrait sauver « la gauche de gouvernement » a, lors de son discours de politique générale prononcé le 8 avril dernier au Palais Bourbon, sonné d’autorité le glas de l’empilement dispendieux des échelons de notre système politico-administratif.

Ce nouveau chantier est une amputation de la réalité profonde des territoires pourtant riches d’une large diversité. Le territoire est évidemment beaucoup plus qu’un simple espace géographiquement administré selon les caprices du moment. Il est imprégné de la vie des hommes organisés en société . Il a une triple dimension : économique, sociale et politique. L’organisation de la production et des échanges marchands sur un territoire donné n’est donc que l’un des aspect de la volonté humaine à faire vivre ce territoire. L‘obsession de M. Valls ne retient à l’évidence de la dimension économique du territoire que son aspect purement financier et probablement de la dimension politique que son aspect électoral. La dimension sociale, quant à elle, est purement évacuée. C’est pourtant là que résident tous les ferments de la stimulation de la démocratie dont une gauche digne de ce nom devrait faire son credo. C’est toute la substance vivante des territoires qui est ici méprisée au profits de leurs émanations – largement artificielles – que sont la financiarisation et l’électoralisme. Si ce désastreux projet devait aboutir il ne ferait que renforcer la concentration du capitalisme financier (développement d’empires bancaires et de métropoles tentaculaires) et la démocratie de façade (fausse alternance tuant les vraies alternatives, abstention croissante). Sonnera alors le triomphe définitif de la politique hors-sol.

Autrefois en France diverse, tout commençait et finissait par la gastronomie ! A l’issue de la folie vallsienne nous nous consolerons en caressant le souvenir de tant d’anciens terroirs désormais labellisés technocratiquement et commercialement par « l’Europe communautaire ». Pourquoi ce détour osé – tout barrèsisme désuet rejeté - par ces terroirs immémoriaux déjà passablement noyés dans le brouillard des directives vruxelloises ? Il est tellement évident que le nouveau modèle politico-administratif imaginé par Manuel Valls et ses mentors est conforme à l’Europe telle qu’elle s’est construite presque à l’insu des citoyens. L’Europe sociale et politique reste à construire quand celle des banques, des firmes et de leurs actionnaires poursuit sa marche dévastatrice des tissus sociaux et des idéaux démocratiques. L’on n’attendra donc rien de bon de ce « machin » que l’on prétend moderne tout comme le prochain scrutin européen sera loin de passionner les foules.

La citoyenneté, en France comme ailleurs, ne peut s’établir vraiment qu’en alliant étroitement l’appartenance à des territoires reconnus et le détachement relatif vers l’envie de partager des valeurs communes à tous les hommes. Décidément, Manuel Valls semble très éloigné de cette indispensable alliance. Gardons pour lui les pieds sur terre !

Yann Fiévet

Les Zindigné(e)s / La vie est à nous - No 15 – Mai 2014

(1) Sitôt leur libre paru ils ont été reçu à l’Elysée pour un « déjeuner de travail ». Ils défendent également l’idée qu’un SMIC trop élevé nuit à l’emploi. Puisque l’on vous dit qu’ils sont sociaux-libéraux !

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