Les grands patrons écrivent à Hollande : la lettre en exclusivité

Blogapares

Après les pigeons, c'est au tour des rapaces d'écrire à François Hollande. Les guerriers volatiles se sont arrachées une de leurs plus belles plumes pour se plaindre des difficultés qu'ils rencontrent dans la bonne marche de leur entreprise pas assez compétitives selon eux face à une concurrence internationale débridée et sauvage générée par la mondialisation...
L'Association française des entreprises privées, les grands patrons donc, pas fichue d'avoir un site internet, les temps sont vraiment durs, demande, oh surprise, notamment une baisse des cotisations sociales et de l'impôt des sociétés.

L'AFEP, fondée en 1982 par entre autres Dominique Strauss-Khan, on croit rêver, et qui rassemble donc la volière du CAC 40, aime décidément l'écrit épistolaire. En 2010, il avait tenté de freiner les avancées du Grenelle de l'environnement par déjà un courrier adressé au ministre de l'écologie.

Nous avons la lettre en exclusivité et sommes heureux de la partager dès aujourd'hui.

"Mon cher François,

Comment vas-tu ? La famille, ça boum ? Et Valérie ? Pas trop dur pour elle ?

Bon dis-moi, c’est pas pour ça que je t’écris, tu t’en doutes bien.

On s’est réunis l’autre soir avec les pots et on s’est dit , excuse-moi de te le dire aussi franchement, que t’assurais pas trop quand même.

Déjà , Louis a sacrément les boules. Ca faisait trois mois qu’il préparait son rapport et alors même qu’il n’est même pas paru, vous lui tombez dessus à bras raccourcis. Pas cool. Mais bon, c’est la vie. Ce serait sympa que tu l’appelles. En ce moment , il se repose dans sa maison de campagne. Il m’a dit qu’il t’en voulait pas trop. Tu passes quand tu veux. Par contre , Jean-Marc et le petit Benoît, c’est même pas la peine d’y penser. Coup de fusil assuré, qu’il nous a dit Loulou.

Cela dit, tu te doutes bien que nous on est d’accord avec Loulou. La compétitivité, pas terrible en ce moment. On rame. Il faut un choc. Loulou l’a dit, Denis aussi. C’est pas sans raison tu penses bien. La situation l’exige. Le TSCG de Nicolas que t’as bien voulu reprendre, et on t’en remercie tous du fond du coeur, c’est bien. Mais ce n’était qu’un début, quand même ! François, allons !

On a eu donc eu pas mal d’idées. Heureusement, on avait fini avant que Domi arrive. Tu connais Domi, quand il est "parti"...

D’abord, faudrait sérieusement baisser les charges sociales y a pas à dire. Tes 40 milliards sur 5 ans c’est vraiment pas assez. Tu déconnes ou quoi ? Pour nous il faudrait 30 milliards sur deux ans sur les salaires "moyens" de 2 smic et plus.

Mais tu te doutes que c’est pas nous qui devons raquer.

Alors, écoute bien Paco, il faut passer à 21,6 de TVA : 15 milliards , c’est pas rien quand même. Ca fait que 350 € en moyenne par foyer, faut pas déconner.

Mais surtout baisse-moi ces putains de dépenses publiques. Tu sais que nous on est prêt depuis longtemps. Philippe veut se lancer dans les cliniques privées, Jean-Marie dans l’enseignement (il t’a fait un de ces projets, tu verrais ça ! 600 € par mois et par enfant dès la maternelle. Il va se gaver ce con), Roland a déjà trois cliniques en vue. Et alors celui qui me tue c’est Robert : il veut racheter carrément La Salpêtrière et recruter des flics privés sur Marseille. Sacré Bob ! Moi je vais peut-être racheter une Mutuelle Santé. (Le dis pas trop, mais suis sur un super coup).

Mais revenons à nos moutons.

Les impôts de Société tu les baisse quand tu veux ! Tu sais qu’on est parmi les plus élevés d’Europe. Tu pourrais faire comme en Irlande ou même la Bulgarie. Non ?

Faudrait aussi exploiter le gaz de Schiste, sans blague. Non mais tu te rends compte ce qu’on va perdre. C’est pas quelques paysous qui vont nous emmerder quand même !!

Je te rapelle Paquito, que ça fait pas mal de temps qu’on morfle. Bon c’est vrai que le poids fiscal de nos boîtes est en moyenne quatre fois inférieur à celui de la PME. Mais nos bénéfices en 2011 n’ont augmenté que de 48% par rapport à 2010 !Tu te rends compte ? Mais où on va, mais où on va ? Je te le demande.

En 2008, a cause de la crise (oui, oui je sais, on a fait exprès de la provoquer... Ca va, il y a prescription maintenant !) on n’a pu verser que 54,7 milliards d’Euros de dividendes à nos actionnaires. J’aime autant te dire qu’ils nous font encore la gueule. En 2009, Total n’ a pu leur verser que 10% de plus qu’en 2008 sur les bénéfices. J’aime autant te dire que ça a valsé (les salariés, je te rassure).

Quand tu penses que même Bernard se barre. Tu te rends compte ?? Qui c’est qui va nous préparer les cocktails maintenant ? Sans parler des chuletas au barbecue. Pingre comme il est , il va même pas nous laisser la recette de sa sauce au Gingembre. Le Domi, il l’a mauvaise, crois-moi.

Les stock-options, les stocks options. Mais tu sais où on en est ? Mais c’est la dèche Paco, la dèche ! quand Edouard a sorti sa nouvelle loi, on avait pourtant dit qu’elle ne servait à rien. Tu crois qu’il nous aurait écouté ? Oui, oui, je sais, on a influencé pas mal de lois depuis 20 ans, mais quand même. Là tu veux nous imposer davantage. Non mais oh, c’est fini ? Faut se détendre c’est qu’on en peu plus. Je te rappelle que Jean-Paul avait renoncé à 3,5 millions en 2009. Si c’est pas faire des efforts.

Bon écoute, faut que j’y aille. J’aurais aimé te parler de nos jetons de présence qui fondent comme neige au soleil, des paradis fiscaux que vous ciblez de plus en plus même s’il est vrai, je le reconnais, vous ne faites rien pour l’instant, du partenariat public privé qu’il faudrait aussi développer histoire que vous assumiez les dépenses, surtout en recherche et innovation, au prix ou c’est cette histoire. Et les retraites-chapeau ? Quand tu penses que Georges, tu te rapelles, l’ancien Pdg du Crédit Agricole, est parti avec même pas 800 000 €de retraite par an. Bon d’accord, il bénéficie également, jusqu’en 2015, d’un bureau, d’une secrétaire et d’une voiture de fonction avec chauffeur. Mais quand même.

Je finirai quand même, et là , je pense que si t’y es pas sensible, c’est que t’es pas socialiste : nos revenus en 2011 n’ont augmenté que de 34% ! Oui 34%. Tu te rends compte ? On gagne c’est vrai, 2,5 fois plus que nos collègues scandinaves qui n’ont rien compris, mais 50% de moins que nos pots anglais. On gagne à peine un peu plus de 4, 1 millions d’euros en moyenne par an.J’aime autant te dire que quand on se voit, on passe pour des guignols. Soit disant qu’on touche des "hauts revenus"... Quand tu sais que l’adhésion à L’AFEP est de 50 000 € par an en plus...

Quand je pense, quand je pense qui en a qui disent que tout ça freine la compétitivité. Non mais je hallucine. Des jaloux, je te dis, des jaloux. En plus, ils veulent qu’on revienne au 19 siècle où on gagnait que 30 fois maximum le plus bas salaire. Mais comment veux -tu qu’on passe de plus de 500 fois à 30 fois ? Des années de lutte, de magouilles, de dessous de table pour rien ? Il en est pas question !

C’est pas difficile, Paco, on te le dit tous les jours : faut prendre l’argent chez ceux qui n’en ont pas ou qu’un peu ! Ils peuvent pas se barrer eux ! Les syndicats, sont liquidés : un pelé et deux tondus par syndicat. Ils bougeront pas ! T’es de gauche, t’as rien à craindre. Ca aurait été Nicolas, je dis pas, mais là , tu vas à fond. Et quand bien même !

Mais tu vas finir par comprendre ça , nom d’une pipe ? Je te rappelle que notre objectif final, c’est le smig à 600 €, 45 h de travail par semaine, plus de Sécu. Alors divise, divise les gens.

Pas mal vu le coup du mariage homo et du vote des immigrès. Je le reconnais. Et même que ta Valérie, elle va pas mal pour occuper les médias. Mais occupe l’esprit des gens, distrait-les. Les JO sont arrivés trop tôt. Tu peux pas organiser un mundial de quelque chose là ?

Bon allez embrasse ta femme, les minots, appelle moi qu’on se fasse un graillou. Avec Loulou, ça te dit ?

Et n’oublie pas : baisse des charges sociales, augmentation de la TVA, baisse des Impôts (pour nous, déconne pas, te trompe pas), baisse des dépenses publiques. Fais comme Mariano, il écoute nos collègues espagnols, lui.

Si ça abouti pas à une relance ça, je mange le chapeau Hermès de ma femme. Lui en achèterai un autre. Le marché du Luxe est passé de 75 milliards en 2005 à 196 aujourd’hui. Viens de l’entendre à la télé. Tu vois, qu’on fait marcher le commerce ? Sauver nos revenus, je veux dire nos entreprises est primordial.

Allez, A+

PP"

La lettre a été décodée :

François : président paraît-il socialiste, prend souvent des mesures pourtant de droite, surtout si préparées par elle. Aime les épines des roses.

Louis : c’est Louis G, dit aussi Loulou, rédacteur d’un ex futur rapport. Point sensible....

charges sociales : terme péjoratif pour cotisations sociales, "charges" est à "cotisation" ce que "coût" est à "prix"

Domi : c’est Dominique S... : gros déconneur. Quand il paye, les filles l’aiment bien. Sinon, elles font la gueule.

Jean-Marc : C’est Jean-Marc A, copain de chambrée de François. A part ça,...

Benoît : c’est Benoît H, a critiqué le rapport de Loulou. Loulou pense qu’il est méchant

Paco : diminutif de Francisco en Espagnol. Paquito en est le diminutif affectueux

Edouard : c’est Edouard B, amateur de course au large.... en frégate

Nicolas : grand conférencier à 100 000 € la prestation. Se tire la bourre avec Billy et Tony. Aimerait enseigner comme Andréas à 46 000 € par mois, mais les pupitres sont trop hauts.

Bernard : c’est Bernard A, a découvert les frites et les "Léonidas" tardivement, ne veut plus s’en passer

Chuletas : côtelettes d’agneau en espagnol. Délicieux, mais faut être en bonne compagnie

Mariano : ce n’est pas le chanteur, c’est l’autre, espagnol qui lui est resté en Espagne

Une question me vient à l’esprit à lecture de cette lettre : mais ils se connaissent tous ou quoi ?

Source : Le Nouvel Obs
http://www.blogapares.com

COMMENTAIRES  

29/10/2012 00:34 par Anonyme

A croire que F. Hollande joue un double jeu.
Je suis militant PdG, voici la lettre qui traînait sur le bureau de son Président.
Mon cher Jean-Luc,
Comme il est bon de sentir que son fauteuil de Président de la République a aussi un accoudoir à gauche.
Tu sais très bien que Jean-Marc n’est qu’un Premier ministre de transition, que j’ai désigné pour ne pas effrayé (sic) ceux qui m’ont élu, mais je n’oublie pas que je suis ici grâce à tes 4 millions de voix.
Je suis entièrement d’accord avec le combat que tu mènes contre le TSCG.
Tu as très bien compris que je n’ai signé avec Merkel que pour donner le change et te donner en réalité toute latitude dans l’action.
Je vois que la tension monte dans le peuple qui me désapprouve largement. Tant mieux !
Cela ouvre les perspectives de lendemains qui chantent.
Attends encore un peu, continue à mettre les masses en branle, et il faudra que je vire l’autre pour faire appel à toi : alors ils verront en Europe de quel bois je me chauffe.
Ensuite, finis les troubles, il s’agit simplement de prendre avec toi les dispositions qui permettrait au capitalisme de mieux tourner.
1) Remettre en cause le paiement de la dette tel qu’il est organisé aujourd’hui en faisant payer les peuples, remarque l’ambiguïté de ma formule, qui peut laisser penser qu’ils continueront à être pompés alors que...
C’est ce que les grammairiens appellent une tournure louche.
2) La priorité au redressement productif, à l’investissement dans les services publics, à l’investissement industriel, à la transition écologique, donc concentrer les financements sur la création de richesses utiles et sur une meilleure répartition des richesses.
Et c’est pour cela que nous proposerons :
3) De reprendre le contrôle des circuits bancaires et financiers, de changer le rôle central de la BCE, que nous proposerons la création d’une banque publique européenne exclusivement consacrée au financement social et écologique.
En gros, prendre le contre-pied de tout ce que je fais par ruse.
La gauche européenne ne manque pas d’audace : suivons donc son programme !
Il restera à voir comment les intéressés nous laisserons nous asseoir dans leur fauteuil de PDG, et si les peuples suivent d’enthousiasme une telle initiative.
Pour le moment, rien d’évident ni d’un côté ni de l’autre.
Pendant qu’à l’extérieur on continuera la politique agressive de la CIA et de l’OTAN, pour ne se mettre personne à dos....
C’est très beau dans un programme, à l’épreuve des faits c’est une autre paire de manches : il faudra toute notre détermination pour que ça marche, mais pour deux copains rien n’est impossible, n’est-ce pas ?
A bientôt sur le perron de l’Élysée, tu verras mon cher Jean-Luc que c’est mieux que la promenade que tu as faite dimanche dans ses jardins ; je compte sur toi,
ton François
C’est dur à avaler, non ?

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