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Lettre ouverte à Monsieur Moncef Ben Salem, Ministre tunisien de l’Enseignement Supérieur

Monsieur le Ministre,

1. Monsieur le Ministre, c’est en tant que deuxième personnage de l’Etat, après le Guide Suprême, que je m’adresse à vous

Monsieur le Ministre de l’Enseignement Supérieur, ce n’est pas, uniquement, en tant que tel que je vais m’adresser à vous, mais bien au-delà  ; car, votre poids politique, votre passé historique, la place de votre courant doctrinal et votre aura au sein du Parti Islamiste Ennahdha, Parti qui tient, aujourd’hui, les rênes du Pouvoir, vous place, de fait, au-dessus de ce simple Département Gouvernemental. D’un autre coté, en m’adressant à vous, je sais, pertinemment, que c’est comme si je m’adressais, simultanément, à la Troïka qui nous gouverne. Non pas la Troïka à laquelle vous pensez [qui représente la majorité à l’Assemblée Nationale Constituante (ANC), constituée par votre Parti et ses deux alliés : le Congrès Pour la République et Ettakatol], mais à la Troïka qui dirige, réellement, le pays et qui est constituée de vous-mêmes, de Rached Ghannouchi, Président-Fondateur-Guide-Suprême, et de Hamadi Djebali, Premier-Ministre-Secrétaire-Général d’Ennahdha. Il est à signaler que, parmi tous les cadres de votre Parti, vous êtes celui qui est le plus couvert d’éloges , d’estime et de respect de la part des deux précités : pour eux , tout en étant un vieux militant, compagnon de route, de torture et de prison, vous êtes le « savant » le plus diplômé parmi lesdits cadres. D’ailleurs, à ma connaissance, vous êtes l’unique dirigeant d’Ennahda qui a eu le privilège d’avoir une Page Facebook le soutenant pour être candidat à la Magistrature Suprême.

En réalité, si l’on analyse vos diverses déclarations relatives à la marche des affaires de l’Etat, depuis votre prise de fonction ministérielle, vous apparaissez comme étant le numéro deux de l’Etat, après le Guide Suprême, avant le Premier-Ministre-Secrétaire-Général et avant le Président de la République. Non ! Il n’y a pas erreur : je dis bien le Guide Suprême ! Car, bien que n’occupant, officiellement, aucun poste dans les rouages de l’Etat, Rached Ghannouchi est, en vérité, Monsieur le Ministre, à l’image d’autres Guides sous d’autres cieux, le Chef qui choisit les Ministres, qui aiguille les grands choix du Gouvernement, qui oriente la politique étrangère, qui donne des interviews aux médias étrangers ( occidentaux, moyen-orientaux, y compris Israël,…), pour leur exposer ce que contiendra la nouvelle Constitution, ce que sera la politique étrangère du pays,… , qui préside, aussi bien la commémoration de la Victoire du 14 janvier 2011, date de la fuite du Dictateur, que la délégation tunisienne au Forum Economique Mondial de Davos, …Et pour la petite histoire, Monsieur le Ministre, rappelez-vous que votre Collègue Houcine Dimassi, Ministre des Finances, n’a pas été choisi par le Premier-Ministre-Secrétaire-Général d’Ennahdha pour faire partie de cette délégation ; à ce sujet, il n’est peut-être pas inutile de souligner , Monsieur le Ministre, que Houcine Dimassi fait partie des quelques membres du Gouvernement non affiliés à Ennahdha, ainsi ceci expliquerait cela !

Je disais, Monsieur le Ministre que, en réalité, vous apparaissez comme étant le numéro deux de l’Etat. Cette affirmation est corroborée, entre autres, par les trois faits suivants :

N’est-ce pas vous, Monsieur le Ministre, le premier dirigeant de votre Mouvement qui avez relayé le Guide Suprême dans sa campagne d’acharnement, pour ne pas dire harcèlement, contre les médias, surtout publics, accusés, d’après lui, de ne pas refléter la volonté du peuple, souhaitant faire perdurer le système Zinochet [alias Zine el-Abidine Ben Ali, le Président-Dictateur déchu, avec un petit clin d’oeil à son confrère le Président-Dictateur Pinochet, système pour lequel ces médias étaient la caisse de résonnance, l’Organe officiel du Pouvoir], ignorant que, partout, dans les pays réellement démocratiques, les médias constituent un contre-pouvoir ( le quatrième pouvoir) qui demeure le Garde-fou suprême contre toutes les dérives, en particulier Oligocratiques ou Totalitaires , et confondant le Peuple avec les 20% d’électeurs ayant voté pour Ennahdha. Je tiens à vous faire part, Monsieur le Ministre, de mon intime conviction que c’est, principalement, cette campagne d’acharnement qui a conduit à certaines agressions ciblées perpétrées, contre les biens et les personnes, par des partisans et /ou sympathisants d’Ennahdha ; en particulier, à la sauvage agression [qui a eu lieu, le lundi 23 janvier 2012 devant le Palais de Justice de Tunis, lors d’un Rassemblement, pour la Défense de la Liberté d’Expression et de Création] contre le Journaliste Zied Krichen et notre éminent Collègue, mondialement connu pour ses travaux en Philosophie et Sciences Politiques , le Professeur Hamadi Redissi, agression rapportée dans la Vidéo suivante :

http://www.youtube.com/watch?v=Xz10EW9qDFo

Qui aurait pu imaginer, même dans les pires scénarios, que des Militants des Droits de l’Homme, ayant défendu tous les opposants, y compris les Islamistes, tout en prenant des risques réels, dans les années les plus sombres du Régime de Zinochet, qui aurait pu imaginer que ces mêmes Militants soient, un jour, violemment agressés par lesdits Islamistes !

J’imagine, Monsieur le Ministre, que vous avez eu la bienveillance d’exprimer, au nom de nous tous, votre solidarité à notre Collègue, le Professeur Hamadi Redissi.

Quant à l’agresseur, comme vous le savez, certainement, Monsieur le Ministre, il court toujours, bien que plusieurs vidéos aient été remises à la police, où l’agresseur apparaît sous tous les angles, police réputée pour l’efficacité de ses services de renseignement, pour son réseau d’indicateurs et pour son fichier relatif aux activistes de ce genre !

N’est-ce pas vous, Monsieur le Ministre, qui avez pris l’initiative de faire un audit, en singleton, du bilan du précédent Gouvernement, présidé par Béji Caid Essebsi , en l’accusant, entre autres, de mauvaise gouvernance, de vous « avoir légué des tonnes de problèmes (…)et une situation détériorée » et d’être responsable, en grande partie, de l’aggravation de la situation, en oubliant, Monsieur le Ministre, que c’est grâce au Cabinet Béji Caid Essebsi que le Pays a évité le pire, au lendemain de la Révolution. Je vous dis cela, en vous assurant que je n’ai aucune sympathie particulière pour Béji Caid Essebsi ; qui plus est, j’ai toujours été un opposant au courant politique qu’il représentait, comme j’ai toujours été un opposant au Régime Zinochet.

N’est-ce pas vous, Monsieur le Ministre, qui, d’après l’agence de presse UPI (United Press International), avez déclaré «  qu’un pays étranger serait derrière les événements récents survenus à Bir Ali Ben Khelifa(…) pays qui veut déstabiliser la sécurité et la stabilité de la Tunisie, au moyen d’importantes sommes d’argent », sans pour autant révéler le nom du pays, en ajoutant qu’Interpol est actuellement en train d’investiguer pour tirer au clair cette affaire. Ces événements, au cours desquels il y a eu des affrontements armés entre les Forces de Sécurité et une bande armée, ont été appréciés différemment par le Premier Ministre et le porte-parole de la Présidence de la République affirmant qu’ils seraient «  sans grande gravité » et qu’il ne fallait pas s’alarmer outre mesure.

Aussi, tout en étant le super-Ministre qui se permet, au vu et au su de tout le monde, d’empiéter sur les prérogatives de ses collègues, de son Premier Ministre et du Président de la République, vous êtes, aussi, Monsieur le Ministre, le dirigeant d’Ennahdha le plus à même de connaitre sa vraie idéologie, plutôt sa vraie tactique, apparente ou cachée, et ses vrais desseins actuels, ainsi que son vrai projet de société que ce parti réserve au peuple tunisien, si, lors des prochaines élections, il aura la majorité ; contrairement à la situation d’aujourd’hui où Ennahdha est, simplement, le premier vainqueur des dernières élections, le Peuple n’ayant pas voté, majoritairement, pour elle ; puisqu’elle n’a pas obtenu (50+x)% des suffrages, avec « x » un nombre, mathématiquement, strictement positif : les 40% de sièges obtenus par Ennahda à l’ANC ne représentent, de fait, que 20% environ du corps électoral.

En conséquence, nous vous saurions gré, Monsieur le Ministre, de bien vouloir nous dire qui fait réellement quoi, dans les coulisses du Pouvoir, et de nous expliciter l’authentique organigramme des rouages de ce Pouvoir : le Peuple a le droit et le devoir de connaître ceux qui le gouvernent et de savoir comment ils le gouvernent.

Avant de poursuivre, je souhaite mentionner une dernière raison qui m’a poussé à m’adresser à vous, plutôt qu’à l’un des deux autres membres de ladite Troïka qui détient, réellement, actuellement, le Pouvoir. Nous sommes tous les deux universitaires, mathématiciens et physiciens-mathématiciens et nous nous connaissons depuis plus de trois décennies. Rappelez-vous de notre première rencontre. C’était dans mon bureau à la Faculté des Sciences de Tunis, aux environs de l’année 1980. Vous étiez venu me voir accompagné de votre Directeur de Thèse roumain, le Professeur Radu Rosca, qui avait soutenu sa Thèse en mai 1939 et qui était coopérant exerçant à Gabès, et de sa jolie et jeune épouse qui ne se plaisait pas du tout dans cette ville. Vous m’aviez demandé d’intervenir, auprès du Ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique de l’époque, pour que le Professeur Radu Rosca soit muté à Sfax, dans l’établissement supérieur où vous exerciez. Rappelez-vous comment vous fûtes, tous les trois, déçus, quand je vous ai informé que je ne pouvais pas accéder à votre requête, compte tenu des valeurs et principes que j’ai toujours défendus. Par contre, quelques années plus tard, pendant vos années de plomb et d’oppression, je vous ai donné, indirectement, un petit coup de pouce pour que vous puissiez obtenir des lettres de soutien de la part de la Communauté Française de Physique-Mathématique ; et ce, quand le Professeur Moshé Flato [Membre du Comité Nobel de Physique, Fondateur et Directeur du Laboratoire de Physique Mathématique de l’Université de Bourgogne et Fondateur de la Revue « Letters in Mathematical Physics », qui fut mon directeur de thèse et qui fut le premier membre de ladite Communauté que vous avez contacté dans ce but, en vous recommandant de moi] m’a informé de votre requête.


2. Monsieur le Ministre, le Peuple veut connaître la vérité, rien que la vérité, toute la vérité sur la tentative de Coup d’Etat Islamiste de 1987

Votre poids au sein de votre Mouvement politique ne date pas d’aujourd’hui. En effet, vous fûtes, dit-on, le cerveau de la tentative de Coup d’Etat Civilo-Miltaire, organisé par un Groupe que vous avez appelé « Groupe Sécuritaire » ou « Groupe de Salut National », dont vous étiez le Chef, qui a failli renverser le 8 novembre 1987 le Président Bourguiba. Mais Zinochet vous a battu au poteau, en le déposant, lui, par un Coup d’Etat Médical, le 7 novembre 1987. Vous avez donné, en 2003, une description succincte de cette tentative que l’on peut retrouver sur le Lien suivant :

http://twitter.com/#!/slim404/status/151458140649553920

Lien contenu dans la Page twitter de Slim Amamou, le fameux slim404, un des plus célèbres cyber-activistes démocrates tunisiens, opposant au régime Zinochet, qui, après avoir été emprisonné à la veille de la Victoire, a été nommé , le 17 janvier 20111, après la fuite du dictateur, Secrétaire d’État à la Jeunesse et aux Sports.

Dans l’introduction cette description, vous avez écrit :

« C’est ainsi que nous avons eu l’idée de nous opposer par la force à la folie de Bourguiba et de ses sbires. Ainsi est né "Le Groupe Sécuritaire" que nous avons baptisé "Groupe de Salut National". Le temps n’est pas venu pour révéler publiquement tous les détails de sa constitution, mais il s’est formé rapidement et comprend un certain nombre de militaires et d’agents de sécurité de tout grade, ainsi que des civils. ».

Et d’après l’ouvrage, rare et inconnu du grand public tunisien, de Abdallah Amami, ex-Directeur de l’ATCE (Agence Tunisienne de Communication extérieure), intitulé « Ennahdha », pour le besoin de votre Coup d’Etat, une fatwa sur mesure, « devenue la condition (sine qua non) de l’exécution de l’opération du Coup d’Etat », a été commandée afin de vous « permettre » d’assassiner, en toute quiétude, des civils innocents, plus précisément d’obtenir la « légitimité islamique de l’assassinat de frères musulmans ». Cette Fatwa a été émise, de Londres où il résidait, par Salah Karkar, moins d’une semaine avant la date fatidique du 8 novembre que vous avez choisie pour exécuter votre Coup d’Etat. Salah Karkar est l’un des cofondateurs, en 1981, avec Rached Ghannouchi, du Mouvement de la Tendance Islamique (MTI) devenu, en 1989, Mouvement Ennahdha.

D’après toujours le même auteur, «  Salah Karkar émit la "fatwa" en partant du principe que le Djihad est le chemin pour instaurer l’Etat islamique ; que c’est une règle fixe confirmée par le texte coranique et la Sunna ; et que ceux qui s’y opposent et exécutent les ordres du gouvernement non-croyant sont mécréants et doivent être combattus, même si certains le font malgré eux. ». Pour expliquer la présence de Salah Karkar à Londres, laissons, encore, parler Abdallah Amami :

« Salah Karkar résidait à Londres, ayant pu quitter le sol tunisien en usant d’un de ces passeports vierges que Abdallah Ghriss (officier des services spéciaux) avait l’habitude de voler du Ministère de l’intérieur. Par la suite, il les remettait à Hamadi Djebali qui faisait preuve de grande habileté en matière de falsification de documents. Ainsi, Hamadi Djebali profita en premier de cette fraude aux passeports suivi de Karkar… ».

Il s’agit bien du même Hamadi Djebali, Premier-Ministre-Secrétaire-Général d’Ennahdha d’aujourd’hui.

Maintenant que vous êtes au pouvoir et peut-être, demain, qui sait ?, à la Magistrature Suprême, au vu du rang que vous occupez, aujourd’hui, au sein d’Ennahdha, je pense, en vous paraphrasant, que « le temps est venu pour révéler publiquement tous les détails » sur le Coup d’Etat Islamiste manqué du 8 novembre 1987 : vous vous devez de dire aux tunisiens toute la vérité sur le « Groupe de Salut National » qui a failli conduire, à cette date, le pays dans une Dictature brune-verte théocratique sans retour, compte tenu de l’extrémisme avoué de votre Mouvement, à l’époque, comme le montre, entre autres, la fatwa attribuée à Salah Karkar, ci-dessus mentionnée.

Il convient de souligner, en conclusion de ce paragraphe, qu’il est étonnant que, jusqu’aujourd’hui, ni la classe politique, ni aucune organisation de la Société Civile n’a exigé de faire la lumière, toute la lumière, sur ce Coup d’Etat Islamiste qui a failli faire sombrer notre pays, pour toujours, dans les ténèbres, d’autant plus que plusieurs de nos gouvernants d’aujourd’hui en furent les instigateurs. Une telle passivité devant un tel événement est inimaginable dans un pays réellement démocratique. Il y a urgence, car le Peuple a le droit et le devoir de connaître ceux qui le gouvernent et de connaître leur passé politique, académique,…


3. Monsieur le Ministre, le Peuple souhaite que vous appliquiez la Loi, rien que la Loi, sinon, avec votre Logique, tout pourrait être permis !

Dans l’enquête d’Agathe Logeart, intitulée "Un voile sur la révolution", consacrée à la situation des femmes en Tunisie, parue, d’abord, sur le Nouvel Observateur du 2 février 2012 et publiée intégralement, ensuite, sur son site internet, le 6 février, vous avez résumé votre position quant au droit des niqabées de suivre des cours ou de passer des examens universitaires, plus précisément, vous avez déclaré :

« (…) C’est dommage que certaines filles soient empêchées de passer leurs examens parce qu’elles portent le niqab. Je m’étonne que des gens qui font partie de l’élite de la Tunisie (nda : vous sous-entendez les universitaires) soient incapables de gérer une si petite affaire. D’autant que leur refus d’accepter des étudiantes voilées se trouvera peut-être un jour contraire à des lois futures. Pour le moment, il suffirait qu’elles suivent les cours dévoilées, en se tournant vers un muret, qu’elles ne regardent pas le professeur. Et pour les examens, que des femmes contrôlent leur identité. ».

Tout d’abord, permettez-moi de vous rappeler, Monsieur le Ministre, que, lors de l’entretien que vous avez accordé à la chaîne Hannibal TV, le samedi 7 janvier 2012, vous avez affirmé, devant des millions de citoyens, que même si vous le vouliez, vous n’avez pas le droit d’interdire le port du niqab, car, vous avez dit, qu’il vous faut pour cela une Loi Constitutionnelle. Permettez-moi de prendre la liberté de vous dire, Monsieur le Ministre, qu’il n’est pas nécessaire d’être juriste pour réfuter cet argument ; c’est simplement un problème de bon sens !

Dans ce contexte, est-il besoin de vous rappeler, Monsieur le Ministre, que Bourguiba a promulgué le Code du Statut Personnel (CSP), la plus grande Révolution Sociétale du Monde Arabe du vingtième siècle, moins de cinq mois après la proclamation de l’Indépendance du Pays, seize mois avant la Proclamation de la République tunisienne, alors qu’il n’était que premier Ministre de Lamine Bey, donc longtemps, longtemps avant la promulgation de la première Constitution de la Tunisie indépendante

Lors du même entretien, vous avez affirmé, aussi, qu’il y a un vide juridique quant à l’interdiction opposée ou la permission accordée aux étudiantes portant le niqab de pouvoir suivre des cours ou de passer des examens universitaires. Vous étiez tellement sûr de vous-même que vous êtes allé jusqu’à dire que le Tribunal Administratif n’a jamais statué sur le droit ou non du port du niqab pendant les examens, en affirmant que ce point de vue est, aussi, partagé par vos conseillers juridiques au Ministère. Et vous avez même informé les téléspectateurs que vous avez décidé de demander, par le biais de votre service juridique, l’avis du Tribunal Administratif sur la question

Inutile de vous dire, Monsieur le Ministre, quel fut mon étonnement, quand, au bout de quelques clics sur mon ordinateur, je suis tombé sur un Lien de la toile contenant des informations démentant formellement, sans appel, vos propos tenus au cours du dit entretien et soutenus par les experts juridiques de votre Département !

En effet, sur ce Lien, il est rapporté que le Tribunal Administratif, par un Arrêt daté du 28 décembre 2011, faisant suite à la requête N°711573, a rejeté une plainte déposée par l’étudiante Maroua Saïdi contre la Faculté des lettres et des Sciences Humaines de Sousse, parce que cet établissement a refusé de l’inscrire en étant niqabée. Dans son marchandage avec l’administration, ladite étudiante avait proposé de montrer son visage à une fonctionnaire ou à une enseignante, ce que l’administration a refusé. Dans le rapport, concernant cette affaire, transmis par le Doyen de ladite Faculté au Tribunal Administratif, on y lit : «  étant donné les impératifs de la transmission du savoir qui exige du professeur qu’il connaisse personnellement ses étudiants, qu’il n’y ait aucun obstacle à cette connaissance aussi bien dans un but d’évaluation du travail que de formation ». Parmi les raisons justifiant sa décision, cette juridiction spécifie dans cet Arrêt que «  à l’image de toutes les libertés individuelles ou publiques (la liberté vestimentaire) est soumise à l’obligation de tenir compte de l’organisation des services publics et de leur marche normale ».

En outre sur ce même Lien, il est rapporté que le Tribunal Administratif, par un Arrêt daté du 7 juillet 2011, faisant suite à la requête N°711573, a rejeté une plainte déposée par l’étudiante Sana El Akdiri contre la Faculté des Sciences de Tunis, parce que cet établissement ne l’a pas autorisé à passer ses examens en étant niqabée. Dans son rapport concernant cette affaire, transmis au Tribunal Administratif, le Doyen de ladite Faculté a souligné les dangers encourus par les étudiantes niqabées, lors des séances de Travaux Pratiques, ainsi que les risques de fraudes liées au niqab. Parmi les raisons justifiant sa décision, cette juridiction spécifie, dans cet Arrêt, que les cours théoriques et les séances de Travaux Pratiques exigent «  une interaction pédagogique avec l’enseignant », qui est impossible avec ce voile qui couvre le visage, et « l’interdiction de tout vêtement susceptible de présenter un danger pour l’expérimentateur ».

Monsieur le Ministre, nous vous demandons, simplement, d’appliquer la Loi, rien que la Loi, Loi soutenue par les deux dits jugements du Tribunal Administratif. Si vous souhaitez que notre pays devienne un Etat de Droit, vous avez l’obligation, Monsieur le Ministre, de publier une Circulaire interdisant le voile intégral dans les établissements universitaires, car un régime où son numéro deux transgresse, sciemment, la Loi est un Régime sans Droits, ni Lois.

Dans ce contexte, permettez- moi, Monsieur le Ministre, de prendre la liberté de vous dire que si l’on devait tenir compte de votre argument soutenu par votre phrase : « D’autant que leur refus d’accepter des étudiantes voilées se trouvera peut-être un jour contraire à des lois futures » pour permettre aux niqabées de suivre des cours ou de passer les examens, alors, ce même argument, soutenu par la même phrase, Mutatis Mutandis, pourrait tout permettre. A titre d’exemple, je vous laisse deviner, Monsieur le Ministre, les permissions que soutiendraient les phrases suivantes :

« D’autant que leur refus de permettre la polygamie se trouvera peut-être un jour contraire à des lois futures » ;

« D’autant que leur refus de couper la main du voleur se trouvera peut-être un jour contraire à des lois futures » ;

« D’autant que leur refus de lapider la femme adultère se trouvera peut-être un jour contraire à des lois futures » ;

« D’autant que leur refus de marier deux personnes de même sexe se trouvera peut-être un jour contraire à des lois futures ».

Je crois, profondément, Monsieur le Ministre, que la fameuse phrase-soutien de votre argument, à savoir « D’autant que leur refus d’accepter des étudiantes voilées se trouvera peut-être un jour contraire à des lois futures » n’est pas si anodine qu’elle n’apparaisse, compte tenu de la manière dont vous avez géré les troubles survenus à la Faculté des Lettres, des Arts et des Humanités de la Manouba (FLAHM), gérance marquée par une sympathie certaine pour les salafistes, auteurs de ces troubles, et votre penchant, implicite, pour le droit revendiqué par les niqabées. Ces salafistes sit-inneurs , dont la quasi-totalité des membres est étrangère à l’Université, ont investi, comme vous le savez, Monsieur le Ministre, depuis le 28 novembre 2011, la FLAHM avec pour principale revendication la levée de l’interdiction du port du niqab, actuellement en vigueur, d’après les décisions du Conseil Scientifique de ladite Faculté, dans les salles de cours et des examens universitaires, perturbant, pendant plus deux mois, les cours et le déroulement des examens, interdisant au Doyen d’accéder à son bureau, agressant, verbalement et physiquement, de façon répétitive, ouvriers, étudiants, administratifs et enseignants dont le Doyen lui-même, un enseignant a été même transporté aux Services des Urgences, et menaçant de mort certains enseignants. En effet, n’aviez-vous pas dit, Monsieur le Ministre, au Nouvel Observateur, dans l’enquête d’Agathe Logeart, ci-dessus mentionnée, à propos de ces salafistes sit-inneurs : « Je trouve qu’ils se comportent de manière civilisationnelle (sic). Il ne faut pas être dur avec eux ». Quant à Rached Ghannouchi, il a déclaré, à leur sujet, dans un entretien accordé à la chaîne Hannibal TV : «  ce sont nos enfants, ils me rappellent ma jeunesse ». Monsieur le Ministre, avec de telles déclarations, émanant des deux plus hautes autorités et de l’Etat et d’Ennahdha, concernant cette bande de salafistes transgresseurs du Code Pénal, croyez-vous qu’il reste le moindre doute, pour une personne normalement constituée, pour ne pas être convaincue que cette bande agit, en réalité, en connivence avec Ennahdha.

Enfin, ne croyez-vous pas, Monsieur le Ministre, que le but ultime de ces salafistes, de leurs semblables, qui ont opéré de façon similaire dans d’autres Etablissements Universitaires, et de ceux qui les soutiennent, implicitement ou explicitement, est, en réalité, la levée de la mixité dans les lieux du savoir. D’autant plus que, s’ils obtiennent gain de cause pour le droit des niqabées de suivre des cours ou de passer des examens universitaires, la levée de la mixité s’impose d’elle-même, par l’institution d’établissements où il n’y a que des étudiantes et des enseignantes, compte tenu des mêmes arguments développés aussi bien par les deux Doyens, dont il était question ci-dessus, que par le Tribunal Administratif pour débouter les deux étudiantes niqabées Maroua Saïdi et Sana El Akdiri, arguments qui se résument en la phrase : « le savoir se transmet à visage découvert ».

En guise de conclusion, compte tenu de ce qui précède, permettez-moi, Monsieur le Ministre, sans vouloir vous faire de la peine, de vous avouer, sincèrement, que je ressens une profonde nostalgie du temps où l’occupant de votre Ministère s’appelait Driss Guiga, je dis bien Driss Guiga, ou Mohamed Charfi !

Je vous prie de croire, Monsieur le Ministre, à l’expression de mon profond respect.

Salah HORCHANI

Professeur à la Faculté des Sciences de Tunis

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