Mythes des Tapiete du Chaco bolivien ( 2/2 )

1ère Partie ICI

Paris, avril 2004

« Les Anciens racontent qu’à l’origine, les Tapiete [1] étaient des animaux terrestres avant de devenir des oiseaux. Les uns étaient des Yulos [2], d’autres des corbeaux, d’autres encore des Khakaras [3]. Mais tous étaient Tapiete et vivaient en paix, disent nos grands-parents. »

Hualacato [4] et les vautours

A l’époque où les Tapiete se transformèrent en oiseaux, il y avait de nombreux hameaux dans cette région du Chaco [5] habités par des majanos [6] des perroquets, des tigres, des iguanes et toutes sortes d’animaux.

Quand un Tapiete se changeait en oiseau, il cherchait aussitôt sa compagne et le couple partait s’installer ailleurs.

Dans l’un de ces hameaux vivait une grand-mère chargée d’ans. Incapable de marcher et de sortir de sa maison, elle ne put se changer en oiseau. Elle resta donc là .

Cette grand-mère était un petit Quirquincho [7] et habitait une maison petite comme un nid de fourmilier. C’est là qu’elle demeurait.

Comme elle connaissait beaucoup de choses, les autres animaux venaient lui rendre visite et lui laissaient une partie du produit de leur chasse. En échange, elle leur offrait l’eau de sa cruche.

Un jour, Quirquincho vint lui demander :« Grand-mère, à quelle heure viendront tes autres petits-enfants ? »

Quirquincho voulait surtout savoir où il pourrait trouver les oiseaux qui se nourrissaient de chair crue pour en tuer un et pacifier les autres. A cette époque, les oiseaux étaient beaucoup plus sauvages que de nos jours et attaquaient tous les autres Tapiete.

Quirquincho les domestiqua en partie, comme nous le verrons plus loin.

La grand-mère répondit :

« Ils viendront cet après-midi. Ne te laisses surprendre par aucun d’entre eux, car s’ils t’attrapent, ils te mangeront tout entier ».

Pour arriver à ses fins, Quirquincho s’installa à côté de la porte, fit le mort et finit par s’endormir.

Un instant plus tard, une mouche s’approcha de lui pensant qu’il était réellement mort, s’introduisit dans son corps par la bouche et ressortit par l’anus.

Une fois qu’elle eut constaté qu’il était bien vivant, elle s’éloigna rapidement ; Quirquincho pensait, qu’ayant réussi à tromper la mouche habituée à manger des cadavres, il était fort bien préparé à affronter les oiseaux qui, eux, ne mangent que de la chair crue !

Puis arrivèrent les uns après les autres Qharqancho, le Corbeau, Aguila blanca et tous les oiseaux qui se nourrissent de chair crue.

Ils crurent tous que Quirquincho était mort et se préparèrent à le manger. Aguila blanca était le Capitan [8] des oiseaux mais c’était Qharqancho qui se montrait toujours le plus intelligent. Ce dernier s’approcha de Quirquincho et, pour vérifier s’il était bien mort, il le regarda fixement dans les yeux, essayant de voir si ses paupières ne cillaient pas.

Qharqancho hésitait et se demandait :

« Quirquincho est-il vraiment mort ? Je crois bien que cet animal ouvre et ferme de temps en temps ses paupières pour nous regarder... »

Un peu plus tard, le Capitan des oiseaux ordonna à Qharqancho de chanter en signe de réjouissance, car ils allaient manger Quirquincho.

Balançant son cou et regardant le ciel, Qharqancho se mit à chanter : « Kaj, kaj, kaj... »

Quirquincho, voyant que tout se déroulait comme prévu, ne put retenir son envie de rire à la vue de Qharqancho et des autres oiseaux dansant, chantant et se préparant à le manger, persuadés qu’il était bel et bien mort.

Lorsque Qharqancho eut terminé son chant, il s’écria à voix haute :

« Bon, je vais manger un oeil ! »

Aguila Blanca ajouta :

« Moi, je vais manger l’autre oeil ! »

Et l’un après l’autre, chaque convive choisit une partie du corps de Quirquincho .

Comme ils se préparaient à entamer le banquet, l’un d’eux suggéra aux autres de transporter le corps de Quirquincho à l’ombre d’un arbre pour le déguster plus à l’aise.

Quand tout fut prêt pour le repas qui devait commencer par les yeux de Quirquincho, celui-ci se dressa soudain et écrasa de toutes ses forces les oiseaux de chaque espèce.

Beaucoup moururent, d’autres réussirent à survivre car Quirquincho ne les écrasa pas tous, mais revint pour soigner leurs blessures et les réanimer afin qu’ils ne meurent pas tous et puissent de nouveau s’envoler.

C’est ainsi que de nombreux oiseaux que nous voyons aujourd’hui furent sauvés à la condition de devenir moins sauvages.

Voilà pourquoi les anciens Tapiete disent que Quirquincho a mâté les oiseaux qui se nourrissaient de chair crue en attaquant et mangeant d’autres animaux avant même qu’ils ne soient morts.

Aujourd’hui, ils s’alimentent seulement de la chair d’animaux déjà morts et ne s’attaquent plus à ceux qui sont vivants.

L’origine de l’ [9] Algarrobo

Les Bandurria [10] et les Tojos [11] étaient frères.

Bandurria allait de caserio [12] en caserio, dont ceux des Tojos où il mangeait et cueillait des fruits des algarrobos [13]. Personne d’autre que Bandurria et Tojo ne connaissait ce fruit et pour en conserver le secret, ils n’invitaient personne à y goûter. Bandurria, accompagné de sa femme et de ses enfants allait souvent rendre visite à Tojo et lui apportait de l’aloja [14] et de la farine d’algarrobo.

Les visites se succédaient toute la journée durant, du matin jusqu’au soir puis, ils rentraient chez eux sans qu’aucune des personnes visitées ne sache ni comment ni d’où ils s’étaient procurés leur boule d’algarrobo sucrée.

Les Tojo seuls possédaient de la farine d’algarrobo douce, aucun autre animal ne savait où s’en procurer ni de quelle manière la préparer. Bandurria en gardait jalousement la semence. Et pour que personne d’autre n’aie d’algarrobo, il écrasait les graines des semences pour les transformer en farine, de sorte que personne ne pouvait en cultiver.

Cela dura ainsi jusqu’au jour où Renard commença à s’intéresser à Bandurria.

Renard se dit un jour :

« D’où apportent-ils autant de farine d’algarrobo alors que nous souffrons tous de la faim ? Lorsqu’ils rentreront chez eux, je les suivrai... ».

Renard suivit donc les Bandurria sans se faire voir lorsqu’ils repartirent dans la forêt.

Ceux-ci se rendirent comme d’habitude jusqu’au hameau des Tojo pour se régaler de l’algarrobo.

Mais à mi-chemin, Bandurria s’aperçut que Renard le suivait en cachette. Il lui barra le chemin, lui demandant :

« Pourquoi me suis-tu ? »

« Moi aussi, je voudrais me promener là où vous allez... », répondit le Renard.

Bandurria refusa :

« Non, tu ne peux pas venir, car tu vas tout saccager. De plus, mes soeurs vont toutes nues et tu risquerais de les voir dans cet état ».

Mais Renard ne se tint pas pour vaincu et implora Bandurria de l’autoriser à l’accompagner :

« Laisse-moi venir avec toi, je me comporterai bien et ne ferai rien de mal ! ».

Et Renard l’accompagna, bien que Bandurria ne lui fit pas totalement confiance.

Chemin faisant, il observait attentivement chaque endroit par où ils passaient, pour découvrir d’où provenait la farine. Plusieurs heures s’étaient écoulées lorsqu’un Tojo apparut au milieu de la forêt ; il allait dans la même direction qu’eux.

Renard, sans demander l’avis de personne, tendit son arc et tira une flèche qui atteignit le Tojo en plein front , le blessant. Bandurria ne dit mot sur cet incident et ils poursuivirent leur marche.

Quelques jours plus tard, ils arrivèrent en vue du hameau des Tojo qui recevaient toujours Bandurria en lui manifestant une grande amitié.

Avant de poursuivre leur marche, Bandurria dit encore une fois à Renard :

« Ici, tu ne dois regarder personne ni parler à qui que ce soit. Tu ne dois pas non plus toucher aux graines ni même t’en approcher sinon leur propriétaire va se fâcher ».

C’est ainsi que Renard profita de l’hospitalité des Tojos qui lui offrirent de la aloja de algarrobo pour étancher sa soif. Comme c’est bon et sucré ! pensait-il.

A cet instant précis arriva le Tojo que Renard avait blessé au front.

Renard le reconnut aussitôt et dit à voix basse :

« C’est celui que j’ai fléché ! » sans se rendre compte que l’un des fils du Tojo blessé était assis près de lui et avait entendu ses mots .

Ce dernier alla vite à la rencontre de son père , lui disant :

« Papa, ce renard assis là vient de dire que tu es celui qu’il a fléché ! »

Les Tojos réagirent immédiatement en se jetant sur Renard qu’ils voulaient tuer.

Mais les Bandurrias s’interposèrent pour protéger Renard. Une discussion animée s’éleva entre eux et finalement Renard fut épargné. Renard profita de la dispute pour attraper quelques graines d’algarrobo qu’il cacha dans ses molaires.

Une fois l’incident réglé, les Tojos et les Bandurrias vérifièrent si Renard n’avait pas pris de graines, car les Tojos n’en donnaient qu’aux Bandurrias.

Aucun d’entre eux ne pensa à regarder entre les molaires...où les graines étaient pourtant bien cachées ! Pendant la nuit, lorsque Bandurria fit part aux Tojo de son intention de repartir, Renard fut le premier à être prêt !

A mi-chemin, les Bandurrias se demandèrent pourquoi Renard, qui d’habitude parlait sans arrêt, n’avait pas proféré un seul mot depuis leur départ du hameau des Tojos.

« C’est bizarre, pourquoi marche-t-il en silence alors que d’habitude il parle tout le temps ? » se disaient-ils.

Renard profitait aussi de chaque pause des Bandurrias pour devancer le groupe et s’en éloigner chaque fois un peu plus.

Lorsqu’il fut déjà loin, les Bandurrias finirent par comprendre que Renard se comportait ainsi parce qu’il avait volé des graines d’algarrobo pour en semer. Ils décidèrent de le rattraper et de récupérer les graines.

Tout le groupe des Bandurrias se mit à courir et le renard, malgré ses efforts, fut rattrapé par quatre jeunes femmes Bandurrias qui le fouillèrent et retrouvèrent quelques graines entre ses molaires, mais pas toutes, car Renard en avaient enfoncé quelques unes au plus profond de sa dentition et il finit par s’échapper avec.

Les Bandurrias en étaient fort contrariés et se rejetaient la faute les uns sur les autres, car c’étaient à cause d’eux que Renard avait réussi à voler quelques graines d’algarrobo.

Ils se demandaient :

« Qu’allons-nous dire maintenant à nos frères Tojos ? Ils nous ont toujours confié leurs graines, ils vont certainement se fâcher et ne nous en donnerons plus jamais ! ».

Quelques jours plus tard, quand Renard se fut suffisamment éloigné des Bandurrias, il se rendit sur un terrain pour y semer l’algarrobo. Deux mois plus tard, il fut tout heureux de voir poindre les premières pousses. Renard passa tout le reste de l’année à surveiller ses semis d’algarrobo, les regardant croître jour après jour...

Une année plus tard, la plantation était assez développée pour que les Tojos s’en approchent avec l’intention de la détruire. Comme ils vivent sous terre, ils décidèrent de creuser des galeries pour arriver jusqu’aux racines et les ronger.

Cette tentative échoua cependant, car Renard, pour protéger les racines, avaient planté tout autour des bâtons de quebracho [15], un bois trop dur pour les dents des Tojos.

Et voilà comment Renard se mit à produire de l’algarrobo.

Les difficultés commencèrent lorsque les fruits de l’algarrobo mûrirent à point : ils étaient sans cesse assaillis par des bandes de perroquets qui s’en régalaient.

Quirquincho dit à Renard qu’il allait surveiller en permanence les algarrobos pour les protéger des oiseaux, mais Renard pensait utiliser ses amies les cigales pour éloigner les perroquets et en tuer quelques uns lui-même avec son arc et ses flèches.

C’est pourquoi nous autres Tapiete nous disons que les cigales chantent le soir dans les algarrobos parce que Renard le leur a appris.

Après avoir protégé les algarrobos de cette façon, Renard invita Quirquincho à en goûter, lui expliquant qu’il s’agissait de fruits sucrés. Mais lorsque Quirquincho grimpa sur l’arbre et goûta aux fruits, il les trouva amers car ils n’étaient pas encore mûrs.

Quirquincho avait des griffes solides. Renard lui demanda donc d’aller cueillir les fruits qui se trouvaient au sommet de l’arbre. Quirquincho grimpa tout en haut de l’algarrobo et de là -haut lança les fruits que Renard rattrapait.

Les fruits étaient pointus et l’un d’eux atteignit Renard à l’oeil, le tuant net. Quirquincho descendit vite de l’arbre. Comme il savait guérir les gens au moyen de la magie, il fit trois signes au-dessus de Renard et ressuscita son compère.

Ayant ainsi guéri Renard, Quirquincho remonta sur l’arbre .

Voulant cueillir plus de fruits qu’il ne le pouvait, il fit un faux mouvement et tomba du sommet de l’arbre, se cassant les reins.

Renard, qui ignorait tout de la magie, gaina immédiatement la croupe de Quirquincho en confectionnant une bande à l’aide d’écorces de différents arbres et réussit à le guérir.

C’est pour cela que de nos jours encore Quirquincho porte des gaines qui protègent son dos et qu’il ne se nourrit plus de l’algarrobo parce qu’il a peur de monter aux arbres, n’étant, après tout, qu’un animal terrestre .

Par la suite, Renard se mit à produire toujours davantage d’algarrobo et les autres animaux connurent ce fruit dont ils possédaient aussi des graines.

Voici l’ histoire de tigre qui est resté insoumis

Après avoir mâté les rapaces, Quirquincho essaya d’en faire autant avec les tigres. Il n’y arriva pas à cause de leur taille et de leur férocité, qui l’obligèrent à s’enfuir. Le grand Dieu Tumpa [16] voulut essayer à son tour.

Avant qu’il ne parte se battre avec les tigres, grand-mère Quirquincho lui parla tandis qu’autour d’eux la forêt résonnait de la musique des flûtes et des crânes d’ocelot..

« Lorsqu’ils viendront, tu tueras les tigres avec ces buracos [17] que j’utilise pour creuser la terre et que je cache derrière la porte », lui dit-elle.

Peu après, les tigres arrivèrent.

Le premier à atteindre la maison de la grand-mère fut l’ocelot, le plus petit des tigres. Tout en s’approchant de la porte, il dit :

« Grand-mère Quirquincho, j’ai très soif et je voudrais que tu me donnes de l’eau » !

« Mais bien sûr, entre dans ma maison et je te donnerai de l’eau » ! répondit-elle.

A peine l’ocelot eut-il pénétré dans la maison que Tumpa lui asséna un coup terrible sur la tête et le tua. Pour que les autres tigres ne s’aperçoivent de rien, il plaça le corps de l’ocelot à l’endroit même où il dormait d’habitude.

Tumpa tua de la sorte tous les tigres, avec l’aide de la grand-mère. Il ne manqua que le plus grand et le plus fort. Quand celui-ci s’approcha à son tour, grand-mère Quirquincho rentra vite dans la maison et dit à Tumpa :

« Celui qui reste est le plus fort de tous, s’il te vaincs, tu ne compteras plus parmi les vivants ! »

Ce grand tigre trouvait le calme qui régnait suspect. Il se mit à douter du Dieu protecteur des Tigres. Il resta donc prudemment à environ vingt mètres de la maison et ne demanda pas d’eau, comme il le faisait toujours. Devant cette attitude inhabituelle, grand-mère Quirquincho lui dit :

« Tigre, viens boire de l’eau. Pourquoi ne veux- tu pas entrer dans ma maison aujourd’hui ? »

Le tigre, bien qu’assoiffé et protégé par le Dieu des Tigres, s’approcha de la maison pour reculer aussitôt.

Après plusieurs heures d’attente, poussé par la soif, il ne résista pas plus longtemps et pénétra dans la maison

Tumpa frappa le chef des tigres à la tête, mais comme il était très grand, le coup ne le tua pas et il attaqua aussitôt Tumpa. Protégé par son dieu, le tigre se défendit férocement. Leur combat dura plusieurs jours, jusqu’au moment où il s’enfuit sur la lune pour en réchapper. Tumpa le poursuivit mais ne put jamais le rattraper.

C’est pour cela qu’une des taches de la lune a la forme d’un tigre lorsqu’on la regarde depuis le fleuve Pilcomayo. C’est là , au milieu de la lune que s’est installé le Capitan des Tigres.

Il y vit toujours et, de là -haut, il éclaire la forêt pour aider les tigres lorsqu’ils partent chasser. Parfois la lune devient à moitié rousse : c’est quand le Capitan des Tigres s’en nourrit.

Voilà pourquoi, nous autres Tapiete, nous disons que le tigre est l’un des rares animaux resté insoumis et que personne, pas même Tumpa, ne pourra jamais le mâter.

L’origine d’ [18] Andira

Autrefois, la chauve-souris Andira était indigène, comme tous les autres animaux. Andira était une jolie jeune femme chauve-souris.

Elle savait s’attacher les hommes mais ne les gardait pas longtemps. Andira disait que ses compagnons mouraient sans qu’elle sache pourquoi. C’était pourtant elle qui les égorgeait et qui s’en repaissait car c’était une buveuse de sang.

Elle suçait tout le sang de ses compagnons morts, puis elle les enveloppait dans leurs hamacs pour que personne ne se rende compte de rien et ne sache qui les avait fait disparaître.

Elle agissait de nuit pour ne pas être vue. Lorsque les corps n’étaient plus bons qu’à être enterrés, elle prévenait les frères et la famille de l’homme qu’elle venait de tuer. Andira pleurait en annonçant la mort de son mari à ses proches, se plaignant de toujours perdre ses époux... Elle les enterrait donc et comme le veut la coutume, tous les Anciens partaient s’installer ailleurs après l’enterrement.

Mais la femme chauve-souris restait là , à attendre pendant plusieurs jours à côté de la sépulture. Puis elle reprenait le corps et le faisait bouillir pour le manger .

Plus tard, un autre chango [19] venait rejoindre Andira...

L’un de ces chango était une petite mouche appelée Mberu [20] Comme Mberu était aussi fait de chair, il plut à la femme chauve souris. Ils se marièrent donc à la manière des indigènes, et, lorsque les invités furent partis, ils restèrent seuls. Ils vivaient loin du village.

Mberu et Andira bavardèrent ensemble ; la femme chauve-souris avait préparé un bon ragoût et lorsque Mberu voulut goûter la viande, Andira ne mit dans son plat que les restes qu’elle n’avait pas pris pour elle.

Elle mangea les meilleurs morceaux et quand Mberu s’aperçut qu’il avait moins de bonne viande qu’elle dans son plat, il se fâcha. Ils se disputèrent et Andira essaya de lui couper le cou, mais elle n’y arriva pas.

Mberu réussit à s’échapper et courut vite rejoindre les invités qui venaient de partir pour leur raconter tout ce que lui avait fait sa femme. De son côté, la femme chauve souris courut à la poursuite de Mberu pour essayer de le rattraper.

Tous deux arrivèrent presqu’en même temps à l’endroit où se trouvaient les autres indigènes, mais la petite mouche avait déjà commencé à raconter que la femme chauve souris coupait le cou à ses maris et qu’après avoir sucé le sang des morts, elle annonçait la nouvelle de leur décès et les enterrait.

Les indigènes se mirent à réfléchir au moyen de tuer Andira.

Pendant qu’ils en discutaient, arriva Kakhara, qui est très intelligent. Les Anciens Tapiete disent que Kakhara a toujours été très intelligent.

En fin de compte, Khakara décida d’épouser Andira, mais il prit d’abord la précaution de se placer des tiges de canne tressées dans la gorge en guise de protection.

On disait que les maris de la femme chauve souris ne duraient que deux nuits environ.

Khakara se coucha près d’elle pour dormir et fit semblant de ronfler ; la femme chauve souris s’approcha de lui pour essayer de lui mordre le cou, mais elle n’y arriva pas, car il était bourré de tiges de canne creuses. Sentant qu’il allait être mordu, Kakhara bougea, se réveilla et ne se rendormit plus de la nuit. Il se leva avec le jour, attrapa son porongo [21] pour en jouer et chanter.

Chaque jour, Kakhara se demandait de quelle manière il pourrait bien tuer la chauve souris. Il partit à la campagne et attrapa deux hualacatos .

Kakhara raconta par la suite qu’il s’était fait une entaille à la cheville pour laisser son sang s’écouler et remplir la panse des hualacatos, qu’il fit rôtir ainsi. Puis il les apporta à la femme chauve souris pour qu’elle en mange.

Le grand perroquet Ayuru [22], qu’on trouve dans nos contrées, ainsi qu’Anumbi et le rococo étaient les soeurs de Kakhara.

Kakhara leur avait appris à ne pas l’écouter lorsqu’il leur demandait de l’eau. Ses soeurs ne l’écoutèrent donc pas lorsqu’il leur en demanda, se tenant aux côtés de sa femme chauve-souris. Cette dernière se fâcha contre ses belles-soeurs et finit par prendre elle-même la cruche pour aller chercher de l’eau.

Elle avait très chaud quand elle partait chercher de l’eau. Kakhara suivait sa femme, qui emportait toujours des couteaux dans sa llica [23] pour couper des cous.

Un jour de grande chaleur, Andira y retourna. Elle avait si chaud qu’elle enleva sa llica et l’accrocha à une branche de chardon avant d’aller boire de l’eau et se baigner.

Kakhara en profita pour mettre le feu aux chardons. Andira se rendit compte de ce qui se passait : elle sortit de l’eau en criant mais ne put s’approcher de ses couteaux qui brûlaient au milieu du feu. Kakhara lui dit alors : « Viens ici, tu peux attraper ta llica par ce côté-là  ! »

La femme chauve souris courut à l’endroit que lui montrait Kakhara et celui-ci la poussa aussitôt dans le feu. Elle se mit à crier et pendant que son corps brûlait, il en sortit des milliers de ces petites chauve souris que nous voyons encore aujourd’hui et qui ne sortent que la nuit.

Kakhara n’en laissa échapper aucune, les faisant tomber dans le feu à l’aide de branches.

Une seule petite chauve souris le supplia de ne pas la tuer, disant :

« Laisse-moi vivre, je ne ferai pas comme ma maman, je ne mordrai que les petites animaux et je ne lècherai que leur sang, c’est tout ! ».

Kakhara eut pitié de la petite chauve souris et la laissa partir.

Cette petite chauve souris est l’Andira, ce petit vampire qui, de nos jours, ne se nourrit plus que du sang provenant de l’échine du cheval et du bétail. Il y en a beaucoup près des fleuves.

Ainsi se termine le conte.

Si Kakhara n’avait pas existé, la femme chauve souris aurait continué à tuer les Tapiete. Il est intelligent et s’est montré capable de sauver les anciens indigènes.

Nous ne tuons ni ne mangeons Kakhara car c’est un ancien indigène intelligent.

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Glossaire basique

Algarrobo : Arbre qui appartient à la famille des caroubiers.

Aloja : Boisson sucrée à base de divers fruits et céréales de la région.

Anumbi : Fourmilier.

Andira : Petite chauve souris du Chaco.

Ayuru : Sorte de perroquet de taille moyenne.

Bandurria : Oiseau qui ressemble à la poule de forêt, de couleur grise, vivant près des rivières.

Buraco : Instrument agricole fait en bois et métal.

Capitan : Mot d’origine militaire espagnol qui désigne l’autorité principale chez les peuples du Chaco.

Caserio : Hameau, groupe de cases indigènes.

Chaco : Région subtropicale aride et sèche qui recouvre une partie de la Bolivie, du Paraguay et de l’Argentine.

Chango : Terme linguistique du Chaco pour désigner les jeunes hommes.

Chorotes : Peuple originaire du Chaco.

Chulupis : Peuple originaire du Chaco.

Guarani : Nom de la population originaire la plus nombreuse du Chaco bolivien.

Hualacato : Tatou.

Kakhara : Nom d’un type d’aigle du Chaco.

Llica : Sac tissé avec des fibres végétales de carahuata, arbuste du Chaco.

Majano : Nom chaqueno d’une espèce du cochon sauvage du Chaco.

Mbéru : Sorte de mouche.

Porongo : Citrouille utilisée comme récipient pour l’infusion de plantes, pour l’eau et comme instrument de musique.

Qharqancho : Synonyme de kakhara.

Quebracho : Arbre de la région dont le bois est l’un des plus dur du monde.

Quirquincho : Tatou.

Toba : Peuple originaire du Chaco.

Tojo : Variété de rongeur du Chaco.

Tumpa : Dieu propriétaire des animaux et la forêt.

Ueraphinta : Variété d’aigle du Chaco de couleur rouge.

Yui : Crapaud de grande taille connu aussi comme rococo.

Yulo : Grand oiseau au cou rouge vivant près des fleuves.

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Bibliographie minimale

DIEZ ASTETE, Alvaro "MAPA ETNOLINGUISTICO DE BOLIVIA -1986" en : Revista Arinsana 1986 No.1, Cuzco.

FERNANDEZ ERQUICIA, F. Roberto INFORME DE LA MISION TAPIETE. MUSEF, La Paz. 1992

MONTAà‘O, Mario GUIA ETNOGRAFICA LINGàœISTICA DE BOLIVIA, Tomo I. Ed. Don Bosco, La Paz..1987

NORDENSKIOLD, Erland THE ETHNOGRAPHY OF SOUTH AMERICASEEN FROM BOLIVIA, Elanders Boktryckeri Aktiebolag, Göteburg. 1924

SIND DIE TAPIETE EIN GUARANISIERTER CHACOSTAMM, Revista GLOBUS No. 12, 29 de septiembre de 1910, Braunschweig.1910

SAIGNES, Thierry AVA Y KARAI : ENSAYOS SOBRE LA FRONTERA CHIRIGUANO (SIGLOS XVI-XX), HISBOL, La Paz. 1990

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F. Roberto FERNANDEZ-ERQUICIA, ethnologue bolivien.

- Peintures : Margari margari@wanadoo.fr.ns

- Lire aussi : Mythes des Tapiete du Chaco bolivien ( 1 )

[1Les Tapiete sont une ethnie originaire du Chaco, qui vit à Samayhuate, Cutaiqui et Cercada, haciendas situées sur la rive gauche du Rio Pilcomayo, près des frontières du Paraguay et de l’Argentine. Ils font partie de la famille ethnolinguistique des Tupi-guarani .

Sur le territoire bolivien, les Tapiete n’atteignent pas 60 personnes. Comme beaucoup de peuples originaires des régions frontalières, ils se sont constitués en peuple trinational, en conséquence des avatars de la colonisation espagnole puis de la formation d’Etats nacionaux/coloniaux, se sentant à la fois boliviens, paraguayens et argentins, sans connaître la raison de cette appartenance.

Au cours des siècles précédents, ils furent soumis par les Chiriguanos qui leur imposèrent leur idiome et les réduisirent en esclavage (Nordenskiold 1910, T. Saignes, 1990).

La tradition orale Tapiete contemporaine rappelle, que pendant la Guerre du Chaco (1932-1935), de nombreuses communautés indigènes furent assaillies par les armées bolivienne puis paraguayenne pour recruter de force des jeunes devant servir de guides et ceux qui refusèrent furent fusillés .

A la même époque, voyant leur territoire ancestral converti en théâtre d’opérations militaires, il s’enfuirent jusqu’en Argentine d’où ils furent refoulés par les bataillons militaires de ce pays. Personne ne sait combien de Tapiete, Chulupis, Chorotes, Tobas, Matacos, Guaranis et autres peuples originaires, furent massacrés à cette période tragique. Le conflit terminé, leur territoire fut divisé et leurs terres occupées par des colons blancs boliviens, argentins et paraguayens.

A l’heure actuelle, les Tapiete constituent une communauté « patronnée » (sous dépendance patronale) : ils ne possèdent pas de terres et prêtent leurs services comme ouvriers salariés dans les haciendas de la région pour des salaires misérables. Ils pratiquent aussi la pêche, la chasse, le petit commerce de la peau de l’iguane et un peu d’agriculture, pour survivre. Ils ne disposent ni de poste sanitaire, ni d’école.

A niveau politique régional, les Tapiete appartiennent à l’« Asamblea del Pueblo Guarani » (APG), organisation indigène qui défend les peuples originaires de la région, et au même temps, soutiennent la lutte des paysans « sans terre » ( le MST).

Les mythes que nous divulguons aujourd’hui ont été recueillis durant le mois de novembre 1991 et février 2000 à Samayhuate auprès de Tomas Ferreira, Capitan des Tapiete et d’autres personnes de la communauté.

Différentes versions de ces contes en espagnol et guarani Tapiete sont conservées dans les archives du MUSEF à La Paz.

Dans cet article, nous avons essayé de les traduire en langage simple pour leur divulgation.

[2Yulo : Grand oiseau au cou rouge vivant près des fleuves

[3Kakhara : Nom d’un type d’aigle du Chaco

[4Hualacato : Tatou

[5Chaco : Région subtropicale aride et sèche qui recouvre une partie de la Bolivie, du Paraguay et de l’Argentine.

[6Majano : Nom chaqueno d’une espèce du cochon sauvage du Chaco.,

[7Quirquincho : Tatou.

[8Capitan : Mot d’origine militaire espagnol qui désigne l’autorité principale chez les peuples du Chaco.

[9Algarrobo : Arbre qui appartient à la famille des caroubiers.

[10Bandurria : Oiseau qui ressemble à la poule de forêt, de couleur grise, vivant près des rivières.

[11Tojo : Variété de rongeur du Chaco.

[12Caserio : Hameau, groupe de cases indigènes.

[13Algarrobo : Arbre qui appartient à la famille des caroubiers.

[14Aloja : Boisson sucrée à base de divers fruits et céréales de la région.

[15Quebracho : Arbre de la région dont le bois est l’un des plus dur du monde.

[16Tumpa : Dieu propriétaire des animaux et la forêt.

[17Buraco : Instrument agricole fait en bois et métal.

[18Andira : Petite chauve souris du Chaco

[19Chango : Terme linguistique du Chaco pour désigner les jeunes hommes.

[20Mbéru : Sorte de mouche.

[21Porongo : Citrouille utilisée comme récipient pour l’infusion de plantes, pour l’eau et comme instrument de musique.

[22Ayuru : Sorte de perroquet de taille moyenne.

[23Llica : Sac tissé avec des fibres végétales de carahuata, arbuste du Chaco.


COMMENTAIRES  

06/01/2006 10:48 par Edith M.

Bravo ! Le mythe fonde l’homme et lui donne des racines impossibles à arracher. Les peuples ne pourront résister à la mondialisation et à l’anonymat qu’en connaissant et en gardant vivant leurs mythes. Les colonisateurs de tout poil, depuis les Romains jusqu’aux Américains, en passant par les Jésuites et les colons européens, ont toujours voulu détruire les mythes des pays qu’ils veulent conquérir en les ridiculisant ou en les rationalisant, en vidant les têtes des colonisés de la mémoire de leurs origines. Cette perte rend les populations totalement malléables, prêtes à troquer leur langue contre celle de l’envahisseur, et à participer à la mise à sac de leur pays.
Je suis frappée par la perte totale de mémoire des Polynésiens, en deux ou trois siècles de christianisation par des missionnaires particulièrement malins. Les Indiens d’Amérique du Sud se sont mieux protégés, me semble-t-il.

08/01/2006 03:28 par Edwin Perez Uberhuaga

DES MIGRANTS DEMANDENT A EVO MORALES QU’ILS LES SOUTIENNENT EN VUE D’UNE VIE DIGNE ET QU’ILS FREINENT UNE DIASPORA CHAOTIQUE

Madrid 4 janvier 06, Edwin Perez Uberhuaga ( CEM )
Les migrants boliviens en Europe demandent au nouveau président Evo Morales qu’ils les soutiennent dans leur légalisation et leur résidence, qu’il négocie des travaux dignes et qu’il stimule le développement dans le pays pour freiner la sortie chaotique du pays.
En Espagne où il y a plus de 140 000 compatriotes,
l’arrivée dans les dernières années a éveillé de grandes expectatives à la visite que M. Morales a effectué le jeudi 4 à Madrid avec le président d’Espagne Jose Luis Rodriguez Zapatero, le roi Juan Carlos , des chefs d’entreprises espagnols et les syndicats des travailleurs espagnols. Les tenants et aboutissants de la visite sont nombreux du fait qu’après 500 ans après l’arrivée des espagnols en Amérique, un indigène élu démocratiquement visite l’Espagne et puisque ce pays est devenu la porte de l’Europe pour des boliviens commençant une lutte pour la survie laissant parfois leur famille et leurs enfants dans le pays jusqu’à ce que sa stabilité économique éventuelle rende possile leur rencontre." La première chose que je veux lui demander, c’est qu’il n’oublie pas de parler de nous." a dit Mario, originaire de Santa Cruz, une des plus grande colonie bolivienne en Espagne faisant partie du millier d’exilés économiques et exilés écologiques qui ont abandonné le pays forcés à cause du chômage et de la déprédation des ressources naturelles de leurs populations. Si dans la dernière régularisation 47 000 boliviens ont pu légaliser leur présence en Espagne, il existe un grand contigent qui ne l’a pas fait car ils sont arrivés après les dates prévues ou puisque leurs " patrons " n’ont pas voulu les aider dans ces démarches. " Je suis illégale et j’ai peur qu’on m’expulse. Qu’Evo fasse quelque chose pour moi. " a dit Rosario de Cochabamba qui se rappelle avoir connu "Evo" dans son époque de dirigeant de producteurs de coca.
" Moi, j’étais une "chola" (indigène bolivienne)et j’étais vêtue, et ceci avec fierté, de mes "polleras" (jupes andines) mais maintenant regardez-moi, j’ai dû me mettre une robe pour venir ici. " a dit la compatriote quinquagénaire mélangeant le quechua avec son nouvel accent espagnol.
La migration bolivienne contient des chiffres spectaculaires, plus de 2 000 000 de compatriotes en dehors d’un pays avec à peine 9 000 000 d’habitants. Des professionnels, des paysans, des étudiants, des jeunes et des personnes âgées sont éparpillés entre l’Argentine, les Etats Unis, le Brésil, l’Espagne et le reste des pays.
" Nous sommes le deuxième et le troisième produit d’exportation mais jusqu’à présent nos gouvernements nous ont ignorés croyant que ceux traversant la frontière automatiquement se trouvent bien. "a commenté par Intenet Mario Villalba depuis Londres, Angleterre où il est entré avec beaucoup de difficultés à cause des contrôles migratoires. Alors que, plus les migrants boliviens existent, plus importants sont les envois d’argent à leurs membres de la famille en Bolivie, mais aussi est plus grande la précariété de travail à cause de la concurrence avec les mêmes boliviens, les latino-américains et européens de l’est.
Il y a peu, l’ambassadeur de Bolivie a réussi à accorder avec l’Espagne la reconnaissance des permis de conduire boliviens ce qui leur permettra de se déplacer avec liberté et de travailler avec des véhicules ce qu’ils ne pouvaient pas faire jusqu’à présent. Depuis Paris, Marcelo a remarqué que s’il réside depuis plusieurs années dans la ville des lumières, son fils n’a pas de travail depuis longtemps et il a participé dans les récentes manifestations en France où le chômage s’accroît et par contre diminue la construction de
l ’interculturalité.
UN TRAITEMENT PLUS DIGNE
Rocio ayant demandé l’anonymat, a dit que le nouveau président devrait intercéder en vue d’un traitement plus juste aux compatriotes puisqu’ils font des travaux de basse rémunération et il y a des cas de professionnels à qui on ne reconnaît pas leurs années d’ études . Rocio a dit qu’indirectement ou diplomatiquement, Evo Morales devrait rappeler qu’une partie des richesses d’Espagne ont été obtenues au prix de la pauvreté en Amérique et en particulier en Bolivie. " Il devrait y avoir des accords pour qu’arrivent en Europe des migrants avec un contrat de travail pour éviter une période traumatique d’adaptation et d’incertitude." a dit un volontaire d’une association orientant les compatriotes à Madrid.
D’Italie, Gonzalo Jimenez a dénoncé que, de plus en plus, il y a davantage de péruviens, d’équatoriens arrivant à Milan avec un passeport et que quelques-uns sont arrêtés et figurent comme "boliviens délinquants" dans les archives policiers."Il y a de la corrupion parmi les fonctionnaires qui accordent un passeport et ils le font dans l’impunité." a-t-il ajouté.
De Suisse, Luis, un sans-papiers, depuis 5 ans, a dit que le président devrait converser avec les gouvernements du nord de l’Europe où il n’y a pas de régularisation et les boliviens comme les autres latino-américains sont exposés aux expulsions policières
"A Bergame, Italie nous sommes 15 000 boliviens et nous avons besoin d’un consul qui se préocupe de nous. "a dit Rita Mendoza affirmant qu’elle a vécu dans plusieurs pays d’Europe où les ambassadeurs et les consuls ne leur prêtent pas attention .
"Je ne veux pas les pistonnés des gouverneurs mais des gens qui nous comprennent ." a exprimé par téléphone la compatriote.
Un autre volontaire à Madrid a signalé qu’on doit faire quelque chose contre les trafiquants de migrants, ceux qui obligent les femmes à se prostituer ou ceux qui donnent les enfants pour des adoptions supposées.
Le taux d’avortements entre les femmes migrantes boliviennes est aussi très élevé. Le président Morales doit faire beaucoup de choses dans le pays mais aussi en dehors parce que nous sommes aussi boliviens que quiconque." a dit Humberto Apaza avant d’entrer dans le métro dans la "zone bolivienne" à Usera pour aller à la place de Castille où il travaille comme maçon. (traduction : Esther Domenech)

www.revistamigrante.com

30/03/2006 03:21 par Edwin Perez Uberhuaga

LE "CHE", LA GUERRE DU PETROLE ET L’ECOLOGIE
PALPITENT DANS LE CHACO.

Camiri, mars, Edwin Perez Uberhuaga (CEM).
L’histoire vivante du "Che" Guevara, la Guerre du
pétrole, des haciendas rurales de plaisance et de
vastes réserves naturelles où habite le guaranà­, font
partie de l’ agressive offre touristique initiée par
le Chaco qui, en plus, souhaite devenir le dixième
département de la Bolivie.
Un parcours par Camiri et Lagunillas, près de
à‘ancaguazu, le week-end dernier a permis de découvrir
les surprenantes facettes d’une région stratégique
pour le pays, mais qui jusqu’à aujourd’hui a été un
peu étouffée par les départements de Chuquisaca, Santa
Cruz et Tarija auxquels il appartient
"politiquement", mais pas géographiquement ni
culturellement. Le Chaco bolivien a une extension de
127 mille kilomètres, où habitent 300 mille cambas et
collas, outre les cent milles guaranis, descendants de
caciques qui ne se sont pas soumis facilement à 
l’empire inca et à la colonie espagnole.
La visite effectuée par des opérateurs et des
correspondants internationaux , a eu pour cadre le
calme de la végétation et des haciendas anciennes,
l’éclat des utopies guévaristes, voire les discours
civiques avec le préfet de Santa Cruz cherchant à 
éviter la création du dixième département, réaffirmé
par les "chaqueños" sous la protection de la prochaine
Assemblée Constituante.

J’ AI VU LE " CHE "
Des témoignages de personnes âgées ayant connu
personnellement, il y a presque 30 ans, le "Che ", des
photographies révélatrices et les lieux où est passé
le guerrillero argentin-cubain, font partie du mystère
qui entoure encore ce personnage, plus connu en Europe
qu’en Bolivie.
Les soeurs Elda et Hilda Blanco ont évoqué l’image
d’un homme barbu, avec un béret qui est apparu
mimétique d’un mendiant loqueteux, qu’elles ont aidé
avec un peu de nourriture et qu’elles ont reconnu des
mois plus tard, en 1967, sur la photographie du "Che"
mort.
Leurs souvenirs, maintenant désordonnés, ont donné
lieu à un petit débat entre elles à propos du "Che" et
des guerrilleros ou des soldats qu’ils ont combattus
pour savoir s’ils étaient les "bons"ou les "méchants"
de cette histoire passionante qui a maintenu en éveil
la région, le pays et le monde pour avoir été une
sérieuse tentative d’expansion du communisme en
Amérique du Sud. Maintenant le "Che" est en train de
donner de quoi vivre à ceux qui ont été ses amis et à 
ceux qui l’ont trahi, a dit un des opérateurs de
tourisme en faisant allusion au grand nombre de
visiteurs qu’a le musée à Lagunillas ou la caserne
militaire où a été prisionnier le journaliste Regis
Debray, protagoniste du premier procès oral d’Amérique
du Sud.
CE PETROLE N’EST PAS A NOUS
La délégation de 15 personnes a été transportée dans
le passé en visitant la première raffinerie de pétrole
de Bolivie à Camiri, région convoitée par les
paraguayens et les transnationales dans la Guerre du
Chaco qui aussi a été le cadre du désastre de la
capitalisation et de la tentative de l’actuel
Gouvernement à fortifier le YPFB.
"Et penser que ce pétrole n’est plus à nous " a dit le
propriétaire d’une agence de voyages en contemplant ,
en dehors de Camiri, un puits ouvert dans la décennie
des 30, de plus de mille mètres de profondeur et que
goutte à goutte, que tonneau en tonneau, aujourd’hui
fait partie de la richesse de l’entreprise Andina. Un
autre des assistants, bien informé, a fait remarquer
qu’il est fort possible que ce pétrole soit une partie
de la contrebande d’hydrocarbures qui fournit le motif
du procès à l’entreprise Andina et l’espagnole Repsol.
Les souvenirs des morts dans la Guerre du Chaco
(1932-1935) et les morts et les blessés dans la lutte
actuelle en vue de la nationalisation des ressources
naturelles, ont provoqué un silence spontané en
contemplant ce liquide visqueux et bleuâtre qui encore
provoque des guerres et des invasions dans tout le
monde.
L’ORGUEIL GUARANI
Le Chaco est plein de légendes de caciques et de
guerriers et de lieux enchantés, où l’homme se trouve
dans la nature et dans le passé, avec ce nouveau
concept de "Tourisme rural" qui attire les visiteurs
de tout le monde.
Les haciendas Caraparicito et Yatiguigua sont un
exemple clair dans la manière dont on peut combiner la
commodité avec un milieu champêtre à travers des
constructions et un décor fait de bois, de lanières de
cuir et d’ objets artisanaux du même endroit.
Dans le parcours fait à cheval par la délégation, on
observe la grande variéte de la nature, des oiseaux
exotiques, des taureaux, des zébus, des buffalos et
des animaux de ferme, alimentés de fruits et du maïs
typique de la zone. Les deux haciendas avec d’autres
de la zone cherchent à capter le tourisme qui provient
du pays et d’Argentine, du Brésil et du Paraguay sans
oublier les européens et les nord-américains qui las
de vivre dans des "jungles " de béton veulent des
retrouvailles avec la nature. La gerante du Chaco
Guarani Tours, la "cordillerana" Karen Wachtel, a dit
que c’est le meilleur moment pour que le Chaco soit
montré avec détermination et personnalité au monde
dans sa véritable dimension et avec l’ orgueil
bolivien.
Edwin Perez Uberhuaga est coordinateur en Suisse du
Centre d’Etudes en Migrations (CEM)
Veuillez visiter et y donner votre avis sur
www.revistamigrante.com , www.vulcanusweb.de.

03/08/2008 06:22 par Edwin Perez Uberhuaga

RAIZ BOLIVIA avril 2008

CULTURE/ CINE

Madrid, Edwin Pérez Uberhuaga (Raà­z).- Le film nord américain "Lève-toi et marche " qui reflète les succès de l’enseignant bolivien Jaime Escalante,. "est un des plus grands témoignages de la capacité des jeunes latinos à s’en sortir dignement et pour eux, ce professeur en est la source d’inspiration" , d’après l’acteur Edward James Olmos.

"LàˆVE-TOI ET MARCHE " JAIME ESCALANTE CONTINUE A ÊTRE L’INSTIGATEUR DE MILLIERS DE LATINOS.

UN FILM ENCOURAGEANT.
Edward James Olmos, célèbre pour son interprétation dans le rôle du lieutenant Castillo dans la série " Miami Beach" a dit à Madrid pour la revue Raà­z Bolivia que le film sur Jaime Escalante, vingt ans après sa réalisation, continue à être utilisé par des milliers d’enseignants latino-américains aux Etats-Unis pour motiver leurs élèves. Le film " Lève-toi et marche" parle du mathématicien qui enseigna à son jeune public des nouvelles méthodes pour apprendre et réussir en mathématiques au Bac C, indispensable pour l’accès à l’université. C’est la vraie histoire du lycée public Gardfield aux Angeles, accablé par la violence des bandes.
Edward James Olmos, mexico-nord américain, a affirmé que le film parle du triomphe de l’esprit et de la joie d’apprendre, vertu aujourd’hui disparue. L’acteur a, par ailleurs, ajouté que personnellement le film lui a apporté beaucoup de satisfactions car ce rôle lui a valu la nomination aux Oscars en 1987.
L’acteur présentant ses films du 3 au 7 mars 2008 à la fondation Casa de America à Madrid, aux côtés du metteur en scène du cinéma indépendant, Robert M. Young, garde le regard expressif de ses films et parle en mélangeant l’anglais et le castillan.

LA SITUATION DE BOLIVIE
Edward James Olmos, un des acteurs « hispanos »les plus respectés, a déclaré que grâce à ce bolivien de La Paz, Jaime Escalante nommé "le tigre bolivien" dans le film, a pu connaître la réalité du pays andin. "Pour moi, cette époque a été comme un rêve merveilleux." L’acteur, né aux Angeles, affirme faire confiance aux boliviens pour sortir de cette crise où ils se trouvent. Il a ajouté que ses films au sujet récurrent, l’immigration mexicaine aux Etats Unis, pourrait s’appliquer à la même problématique en Europe quant aux immigrés boliviens et latino-américains.

QUI EST JAIME ESCALANTE ?
"Il n’y a pas de surdoués, mais plutôt, peu sont ceux qui atteignent la gloire. Tout d’abord parce qu’ils n’en ont pas envie, ensuite, parce qu’il existe des facteurs destructifs au sein de notre société." déclarait le professeur de La Paz Jaime Escalante, âgé aujourd’hui de 77 ans, lors d’une conférence à Santa Cruz il y a de nombreuses années. Il clamait aussi"Le jour où un adolescent quitte l’école , il se condamne, à l’avenir, à vivre dans la pauvreté" ainsi que sa devise "détermination+discipline+ travail dur=succès" . Interviewé à La Paz, prés du lycée San Calixto où autrefois il fut enseignant, sa simplicité et son "cachucha" ( chapeau), cachant sa calvitie naissante, le caractérisaient déjà . Sur Internet, on trouve ces données : Pendant quatorze ans il donna des cours de physique et de mathématiques. Ensuite, il émigra. Sa première escale fut l’université de Puerto Rico où il apprit les sciences et les mathématiques. Il passa en Californie où il se trouva sans savoir un mot d’anglais, sans un titre pour enseigner. En dépit des adversités rencontrées comme immigré , il alla contre vents et marées et étudia toutes les nuits à l’université de Pasadena où il obtint sa maîtrise en Ingénierie électronique.
En 1976, il commença à enseigner aux Angeles, au lycée Garfield où les drogues, les bandes et la violence étaient monnaie courante. Malgré ce fléau, Jaime Escalante put motiver un petit groupe d’étudiants afin de les préparer à l’examen de mathématiques au Bac C en 1982. Le Service Scolaire de Vérification des Examens l’annula croyant que les étudiants avaient triché. La plupart de ces 18 élèves passèrent à nouveau les examens et réussirent avec mention. Jaime Escalante devint un héros national. Aujourd’hui, Jaime Escalante est l’un des éducateurs le plus connu. Il a reçu la Médaille Présidentielle des Etats Unis et on lui a décerné le prix Andrés Bello(prix honorant la meilleure recherche sur l’éducation supérieure en Amérique Latine(OEA)) Edwin Pérez Uberhuaga

RAIZ BOLIVIA avril 2008

Edwin Pérez Uberhuaga est directeur de la revue Raà­z Bolivia, (revue mensuelle des boliviens en Espagne)www.clubraiz.com
Il a écrit 3 livres, un quatrième est en cours de préparation : Personas et personajes tome I,II, La migración antés y después el 11 de septiembre

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