15 
Ce livre ne fera pas un tabac. Annie Lacroix-Riz* est placardisée par les médias de Bolloré and Co.

Quand industriels et banquiers français soutenaient Hitler.

Par ces temps où la météo revient au brun, il est salutaire de réviser l'histoire, celle de nos capitalistes d'avant guerre qui, avant même qu'Hitler ne soit chancelier, ont choisi le nazisme.

Annie Lacroix-Riz est une historienne incapable de laisser l’histoire tranquille. Alors que le récit de notre passé est gravé dans le marbre des imprimeurs, il faut qu’elle efface, ajoute, bouscule. Avec une chercheuse comme elle -et qui trouve-, difficile de dormir en paix. Jadis un grand magasin avait pour slogan « Il se passe toujours quelque chose aux Galeries Lafayette »... Lacroix-Riz c’est pareil. Et, bizarrement, les boîtes d’archives dans lesquelles elle dort accouchent de vérités qui s’en prennent toujours à de pauvres gens. Voyez le mauvais esprit, alors que le malheur habite toujours chez les riches, que Pétain a sauvé les juifs, et l’Amérique l’Europe avec le Plan Marshall. Le dernier exemple est son colossal livre « Industriels et banquiers français sous l’Occupation » -une version augmentée de son précédent ouvrage aujourd’hui publiée en « poche »-, une œuvre qu’elle fait progresser au fil de ses découvertes.

Constatons que De Gaulle ne lui a pas facilité le travail, en 1945, en ordonnant une épuration légère afin que la France continue au plus vite d’exister et ne devienne pas un bantoustan américain. De la fin de la guerre à 1950 la Justice chargée de l’épuration n’était qu’une vaste blanchisserie. La majorité des industriels et banquiers, sauf quelques cas trop flagrants, sont sortis indemnes du passage devant les robes noires. Parfois sanctionnés mais vite amnistiés. Pour excuse partagée, les collabos avaient un alibi : « Sous contrainte allemande, nous n’avions pas le choix ». Le droit français prescrit qu’un accusé a le droit de mentir. Les industriels et banquiers mentaient.

Mensonge ancien puisque c’est bien avant l’arrivée d’Hitler place du Trocadéro, dès les années 20 et 30, avec la montée du nazisme en Allemagne et du fascisme en Italie que les entrepreneurs et financiers ont choisi Hitler et Mussolini, pour fuir le Front populaire et les cohortes Communistes. C’est l’époque où les groupes français intensifient leurs accords et leur coopération avec ceux d’Allemagne, acceptant sans difficulté une direction germano-nazie. Parfois même abandonnant des marchés, comme Schneider-Creusot lorsqu’en 1938-¬39, Skoda, un joyau de l’empire industriel Tchécoslovaque, passe sous les griffes du Reichswerke d’Hermann Göring. Simple anticipation puisque ce monde, dans une guerre qui vient a, sans le savoir, déjà choisi la défaite. « Hitler va mettre de l’ordre en France », nous dit alors Georges Lang, imprimeur membre du Comité France-Allemagne fondé en 1935. Quand après-guerre, les mêmes viennent se plaindre de l’imparable pression nazie subie, ils oublient leur loto. Celui qu’ils ont joué quinze années plutôt avec le Reich gagnant. Annie Lacroix-Riz écrit dans ce dernier opus : « On ne résiste pas à l’occupant qu’on a appelé et installé ». Souvent avec un tempo plus rapide que les politiciens qui vont finir par collaborer, les industriels et banquiers crient déjà « A Berlin, à Berlin ! ». On demande l’abolition de droits de douanes puisque le projet est de construire un nouveau capitalisme façon Europe Nouvelle. Jouissons sans entraves.

Le projet dépasse l’espoir d’un profit rapide, celui de prendre l’argent puis s’en aller. Pas du tout. Les puissants de l’économie française rêvent d’une installation durable. Mais certains pragmatiques, eux, songent d’abord à spolier les « biens juifs ». Exemple dans une lettre que Pierre Taittinger adresse à Darquier de Pellepoix dans laquelle il se plaint de ne pas avoir assez de « biens juifs » à « administrer ». Dans « Industriels et banquiers » l’auteur ne livrent pas qu’une vision de ce monde qui colle au projet de l’Europe Nouvelle. Il y a aussi la crapulerie ordinaire. Donc comme celle de Taittinger ou de Coco Chanel pillant la propriété de « israélites ». Pour ceux qui ont collaboré ( la majorité), l’Occupation a été une ère fructueuse, nous démontre le livre : le capital des grandes banques a doublé ou triplé. Exemple le groupe pharmaceutique Théraplix a quadruplé ses bénéfices ; les valeurs boursières de nombreuses entreprises ont grimpé, atteignant jusqu’à six fois leur valeur d’avant-guerre. Le beurre et l’argent du beurre. Certes, après guerre, il y a eu des nationalisations, comme celle de Renault, mais rien de grave pour les capitalistes. Dans les coffres des banques dorment encore des euros qui sont des petits de l’argent bien sale, des fortunes de guerre.

Le plan de l’IG Farben à l’été 1940 consistait à « obliger l’industrie française à travailler pour la machine de guerre nazie », nous dit Lacroix-Riz. Quant au français Kuhlmann, un rapport indique qu’en août 1940, l’entreprise a proposé de « mettre son industrie tout entière au service de l’Allemagne pour renforcer le potentiel chimique pour la continuation de la guerre contre l’Angleterre. Kuhlmann serait prêt à produire tous les produits préliminaires et auxiliaires pour l’IG, ce qui serait désiré du côté allemand. ... une collaboration intime, ... intégration de l’industrie française dans l’économie européenne sous une direction allemande. » Annie Lacroix-Riz nous rappelle qu’IG Farben a financé la construction du camp de la mort Auschwitz III, avec l’argent où cousinaient marks et francs. Sainte pudeur, ne parlons pas des biens coloniaux pillés par l’Allemagne, grâce à la bonne volonté et au zèle du patronat français qui lui donnait les clés des pays de sauvages.

Dans ce livre de 1224 pages (dont 200 d’annexes), la liste des noms cités est jubilatoire : elle met à la lumière les infames. Ces collabos de la banque et de l’industrie sont épinglés au mur de la honte. La mémoire de l’historienne est là pour nous rappeler l’honneur perdu de ceux qui, le 18 août 44, ont eu le temps d’arracher la Francisque de leur revers de veste. Mais leur passé est là, indélébile dans ce livre salutaire qui traque la saleté comme une tornade blanche. L’œil est de la tombe.
Ceux qui estiment qu’un tel livre va faire du foin. Provoquer des divorces au motif que le grand père a payé notre château, en vendant du ZyclonB et de l’acier aux Allemands, se trompent. Annie Lacroix-Riz, pourtant femme qui transmet la vérité des archives, est assignée au placard par la nouvelle presse de propagande tenue par les Bolloré and Co. Surtout ne pas raviver les moments d’égarement. En rejoignant l’Elysée -par un train parti de Vichy- Mitterrand a été le premier à assigner le monde intellectuel et la presse au silence. Sifflé la fin de l’histoire avec Bousquet en chef de gare.

Jacques-Marie BOURGET

« Industriels et banquiers français sous l’Occupation » Annie Lacroix-Riz. Editeur « Dunod Poche » 1224 pages. 13,90 euros.

* Annie Lacroix-Riz est ancienne élève de l’Ecole normale supérieure. Professeur émérite à Paris 7. A publié de nombreux ouvrages dont « Le Choix de la défaite » , « « La non épuration en France », »Les origines du Plan Marshall ».

COMMENTAIRES  

23/07/2025 09:41 par robess73

sorti en 1996 ce livre MAJEUR de la grande dame ,reedité en poche cette année devrait absolument etre lu par chaque eleve du secondaire ,surtout ceux qui choississent l histoire !!!!

23/07/2025 10:53 par Evan Jones

Si peu des livres (deux ?) de ALR ont été traduits en anglais. Pourqoui ?

23/07/2025 11:02 par Zéro...

Le nazisme a servi au Système à véhiculer une hystérie anticommuniste - en mettant ces deux idéologies sur le même plan... - et a finalement offert aux Juifs un Joker éternel et un pays clés en main au détriment des Palestiniens !!

Le nazisme défait ?

Voyez la réécriture antisoviétique de l’Histoire de la Seconde Guerre Mondiale, relativisant le mal Noir ; voyez en Ukraine et dans les Pays Baltes où les néonazis ont pignon sur rue ; voyez la guerre menée à la Russie avec, c’est bien sûr un hasard, les Allemands en pointe (avec l’Angleterre et... la France qu’on retrouve dans la Collaboration décrite dans ce livre !) et l’UE dirigée par des petits-enfants de nazis...

Le nazisme et l’extrême droite ne sont que des rejetons et outils du Système euro-mondialo-capitaliste : c’est lui qu’il faut combattre pour les faire disparaitre !

Il faut s’attaquer aux racines des maux, pas SEULEMENT à leurs conséquences, ce qui vain...

24/07/2025 17:40 par J.J.

"Mais leur passé est là, indélébile dans ce livre salutaire qui traque la saleté comme une tornade blanche. "
Mais ça ne changera pas grand chose à leur situation et à la nôtre.
"Bien mal acquis ne profite jamais"...à ceux qui ont été victime de la spoliation.
Il me serait plaisant de revoir une situation que j’ai vécue, tout jeune à la libération de la ville : le passage à tabac, au QG du maquis d’un prof du lycée, qui durant ses cours faisait l’apologie de la collaboration, et qui avait dénoncé aux boches ou aux miliciens certains de ses élèves résistants qui avaient dû prendre le maquis pour sauver leur peau.

25/07/2025 17:38 par Louise de Bretagne

Puisque mes jcommantaires ne sont pas tous du goût de legrandsoir, j’emploierai seulement pour commenter ce long-texte, cette citation du Corse qui devint empereur des français.
⬇️
La vérité historique est souvent une fable convenue.
(Napoléon Bonaparte)

25/07/2025 22:33 par robess73

Louise de Bretagne où d ailleurs.le tyran Bonaparte n était pas corse mais génois. l histoire convenue commence déjà la.pour le reste lisez religieusement les livres de la grande Annie .tout y est source.

25/07/2025 23:19 par Louise de Bretagne

@robess 73
Napoléon Bonaparte était d’origine corse. Il est né à Ajaccio, en Corse, en 1769, alors que l’île était récemment rattachée à la France. Sa famille, bien que d’origine génoise, s’était installée en Corse depuis plusieurs générations.

Je peux me passer de vos mauvaises leçons d’histoire et je voudrais bien que vos commentaires soient adressés uniquement aux auteurs des textes publiés.
Merci...

26/07/2025 02:27 par bostephbesac

Vous m’avez apprenez une chose, Robess ! J’ ai toujours entendu Bonaparte.............Le Corse !

26/07/2025 08:09 par Louise de Bretagne

@robess73
Je n’ai que faire de vos mauvaises leçons d’histoire, vous êtes là pour commenter les textes publiés par les auteurs et non échanger vos critiques acerbes avec un pseudo qui n’en a rien à faire de votre piètre savoir et de vos insinuations...

Napoléon Bonaparte était Corse. Il est né à Ajaccio, en Corse, en 1769. Bien que sa famille ait des origines italiennes, Napoléon est né et a grandi sur l’île de Corse, qui faisait alors partie de la République de Gênes, mais fut cédée à la France peu de temps après sa naissance. Sa corsitude a marqué son identité et son parcours, même après son intégration dans la société française.
En d’autres termes, même si la Corse était génoise au moment de sa naissance, Napoléon était un Corse de naissance et d’éducation, et cet héritage a joué un rôle important dans sa vie et sa carrière.

26/07/2025 18:31 par robess73

Quand on voit passer des énormités on est obligé de rectifier . Bonaparte était génois ne vous en déplaise .quand on veut reprendre l auteur d un article on évite les bourdes historiques .

27/07/2025 01:29 par bostephbesac

En tout cas, ce qui ressort de Wikipédia : Ajaccio, Français, Corse.

27/07/2025 16:26 par robess73

La Corse n a été réellement française qu en 1778 ( et encore) le tyran étant né en 1769 .alors que la Corse appartenait a genes .donc. ... Henri Guillemin et d autres historiens ont raison . wikipédia n est pas source fiable

28/07/2025 00:23 par bostephbesac

Je vous trouve bien tatillon . Je comprend Louise de Bretagne.

30/07/2025 14:54 par rémi

Francaise ou genoise, la Corse EST la Corse. Que de pinaillerie à la c..! Que l’Alsace fut francaise ou allemande, que cela a-t-il changé pour les alsaciens, avant ou après14/18 ? SVP ! Heureusement, le génie de notre grande dame historienne est au-dessus de tout çà !

31/07/2025 13:14 par LABSIR

Total RESPECT à cette Grande Historienne qui remet de l’ordre dans les faits historiques avec Pédagogie, Objectivité et Loyauté

(Commentaires désactivés)