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«  La moitié des élèves musulmans à Bruxelles sont antisémites »

« La moitié des élèves musulmans à Bruxelles sont antisémites »[1]… est ce qui ressort d’une étude intitulée "Jong in Brussel" de la plate-forme Onderzoek Jeugd et dont les résultats ont été publiés jeudi 12 mai 2011 dans le journal De Morgen.

Ce qui me cause souci, n’est pas tant l’« étude » de la plate-forme Onderzoek Jeugd, mais le relais qu’en fait la presse, sans autres éléments que ceux qui lui sont fournis par cette « étude », ce qui participe ainsi de manière passive au risque de banalisation de l’islamophobie.

Ce douteux sondage avance le principe que les musulmans, en bloc, seraient antisémites par nature. Ne s’agit-il pas là d’un postulat raciste ? Même si aucun des sondés n’est ni auteur, ni incitateur, ni demandeur d’une politique antijuive, il est antisémite de nature car musulman ! Ce sondage essentialise les élèves « musulmans », il en fait une entité homogène, pour ensuite leur attribuer un caractère méprisable (« antisémite »). Cette manière de penser, conjuguant l’essentialisation l’homogénéisation et le dénigrement, porte un nom : le racisme.

Aucune précision n’est donnée quant aux questions que cette « étude scientifique » a posé, ni aucun élément de la manière dont est défini le terme « antisémite »...

Pourtant, il existe une multitude de définitions du terme « « antisémite » et très souvent, l’on y associe la critique de la politique de l’Etat d’Israël (en particulier quand cette critique est énoncée par des personnes issues de l’immigration), ou encore l’« antisémitisme » des jeunes des quartiers populaires (souvent se définissant comme musulmans) issus de l’immigration.

Avant tout l’antisémitisme est inacceptable et indéfendable et il ne s’agit pas d’en débattre.

Mais, il est clair que cette enquête pose question sur le conflit israélo-palestinien et bien entendu son importation.

Rappelons qu’un sondage de la BBC publié le 19 avril témoigne de la mauvaise image d’Israël[2] en Europe. Dans un échantillon de 28 pays, Israël se range juste devant la Corée du Nord, le Pakistan et l’Iran, le plus mal classé.

Dans l’échantillon de la BBC, le plus mauvais résultat pour Israël est enregistré en Egypte, et en Turquie. Mais il serait mensonger de lier mauvaise image et poids de l’islam. Le Brésil, l’Allemagne et la Thaïlande considèrent également très négativement l’influence israélienne.

Ce sondage de la BBC ne fait pas de distinction entre les citoyens d’un pays, qu’ils soient musulmans ou pas.

Ce sondage arrive juste au moment où les Palestiniens célèbrent les 63 ans de la Nakba (catastrophe) synonyme de la destruction par Israël de plus de 500 villages ainsi que de l’expulsion de près de 800.000 Palestiniens de leurs foyers.

Si Israël est si mal perçu dans le monde, ce n’est pas tant à cause de l’antisémitisme, mais bien de sa politique raciste et colonialiste persistante. Cette idéologie raciste et colonialiste était d’ailleurs revendiquée par Théodore Herzl dans son livre sur l’Etat juif lorsqu’il expliquait : « Pour l’Europe nous constituerons là -bas un morceau du rempart contre l’Asie, nous serions la sentinelle avancée de la civilisation contre la barbarie ».

Expliquant le caractère colonial de l’Etat sioniste, Moshé Dayan déclarait dans le journal Haaretz du 4 avril 1969 : « Des villages juifs ont été construits à la place de villages arabes. Vous ne connaissez même pas le nom de ces villages arabes, et vous n’êtes pas à blâmer parce que les livres de géographie n’existent plus. Non seulement ils n’existent plus, mais les villages arabes non plus […]. Il n’y a pas un seul endroit dans ce pays qui n’ait pas eu auparavant une population arabe ».[3]

Dans son livre Le Septième Million, l’historien israélien Tom Segev montre comment les dirigeants israéliens ont utilisé la mémoire du génocide des juifs par les nazis pour façonner une identité collective israélienne. Dès leur plus jeune âge, les enfants israéliens, quelle que soit l’histoire de leurs ancêtres, sont élevés dans le souvenir et le culte du passé tragique des communautés juives européennes. [4]

Cette confusion entre antisionisme et antisémitisme, volontairement entretenue par les sionistes juifs et non-juifs, est d’autant plus dangereuse qu’elle risque de finir par délégitimer la nécessaire lutte contre l’antisémitisme.

Ce qui est mis en évidence dans l’enquête "Jong in Brussel", c’est l’antisémitisme supposé des populations musulmanes (qui ne sont donc pas inclus dans la catégorie « Belge »), et conçu comme un phénomène naturel et culturel, ce qui m’amène à dire que cette enquête n’est rien d’autre qu’un communiqué de presse islamophobe, anti-arabe, relayé comme une information capitale par les médias.

Un peu partout dans le monde, des juifs ou associations juives fondent leur opposition à l’idéologie sioniste non sur des convictions religieuses mais bien éthiques et politiques. [5]

Combien de Belges ont des sentiments anti-arabes ou anti-musulmans ?

Il aurait été intéressant de s’adresser d’une même voix à toutes les victimes du racisme dans un souci d’égalité, et de mettre en oeuvre une politique qui garantisse à tous, sécurité et respect.

La question du retour de la « bête immonde » se pose effectivement, mais alors dans d’autres termes.

Reste maintenant à se demander pourquoi aucune association n’a jusqu’à présent publié le moindre communiqué face à ce sondage paru dans presque tous les journaux, et pourquoi aucun journaliste n’a pris la peine de nous donner un aperçu des questions ni de la méthode utilisée.

Nordine Saïdi
Mouvement Citoyen Palestine
http://mcpalestine.canalblog.com

[1] http://www.rtbf.be/info/belgique/detail_la-moitie-des-eleves-musulmans...

[2] http://www.bbc.co.uk/pressoffice/pressreleases/stories/2010/04_april/1...

[3] http://www.urgencepalestine-vd.ch/pdf/7_paroles.pdf

[4] http://www.ujfp.org/modules/news/article.php?storyid=129

[5] http://www.ijsn.net/C25/

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