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Ce qu’on ne pourra jamais oublier

Hiroshima : après le 6 aout 1945...

Mardi dernier, 21 de septembre, à neuf heures du matin, j’ai rencontré plus de six cents passagers de la Croisière pour la paix (Peace Boat), presque tous japonais, dont une survivante, qui avait alors deux ans, de l’assassinat massif commis à Hiroshima.

La télévision cubaine a transmis la rencontre, mais la traduction au palais des Congrès n’était pas simultanée, si bien que les voix des compañeras qui réalisaient ce travail difficile se superposaient à la mienne, j’ai donc décidé d’écrire des Réflexions sur ce point.

J’en ai profité pour réduire la longueur de ce que j’ai exprimé et mieux ordonner mes pensées tout en restant absolument fidèles à leur teneur.

J’ai retranscrit intégralement ce qu’on dit les autres intervenants.

Malgré mes efforts, ces Réflexions sont longues, car la rencontre a duré deux heures et demie, et j’ai décidé de les diviser en trois et de les publier en autant de jours (regroupés ensemble ici - NdR).

La rencontre a été ouverte par Kenia Serrano, présidente de l’Institut cubain d’amitié avec les peuples.

* * * *

Kenia Serrano Bonjour.

Le 3 septembre dernier, le directeur de l’organisation non gouvernementale Croisières pour la paix, M. Yoshioka Tatsuya, a adressé à notre commandant en chef une lettre pour lui demander de recevoir les dirigeants de la croisière et une survivante d’Hiroshima et de Nagasaki qui l’accompagnait ; notre commandant a accepté et a invité une large représentation des passagers à cette rencontre.

Cette rencontre se tient le 21 septembre, que les Nations Unies ont déclaré Journée mondiale de la paix, et la présence de notre cher commandant en chef Fidel Castro Ruz est pour nous mémorable (applaudissements).

Nous avons à la présidence M. Nao Inoue, directeur de cette traversée de la Croisière pour la paix (applaudissements), Mme Matsumi Matsumura, cadre de cette croisière (applaudissements), Mme Junko Watanabe, membre du Mouvement Hibakusha, survivant d’Hiroshima et de Nagasaki (applaudissements), et la professeure Susana Garcà­a, de l’Université de La Havane, qui, comme vous le constatez, facilite ce dialogue en japonais (applaudissements).

comandante...

Fidel Castro. Quoi ? Je dois faire un discours ?

Kenia Serrano. Non, saluer… ce que nous souhaitons tous.

Fidel Castro. Non, je suis venu répondre, c’est tout. Quand j’ai demandé ce que je devais faire, on ne m’a rien dit.

Je voudrais tout d’abord vous remercier de l’honneur que signifie cette rencontre.

J’ai été un peu absent, comme vous le savez ; je lisais les journaux, mais j’ai perdu bon nombre de vos rencontres, mais j’ai appris ensuite votre histoire en détail. Je sais combien de fois vous êtes venus à Cuba : en 1990, d’abord, puis en 1995, 1997 et 1998 ; en 2000, 2001 y 2002, deux fois ; puis en 2005, 2007 et 2009, et aujourd’hui, ce qui fait, que je sache, un total de quatorze voyages.

Quand j’ai reçu votre invitation, je me suis réjouis de cette occasion d’échanger avec vous, à cause du moment important que nous visons, qui n’est pas un moment quelconque ; et aussi de vous remercier de la solidarité que vous avez montrée envers nous tout au long de ces années. Je connais vos difficultés, les luttes contre les blocus, l’identité et la nationalité du navire, les ports où vous pouviez aller ou non, si on vous fournissait ou non du combustible, et d’autres idioties similaires de notre principal adversaire dont les méthodes ne permettront jamais d’instaurer un monde d’entente et de paix.

Votre slogan si important : « Apprend des guerres passées pour bâtir un avenir de paix », aura toujours un sens, bien entendu, mais à plus forte raison aujourd’hui. J’ose dire, sans crainte de me tromper, que l’humanité n’a jamais vécu un moment si périlleux. Il ne s’agit pas d’un simple voyage, mais d’une lutte réelle, sérieuse, et je peux vous le prouver. J’espère que nos échanges nous permettront de mieux connaître ce que vous pensez ou quelles sont les formules possibles, les solutions réalistes, non la simple expression de nobles désirs.

Cette rencontre a pour moi une très grande importance justement du fait de votre grande expérience en la matière.

Nous avons rappelé ces jours-ci un nouvel anniversaire d’un fait brutal et insolite : la première utilisation des armes atomiques contre des villes pacifiques.

Le monde a beaucoup rappelé ce qui s’est passé à Hiroshima le 6 août 1945. Je venais de terminer mon bac, je m’en souviens, c’était l’été, j’étais de visite à Santiago de Cuba quand la nouvelle est arrivée, et personne n’avait la moindre idée de l’existence d’une arme de cette nature. La seconde bombe atomique a été larguée trois jours après, si je ne me trompe pas.

Je peux en parler un peu plus ensuite, des sentiments que j’ai ressentis et l’idée que je me suis fait toute ma vie de cet fait-là . C’est un exemple des choses qui peuvent faire gagner les gens en conscience. Tout ce qui s’est passé là et les dommages causés aux êtres humains, malgré le temps écoulé, ne cessent de bouleverser l’opinion internationale. Rien n’a jamais mieux exprimé ce qu’est la guerre.

Je crois m’être trop étendu pour ces premiers mots, et je voudrais vous écouter. Je sus prêt aussi à répondre à vos questions. Je n’ai aucun secret, vous pouvez aborder tous les thèmes.

J’aimerais demander à notre interprète comment elle s’en est sortie (rires et applaudissements).

Interprète. On dirait que bien, comandante.

Fidel Castro. Parfait.

Kenia Serrano. Merci, comandante. M. Nao Inoue, à vous, s.v.p.

Nao Inoue. Bonjour à tous. Je voudrais tout d’abord vous remercier profondément de vous avoir accueilli. Je suis Nao Inoue, directeur de la croisière numéro 70, et je voudrais dire quelques mots au nom de tous les membres de Peace Boat.

Nous savions déjà que vous connaissiez bien notre organisation, fondée en 1983, voilà donc vingt-sept ans. Nous avons fait à ce jour soixante-dix croisières à travers le monde pour plus de 40 000 Japonais.

Nous sommes venus quatorze fois à Cuba, vous le savez, et cette année-ci est importante parce que c’est le vingtième anniversaire. Et nous souhaitions vous connaître personnellement, comandante. Pendant ces vingt ans, nous avons fait l’impossible pour être un pont entre les peuples cubain et japonais. Et nous avons toujours été contre le blocus injuste, vraiment injuste.

Nous jugeons important de continuer d’être cette passerelle, non seulement entre nos deux peuples, mais aussi entre les peuples latino-américains et asiatiques. Nous voulons travailler à promouvoir un monde de paix, durable, et nous commençons à resserrer des liens d’amitié et de fraternité avec le Venezuela, l’Équateur et le Nicaragua. De tous ces pays, c’est Cuba que nous avons visité le plus souvent. Mais nous allons avoir l’occasion de connaître le président nicaraguayen, M. Daniel Ortega.

C’est pour resserrer les liens d’amitié et de fraternité entre les pays de l’ALBA et le Japon que nous avons inauguré le projet appelle Croisière de jeunes de l’ALBA, que nous avons invité à monter à bord, avec lesquels nous avons eu des échanges, des forums et des conférences d’études, et j’aimerai vous demander, comandante, de nous appuyer dans ce sens.

Comme, vous l’avez dit, nous sommes le seul pays au monde à avoir reçu une bombe atomique, nous sommes obligés d’émettre des messages pour un monde exempt d’armes nucléaires. Nous aimerions aussi collaboré avec vous pour éliminer les armes atomiques.

Nous tenons aussi à dire que le Japon s’est doté d’une Constitution pacifiste, autrement dit qu’il renonce à la guerre et aux armes de destruction massive.

Nous avons aussi appris que les pays latino-américains se sont dotés d’une constitution pacifiste et qu’ils interdisent les bases militaires étrangères, et nous pensons proposer à l’ONU de promouvoir que tous les pays du monde aient une belle Constitution pacifiste.

Nous ne voulons plus jamais la guerre, nous ne pouvons plus jamais permettre le recours à l’arme atomique. Comme ne cessent de le dire les survivants d’ Hiroshima et de Nagasaki : « Nous ne voulons plus voir se répéter cette tragédie brutale. » Nous voulons bâtir un monde et une société où les gens n’aient plus à vivre dans la pauvreté et ces choses-là . Voilà pourquoi tous les pays doivent se doter de ce genre de constitution. Nous nous sommes promis d’édifier un monde sans pauvreté, sans famine, heureux et durable.

Finalement, comandante, je suis un de vos grands fans (rires et applaudissements). Nous le sommes tous, à ce que je vois. Nous savons que vous êtes très occupé, mais nous voulons vous inviter à naviguer avec nous jusqu’au Nicaragua. Que vous en semble ? (applaudissements.) Qu’en dites-vous ? (applaudissements.)

Fidel Castro. Merveilleux ! (applaudissements.)

Nao Inoue. Je vais conclure sur cette invitation. Je vous remercie (applaudissements.)

Fidel Castro. Ca ne sera pas à la saison des cylcones, pas vrai ? (rires.) On m’a dit que vous deviez arriver hier, mais qu’à cause de cyclones dans l’Atlantique… A quelle heure êtes-vous finalement arrivés ?

Nao Inoue. A cinq heures du matin.

Fidel Castro. A combien navigue le Peace Boat ? (rires.)

Nao Inoue. En gros, à la vitesse d’un vélo rapide (rires).

Fidel Castro. Ca dépend, le champion dépasse 60 km/h… (rires) En ces temps-ci, le Peace Boat doit naviguer plus vite, il est plus urgent de parcourir le monde (applaudissements)

Je dois aussi m’excuser. J’ai appris votre arrivée hier matin, et je me suis mis alors à penser comment avoir une réunion avec vous, parce qu’on m’a dit que vous alliez demander de le faire à quelques-uns. Je me suis dit : Je vais tâcher de les saluer tous. » Mais je ne sais pas à quelle heure vous arriviez. Vous aviez aussi un programme déjà organisé pour la journée. Alors, que faire pour ne pas gêner les autres ni d’autres programmes ? D’où cette réunion si tôt. Nous avons tous dû nous lever tôt… Je ne sais pas où vous étiez, si vous étiez au bastingage pour voir l’entrée de La Havane, ou si vous dormiez… je vous demande donc de m’excuser parce que je suis le coupable que vous ayez dû augmenter notre programme (applaudissements). Alors, nous avons organisé ou plutôt improvisé cette réunion à cette heure-ci, afin que vous puissiez faire toutes les autres activités et que moi je n’aille pas dégrader me relations avec les institutions qui s’occupent de vous. Je crois qu’on nous a donné une heure et demie. J’ai répondu : en fin de compte, ils devaient arriver hier et ils arriveront demain. Souplesse, donc. Le navire allait partir à 17 h, je crois.

Kenia Serrano. L’embarquement à 17 h et le départ à 19 h.

Fidel Castro. Ils allaient appareiller à 19h.

Kenia Serrano. Exact.

Fidel Castro. Oui, les activités se terminaient à 17 h. Si un cyclone a retardé le navire, qu’ils partent ensuite à 21 h ou à 22 h, eh bien ils resteront un moment de plus à La Havane. Ce n’est pas une tragédie. Heureusement, c’est une visite sans guerre. En temps de paix.

Je vous demande donc de m’excuser. Comment cela va-t-il passer ?

Kenia Serrano. comandante, chaque fois que le navire arrive, il a à son bord - l’an dernier et cette année-ci - des survivants d’Hiroshima. Je vous propose donc d’écouter le témoignage de Mme Junko Watanabe.

Junko Watanabe. Avant tout, comandante Fidel Castro, c’est pour moi un grand honneur et un grand plaisir de vous connaître, et j’aimerais aussi vous remercier profondément de nous avoir accueilli si affectueusement.

Je voudrais aussi remercier le peuple cubain de son grand intérêt et de sa grande connaissance d’Hiroshima y Nagasaki. De plus, hier, le Mouvement cubain pour la paix m’a organisé une rencontre de témoignages, et aussi une cérémonie pour la Journée internationale de la paix, et nous avons eu aussi une très belle rencontre à la Maison de l’amitié.

Je suis né à Hiroshima, et je me suis mariée à un Japonais, et je me suis installée au Brésil à vingt-cinq ans et je suis retourné au Japon à trente-huit ans, et c’est alors seulement que j’ai reconnu que j’étais une survivante d’Hiroshima et de Nagasaki.

Je suis né au centre d’Hiroshima, mais durant la seconde guerre mondiale, ma famille avait été évacuée hors de la ville. Je n’avais que deux ans, et je n’ai bien entendu aucun souvenir. Et j’ai été bouleversée d’apprendre par mes parents que j’étais une survivante.

Le 6 août 1945, à 8 h 15, ma maman était dans la cour de la maison avec mon petit frère. Mon grand-frère et moi, on jouait dans un patio d’un temple qui était près de la maison. Alors, ma maman a senti un vent fort, épouvantable, et elle a vu les papiers brûlés qui tombaient devant sa maison. Elle a été surprise, et elle est venue me chercher au temple, et c’est là que nous avons reçu la pluie noire. La pluie était noire et poisseuse.

Avant la bombe, ce 6 août, il y avait du beau temps. On dit que la bombe atomique a explosé à 580 mètres d’altitude.
Fidel Castro. A combien de mètres ?

Junko Watanabe. A 580 m.

Fidel Castro. Une bombe atomique.

Junko Watanabe. Une bombe atomique.

Fidel Castro. A l’uranium, pas au plutonium. Le plutonium, c’est l’autre ville.

Junko Watanabe. Oui, Nagasaki.

Comme elle a explosé plus haut, elle a fait plus de mal avec ses rayonnements chauds et le vent chaud qui ont brûlé les gens. Après, la poussière et les papiers ont commencé à s’élever, et ensuite la pluie noire est tombées avec les radiations.

C’est après la pluie noire que mon corps a subi du mal.

Fidel Castro. Comment ?

Junko Watanabe. Mon corps a souffert, et je vais vous dire comment. J’avais des diarrhées tous les jours, tout ce que je mangeais ressortait, je ne conservais rien, et mes parents pensaient que j’allais mourir. J’avais deux ans, et bien entendu je ne me souviens de rien. C’est quand je suis devenue sexagénaire que j’ai commencé à participer à une association au Brésil. Cent trente-deux survivants d’Hiroshima et de Nagasaki vivent au Brésil.

Fidel Castro. Au Brésil ?

Junko Watanabe. Au Brésil.

Fidel Castro. Ils y sont allés enfants ?

Junko Watanabe. De différents âges.

Fidel Castro. Les parents sont allés avec eux ?

Junko Watanabe. La plupart se sont mariés et ils y sont allés adultes, sans leurs parents. L’âge moyen des survivants est de soixante-quinze ans, ils se font vieux. Et le président de l’Association au Brésil lui a demandé de l’aider, parce que c’est une survivante jeune.

Bien que je sois une survivante, comme je n’avais aucun souvenir, je ne savais rein de la bombe atomique avant d’entrer dans cette Association.

J’ai lu tous les documents rédigés par deux cents survivants d’Hiroshima et de Nagasaki qui vivaient au Brésil et décrivant les réalités d’Hiroshima et de Nagasaki. C’est la première fois que j’ai connu la réalité de la bombe atomique d’Hiroshima. Ils ont décrit une scène très brutale.

J’étais très triste et pleine de rancoeur, je tremblais. J’ai aussi découvert un documentaire filmé par un journaliste japonais. Car, après la bombe atomique, les scientifiques étasuniens ont volé cette information et l’ont ramenée dans leur pays. Ils n’allaient jamais montrer ce film que j’ai trouvé dans un bureau. Il est un peu difficile à voir parce que c’est une très vieille pellicule. J’ai demandé à un ami de le transcrire en DVD.

Nous avons vu ce film à dix amis survivants. Les scènes apparaissant dans ce documentaire étaient trop brutales, et je les ai vues avec beaucoup de tristesse. Hiroshima disparaissait. Les édifices étaient en flammes, totalement incinérés, la ville totalement noire. On voyait aussi les gens qui déambulaient, inconscients. La peau leur pendait des bras. Les yeux sortaient de leur orbite. Les gens étaient inconscients.

Quand j’ai vu le documentaire, j’ai reconnu que j’étais là à ce moment-là . Ce sont des êtres humains qui ont fait ça. Je suis pleine de rancoeur et de tristesse.

Et je me suis mise à penser : nous devons transmettre ces témoignages aux autres générations, et en 2008, j’ai participé au projet Hibakusha de Peace Boat, qui a invité cent survivants à bord, et nous avons voyagé en donnant des témoignages à chaque port. Et j’ai aussi connu d’autres Hibakusha dans le monde.

Au Vietnam, nous avons connu les victimes de l’agent Orange, pendant la guerre, et ce qu’eux-mêmes et leurs parents ont souffert. L’effet se transmet d’une génération à l’autre.

Mon frère aîné avec qui je jouais dans le temple est mort il y a deux ans, à l’âge de soixante-sept ans, d’un cancer du foie. Après avoir reçu la pluie noire, comme moi, il avait des carences osseuses et il était très faible.

Comme je vois les survivants mourir, je m’inquiète de ma santé.
J’aimerais aussi vous présenter une histoire d’origami, qui sont des grues faites de papier et symbole de paix d’abord pour nous, et maintenant dans le monde entier, l’histoire d’une fillette, Sadako Sasaki, morte de leucémie à douze ans.
En mai de cette année-ci, j’ai eu l’occasion de faire la connaissance du frère de Sadako Sasaki, lors de la Conférence sur la non-prolifération des armes nucléaires à New York.

Sadako Sasaki a reçu la pluie noire, comme moi, et elle a grandi normalement jusqu’à dix ans. Après, il a fallu l’hospitaliser. Elle croyait que si elle faisait mille grues de papier, elle allait s’améliorer, et, selon ce que raconte son frère, elle a continué de plier des papiers… A l’époque, nous n’avions aucun papier, et elle utilisait des papiers pour envelopper les médicaments, et elle pliait les grues avec des aiguilles. Elle disait toujours jusqu’à sa mort : « Je veux vivre plus, je veux vivre plus… »

Nous sommes dans la même situation que Sadako Sasaki, nous qui avons reçu la pluie noire à l’âge de deux ans : elle est morte, je survis. Et je sens une grande responsabilité de faire connaître la bombe atomique, les survivants. Les survivants ont d nombreux problèmes physiques et psychiques, jusqu’à leur mort, et nous devons le faire savoir aux autres générations.

Nous avons appris qu’il y a plusieurs types d’Hibakusha, à différents endroits. Par exemple, les indigènes qui tirent l’uranium dans les mines souffrent beaucoup des rayonnements, et les gens qui vivent près des centrales nucléaires. Ces choses, il faut les faire savoir, éduquer les gens.

Quand j’ai participé au projet Hibakusha, voilà deux ans, un Japonais, le directeur du documentaire, qui a couvert mon séjour à bord, puis il a interviewé mon père, qui a quatre-vingt-dix-huit ans, et qui lui a raconté des choses que je ne connaissais pas, et le directeur lui a demandé : « Pourquoi n’avez-vous pas dit la réalité à Junko ? »

Les femmes qui ont subi l’influence de la bombe atomique ont été discriminées et certaines ont eu du mal à se marier. Donc, moi survivante, je n’ai eu aucun problème physique, par bonheur, mais de nombreux médecins disent que l’influence des rayonnements apparaît aussi à une autre génération.

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Fidel Castro. A quel âge votre père est-il décédé ?

Junko Watanabe. Non, il vit encore, il a quatre-vingt-dix-huit ans. Je tiens à vous transmettre les sentiments de mon frère, qui est déjà mort, et le message de tous les survivants, afin que la nouvelle génération transmette notre témoignage aux générations suivantes. Je vais continuer de témoigner. Je vous remercie (applaudissements).

Fidel Castro. Je vous prie de m’excuser si je vous pose des questions, parce que je souhaite vivement qu’on connaisse tout ce que vous racontez. Et si vous n’y voyez pas d’inconvénient, nous retransmettrons cette rencontre à la télévision (applaudissements). Nous souhaitons beaucoup que notre opinion publique connaisse tout ça. Et d’autres pays, aussi. Il est extrêmement important qu’on sache ce qu’il s’est passé là , indépendamment de ce qui a déjà été publié, filmé, et de toutes les choses nouvelles qui apparaissent.

Je vous expliquerai ensuite pourquoi je pose des questions.

Vous racontiez donc que vous étiez dans la cour d’une maison voisine avec votre frère quand l’explosion a eu lieu et a soulevé un nuage de poussière. Vous savez, grâce aux témoignages d’autres personnes, combien de temps cette poussière a mis pour atteindre l’endroit où vous vous trouviez.

Junko Watanabe. Près d’une demi-heure. Mais il n’a pas plu partout, uniquement dans la direction où le vent soufflait.

Fidel Castro. La pluie, oui. La pluie, et des cendres.

Junko Watanabe. Non, il n’y a jamais eu de pluie de cendres : c’est la poussière mêlée à la pluie qui a atteint les gens. Ca n’a pas été quelque chose de séparé, mais tout ensemble à cause de la saleté et de tout ce que l’explosion a entraîné avec elle.

Fidel Castro. Vous n’étiez pas à l’abri, vous étiez dans une cour ?

Junko Watanabe. On était à dix-huit kilomètres de l’endroit où la bombe a explosé.

Fidel Castro. Dix-huit kilomètres !

Interprète. Dix-huit kilomètres.

Fidel Castro. C’est ce que je voulais savoir. Il y a un pont, je crois, qui marque l’endroit où la bombe est tombée. A dix-huit kilomètres. Vos parents étaient à l’abri ?

Junko Watanabe. Ma maman était à l’extérieur de la maison, avec mon petit frère aux bras. Mon papa était à Hiroshima où il travaillait et il rentrait chez nous. Mais il était dans un édifice au moment de l’explosion. Il a même vu l’avion qui tournait autour d’Hiroshima.

Fidel Castro. Avant la bombe, bien sûr. Et votre mère a été brûlée ?

Junko Watanabe. Non. Là où on était, à dix-huit kilomètres, on a reçu toute cette quantité de papiers brûlés, cette vague, ce vent, qui est arrivé jusqu’à nous. Mais pas de brûlure, non. Si on avait été un peu plus de l’épicentre, je ne crois pas qu’on serait ici pour le raconter…

Fidel Castro. Bien entendu. Nous avons reçu tout récemment un chercheur très prestigieux, un professeur émérite de l’université Rutgers, dans le New Jersey, l’auteur de la théorie de l’hiver nucléaire. Et c’est là , de mon point de vue, quelque chose de très important, parce que ça a à voir avec les dangers qui menacent aujourd’hui l’humanité, sans parler de bien des choses qu’on ignore. Ce professeur est donc venu ici et il a exposé sa théorie devant des scientifiques. Une théorie prestigieuse, très solide, au sujet des conséquences d’une guerre atomique. Elle n’aborde pas directement les destructions qu’elle provoquerait, et qui seraient énormes, mais le danger que représenterait pour l’humanité une guerre atomique, pas même mondiale, mais juste régionale.

Cette théorie part du moment actuel, bien différent de celui où la première bombe a explosé. Elle tient compte de la situation actuelle où il existe vingt-cinq mille ogives nucléaires dans le monde. Je suppose que beaucoup de vous le savent. Selon ce scientifique, il suffirait de l’explosion de seulement cent ogives nucléaires pour provoquer ce qu’il appelle l’hiver nucléaire.

Il fonde sa théorie sur une série de recherches faites par des scientifiques étasuniens et soviétiques - avant la disparition de l’URSS - au sujet des effets que produiraient un certain nombre d’explosions nucléaires durant une guerre. Et ils ont calculé qu’il suffirait d’une centaine d’explosions nucléaires pour liquider la vie sur la planète, de sorte qu’une guerre entre l’Inde et le Pakistan, par exemple, compte tenu de la quantité d’armes que possèdent ces deux pays, suffirait à exterminer notre espèce.

Bien que vous ayez sans doute assez de données, nous pouvons vous fournir un exemplaire de la conférence d’Alan Robock - c’est le nom du professeur qui est venu la donner ici même, ce mois-ci. Elle contient des informations très utiles qui devraient vous servir à faire connaître les conséquences d’une guerre, et non seulement les effets directs. De plus, les armes actuelles sont bien plus puissantes, bien plus précises, bien plus rapides. Le pouvoir des armes actuelles équivaut à 140 000 bombes d’Hiroshima ou de Nagasaki. Les deux armes ont été testées, une d’uranium et l’autre de plutonium. On maîtrise maintenant toutes ces technologies et on utilise ces armes avec une précision totale.

Les accords signés entre les grandes puissances n’ont pratiquement aucune valeur parce qu’ils n’aboutissent pas à une réduction réelle des armes.

Si votre organisation entre en contact avec lui, qui est quelqu’un de très généreux, il pourrait vous offrir une conférence sur ce point.

Je lui ai posé des questions sur le nuage. Il affirme en effet - et il le prouve - qu’à la suite des explosions nucléaire, tout prend feu, le bois, tout ce qui provient du pétrole et bien d’autres choses prennent feu et, tout ça, mélangé à la terre, produit de grandes concentrations de poussière. Il a tout étudié : ce qu’il se passerait avec deux bombes, ou dix, ou cent, jusqu’à une limite. Ce nuage de poussières finirait par couvrir la terre dans un délai de moins de trois semaines, je crois, et la température baisserait au-dessous de zéro. Ca impliquerait une nuit de plusieurs mois, qui empêcherait le passage de la lumière solaire. La production d’aliments disparaîtra, et les conséquences sont horribles ; plus de six milliards de personnes se retrouveraient sans aliments, en plus du froid.

Je lui ai posé une question à la fin de son exposé qui a duré une heure, avec des cartes, des graphiques. Ces chercheurs ont étudié tous les effets des éruptions des volcans, et comment la poussière se répand à chaque explosion. Une, toute récente, en Irlande, a crée de sérieux problèmes en Europe. Ils ont étudié aussi les grands incendies qui se déclenchent naturellement ou à la suite d’une guerre ou d’un accident. Alors, je lui ai demandé : « Combien de gens dans le monde savent tout ça ? » Il me dit : « Presque personne. » Je lui demande : « Et dans votre pays,
combien de gens ? » Il me répond : « Très peu. » Je lui dis : « Et comment expliquez-vous ça ? Il faut peut-être chercher des psychologues et des spécialistes d’autres sciences pour expliquer ce phénomène. » Et il me répond : « Je peux vous répondre : ça s’appelle l’état de déni. » Selon lui, quand des choses si horribles peuvent survenir, les gens préfèrent se refuser à le croire.

On pourrait ajouter une autre explication en rapport avec le monopole des médias. Ce qu’il se passe dans le monde est manipulé par les médias modernes, la radio, la télévision, le cinéma, qui soit n’en donnent aucune analyse, soit n’en parlent même pas de sorte que bien des choses sont absolument passées sous silence. Là -dessus, sur ce monopole de l’information, il existe des livres importants. La vérité est mise sous séquestre, on ne la connaît pas. Ce sont là deux phénomènes.

Je lui ai expliqué que je n’étais pas pessimiste à ce sujet, qu’on pouvait conscientiser les gens. Bien entendu, si les masses ne savent pas lire ni écrire, vous ne pouvez même pas le tenter. Mais si la société a un degré élevé de connaissances, comme au Japon, alors vous pouvez créer de la conscience grâce aux médias, pas seulement l’écrit, mais aussi la parole, les images, la musique et d’autres moyens d’expression.

C’est le cas de Cuba, soyez sûrs. Que peut faire quelqu’un qui ne sait pas lire ni écrire ? Mais si les gens ont conclu le primaire et le secondaire, si des centaines de milliers de personnes ont fait des études universitaires, si vous avez de bons professeurs, alors des phénomènes différents se produisent. Notre Révolution ne s’est pas défendue par la force, elle s’est défendue par les connaissances, par la conscience. Comment un petit pays comme Cuba aurait-il pu résister, sinon, à cinquante ans de blocus et de harcèlement ? Les USA pensaient pouvoir nous faire plier ou nous tromper, et ils n’ont pas pu. C’est là une preuve qu’on peut créer de la conscience. En effet, si nous renonçons à l’idée qu’il est possible de conscientiser les gens, à quoi alors votre travail à vous ? Parce que vous parcourez le monde et vous expliquez, vous faites entendre le témoignage de gens qui ont vécu ça de près et qui racontent des choses absolument déchirantes. Je m’explique mieux le rôle que vous jouez, parce que ce sont des choses que vous avez senties dans votre chair, que des personnes ont vraiment vécues.

Je suis allé à Hiroshima, j’ai visité le musée. On m’y a tout expliqué : ce qui a résisté, ce qui n’a pas résisté… Et l’un des images horribles de cette tragédie humaine, ce sont ces enfants qui n’étaient pas encore nés, ces mères enceintes qui allaient accoucher dans un mois, deux mois, trois mois. Ces images sont bouleversantes. Et elles peuvent toucher les gens. On est maintenant bien plus conscient de tout ça, mais il reste encore beaucoup à faire. Le fait est que l’humanité est menacée de quelque chose d’aussi horrible que ce que vous avez raconté, voire plus bien horrible, parce que votre témoignage est celui de gens qui ont été victimes d’une seule bombe, qui ont été brûlées, qui ont reçu des lésions ou des radiations, et qui ont survécu plus de cinquante ans, soixante-cinq ans exactement. Aujourd’hui, des milliers de bombes bien plus puissantes et précises menacent toute l’humanité.

Selon ce scientifique, plus un pays possède d’armes nucléaires et moins il aura de possibilités de paix et de sécurité. Il est partisan de la destruction de toutes les armes atomiques. Je vais, moi, un peu plus loin : si on détruit les armes atomiques et pas les armes classiques, ça ne change pas grand-chose. Car le pouvoir destructeur de ces armes classiques est énorme. Un bombe à fragments de tungstène dans une ogive lourde, non nucléaire, atteint une vitesse dans l’espace de 25 000 km/h, plus de vingt fois la vitesse du son, et retombe ensuite à une vitesse d’au moins 20 000 km/h. Tout ce qui trouve dans une zone donnée est absolument détruit. Il ne reste plus rien d’un poste de commandement, d’un gouvernement, de la cible visé. Ca, on le sait. La dernière guerre mondiale a causé 50 millions de morts, rien qu’avec des armes classiques, sans parler des victimes et des dommages humains provoqués par les deux bombes atomiques qui ont fait plus de 150 000 morts et causé des blessures à bien plus de gens, brûlures, irradiations, et bien d’autres dommages. Durant cette guerre, les destructions, la faim, les maladies ont touché une grande partie du monde. Et si une autre guerre mondiale éclate, ça sera la dernière, il n’y en aura plus d’autre. Einstein l’a dit : même si on ne sait pas comment sera une guerre mondiale à l’âge atomique, on sait en tout cas que la suivante se fera avec des arcs et des flèches…

J’ai ici une lettre que m’a adressée Robock, ce scientifique, dans laquelle il répond à une question que je lui ai posée quand il était déjà à l’aéroport pour rentrer chez lui. Durant sa conférence, il avait parlé de Mars, je lui ai téléphoné pour lui demander où je pouvais trouver des renseignements sur cette planète. Il m’a expliqué que Mars n’avait pas d’atmosphère, à cause de son peu de grosseur, ce que j’ignorais. Il m’a promis de m’envoyer l’information, ce qu’il a fait deux ou trois jour plus tard. « Mars possède une atmosphère bien moins épaisse que la Terre, avec seulement 7 p. 100 d’air…, ce qui équivaut à la densité de l’air de la Terre à vingt et un kilomètres d’altitude. L’atmosphère de Mars est composée en sa quasi-totalité de dioxyde de carbone. »

Tout ceci a à voir avec les effets des explosions nucléaires, avec les conséquences sur le climat. Qu’a-t-on dit de l’environnement, des changements climatiques ? Ce grave problème n’existe-t-il donc pas ? N’a-t-on pas fait des recherches là -dessus ? N’existe-t-il pas un excellent documentaire élaboré avec la coopération des scientifiques les plus éminents sur les changements climatiques, sur leurs effets sur la pluie, l’économie, la vie des êtres humains ? Tout ceci a été étudié comme un seconde conséquence des changements climatiques. Bref, pas la peine d’attendre une guerre nucléaire pour voir la vie disparaître de notre planète. Je le répète : voir la vie disparaître de notre planète.

L’économie et la vie des nations se fondent aujourd’hui sur la consommation de matières premières non renouvelables, dont la plus importante est le pétrole consommé à raison de presque cent millions de barils par jour. Or, le pétrole a mis environ 400 millions d’années à se former à partir de la matière vivante, tout comme le gaz et le charbon. Et en combien de temps l’homme a-t-il consommé la moitié du pétrole que la Nature a accumulé pendant ces 400 millions d’années ? En à peine cent trente ans ! Et sa consommation cause des effets terribles à l’environnement. Elle produit du dioxyde de carbone, qui abonde justement dans l’atmosphère de Mars. Ce sont là des faits que l’humanité doit connaître, auxquelles elle doit faire face et qu’elle doit régler. Sa survie est à ce prix.

La population ne peut grandir indéfiniment, car notre planète a des limites. Si j’ai bonne mémoire, la Terre comptera plus de neuf milliards d’habitants en 2050. Elle n’en comptait qu’un milliard voilà deux cent ans. Les conséquences de cette croissance démographique sur l’eau, les aliments, l’énergie, les matières premières sont vraiment extraordinaires.

Le Japon a une surface bien limitée par rapport à sa population qui se monte, que je sache, à cent trente millions de personnes. On dit que c’est la nation où la moyenne de vie est la plus élevée, avec une population d’une culture élevée, qui se stabilisera autour de cent millions d’habitants. Il est donc possible de faire en sorte que la population se stabilise.

Un de vos voisins, la Chine, applique une politique démographique rigoureuse. Sans ça, elle compterait aujourd’hui environ trois milliards d’habitants. La Chine et l’Inde comptent à eux deux presque la moitié des habitants de notre planète.

Ce sont là des réalités. Et les gens doivent avoir le courage de faire face aux réalités, de les connaître, comme vous le faites vous-mêmes au sujet des terribles conséquences des explosions nucléaires. Ceux qui naîtront doivent jouir de conditions indispensables, d’une vie naturelle et aussi pleine que possible. Ce n’est pas ce qu’il se passe. De huit à dix millions de personnes meurent tous les ans de faim et de maladies non soignées. Qui en parle ? Quelques scientifiques et quelques politiques. C’est à peine si on parle de ça ; en tout cas, ce n’est pas un thème qui intéresse les grandes transnationales.

Je sais que vous nous avez demandé de vous envoyer un médecin ayant une expérience internationaliste. Nous en avons des milliers, dans de nombreux pays. Vous seriez surpris de savoir ce que notre petit pays peut faire pour d’autres peuples. Et ce ne sont pas des tâches irréalisables.

Matsumi Matsumura. comandante, au sujet de cet internationaliste…

Fidel Castro. Il est dans la salle ?

Matsumi Matsumura. Oui.

Fidel Castro. Où donc ? Lève la main pour qu’0n te voie. On m’a dit que tu as été en Haïti…

Matsumi Matsumura. Le docteur Liván Torero a travaillé beaucoup en Haïi et nous l’avons invité sur notre bateau de la paix pour qu’il nous parle de son expérience. A côté de lui, il y a José Ramón, un danseur de salsa, car il est tres important pour nous de connaître votre culture ; je crois que c’est une danse traditionnelle et nous avons beaucoup appris là -dessus. Je vous remercie vraiment beaucoup de nous avoir invités (applaudissements).

Fidel Castro. C’est moi qui vous remercie. J’en ai parlé parce que je sais ce que font nos médecins en Haïti, comme une preuve de ce que peut la conscience.

En Bolivie, nous avons presque deux mille médecins à bien des endroits. En Équateur, qui compte quinze millions d’habitants, ils contribuent à des recherches et à soigner tous ceux qui souffrent de problèmes génétiques ou autres, qui sont invalides ou handicapés, qui sont nés aveugles ou sourds. Si un enfant ne peut entendre, il reste muet ; s’il n’entend pas les sons, il ne peut les émettre. De nombreux problèmes peuvent se solutionner par un petit appareil, qui leur permet de parler et de communiquer.

Les sourds et aveugles de naissance, là , c’est plus compliqué. Comment est la vie d’une personne aveugle et sourd-muette, de quelqu’un qui n’a jamais entendu ni vu ?

Je connais les résultats obtenus par implants cochléaire : les enfants apprennent à écouter, à parler, à écouter de la musique, à connaître le monde, leur vie change.

Je crois que la société devait le faire savoir aux parents, tâcher de les avertir des dangers, leur faire comprendre que dans des circonstances données, ils ne devraient pas avoir de descendants. Chaque être humain doit venir au monde avec toutes ses potentialités. Si, pour une raison quelconque, un enfant naît avec des déficiences vitales non héréditaires, il faut faire l’impossible pour enrichir sa vie. Ceux qui ne peuvent pas être vraiment alimentés, ce qui ne peuvent être éduqués, avoir une vie normale, une vie qu’il vaut la peine de vivre, ne devaient pas être conçus, tout simplement.

Je sais que tout le monde ne pense pas pareil, qu’il existe des influences religieuses, et je les respecte. Mais je donne mon opinion franchement, et j’explique pourquoi. Pour le genre humain, aujourd’hui, il s’agit vraiment du fameux dilemme : être ou ne pas être, et si notre espèce va survivre, car elle a causé bien du mal aux êtres vivants. Depuis que l’intelligence humaine est apparue, elle a tout chamboulé, et elle a constitué à ce jour une tragédie pour la Nature. Et les armes atomiques risquent de causer un problème aussi grave que le fameux astéroïde qui est tombé, dit-on, dans l’isthme de Tehuantepec, au Mexique, voilà des dizaines de millions d’années et qui provoqué un hiver prolongé.

Aucune autre espèce n’a fait ça. Les autres ont maintenu l’équilibre avec la Nature durant des milliards d’années, environ quatre milliards. L’homme est nouveau. Il est apparu voilà à peine deux cent mille ans comme espèce pensante. Encore que… pensante, c’est encore à prouver. Sera-t-elle capable de survivre ? Pardonnez-moi d’être un peu dur contre nos insanités.

Bref, tous ces problèmes se combinent, et il me semble qu’il faut lutter contre eux tous pour gagner la bataille qui doit être l’objectif des être humains. Alors, on pourra peut-être créer des choses merveilleuses.

Combien de gens bien formés du point de vue scientifique, combien de sommités y a-t-il dans le monde ? Aux USA, 80 p. 100 des ingénieurs travaillent dans le domaine militaire, pour créer la science et les moyens permettant de détruire et de tuer, dans le cadre d’un système perfide qui les a conduits à cette destinée.

Nous aspirons à ce que les personnes atteignent des niveaux intellectuels élevés. Par hasard, juste avant de venir, j’ai lu un bulletin de nouvelles et j’ai vu que Cuba occupait la première place au monde en pourcentage d’étudiants inscrits. Le Venezuela occupe le cinquième rang ; la Corée vient en second, la Finlande en troisième, la Grèce en quatrième ; les USA, en sixième.

J’ai mentionné le médecin. Ces hommes et ces femmes - la majorité sont des femmes - travaillent en Bolivie, au Nicaragua, au Venezuela, dans bien des pays du Tiers-monde. Pourquoi ? Ils sont étonnants : ils rentrent pour quinze jours de congés et ils brûlent d’envie de repartir. Ils pensent à leurs patients, et il faut voir comment ceux-ci en parlent. C’est là un produit de la conscience. Et la conscience, vous ne l’achetez nulle part, elle ne s’échange pas pour de l’argent.

Ce que font nos compagnons en Haïti est un fruit de la conscience. Voilà pourquoi je me permets d’en parler, car c’est la conscience qui a permis de faire la Révolution, de résister, indépendamment des critiques qu’on nous fait ou des erreurs que nous ayons commises, car aucune oeuvre humaine n’est parfaite. Nous n’avons pas du tout peur de parler de nos erreurs. Ce qui est impardonnable, c’est d’oeuvrer sciemment au détriment d’autrui.

Aucune oeuvre humaine n’est parfaite, mais nous croyons en elle. Sinon, nous ne ferions pas ce que nous faisons. Et ce que vous faites si noblement.

Je regrette de vous avoir pris tant de temps.

Matsumi Matsumura. comandante, nous avons été avec une brigade qui travaillait à Shihan et nous avons eu l’occasion de connaître les familles des Cinq Héros, sur lesquels nous avons beaucoup appris. A bord, nous avons aussi continué d’apprendre.

Comme vous venez de le dire, le 12 septembre a marqué le douzième anniversaire de l’arrestation des Cinq Héros, et nous, les membres du Peace Boat, nous voulons qu’ils soient libérés le plus tôt possible, et nous promettons de soutenir cette campagne depuis le Japon (applaudissements).

Vous avez aussi mentionné les systèmes d’éducation et de santé à Cuba. De nombreuses organisations nous attendent après notre séjour ici, et il serait bon que nous ayons plus de temps pour que les peuples japonais et cubain se connaissent mieux. Que vous en semble ?

Fidel Castro. C’est un moment important. On discute aux Nations Unies - je sais que vous faites partie du Conseil économique et social - les objectifs du Millénaire dans le cadre d’une conférence avant le début du débat général. Les Nations Unies sont censément tout ce que nous avons, je dis censément parce que parfois elles ne semblent même pas exister. On a beau discuter en effet des problèmes du développement, des objectifs de développement, en santé, en éducation, ces objectifs sont de moins en moins atteints. Au contraire, à chaque crise, on constate un recul.

Le pouvoir d’achat des Étasuniens a diminué de 43,6 p. 100. Vous imaginez une économie où, soudain, on cesse d’acheter une bonne partie des services, des productions de l’industrie, etc., et le chômage que ça provoque.

Nous devons, hélas, collecter de nombreuses informations sur les USA, et je peux vous assurer que c’est un désastre. C’est une « grande démocratie », mais avec 12 000 lobbyistes au Congrès qui oeuvrent pour les transnationales et qui coûtent 3,5 milliards de dollars par an. Ce sont de mesures de temps passés qui ont incroyablement dégénéré. Résultat ? Toutes les grandes entreprises contrôlent et manipulent le Congrès qui a la faculté de ratifier les accords ou d’adopter des budgets et des lois. Par exemple, il doit accepter un éventuel accord de désarmement ou de réductions des armes atomiques, indépendamment de sa maigre portée.

Personne ne sait plus très bien quel est le rôle d’un président aux USA. Bien souvent, il ne peut rien faire, et c’est pourtant celui qui trimballe l’attaché-case nucléaire dont personne ne sait exactement à quoi il sert. A l’époque d’Hiroshima et de Nagasaki, il n’existait que deux bombes, qu’un président médiocre et ignorant a décidé de larguer. Je suis sûr que Roosevelt ne l’aurait pas fait, c’est quelqu’un de différent, un capitaliste, bien entendu, le chef de l’État capitaliste et impérialiste le plus riche, mais possédant une bonne éducation, un morale politique, moins identifié personnellement aux grandes fortunes. Son successeur n’a même pas informé ses alliés soviétiques que les USA possédaient la bombe. Et le plus cruel, c’est qu’il n’y avait aucun besoin d’utiliser cette bombe. C’est prouvé par l’Histoire. Le gros des forces impériales nippones, concentrées en Mandchourie, était totalement défait. Le gouvernement militariste japonais ne pouvait pas survivre longtemps. Pour remporter la victoire déjà aux mains des alliés, il n’y avait pas besoin de larguer ces bombes. On peut même alléguer qu’il s’agissait d’éviter des morts, car les forces soviétiques avançaient d’une manière irrésistible en Mandchourie et la fin de la guerre était une question de jours.

S’il fallait un prétexte croyable, alors pourquoi n’ont-ils pas largué les deux bombes sur des installations ou des bases militaires ? Pourquoi sur la population civile ? Pourquoi cette décision de tuer plus de cent mille personnes et de causer tant de souffrances ? Car ils savaient pertinemment ce qu’était la bombe. Voilà quelques jours, j’ai vu un film où apparaît l’avion porteur de la bombe qui avait été baptisé du nom de la mère du pilote. Voyez un peu quel orgueil ! Quel honneur ! Comment peut donner le nom de sa mère à l’avion porteur de la bombe qui a tué plus de cent mille personnes en quelques minutes ?

C’a été un acte cruel, une expérimentation inqualifiable au prix de la souffrance de centaines de milliers de personnes sans défense qui n’avaient aucune faute de cette guerre.

Junko a dit que vous étiez allés au Vietnam pour vérifier les effets de l’agent orange. Combien d’enfants, combien de millions de Vietnamiens sont morts dans cette guerre ? De quatre à cinq millions. Combien sont restés invalides à cause de ces produits chimiques ? Les USA ont utilisé les armes chimiques dans une autre guerre, quand ils en ont fourni à l’Iraq durant sa guerre contre l’Iran. L’administration étasunienne a aussi employé des armes bactériologiques, en particulier contre Cuba. Elle utilise aussi du phosphore blanc et des bombes de fragmentation, le napalm et d’autres moyens semblables à travers ses alliés.

Le président a la faculté de lancer l’arme nucléaire ou de lancer une guerre. Une fois la guerre déclenchée… Et ça a une importance spéciale, parce qu’il existe un danger de guerre réelle, et de guerre nucléaire. Nous savons tous ce qu’il se passe en Iran, qu’il existe des menaces contre l’Iran parce qu’il traite de l’uranium. Personne n’a pu prouver que les Iraniens préparent une bombe atomique ni qu’ils se proposent de le faire. Ils possèdent des centres de recherche, comme bien d’autres pays, de sorte qu’une quarantaine de pays pourraient fabriquer une bombe atomique à partir d’uranium enrichi. Les Iraniens possèdent donc des centres de recherche, des centrales électriques fonctionnant au combustible nucléaire. C’est d’une centrale électrique utilisant cette énergie que sort la matière première pour le plutonium qui a servi pour l’arme utilisée contre Nagasaki. Les Russes ont signé un accord : ils fournissent l’uranium, les Iraniens le consomment pour produire de l’électricité et les Russes remportent ce qu’il reste une fois l’électricité produite.

La situation est très dangereuse. Il existe une escadre USA-Israël face aux côtes iraniennes, et les USA ont fait adopter des accords au Conseil de sécurité, à partir de calculs erronés. Ils pensent pouvoir faire plier l’Iran. Mais ils ne vont pas y parvenir, à mon avis, et ils n’obtiendront rien par la force.

Israël a fait des programmes, il est maintenant, pourrait-on dire, la cinquième puissance nucléaire au monde. Et il est décidé à agir. Il l’a déjà fait contre l’Iraq dont il a attaqué le centre de recherche nucléaire ; il a fait pareil contre la Syrie, en 2007. L’Iraq, c’était dans les années 80. Selon des articles de journalistes bien informés et des déclarations de ses dirigeants, on sait qu’Israël est décidé, si les Étasuniens n’attaquent pas l’Iran, à le faire pour son compte, à détruire ses centres de recherche, les usines qui fonctionnent ou qui sont sur le point de fonctionner pour produire de l’électricité.

J’ai écrit sur tout ça, sur les dangers d’une guerre dans cette région. J’avait écrit vingt-six Réflexions avec la dernière où j’ai parlé des Roms, un autre des groupes ethniques exterminés dans les camps de concentration nazis, où les principales victimes ont été les juifs, les Roms et les Russes, au nom de la cynique doctrine hitlérienne de l’espace vital.

J’ai mes vues sur tout ceci. Je n’ai jamais hésité à condamner l’Holocauste en tant qu’acte cruel. Ceci est une chose, et une autre l’interventionnisme et les plans bellicistes d’Israël.

Tous ces problèmes existent. Je vous recommande de prêter attention à tout ceci. Je ne sais quels documents nous pouvons vous envoyer… peut-être les Réflexions que j’ai publiées sur ce point. Combien de traducteurs de japonais avons-nous ?

Kenia Serrano. Pas beaucoup, mais ils peuvent aider à les traduire.

Fidel Castro. Nous allons aussi vous envoyer la conférence de Robock et d’autres documents. Nous pouvons coopérer modestement avec vous. Vous avez sûrement le film intitulé Home, du cinéaste français Yann Arthus-Bertrand, sur l’environnement. Une des meilleurs sur ce point.

Si on attaque l’Iran pour détruire ses réacteurs, la guerre deviendra nucléaire, tout simplement parce que les Iraniens ont mis au point des armes classiques défensives, des avions télécommandés, des centaines de lance-missile. Pas un seul navire de surface ne resterait intact ; il pourrait se défendre d’un ou deux projectiles, mais pas de nombreux projectiles à la fois. Vous imaginez la situation ? Si les agresseurs sous-estiment les Iraniens et attaquent ces endroits, ils vont souffrir de très lourdes pertes ; ils savent qu’une guerre interminable débuterait. Qui va contrôler une situation pareille ? Il est facile d’émettre un ordre d’attaque, toutes les guerres ont commencé comme ça, mais ce serait la dernière, à mon avis, parce qu’elle va devenir forcément nucléaire. J’espère me tromper, mais c’est un des dangers à court terne que je juge imminent.

Comme je vous le disais, nous sommes prêts à collaborer modestement et nous vous remercions d’avance de toutes les nouvelles que vous pourriez nous adresser. Et si vous revenez et que nous ayons du temps, autrement dit si je ne vous interromps pas, nous nous réunirons de nouveau. Je vous le promets. Je vous remercie (applaudissements).

Nao Inoue.- Nous aussi. Nous avons beaucoup appris. Pour connaître la réalité de La Havane, - de fait, nous venons d’arriver et nous ne connaissons guère que le terminal maritime - nous allons la visiter, pour connaître les travaux que font les Cubains, pour voir directement de nos yeux ce que vous faites. Oui, vraiment, merci beaucoup.

Fidel Castro. Vous n’allez pas directement au Nicaragua, n’est-ce pas ?

Matsumi Matsumura. Nous passons par la Jamaïque, nous prenons le canal de Panama et ensuite nous allons à Corinto, au Nicaragua.

J’aimerais vous présenter un invité très important, le ministre nicaraguayen de la Culture, M. Luis Mora (applaudissements).

Fidel Castro. Il est venu avec vous ou vous a-t-il attendu ici ?

Luis Mora. Je suis venu à La Havane pour monter à bord.

Fidel Castro. Mais tu vas à la Jamaïque ?

Luis Mora. Au Nicaragua, à Corinto.

Fidel Castro. Et qui est l’autre ?

Luis Mora. Nous sommes heureux d’être avec vous et de vous adresser les saluts de Daniel et de Rosario, du peuple nicaraguayen au peuple cubain que nous aimons tant et qui nous a tant aidés.

Fidel Castro. Je vous remercie.

Luis Mora. Bien sûr, bien sûr.

Matsumi Matsumura. Merci infiniment. Il a à ses côtés comme conseiller, M. John Hopkison, de la partie caribéenne.

Interprète. De la partie caribéenne du Nicaragua.

John Hopkison. Oui, de Bluefields, dont vous avez arpenté les rues voilà bien des années.

Fidel Castro. Oui, je m’en réjouis beaucoup (applaudissements).

Nao Inoue. Voici une cloche dont nous espérons qu’il sortira un vent pacifique et un son pacifique. (Il lui remet une cloche.) J’aimerais aussi vous faire cadeau d’une maquette de notre Peace Boat, ancré maintenant à La Havane, l’Oceanic.

Kenia Serrano. Leur navire de croisière, le SOS Oceanic, bat pavillon panaméen.

Fidel Castro. Parfait, je vais le garder.

Nao Inoue. Nous vous remercions vraiment beaucoup de nous avoir reçus. Nous nous sommes engagés à poursuivre nos activités et surtout à collaborer avec l’ICAP qui nous a toujours aidés dans des programmes et des échanges. Sa presidente, Kenia, et sa vice-présidente Alicia Corredera, nous appuient toujours. comandante, je vous remercie beaucoup (applaudissements).

(On lui remet des cadeaux.)

Fidel Castro. Je vous ai pris une heure de plus, mais j’espère que vous pourrez remplir votre programme. A cause de moi, vous allez partir une heure en retard (rires et applaudissements).

* * * *

La réunion a conclu là . J’ai été objectif en tout. On constatera que j’ai dit que Roosevelt n’aurait pas lancé les bombes atomiques. C’était un antifasciste sincère. Dans le cadre du système économique et politique de son pays, loin de réduire les impôts pour les riches, pour les millionnaires, il les a élevés, ce qui explique pourquoi la droite le haïssait. Cette droite, c’est Harry Truman qui la représentait.

Le monde devrait réfléchir sur le message qu’il a adressé par la radio à la nation, le 9 août 1945 : « Le monde saura que la première bombe atomique a été larguée sur une base militaire d’Hiroshima. Et ce, parce que nous souhaitions éviter dans cette première attaque, dans la mesure du possible, d’assassiner des civils… »

Or, il n’existait aucune base militaire à Hiroshima. Le point choisi a été un petit pont en pleine ville.

Raconter ce mensonge était d’un cynisme répugnant. Truman était parfaitement au courant du pouvoir destructeur de cette arme.

Le 6 août dernier, pour le soixante-cinquième anniversaire de ce crime monstrueux, le chercheur canadien Michel Chossudovsky a reproduit ce que Truman avait écrit dans son journal, onze jours avant le largage de la bombe : « Nous avons découvert la bombe la plus terrible dans l’histoire du monde. Ce pourrait être la destruction par le feu prédite dans la vallée de l’Euphrate, après l’arche de Noé… Cette arme va être utilisée contre le Japon... Nous l’utiliserons afin que les objectifs militaires et les soldats et les marins soient la cible, non les femmes et les enfants. Même si les Japonais sont des sauvages, impitoyables et fanatiques, nous autres, comme leaders du monde… nous ne pouvons pas laisser tomber cette bombe terrible sur la vieille capitale ou sur la nouvelle… La cible sera uniquement militaire… C’est peut-être la découverte la plus terrible jamais faite, mais ça peut être la plus utile. »

Ce fut sans aucun doute le pire assassinat, et le plus cynique, de l’Histoire.

Fidel Castro Ruz

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