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Soudain, joyeux, il dit : "Grouchy !" - C’était Blücher" (Victor Hugo, les Châtiments)

Kerry, Harris, Cazeneuve, prédirent-ils : ce furent Bush, Trump, Bayrou

Guillaume CONSTANS

Christine Ockrent a été une des intervenantes lors des récentes élections présidentielles américaines de 2024.

Cela m’a rappelé une anecdote d’il y a 20 ans : l’élection présidentielle américaine de 2004.

Dans la nuit du 2 au 3 novembre 2004, j’ai suivi la présentation donnée à la télévision du déroulement des élections.

Sur France 2, Christine Ockrent était la responsable de l’émission.

(Je regretterai toujours de ne pas avoir eu l’idée de l’enregistrer - j’ai pensé en faire un résumé dès le
lendemain mais je l’ai perdu, j’essaye donc d’en rendre compte le plus fidèlement possible en
utilisant ma mémoire).

D’entrée, elle dit : nous pouvons vous assurer sans trop d’erreurs que John Kerry est le vainqueur
des élections.

Voici la justification qu’elle a donnée :

Le dépouillement est quasiment fini, on n’attend plus que les résultats de l’ État de l’Ohio qui
comporte 20 grands électeurs. (à l’époque, je crois qu’aujourd’hui c’est 18).

La différence de nombre de grands électeurs entre les 2 candidats étant inférieur à 20, celui qui
gagne l’Ohio est assuré de gagner l’élection (Winner take all). (Jusque-là, rien à dire) Elle précise : John Kerry peut donc rattraper son retard en gagnant l’Ohio (petite alerte, on nous
présente un potentiel vainqueur qui a du retard !).

Elle relate : en l’état actuel des dépouillements, dans l’Ohio, le retard de John Kerry sur George W
Bush n’est que de 25 000 voix et il reste 40 000 voix (*) à dépouiller dans des secteurs reconnus
favorables à John Kerry.

Elle affirme la victoire du candidat en retard sur les grands électeurs et en retard sur le
dépouillement du dernier état en attente !!!

Or, par les chiffres qu’elle donne elle-même, la victoire de John Kerry est tout simplement
impossible !

Explication :

Dans les 40 000 bulletins restant à dépouiller, soient A le nombre de voix obtenues par John Kerry
et B celui de voix obtenues par Georges Bush, on doit avoir

A supérieur ou égal à B + 25 000, alors que A + B = 40 000
d’où dans le cas minimum :
A + B = 40 000
A - B = 25 000


d’où 2 A = 65 000
Donc : A = 32 500, c’est-à-dire 32 500\40 000 = 81,25% des voix restant à dépouiller !
Ce sont des pourcentages d’une république bananière.

(*) Je ne sais plus quels étaient les chiffres exacts mais étaient de la même grandeur et aboutissaient
au même résultat, à savoir une proportion de A de plus de 80 % par rapport aux bulletins à
dépouiller).

Sur le plateau de l’émission, il y avait des hommes politiques, des journalistes, des artistes, des
professeurs d’université, des vedettes des médias, des juristes, etc. dissertant de manière brillante et
décontractée. Aucun ne contestait les conclusions de Christine Ockrent.

Je me souviens en particulier du professeur d’économie de Paris Dauphine, Jean-Marie Chevalier,
expliquant doctement ce qui allait changer dans la politique des États-Unis à la suite de l’élection de John Kerry.

France 2 avait des envoyés spéciaux sur place aux États-Unis dont Mémona Hintermann. Le ton
était le même qu’à Paris. On racontait que Georges W Bush, conscient de l’échec de sa réélection,
était passé en rasant les murs au siège du parti américain. Alors que, au siège du parti démocrate
(Boston ?), on commençait à déboucher les bouteilles de champagne ...

À la fin de l’émission, Christine Ockrent avait dit (dans un éclair de lucidité ou par prudence ?) :
"Espérons que nous n’allons pas vivre les mêmes déconvenues d’il y a 4 ans. Nous nous étions
endormis persuadés qu’Al Gore serait élu et nous nous étions réveillés avec l’élection de Georges W
Bush".

Je suis allé alors sur France 3 : la tonalité était la même, ils s’attendaient à la victoire de John Kerry
Nouveau zapping pour aller sur TF1. Surprise : je suis tombé sur LCI.

(Lorsque, en 1986, le canal de la première chaîne avait été attribué à TF1, le cahier des charges
imposait que 4 heures devaient être consacrées à la culture chaque jour, mais sans contrainte sur les
horaires, ce qui fait qu’elles étaient diffusées la nuit ...).

On interviewait un juriste, habillé de façon très fantaisiste, avec un superbe nœud papillon. il était
très souriant et pétillant de malice (j’ai retrouvé son nom grâce à Internet, il s’agit de Sébastien
Canévet) et disait :

"Je serais très prudent avec les résultats de l’Ohio, car c’est un État Reagan-démocrate."

C’était et ce sera la seule opinion réservée que j’aurais entendu ce soir-là, où j’ai appris ce qu’était un
État Reagan-démocrate. Sont qualifiés ainsi les États classés démocrates mais qui avaient voté
Ronald Reagan en 1980 et 1984.

Entendu le lendemain matin, aux journaux de France Inter :

À celui de 7 h : le résultat des élections présidentielles américaines est toujours incertain.
À celui de 8 h : John Kerry reconnaît sa défaite.

Bilan : non seulement George W. Bush l’avait emporté largement en Ohio mais :
George W. Bush avait obtenu 62 061 268 voix, soit 50,73 % du total et 286 grands électeurs. John Kerry avait obtenu 59 028 548 voix, soit 48,27% du total et 252 grands électeurs. La différence de voix entre les 2 candidats, 3 012 720, était un record pour l’époque. (1)

Je n’ai entendu aucune excuse de la part des spécialistes de commentaires aussi désastreux. Au contraire, la télévision est bonne mère et a proposé, 20 ans après ce naufrage, un poste à Christine Ockrent pour commenter les élections à venir.

Note (1) À titre de comparaison :

Donald Trump a obtenu 77 209 255 voix, soit 49,9% du total et 312 grands électeurs.
Kamala Harris a obtenu 74 983 555 voix, soit 48,4% du total et 226 grands électeurs.
La différence de voix entre les 2 candidats est de 2 225 700, donc inférieure à celle entre George W.
Bush et John Kerry.

Guillaume CONSTANS
Toulouse. Samedi 14 décembre 2024.

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COMMENTAIRES  

15/12/2024 10:15 par xiao pignouf

Ces gens-là ne prédisent rien, ni en France ni ailleurs. Ils prennent juste leurs désirs pour des réalités. Les Démocrates américains, pour leur vernis pseudo progressiste, ont toujours eu les faveurs de la bourgeoisie médiatique française qui croit ainsi renvoyer d’elle une image honorable, humaniste... « démocrate » quand en France elle promeut le fascisme mou de Macron.

Ces grands reporters n’ont de journalistes que le nom. Ils n’informent plus, côtoient les grands patrons à qui ils obéissent.

D’un point de vue purement journalistique, ils pantouflent, se contentant de reprendre les dépêches et travaillent davantage le bon mot, la bonne accroche, le calembour plutôt que la vérité.

15/12/2024 13:18 par Vincent

C’est juste un moyen de formater l’opinion bien-pensante de la majorité conformiste : Les gentils/les méchants ; oh ! non les gentils ont perdu ! tout ça.
Les "journalistes" sont (étaient) des influenceurs avant l’heure. Autrement dit : des p.tes, quoi.

Voyez plutôt avec cet exemple qui n’a rien à voir avec les pseudo-prédictions des crétins utiles :
Sur Arte, dans "Le dessous des cartes", quand elle parle des évènements en Syrie, Émilie Aubry la présentatrice diplômée de Sciences-Po et petite bourgeoise pistonnée, parle de Bachar al Assad en disant "Bachar".
C’est simplement grossier. Inacceptable.
Mais c’est ce que font les médias démocrates étasuniens bien-pensants qui fabriquent globalement l’opinion et les lignes éditoriales, qui disaient aussi "Saddam", par exemple.

Pourtant chez nous on ne disait pas "George" pour parler de Bush, pas plus que "Francisco" pour parler de Franco, ni "Joseph" pour parler de Staline, ni "Nico" pour Ceausescu ou Sarko, etc.
Et on ne dit pas "Manu" pour désigner l’actuel dictateur en poste, en tout cas pas sur Arte, bon sang !

Pour nommer quelqu’un qui n’est pas mort, on emploie Monsieur et le patronyme, ou son prénom et son nom, ou alors son titre avant son nom.
Quand on est poli ou bien élevé, ou quand on a fait Sciences-Po en bon petit-bourgeois qui se respecte, on n’emploie le patronyme seul que lorsque la personne est décédée. Je dis ça comme ça, au passage.
Donc cette sotte surpayée devrait dire "Monsieur al Assad", ou "Bachar al Assad", ou "Le Président Assad".
Ici, dire "Bachar" est juste une insulte, et elle le sait parfaitement.
Son émission est donc, à plus d’un titre, une énième bouse télévisuelle à l’usage des bourgeois vulgaires, incultes mais bien-pensants qui la regardent, et qui répètent tous en chœur : "Bachar, Bachar, bachar".

Seulement voilà : Même notre ancien brillant MAE et aujourd’hui Président du Conseil Constitutionnel, garant et phare des "valeurs" la République, disait : "Bachar ne mérite pas d’être sur Terre".
Le statut et le poste occupé par cet individu inculte et vulgaire là, démontre autrement l’ampleur et la gravité du problème.

Donc si vos prévisionnistes de plateau sont simplement devenus aussi débiles que des "journalistes" étasuniens moyens à force de les singer, je tenais quand même à rappeler que nos dirigeants sont devenus tout aussi dangereusement et vulgairement débiles à force de se soumettre à leur maîtres étasuniens incultes, cyniques et profondément débiles.
Tout machisme mis à part, la vraie gravité du problème se situerait donc ici peut-être plus du côté de l’impunité de Monsieur Kouchner pour sa proximité avec les néocons. qui s’apparente à de la haute trahison, et ses actions autour du "droit d’ingérence" (on reparle du Kosovo, du trafic d’organes, etc. ? Mmmm ?) que du côté de son ex-influenceuse obsolète d’épouse.

17/12/2024 19:15 par Josy

C’est un bon résumé des habitudes expertes des journaleux et commentateurs élites du pays .On peut s’en dispenser .
Il est toutefois nécessaire de le porter à la conscience des citoyens qui entendent d’une oreille distraite.

19/12/2024 22:12 par lameufananardraoustschnell

Par pitié virez cette photo répugnante qui "illustre" l’article, cette "reine des ménages" dont Bourdieu disait que c’était la pire de tou(te)s

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