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L’OMS recommande le DDT pour des stratégies de lutte contre le paludisme, par Jim Lobe.





[’’Sous la direction du président Bush’’, les Etats-Unis ont commencé par soutenir la pulvérisation intérieure pour la lutte contre le paludisme en Afrique, y compris des programmes utilisant le DDT’’, a déclaré le sénateur Tom Coburn (un républicain d’Oklahoma), qui a qualifié la décision de l’OMS d’avaliser l’utilisation du DDT ’’d’audacieuse’’ et de ’’révolutionnaire’’. ’’J’espère que ces nouvelles politiques vigoureuses sur la pulvérisation et le DDT de la part de l’OMS encourageront plus de donateurs à en faire de même’’. ]






IPS, Washington, 19 septembre 2006.


Dans un important changement de politique, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a annoncé vendredi qu’elle recommandait l’utilisation du pesticide DDT pour lutter contre la propagation du paludisme, une maladie transmise par des moustiques, qui tue environ un million de personnes par an, la plupart étant des nouveau-nés et de jeunes enfants en Afrique.


L’annonce faite par le directeur du département de l’OMS en charge du paludisme dans le monde, Dr Arata Kochi, a souligné que l’utilisation du pesticide controversé, qui a été interdit aux Etats-Unis en 1972 à cause des inquiétudes au sujet de son impact sur la santé animale et humaine, devrait être confinée à ce qui est appelé une pulvérisation résiduelle intérieure.

’’Nous devons adopter une attitude basée sur la science et les données’’, a déclaré Kochi aux journalistes à Washington. ’’L’un des meilleurs outils que nous avons contre le paludisme est une pulvérisation résiduelle intérieure de la maison. De la douzaine d’insecticides que l’OMS a homologués comme étant sans danger pour la pulvérisation de la maison, le plus efficace est le DDT’’.

’’Une recherche et un test approfondis ont...démontré que des programmes de pulvérisation résiduelle intérieure bien gérés utilisant le DDT ne présentent aucun risque pour la faune et la flore ou les hommes’’, a-t-il ajouté.

Certains groupes sanitaires et d’intérêt public ont toutefois contesté immédiatement cette appréciation.

’’Cette approche nous amène exactement dans la mauvaise direction’’, a déclaré Dr Paul Saoke, directeur de Médecins pour une responsabilité sociale au Kenya. ’’Le DDT est une réponse imprévoyante avec des conséquences à long terme, et l’OMS devrait aider les pays en développement à lutter contre le paludisme avec des alternatives plus sûres et plus efficaces’’.

’’La dépendance vis-à -vis des pesticides, en particulier le DDT, comme une solution en argent pour la protection contre le paludisme est extrêmement dangereuse’’, selon Jay Feldman, directeur exécutif de ’Beyond Pesticides (Au-delà des pesticides), un groupe d’intérêt public basé à Washington.

Il a noté que des agences gouvernementales aussi bien aux Etats-Unis que dans d’autres pays ont classé le DDT comme un agent qui pourrait provoquer le cancer et des lésions nerveuses et perturber les systèmes endocriniens des hommes et des animaux.

En fait, le DDT est l’une des 12 substances chimiques devant être supprimées graduellement dans le monde entier conformément à la Convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants (POP), des substances qui sont à la fois toxiques et persistent dans l’environnement — dans les plantes, l’eau, et le tissu animal — pendant plusieurs années.

En 2001, la même année où la convention a été conclue, l’OMS elle-même a publié un plan d’action pour réduire la dépendance vis-à -vis du DDT pour lutter contre le paludisme dans des pays où il était utilisé.

Développé au cours de la Deuxième Guerre mondiale, le DDT, abréviation de dichloro-diphényl-trichloréthane, a été qualifié de ’’miracle’’ pour son efficacité dans la lutte contre le paludisme, le typhus, et d’autres maladies transmises par des insectes. En 1955, l’OMS a lancé un programme mondial pour éradiquer la maladie, principalement à travers l’utilisation du pesticide.

Alors que l’effort a connu un succès spectaculaire dans la réduction de la mortalité, en particulier dans des parties d’Asie et d’Amérique latine, la résistance est apparue dans plusieurs populations de moustiques avec le temps, réduisant son impact.

Au même moment, des écologistes — notamment Rachel Carson, dont le livre à succès "Silent Spring" (’’Printemps silencieux’’), relatif aux effets du DDT sur la santé des oiseaux et leur progéniture, a créé une sensation nationale — ont commencé par montrer en détail la manière dont le DDT est entré et a persisté dans la chaîne alimentaire, créant des ravages parmi les populations animales dans la nature. Avec à leur tête la Scandinavie, la plupart des pays industrialisés avaient interdit le DDT à la fin des années 1970.

Tandis que le DDT était toujours utilisé dans plusieurs pays en développement, des agences mondiales, dont l’OMS, et des donateurs d’aide étrangère au cours des deux décennies qui ont suivi ont fait la promotion d’alternatives, au nombre desquelles des pesticides qui étaient considérés comme beaucoup plus sûrs que le DDT, des moustiquaires traitées à l’insecticide, et des médicaments destinés à prévenir ou à traiter le paludisme.

Mais les progrès pour réduire la propagation de la maladie, qui infecte quelque 500 millions de personnes par an, ont été limités, en particulier en Afrique, à cause de divers problèmes allant de la faiblesse des systèmes de soins de santé de la région jusqu’aux coûts et à l’entretien des moustiquaires ainsi que la vitesse avec laquelle le parasite le plus mortel du paludisme, en particulier le Plasmodium falciparum, développe une résistance aux médicaments.

Par conséquent, les pressions pour réhabiliter le DDT comme une principale composante de l’effort pour contenir la maladie ont augmenté sans arrêt ces dernières années, comme en témoigne, en particulier, la citation de l’OMS vendredi, selon laquelle le DDT est le plus efficace des pesticides utilisés dans la pulvérisation résiduelle intérieure, ou IRS.

La pulvérisation intérieure est l’application d’insecticides à effet lent et à action longue sur les murs et les toits des maisons et des abris des animaux afin de tuer des moustiques porteurs de paludisme qui s’y déposent. Une application pourrait tenir jusqu’à une année.

Quatorze pays subsahariens utilisent actuellement l’IRS, et dix d’entre eux, dont l’Afrique du Sud, utilisent le DDT, selon l’OMS. En outre, le Fonds mondial de lutte contre la tuberculose, le SIDA et le paludisme, a approuvé la stratégie et est actuellement en train de financer son utilisation dans quelque 41 pays.

Les Etats-Unis sont également prêts à consacrer des ressources accrues à l’IRS. L’année dernière, le président George W. Bush a annoncé son initiative contre le paludisme, un plan de 1,2 milliard de dollars, étalé sur cinq ans, pour réduire de 50 pour cent la mortalité due au paludisme dans 14 pays de l’Afrique subsaharienne. L’initiative, qui est administrée par l’Agence américaine pour le développement international (USAID), a affecté 20 millions de dollars aux programmes IRS en 2007, une hausse par rapport au budget d’un million de dollars l’année dernière.

’’Sous la direction du président Bush’’, les Etats-Unis ont commencé par soutenir la pulvérisation intérieure pour la lutte contre le paludisme en Afrique, y compris des programmes utilisant le DDT’’, a déclaré le sénateur Tom Coburn (un républicain d’Oklahoma), qui a qualifié la décision de l’OMS d’avaliser l’utilisation du DDT ’’d’audacieuse’’ et de ’’révolutionnaire’’. ’’J’espère que ces nouvelles politiques vigoureuses sur la pulvérisation et le DDT de la part de l’OMS encourageront plus de donateurs à en faire de même’’.

En approuvant l’usage du DDT, Kochi de l’OMS a souligné qu’il ne devrait être appliqué que comme recommandé, et ne devrait, en aucune circonstance, être utilisé en plein air ou à des fins agricoles, comme cela était fait aux Etats-Unis avant l’interdiction de 1972.

’’Le DDT ne présente aucun risque sanitaire lorsqu’il est utilisé convenablement à la maison’’, a-t-il affirmé, ajoutant dans un appel à la communauté écologique : ’’Aidez à sauver des bébés africains tout en aidant à sauver l’environnement’’.

Cet argument n’est toutefois pas accepté par plusieurs activistes. ’’Le DDT n’est pas une substance chimique inoffensive’’, souligne Kristin Schafer, coordonnatrice de programme pour la section nord-américaine du Réseau d’action contre le pesticide (PAN), ’’malgré les affirmations de ses promoteurs agressifs’’, qui, a-t-elle ajouté, ont reçu le soutien de l’industrie du pesticide.

’’Même si nous reconnaissons que l’utilisation à court terme du DDT pourrait être appropriée dans des cas limités, nous sommes très préoccupés par le fait que l’OMS semble être en train de s’incliner devant les pressions de ces défenseurs et de revenir sur ses engagements à aider les pays à combattre le paludisme sans le DDT’’, a-t-elle indiqué.

Elle a noté que le Vietnam a réduit les décès dus au paludisme de 97 pour cent et les cas de paludisme de 59 pour cent lorsqu’il s’est tourné, en 1991, vers un programme de lutte contre le paludisme sans le DDT, basé sur la distribution de médicaments, de moustiquaires, et de projets locaux en matière d’éducation sur la santé. (FIN/2006)

Jim Lobe

Droits de reproduction et de diffusion réservés © IPS Inter Press Service.

 Source : IPS www.ipsnews.net



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