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Hommage à Bernard Maris

Bernard Maris a terminé sa carrière universitaire à l’Institut d’études européennes de l’Université Paris 8, dont la directrice fut longtemps Mireille Azzoug.

Elle lui rend ici hommage.

Bernard Gensane

Né à Toulouse le 23 septembre 1946, Bernard Maris, professeur des universités, économiste, essayiste et chroniqueur au journal Charlie Hebdo, nous a quittés ce mercredi 7 janvier 2015. Il a été froidement exécuté, avec neuf autres membres de l’équipe de ce journal et deux policiers, par des tueurs barbares qui s’en sont pris à la liberté de la presse, à la liberté de penser, aux valeurs fondamentales de la démocratie, de la République et de l’humanité.

Notre peine est immense, notre indignation et notre colère aussi.

Bernard Maris était non seulement l’un de nos collègues, c’était, pour beaucoup d’entre nous, un ami, un économiste brillant, un enseignant de talent. Un chercheur aussi, doublé d’un essayiste à la plume élégante, féru de poésie et de littérature – il fut aussi auteur de romans. Un humaniste érudit qui s’intéressait aussi bien à l’histoire, à la sociologie et à la psychologie qu’à la psychanalyse ou la rhétorique, disciplines dont il nourrissait son approche de l’économie.

Il se trouva parfaitement dans son élément lorsqu’il fut nommé, en 1999 (jusqu’à son départ à la retraite en 2012), professeur à l’Institut d’études européennes de l’Université Paris 8, celui-ci ayant mis la pluridisciplinarité au centre de ses enseignements et de ses recherches. Il y dirigea pour un temps le doctorat d’études européennes et le Centre d’études des mutations en Europe.

Bernard Maris séduisait son auditoire par l’originalité et la hardiesse de sa pensée, rétive à toute orthodoxie, par la clarté pédagogique de son exposé, qui ne sacrifiait en rien la finesse et la sophistication de l’analyse. Il enseignait avec brio le fonctionnement des marchés financiers, les rouages de l’économie financière et boursière, l’économie du développement durable, l’économie européenne. Il savait mettre au jour la rhétorique de l’économie et sa fonction de légitimation du discours dominant.

À Charlie Hebdo, c’était Oncle Bernard, avec ses chroniques à l’humour décapant et son art de la dérision. Humaniste, libre penseur, anticonformiste, antimonétariste, ennemi de la financiarisation de l’économie, du productivisme, il s’en prenait aux poncifs du néolibéralisme débités dans les discours prétendument « experts » des économistes gourous, qu’il tenait en piètre estime.

Rebelle aux orthodoxies, il voulait redonner à l’économie ses lettres de noblesse, celles du politique. Il admirait Keynes, qu’il convoquait souvent dans ses analyses. Ce qui le séduisait chez celui qu’il appelait l’économiste citoyen, c’était d’avoir su remettre l’économie à sa place, qui est d’être un outil au service de l’humanité. Dans l’ouvrage qu’il lui a consacré, Keynes ou l’économiste citoyen, Bernard Maris écrit : « Keynes est un pur économiste. C’est-à-dire qu’il ne peut envisager la réflexion économique sans l’art, la politique, le bien-être. [...] On ne peut comprendre l’économiste Keynes, entrer dans une pensée diverse, riche, contradictoire, mais indiscutablement la plus grande pensée économique du siècle, en dissociant un seul instant les mots « économie » et « civilisation ». Voilà pourquoi l’économie de Keynes est d’une brûlante actualité, bien au-delà des « politiques de relance », des « baisses du taux d’intérêt », des recettes pour cuisines de ministères ou des ponts aux ânes pour étudiant en macroéconomie. Quel économiste aujourd’hui pense à la Cité ? Aucun. » (Ou presque aucun, car quelques-uns sauvent quand même l’honneur).

Directeur adjoint de la rédaction de Charlie Hebdo, collaborateur à Marianne, aux Échos, au Nouvel Observateur, au Monde, chroniqueur à France Inter, très souvent invité sur les plateaux de télévision, il développait partout ses analyses décapantes et lucides avec un humour facétieux et une bonhomie tranquille et joviale. Jacques Sapir a pu dire de lui, dans l’hommage qu’il lui rend, « qu’il reste un modèle d’économiste citoyen ».

Ce droit à la critique, ce devoir d’irrespect sans lesquels il n’y a pas de liberté, lui ont valu la mort, comme à ses confrères de la rédaction de Charlie Hebdo, à une époque où il n’est plus tolérable de mourir pour des idées.

Mais les idées qu’il a semées ne sont pas mortes pour autant : il nous les lègue en héritage. Et pour que celui-ci perdure, il nous suffit de lire ou relire ses nombreux ouvrages, ses articles, ses chroniques dans Charlie Hebdo ou d’écouter les enregistrements de ses interventions sur la Toile.

Nous sommes tous Charlie et nous le resterons !

Mireille Azzoug
Directrice honoraire de l’Institut d’études européennes Maître de conférences hors classe retraitée

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