RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher

Les dernières manœuvres de la France et des États-Unis en Afrique

L’Afrique traverse des moments difficiles où la guerre ne connaît pas de trêve. La République centrafricaine et le Soudan du sud le savent bien, et Noël n’a décidément pas empêché les conflits de s’y dérouler. Deux guerres différentes, tout du moins en apparence, car quelque chose les unit malgré tout : l’ingérence de l’Occident. D’un côté, on trouve en effet la France, qui protège ses intérêts en Centrafrique (riche en diamants, en pétrole et en uranium) ; et de l’autre, les États-Unis, dont les manœuvres avaient permis la partition du Soudan sur fond de gisements pétroliers en 2011.

Quasiment un an a passé depuis que la France a refusé, à la fin de décembre 2012, de venir en aide au président aujourd’hui déchu François Bozizé, alors en proie aux rebelles de la Seleka. Et beaucoup d’eau a coulé sous les ponts : il y a eu un coup d’État et les rebelles ont pris le pouvoir tout en semant l’anarchie dans le pays. Des villages entiers ont été détruits, des milliers de personnes ont fui leur maison, laissant tout derrière elles. La population a vécu dans un climat de terreur.

La France s’est réveillée il y a un mois en décidant d’arrêter le « génocide » en envoyant, avec l’aval de l’ONU, l’armée se déployer en République centrafricaine. Selon Paris et les media, on est désormais en présence d’un conflit ethnico-religieux. Après la mort de deux soldats, François Hollande a réaffirmé le principe d’impartialité de ses troupes. Quelques jours auparavant, le président français soulignait que « la mission est dangereuse mais nécessaire si on veut que ne se produise ici (en RCA, NDLR) un carnage ». Que ce soit pour la Libye, pour la Côte d’Ivoire et tout récemment pour le Mali, la propagande de la France est décidément toujours la même.

Sur place, on ne peut cependant que constater le chaos. La population est barricadée à domicile et ne sort que pour assurer son approvisionnement. Les rues sont désertes, abandonnés aux militaires français et africains de la MISCA. Il y a quelques jours, les soldats tchadiens de la force africaine en RCA ont ouvert le feu sur un groupe de manifestants qui s’étaient rassemblés autour de l’aéroport de Bangui pour exiger la démission du président putschiste Michel Djotodia et le départ de ses combattants, accusés de complicité avec la Seleka. Les troupes tchadiennes ont tiré sur la foule, causant la mort d’une personne.

Dans le même temps, plusieurs milliers de manifestants protestaient contre la présence de l’armée française. « Non à la France ! », « Hollande criminel ! », scandaient notamment ceux qui entendaient dénoncer la partialité des militaires déployés depuis début décembre en RCA. Les soldats français sont en effet accusés d’œuvrer en faveur des chrétiens et des groupes anti-balaka, formés en grande partie par d’anciens membres des forces armées centrafricaines.

Cette situation attise le fort sentiment anti-français qui est en train de naître au sein de la minorité musulmane. Cette dernière accuse les forces militaires de Paris de complicité de génocide en n’arrêtant pas les représailles des chrétiens contre les ex-rebelles désarmés mais aussi contre les commerçants dont les magasins ont été pillés.

L’épouvantail du conflit interreligieux créé de toutes pièces n’échappe à personne. En une semaine, les affrontements ont fait quelque 450 victimes. « Nous nous sommes révoltés afin que Djotobia et se combattants s’en aillent et que le pays puisse vivre dans la paix », a déclaré Richard Benjouane, le chef des milices d’auto-défense anti-balaka dans un des rares entretiens publiés dans la presse. Alfred Rombhot, chef d’un groupe de miliciens, nie que ses hommes puissent s’en prendre aux musulmans, tout en reconnaissant qu’il y a des meurtres : « nous savons qu’il y a des Centrafricains musulmans. Ils ont le droit d’être là. Les étrangers, c’est différent. Tout ça est très clair ».

Ce conflit a provoqué le déplacement de plus d’un demi-million de personnes. Plusieurs agences des Nations-Unies ont exprimé dernièrement leur préoccupation devant la situation du pays ; des millions de civils sont menacés par l’insécurité alimentaire et la violence qui se poursuit sans relâche.

La situation est elle aussi chaotique au Soudan du sud, où un coup d’État a été dernièrement déjoué. Né en 2011 de la partition du Soudan, le plus jeune État du monde a rapidement plongé dans la violence. Depuis le 15 décembre, il est déchiré par d’intenses combats qui menacent de dégénérer en guerre civile.
Au cœur du conflit : une rivalité entre le président Kiir et son ex-vice-président, limogé en juillet. En une semaine, les combats ont fait plusieurs centaines de victimes et touchent maintenant la moitié du pays. Les civils tentent de se réfugier par milliers dans les complexes de l’ONU totalement débordés, notamment dans la capitale Juba, au sud. Des témoignages font état de massacres et de viols à grande échelle.

Le secrétaire d’État étasunien, John Kerry, a téléphoné le week-end dernier au président Salva Kiir pour lui dire que les violences sapaient ce qui avait été imaginé lors de l’indépendance du 9 juillet 2011. L’administration Obama a aussi dépêché son émissaire Donald Booth et envoyé quarante-cinq militaires pour assurer la sécurité de leurs ressortissants restés sur place.
Les États-Unis se défendent d’agir par intérêts stratégiques ou économiques, et mettent en avant l’urgence humanitaire. Pour l’opinion, la vérité est faite : le long conflit qui a abouti à la partition du Soudan était une guerre entre chrétiens et musulmans.
« Complètement faux », rétorque Michel Raimbaud, ancien ambassadeur de France sur place. Il s’agissait avant tout, pour les Occidentaux et Israël, de démanteler le plus grand pays arabe et africain riche en pétrole (l’or noir représentant 95 % de l’économie nationale du Soudan du sud).

Le regard que tout observateur peut porter sur l’Afrique permet de constater que le continent évolue avec frayeur vers la balkanisation. Cette dernière tend aujourd’hui à scinder en deux (ou plusieurs) parties les pays. Le cas de la Libye est révélateur de ce qui attend peut-être d’autres États. Actuellement, Européens et Américains sont en train d’imposer dans l’ex-Jamahiriya libyenne un nouveau système fédéral où désormais il existe deux administrations : une à Tripoli, l’autre à Benghazi. Dans ce schéma, l’important pour les puissances occidentales est d’avoir la mainmise sur le « pays utile ». Il est dans leur intérêt de contrôler les pôles stratégiques, de contrôler l’ensemble des ressources pour assurer leur sécurité énergétique. Mais le risque d’insécurité permanente est à craindre…

Pour Kwame Nkrumah, homme politique indépendantiste et panafricaniste ghanéen qui dirigea ce pays en tant que président de 1960 à 1966 :

« l’essence du néo-colonialisme, c’est que l’État qui y est assujetti est théoriquement indépendant, possède tous les insignes de la souveraineté sur le plan international. Mais en réalité, son économie, et par conséquent sa politique, sont manipulées depuis l’extérieur ».

La République centrafricaine et le Soudan du sud connaissent bien les mêmes maux dont les causes ont un nom : le néo-colonialisme.

Capitaine Martin

»» Résistance politique.fr
URL de cet article 23880
  

Roberto Saviano. Gomorra. Dans l’empire de la camorra. Gallimard, 2007.
Bernard GENSANE
Il n’est pas inutile, dans le contexte de la crise du capitalisme qui affecte les peuples aujourd’hui, de revenir sur le livre de Roberto Saviano. Napolitain lui-même, Saviano, dont on sait qu’il fait désormais l’objet d’un contrat de mort, a trouvé dans son ouvrage la bonne distance pour parler de la mafia napolitaine. Il l’observe quasiment de l’intérieur pour décrire ses méfaits (je ne reviendrai pas ici sur la violence inouïe des moeurs mafieuses, des impensables tortures corporelles, véritable (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

Le domaine de la liberté commence là où s’arrête le travail déterminé par la nécessité.

Karl Marx

"Un système meurtrier est en train de se créer sous nos yeux" (Republik)
Une allégation de viol inventée et des preuves fabriquées en Suède, la pression du Royaume-Uni pour ne pas abandonner l’affaire, un juge partial, la détention dans une prison de sécurité maximale, la torture psychologique - et bientôt l’extradition vers les États-Unis, où il pourrait être condamné à 175 ans de prison pour avoir dénoncé des crimes de guerre. Pour la première fois, le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture, Nils Melzer, parle en détail des conclusions explosives de son enquête sur (...)
11 
Hier, j’ai surpris France Télécom semant des graines de suicide.
Didier Lombard, ex-PDG de FT, a été mis en examen pour harcèlement moral dans l’enquête sur la vague de suicides dans son entreprise. C’est le moment de republier sur le sujet un article du Grand Soir datant de 2009 et toujours d’actualité. Les suicides à France Télécom ne sont pas une mode qui déferle, mais une éclosion de graines empoisonnées, semées depuis des décennies. Dans les années 80/90, j’étais ergonome dans une grande direction de France Télécom délocalisée de Paris à Blagnac, près de Toulouse. (...)
69 
Comment Cuba révèle toute la médiocrité de l’Occident
Il y a des sujets qui sont aux journalistes ce que les récifs sont aux marins : à éviter. Une fois repérés et cartographiés, les routes de l’information les contourneront systématiquement et sans se poser de questions. Et si d’aventure un voyageur imprudent se décidait à entrer dans une de ces zones en ignorant les panneaux avec des têtes de mort, et en revenait indemne, on dira qu’il a simplement eu de la chance ou qu’il est fou - ou les deux à la fois. Pour ce voyageur-là, il n’y aura pas de défilé (...)
43 
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.