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OTAN ou indépendance nationale ?

(Mouvement politique d’éducation populaire).

Le néolibéralisme repose sur cinq piliers, l’Organisation mondiale du commerce (OMC), la Banque mondiale (BM), le Fonds monétaire international (FMI), l’Union européenne (UE) et l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN). Les néolibéraux savent que les peuples les rejettent au fond d’eux-mêmes, ils ont besoin d’une alliance militaire pour le cas où leur opposition s’affirmerait ouvertement.

Une brève histoire de l’OTAN

Rappelons qu’en 1949, à sa création, cette alliance militaire avait pour but de protéger les pays occidentaux signataires (Amérique du Nord et Europe occidentale non communiste) de la menace militaire soviétique, réelle ou supposée. Pourtant à cette époque, l’Union soviétique et ses alliés étaient bien incapables d’attaquer les pays occidentaux. L’OTAN, dès l’origine, se révélait ainsi comme une alliance offensive et non défensive (en 1955, le bloc de l’Est s’est protégé par la création du pacte de Varsovie).

L’OTAN entraîna les pays occidentaux dans une vassalisation militaire et économique assumée par rapport aux États-Unis.

Le général de Gaulle n’admettait pas la perte évidente de souveraineté et d’indépendance en politique étrangère qu’impliquait ce traité militaire, et la contrainte que des troupes françaises soient commandées par des généraux étrangers lui était odieuse. En 1966, au terme de huit ans de tensions avec l’OTAN, il décidait la sortie de la France du commandement intégré, et les troupes américaines furent obligées de quitter leurs bases en France.

En poussant à la course aux armements, les États-Unis ont obligé l’URSS à dépenser des sommes considérables, hors de ses possibilités matérielles et ont contribué à la faire éclater en 1991. On aurait pu croire alors que l’OTAN allait se dissoudre puisqu’elle n’avait plus de raison d’être. Mais il n’en a rien été, elle s’est trouvé un nouvel objectif : assurer sur le continent européen la stabilité de l’ordre mondial néolibéral. Elle attisa les nationalismes en Yougoslavie, ennemie déclarée, dans laquelle elle mena une guerre dite « humanitaire ». Ce fut le laboratoire d’un nouveau concept stratégique et de la nouvelle idée que les États-Unis avaient de l’OTAN. Les pays européens ne devaient pas se sentir plus libres que par le passé, de concevoir une diplomatie, une politique extérieure et un commandement militaire indépendants des États-Unis.

En 1999, le deuxième « nouveau concept stratégique de l’OTAN »

Il fixe comme objectif de « sauvegarder - par des moyens politiques et militaires - la liberté et la sécurité » de l’Amérique du Nord et de l’Europe. Son rôle n’est plus dès lors limité à son cadre historique euro-atlantique.

L’attentat du 11 septembre 2001 contre les tours jumelles de New York, si horrible soit-il, fut une divine surprise pour cette organisation. L’OTAN s’était enfin trouvé un véritable nouvel ennemi authentique : le terrorisme non étatique dont l’avantage était de ne pas être limité à un pays. Il était multiforme et il devenait possible pour l’OTAN d’intervenir partout.

C’est ainsi que le 7 octobre 2001, les forces états-uniennes envahissaient l’Afghanistan et y détruisaient le régime des talibans. Le 20 décembre de la même année, l’ONU créait la FIAS (Force internationale d’assistance à la sécurité) et le 11 août 2003, l’OTAN en prenait le commandement.

La FIAS comptait 5 000 hommes en 2003, elle en compte actuellement plus de 100.000, et pourtant l’OTAN s’enlise face à une rébellion menée par les talibans et soutenue par la grande majorité de Afghans. L’Afghanistan où l’opium était interdit sous le gouvernement des talibans en est devenu le premier producteur mondial, les femmes sont soumises à la charia, la population souffre de malnutrition. L’OTAN tente de faire croire à sa mission humanitaire mais l’aide civile représente seulement un dixième des dépenses militaires.

En 2003, les États-Unis devaient subir un échec, lorsque George W. Bush, inventant l’existence d’armes de destruction massive en Irak, décida d’envahir ce pays. Il ne put le faire au nom de l’OTAN, la France et l’Allemagne ne l’ayant pas suivi.

L’été 2008 les États-Unis ont subi un deuxième échec, lorsqu’ils incitèrent la Géorgie à attaquer certaines de ses républiques autonomes qui s’étaient trop émancipées. La Russie intervint et mit un coup d’arrêt à la progression de l’OTAN dans les anciennes républiques soviétiques, Géorgie, Arménie, Azerbaïdjan.

Déploiement de l’OTAN

L’OTAN a signé des partenariats avec la plupart des pays méditerranéens, la toile de l’OTAN s’étend à des « partenaires d’opérations » puisque 18 pays non membres de l’OTAN participent aux opérations en Afghanistan : l’Australie, la Nouvelle-Zélande, la Corée du Sud, le Japon, l’Inde, l’Indonésie, etc. La Chine participe à des patrouilles communes de lutte contre la piraterie dans le golfe d’Aden.

Les 3 et 4 avril 2009, les chefs d’État des pays membres de l’OTAN en fêtaient le 60e anniversaire à Strasbourg dans une ville barricadée. Les contre-manifestants, bien qu’autorisés à défiler à 4 km du centre furent dispersés violemment. C’est à l’occasion de ce sommet que Nicolas Sarkozy annonçait le retour de la France dans le commandement intégré de l’OTAN. Il acceptait de plus de renforcer la présence française en Afghanistan.

Le troisième concept stratégique prévoit toujours la menace terroriste, la piraterie et la prolifération nucléaire, mais d’autres priorités sont fixées : la défense contre les cyber-attaques qui peuvent provoquer la paralysie d’un pays, le bouclier antimissiles et la sécurité des approvisionnements énergétiques. La Russie est accusée de vouloir créer avec des pays arabes une OPEP du gaz qui maintiendrait les prix à un niveau élevé [1]. Un rapport indique que « l’OTAN à tout intérêt à protéger les axes vitaux qui alimentent les sociétés modernes [2] ».

L’OTAN est un instrument militaire dirigé par les États-Unis qui dispose de bases militaires sur tous les continents, outrepasse les Nations Unies et les règles du droit international, encourage la militarisation et l’escalade des dépenses militaires - les pays membres de l’OTAN cumulent 75% des dépenses militaires mondiales. Elle assoit la domination économique, politique et diplomatique des pays capitalistes et pour commencer le plus puissant d’entre eux, les États-Unis, très conscients de l’importance stratégique de la perpétuation de leur puissance militaire.

L’OTAN, tuteur armé de l’Union européenne

Le traité de Lisbonne stipule que « la politique de l’Union » doit être « compatible avec la politique » arrêtée dans le cadre de l’OTAN (TUE 27/42-2), et que « au cas où un État membre serait l’objet d’une agression armée sur son territoire, les autres États membres lui doivent aide et assistance par tous les moyens en leur pouvoir, conformément à l’article 51 de la Charte des Nations unies. […] Les engagements et la coopération dans ce domaine demeurent conformes aux engagements souscrits au sein de l’OTAN » (TUE 27/42-7).

Le 19 février 2009, dans une résolution sur « le rôle de l’OTAN dans l’architecture de sécurité de l’UE », les eurodéputés affirmaient « qu’un consensus réel, global et démocratique entre l’Union européenne et l’OTAN est un aspect essentiel de la mise en oeuvre de cette stratégie, fondée sur un consensus sécuritaire entre l’Union européenne et les États-Unis d’Amérique ». Le texte, qui revendique un « partenariat encore plus étroit » entre l’UE et l’OTAN dans « des domaines tels que le terrorisme international [...], la criminalité organisée, les cybermenaces, la dégradation de l’environnement, les catastrophes naturelles et autres » a été adopté de justesse, notamment grâce aux voix du PSE.

Même si certains pays de l’UE comme l’Autriche et l’Irlande se disent neutres, ils doivent suivre les recommandations de l’OTAN et augmenter leurs dépenses d’armement puisque « les États membres s’engagent à améliorer progressivement leurs capacités militaires » (Art. 28-A-3). En Europe, l’OTAN aggrave les tensions, alimente la course aux armements avec le prétendu « bouclier » antimissile, un arsenal nucléaire gigantesque et la doctrine de « première frappe nucléaire ».

La politique de surarmement et de division du travail entre les pays membres a des répercutions sur leur politique économique. C’est ainsi que la France avait en 2010 une balance commerciale déficitaire de 51 milliards d’euros. L’examen des chiffres montre que le poste le plus déficitaire (13,6 milliards d’euros) est le secteur de l’armement. Le fort niveau des importations d’armes (114,3 milliards d’euros) est dû à la volonté de l’OTAN que ses membres se spécialisent dans des secteurs étroits. Les exportations (100,7 milliards d’euros) concernent en particulier les missiles, les importations concernent le reste [3].

Rappelons que les pays membres de l’OTAN sont contraints par le processus de « planification des forces » à l’achat de matériel américain et à la mise en place des normes de l’armée américaine, afin d’assurer l’interopérabilité des forces de l’alliance sous direction américaine. Ces questions ne sont évidemment pas que techniques ou économiques, elles sont bien stratégiques puisque au terme de cette intégration, il devient impossible à un pays d’exercer la moindre souveraineté militaire nationale, ce qui est bien sûr le but principal.

L’OTAN demande que les pays membres consacrent 2% de leur PIB aux dépenses d’armement, mais la crise aidant, seuls 6 membres sur 28 remplissent cet objectif. L’OTAN constate avec tristesse que c’est son point faible [4].

Le gendarme du monde

La stratégie de l’OTAN est basée sur la force et la menace, le but étant de défendre les intérêts du camp occidental, avec son système politique et économique.

Elle vise une « approche globale » avec « la mise à disposition de forces parfaitement préparées et entièrement déployables, capables de mener toute la gamme d’opérations et de missions militaires sur le territoire de l’Alliance et, au-delà , à sa périphérie et à distance stratégique ». Un Centre de coordination des opérations spéciales de l’OTAN (NSCC), a été créé sous le commandement d’un vice-amiral étatsunien « prélude à un quartier général multinational ». L’objectif est une capacité d’intervention tous azimuts, un des buts étant d’assurer la sécurité énergétique de l’Occident.

La répression sauvage de Kadhafi contre son peuple a été une aubaine pour l’OTAN. L’opération militaire aérienne décidée par le Conseil de sécurité de l’ONU a été menée au début par la France et la Grande-Bretagne, puis rapidement l’OTAN a pris les choses en mains, comme il se doit sous la direction d’un général américain. Alors que l’Occident n’a pas apporté son soutien à la répression des autres révolutions arabes, elle s’en est fait le chantre en Libye, espérant bien entendu étendre son influence sur ce pays, toujours au nom de l’intervention humanitaire.

Une politique de gauche ne peut se concevoir tant que notre pays sera dans l’OTAN. Grâce à la domination des États-Unis sur le plan économique, politique et militaire, l’OTAN peut employer la force contre tout pays ayant une politique tout simplement indépendante. Les droits de l’Homme sont alors cyniquement instrumentalisés pour une intervention dont les buts sont tout sauf humanitaires, n’en déplaise à tous les Bernard Kouchner. Pour rester crédible, la menace militaire doit régulièrement être mise en oeuvre, le but étant la réaction de l’Alliance quand les intérêts stratégiques sont menacés. Elle permet d’exercer sur le reste du monde la pression commerciale, stratégique et économique des pays occidentaux, surtout à l’avantage de leur chef de file, les États-Unis.

La contre-révolution néolibérale qui sévit depuis 30 ans constitue un ensemble unifié et structuré : contre-révolution idéologique, médiatique, institutionnelle, commerciale, financière, politique, sociale et militaire. Asseoir cet ensemble sur la force militaire est indispensable pour elle. Bien que certains pays ressentent les inconvénients d’être vassalisés, ils apprécient de pouvoir compter sur la force des États-Unis grâce à laquelle ils imposent au reste du monde leurs intérêts et leur puissance.

Dans le contexte de lutte exacerbée que se livrent les entreprises mondialisées, l’OTAN peut être une pièce importante dont disposent les pays occidentaux en relative décadence économique pour faire pression sur les pays émergents.

Perspectives

Un pays qui voudrait recouvrer sa souveraineté populaire et nationale pour réaliser une politique progressiste sociale et écologique, en opposition avec les logiques libérales, devrait récupérer son indépendance militaire, et donc sortir immédiatement de l’OTAN. Cela serait même le gage de son sérieux, de même qu’une sortie de l’euro et des institutions de l’Union européenne et de l’OMC, du FMI et de la Banque mondiale.

Il faut rappeler à ce propos que la souveraineté populaire et nationale n’a aucun rapport avec le nationalisme ou le souverainisme. Une politique d’émancipation des peuples passe par la reprise en main de leurs destins par les populations là où elles peuvent le faire, à l’échelle nationale, et des manettes institutionnelles indispensables pour ce faire.

Le M’PEP est pour une coopération pacifique avec tous les pays du monde. Cependant, dans la mesure où la France disposerait d’un gouvernement indépendant et progressiste prenant des mesures sociales et se détachant de l’ordre néolibéral mondial, elle deviendrait la cible des pays les plus réactionnaires et donc de l’OTAN. Elle devrait par conséquent rétablir la conscription, la défense du territoire national doit être l’affaire de toutes et de tous et reposer sur une armée populaire et républicaine. Il faudra former un encadrement militaire dévoué et garant de l’indépendance nationale. Les armées (terre, air, mer) devront être restructurées pour assurer immédiatement la défense du territoire. Si le M’PEP est favorable à la disparition totale et la plus rapide possible des armes nucléaires, il considère que la dénucléarisation doit être générale et parallèle : toutes les puissances nucléaires doivent réduire leurs armes ensemble selon un traité spécifique. En attendant, la France devra maintenir une force nucléaire défensive. Au total, l’armée française n’interviendrait pas sur les théâtres extérieurs et servirait seulement à la défense du territoire national.

M’PEP

Le 25 octobre 2011.

http://www.m-pep.org/spip.php?article2427

Notes

[1] http://www.imi-online.de/2009.php?id=1938

[2] http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article1367

[3] http://lekiosque.finances.gouv.fr/Appchiffre/Etudes/Thematiques/3T2010.pdf

[4] http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article1367

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