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« Ce sont les masses qui font l’Histoire »

( A l’un de mes correspondants )

Tu nous interroges à juste titre sur « la forme organisationnelle ».

Bien évidemment, il ne peut d’agir pour nous de lire dans la boule de cristal des diseurs d’avenir, mais de retrouver en Marx les fondements de ses réflexions à ce sujet , en étant conscient de ce que, à l’égal d’autres concepts, ceux-là ont pu aussi être « torturés », voire « falsifiés » ultérieurement.

Il m’apparait cependant, après avoir pas mal fait s’entrechoquer diverses théories, que l’on en vient à une question originelle : qui ou quoi, dans les sociétés humaines, crée les idées, les pensées, les systèmes de pensées, les idéologies, les institutions sous leurs différentes formes...

Si l’on admet, comme l’exprime excellemment l’Internationale, que ce ne peut être un Dieu, ni un César, ni un Tribun, il convient de bien admettre également que ce ne peut être un Parti.

L’IDEOLOGIE ALLEMANDE

Marx est clair, et ce dès « L’Idéologie allemande » : « La production des idées, des représentations et de la conscience, est d’abord directement et intimement mêlée à l’activité matérielle et au commerce matériel des hommes : elle est le langage de la vie réelle. »

Il y revient à la première occasion tant l’enjeu lui semble de première importance : « Les idées ne sont rien d’autre que les choses matérielles transposées et traduites dans la tête des hommes. »

Et, s’agissant de l’histoire, il précise : « L’histoire ne fait rien, c’est l’homme, réel et vivant, qui fait tout. » ( voir mon article à ce sujet dans « La Tribune de Michel Peyret » mise à ma disposition dans « Rouges Midi ».)

CONTRIBUTION A LA CRITIQUE DE L’ECONOMIE POLITIQUE

Dans la Contribution à la Critique de l’Economie Politique, Marx développe davantage :

« Dans la production sociale de leur existence, les hommes entrent en des rapports déterminés, nécessaires, indépendants de leur volonté ; ces rapports de production correspondent à un degré de développement donné de leurs forces productives matérielles.

« L’ensemble de ces rapports de production constitue la structure économique de la société, la base réelle, sur qui s’élève la superstructure juridique et à laquelle correspondent des formes de conscience déterminées..

« Le mode de production de la vie matérielle conditionne le procès de vie social, politique et intellectuel en général.

« Ce n’est pas la conscience des hommes qui détermine la réalité, c’est au contraire la réalité sociale qui détermine leur conscience.

« A un certain stade de leur développement, les forces productives de la société entrent en contradiction avec les rapports de production existants, ou, ce qui en est l’expression juridique, avec les rapports de propriété à l’intérieur desquels elles s’étaient mues jusqu’alors.

« De formes évolutives des forces productives qu’ils étaient, ces rapports deviennent des entraves de ces forces.

« Alors s’ouvre une ère de révolution sociale.

« Le changement qui s’est produit dans la base économique bouleverse plus ou moins lentement ou rapidement toute la colossale superstructure.

« Lorsque l’on considère de tels bouleversements, il importe de distinguer toujours entre le bouleversement matériel des conditions de production économiques - qu’on doit constater fidèlement à l’aide des sciences physiques et naturelles - et les formes juridiques, politiques, religieuses, artistiques ou philosophiques, bref, les formes idéologiques sous lesquelles les hommes deviennent conscients de ce conflit et le mènent à bout.

« De même que l’on ne juge pas un individu sur l’idée qu’il se fait de lui, de même on ne peut juger une telle époque de bouleversement sur sa conscience de soi ; il faut, au contraire, expliquer cette conscience par les contradictions de la vie matérielle, par le conflit qui existe entre les forces productives sociales et les rapports de production.

« Une société ne disparaît jamais avant que soient développées toutes les forces productives qu’elle est assez large pour contenir, et jamais de nouveaux et supérieurs rapports de production ne se substituent à elle avant que les conditions d’existence matérielles de ces rapports aient été couvées dans le sein même de la vielle société.

« C’est pourquoi l’humanité ne se pose jamais que les problèmes qu’elles peut résoudre, car, à regarder de plus près, il se trouve toujours que le problème lui-même ne se présente que lorsque les conditions matérielles pour le résoudre existent ou du moins sont en devenir. »

FAIRE RESSORTIR LE NOUVEAU

On comprend dès lors pourquoi ni les élévations de la conscience des peuples, ni les conditions de la révolution ou du changement de société, ne peuvent être enfermés dans les élaborations d’un parti ou d’une organisation qui apporterait de l’extérieur de la société la conscience de la nécessité de sa transformation ?

Par contre, on peut au contraire concevoir le rôle que peut avoir une organisation qui aiderait à montrer le nouveau qui est en train d’apparaître ou de commencer à se construire dans la société elle-même, plus particulièrement dans son mode de production.

Qui aiderait également à montrer que le mode de production capitaliste fondé sur l’existence de la propriété privée et la recherche du profit est aujourd’hui l’obstacle principal au développement de toutes les potentialités de la révolution en cours avec l’automation et l’informatisation de leurs processus de production.

DES POUVOIRS DE DECISION REELS

Qui aiderait à mettre en évidence que la libération de ces potentialités exige l’appropriation sociale et le dépérissement de l’Etat pour donner enfin les pouvoirs de décision réels, non pas à telle ou telle structure qui perpétuerait ou remplacerait par d’autres ces instruments de domination sur les peuples, mais à ceux-là même en mesure de libérer toutes les potentialités des transformations en cours, et les seuls à pouvoir le faire, parce que seuls ils en ont la maîtrise réelle et totale, matérielle et intellectuelle, dans le mode de production.

Qui aiderait à montrer que les nouveaux progrès de productivité, sans commune mesure avec les anciens, qui résulteraient de la libération de toutes les potentialités de l’automation et de l’informatisation, permettraient enfin de donner les moyens matériels et intellectuels de répondre à tous les besoins existentiels des êtres humains de notre planète, d’en finir à la fois avec le salariat et le capital, avec la misère, les injustices, la sous-alimentation et sous-instruction.

LE DROIT AU TEMPS LIBRE RENUMERE

Qui montrerait qu’enfin il devient possible d’augmenter le temps libre de façon considérable, de développer parallèlement de libres activités selon les besoins et les goûts de chacun, et d’assurer à chacun un revenu d’existence, associé à l’extension des gratuités en tous domaines.

Qui ainsi ferait dès aujourd’hui la preuve que tous les Sarko présents, passés ou à venir, avec leur « travailler plus pour gagner plus » font partie des berceuses éternelles du malheur humain, car qui ne voit que dans les conditions nouvelles, il deviendrait possible de faire travailler plus les machines si cela s’avérait effectivement nécessaire pour satisfaire tous les besoins humains, tout en continuant à développer le temps libre et ainsi les possibilités du libre développement de toutes les potentialités humaines dans chaque individu.

L’ORGANISATION DU PEUPLE

Qui ne voit qu’aussi, en gagnant pour la première fois effectivement que le gouvernement du peuple, par le peuple, et pour le peuple, devienne une réalité pour l’ensemble de la société, cette organisation pourrait elle-même se concevoir dans ce nouveau de toute autre façon que tout ce qui a pu être connu jusqu’alors, et que c’est cette organisation qu’il devient nécessaire de construire dès aujourd’hui, sauf à considérer que le changement de société ne serait plus à l’ordre du jour alors que l’ancien est déjà très fortement rejeté.

MONTRER CE QUI EST DEJA LA

Alors que, également, en de nombreux domaines, des formes de la nouvelle société existent déjà , qu’il s’agisse des formes collectives de propriété, comme des formes de gestion de maintes activités de différents secteurs de la société, le changement de société consistant alors davantage dans l’extension de ces formes encore minoritaires que de leur création ex nihilo.

Alors que nous voyons commencer à se reproduire des effondrements d’Etat tels qu’ils ont pu se manifester déjà en d’autres périodes historiques, tout concourt à faire penser que ces changements sont à appréhender dans ce contexte nouveau qui exclut toute comparaison avec des expériences d’autres temps.

RIEN N’EST ETERNEL

En ce monde, et toute son histoire le vérifie, rien n’est éternel, tout naît, grandit, se transforme, passe par plusieurs états avant de finalement mourir...en donnant naissance à un nouveau cycle de cette histoire que ceux qui le vivront inventeront...

Et c’est pourquoi le « Ce sont les masses qui font l’histoire » est sans doute le concept global qui rend le mieux compte de tout l’apport de Marx à la compréhension de l’histoire des hommes.

Spartacus, comme les serfs du Moyen-Age ou les bourgeois du 18ème siècle, n’avaient pas les mêmes formes d’organisation que celles qui sont apparues ensuite dans l’affirmation des Etats et des gouvernements capitalistes.

Ils n’en ont pas moins réussi à impulser aux différentes étapes les évolutions qui ont permis des changements de société...

Et c’est aussi pourquoi il est très difficile de prévoir aujourd’hui ce que seront ces organisations nouvelles répondant aux besoins des sociétés de demain.

Michel PEYRET

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