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Le harcèlement du FBI contre les militants de la solidarité (Al Jazeera)

Tracy Molm a parfois du mal à payer son loyer, ce fut donc une surprise lorsque les forces de sécurité américaines sont venues un jour frapper à sa porte à 7 heures du matin, pour fouiller son appartement à la recherche de soutien matériel à une organisation terroriste.

Les mandats indiquent que les enquêteurs pensent que Molm et au moins sept autres militants d’un comité anti-guerre du Minnesota et d’autres groupes ont fourni un soutien matériel au Front Populaire de Libération de la Palestine (FPLP) et aux rebelles des Forces Armées Révolutionnaires de Colombie (FARC), groupes considérés comme des organisations terroristes par les États-Unis.

«  Je suppose que soutien matériel signifie de l’argent et des armes, mais ils (la police) n’ont pas donné d’explications, » a déclaré Molm à Al Jazeera. «  Je pense qu’ils essaient en réalité d’intimider ceux qui sont solidaires des peuples de la Palestine et de la Colombie. »

Des militants de Minneapolis et de Chicago ont été assignés à comparaître devant un «  grand jury » en Octobre, après des raids policiers effectués le 24 septembre.

Aucune charge

Malgré les perquisitions et la saisie d’ordinateurs, chéquiers, téléphones portables, documents et photographies, Molm et d’autres militants n’ont pas été formellement mis en accusation.

«  Les perquisitions ont été menées sous mandat d’un juge fédéral », a déclaré à Al Jazeera Royden Rice, agent spécial du FBI à Chicago.

«  Il n’y a eu aucune arrestation ou charges liées à cette enquête, » a-t-il dit, faisant dire aux militants que ces expéditions policières constituaient des tentatives d’intimidation visant les Américains qui critiquent la politique étrangère du leur gouvernement.

Plus de 200 personnes ont manifesté lundi à Minneapolis pour dénoncer la descente de police, selon le quotidien Minnesota Daily, tandis qu’au moins 100 autres se sont rassemblés mardi à Chicago en solidarité avec les militants. D’autres manifestations sont prévues dans d’autres villes américaines et les militants prévoient une mobilisation croissante dans la mesure où ils n’ont eu que trois jours pour organiser les premières manifestations.

«  Le FBI n’enquête pas sur une personne ou un groupe pour leurs opinions politiques, » a dit l’agent Rice. «  Nous enquêtons lorsqu’il y a soupçon que la loi a été violée. »

Réprimer l’action politique

Bernardine Dohrn, professeure de droit à l’université Northwestern à Chicago, hésite quant aux objectifs de la police : «  Soit (la police) est en train d’aller à la pêche, parce qu’elle n’a suffisamment d’éléments pour inculper quelqu’un ; soit il s’agit d’une tentative de répression contre l’action politique. Dans tous les cas, c’est une mauvaise nouvelle. » dit-elle.

En tant qu’enseignante, Dohrn est préoccupée par la nature vague des lois de sécurité nationale instaurées après les attaques du 11 septembre 2001.

«  Si vous écrivez des articles, s’agit d’un soutien matériel (aux terroristes) ? Si vous fournissez du matériel pour les ordinateurs et les cliniques de santé dans les territoires occupés, ou des territoires qui résistent au contrôle du gouvernement, s’agit d’un soutien matériel ? »

Elle dit que les enquêtes menées par un grand jury et les harcèlements judiciaires subis par les militants sont une manière de «  court-circuiter les protections garanties par la Constitution ».

Les personnes qui comparaissent devant un grand jury «  ne peuvent pas être accompagnées d’un avocat. Il n’y a que le procureur, l’accusé et un groupe de jurés... autrement dit, c’est un moyen pour obtenir de l’information par la pression »

Jessica Sundin, de l’université du Minnesota, s’est vu confisquer ses affaires par les forces de sécurité lors d’une opération coordonnée de perquisitions et de saisies. Comme Molm, elle nie fournir un soutien matériel à un groupe et dit qu’elle n’a rien fait d’illégal ou immoral.

Elle croit que «  la plus grande tâche de notre mouvement anti-guerre est d’éduquer notre propre peuple. »

Visiter un pays occupé

Dans cet esprit, Molm et d’autres militants américains se sont rendus en Palestine en 2004 pour évaluer la situation. «  Tous les jours les gens (dans les territoires occupés) doivent passer des points de contrôle avec des armes pointées sur leurs têtes, ils sont dans une situation horrible et pourtant ils continuent de vivre et de rire » dit-elle.

« Si l’occupation de la Palestine est si brutale, c’est grâce à l’argent des contribuables US, à mes impôts. Envoyer des gens là -bas pour ramener des témoignages et des images est important pour construire une solidarité. »

Selon de Département d’État US, Israël, qui occupe les territoires palestiniens, a reçu en 2009 2,55 milliards en aide militaire de la part des États-Unis. Le chiffre devrait monter à 3,15 milliards entre 2013 et 2018.

«  Je ne sais pas pourquoi ce serait illégal de posséder une écharpe avec le drapeau palestinien, mais la police me l’a confisquée » dit-elle.

En ce qui concerne la Colombie, ce pays a reçu au moins 5 milliards de dollars d’aide militaire des États-Unis depuis 1999.

Amnesty International USA, un groupe de défense des droits de l’homme, a dit que «  notre organisation demande depuis plus de dix ans la suppression totale de l’aide militaire US à la Colombie à cause de la collaboration persistante entre les Forces armées colombiennes et leur alliés paramilitaires. »

Justifier le financement de la guerre contre le terrorisme

Plutôt qu’une grande opération des forces de sécurité pour intimider les critiques de la politique étrangère des États-Unis, les perquisitions ont peut-être une motivation plus simple : justifier les énormes sommes d’argent que le gouvernement a affecté à la lutte contre le terrorisme. »

«  Dans le Minnesota, il y a eu beaucoup d’argent investi dans les efforts de lutte contre le terrorisme, » dit Sheila Regan, une journaliste de TC Daily, un média local.

«  Cet état a une des plus grandes bureaucraties anti-terroristes du pays ; il leur faut trouver quelque chose pour justifier leurs salaires, » a-t-elle dit.

Comme d’autres militants qui ont été assignés, Molm milite au sein d’un groupe appelé Students for a Democratic Society (SDS) qui a joué un rôle important dans l’organisation de grandes manifestations contre la guerre US au Vietnam dans les années 60 et 70.

Dohrn a été une dirigeante nationale de l’organisation de 1966 à 1970 et a de l’expérience en matière d’assignations et convocations devant un grand jury encourues par la nouvelle génération de militants.

«  Lorsque j’ai été convoquée devant un grand jury et que j’ai refusé de collaborer... J’ai été emprisonnée puis libérée huit mois plus tard par le même juge, qui a déclaré «  il n’y a apparemment aucune preuve contre vous. » C’est une drôle de manière de montrer votre innocence. »

A l’époque du mouvement anti-guerre dans les années 60, quelques militants américains se sont rendus au Vietnam pour constater les effets des bombardements des B52, des épandages de l’Agent Orange et du soutien occidental au gouvernement du Sud Vietnam.

Jane Fonda, ancienne militante devenue star du fitness, s’est rendue célèbre en posant aux côtés d’un canon antiaérien avec des communistes nord vietnamiens, et en critiquant les États-Unis pour leur campagne «  illégale » de bombardements contre le pays.

De nouveaux outils pour les militants

Mais aujourd’hui, visiter des pays où règne une agitation armée - Palestine, Colombie, Irak ou Afghanistan, Somalie ou Yémen - est beaucoup plus facile, en partie grâce aux progrès de la technologie et à la baisse des prix de transport occasionnés par la globalisation capitaliste.

Les voyages facilitent les contacts humains. Et les militants US déclarent qu’ils luttent pour informer les gens ordinaires des injustice commises, en leur nom, dans des endroits loin de Minneapolis ou de Chicago.

Lorsque Molm s’est rendue en Palestine en 2004, elle dit que les médias US n’étaient pas du tout intéressés par ses conférences ou les «  injustices » qu’elle avait vues. «  A présent, j’ai tous les grands médias qui me demandent ce que j’ai vu là -bas. Maintenant je peux raconter les démolitions des maisons et le mur (de séparation construit par Israël) »

Au moins sur ce plan-là , dit elle, l’assignation à comparaître devant un grand jury pourrait donner un bon coup de pouce pour leur combat auprès de l’opinion publique américaine.

Source : Al Jazeera
http://english.aljazeera.net/focus/2010/09/201092993840748931.html

traduction VD pour le Grand Soir

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