Appel à l’humanité

"Diverse Humanity", Alexandra Lane

Ceci est un appel à l’humanité des femmes et des hommes du 21ème siècle. Un appel qui sonne comme l’imminence d’un changement, au croisement toujours plus proche des ténèbres de la fin d’un cycle et des lumières du début d’un autre. Un appel à celles et ceux qui comme moi transpirent cette même impression désagréable que tout se meurt, que l’état de droit n’est pas, que l’Humanité fonce tête baissée sur une autoroute sans sortie, que notre mauvaise foi et nos mensonges sont infinis et que s’installe cette insidieuse résignation à consommer du monde qui va mal.

Les mots qui vont défiler sous vos yeux ont pour cible votre conscience, que vous soyez proie ou prédateur, indigné ou dignitaire. Car comme vous je fais partie de cette génération sacrifiée qui veut, qui peut et qui va tout remettre en question. Tout. Telle est sa raison d’être. Prise en étau entre les murs que sont les frontières et l’argent, elle s’est formée en souterrain, comme une lame de fond, sous toutes les crises que nous traversons, c’est une véritable crise humaine que nous vivons. Que nous soyons Européens, Africains, Asiatiques ou Américains. N’en déplaise aux fatalistes, les récentes et multiples naissances de mouvements citoyens à travers le monde sont en cela des initiateurs de formes de pensées politiques nouvelles. A la lumière de leurs étincelles, nous goûtons à l’odeur des mèches qu’ils rallument pour nous éclairer. Car il est grand temps de réunir nos forces, de puiser en nous le courage d’exorciser nos peurs, de se sentir humain parmi les humains et de se projeter dans un avenir commun. Un monde dans lequel les dictatures financières, politiques et militaires des oligarchies seraient reléguées aux oubliettes de l’Histoire. Un monde dans lequel les citoyens pourraient réellement prendre part aux décisions politiques, libres de s’exprimer, libres d’aller et venir où bon leur semble. Un monde dans lequel l’homme et la nature seraient enfin au coeur des préoccupations, où les désirs seraient subordonnés aux besoins. L’espoir, aujourd’hui, relève du bon sens, participe du beau et surtout, il est plus que jamais vital.

Comment changer le monde ? Voilà la vraie question. Imaginer qu’un paradigme miracle pourrait nous propulser du jour au lendemain dans une ère de paix et de sérénité serait naïf, n’est-ce-pas ? Voilà pourquoi nous feignons ne pas pouvoir répondre à cette question fondamentale, nous réfugiant derrière son apparente inaccessibilité et nous moquant de la première âme venue qui se risquerait à une réponse ou en nous disant comme pour nous rassurer que l’important n’est pas la chute, c’est.... Ces comportements que nous adoptons face à nos responsabilités sont en fait les révélateurs d’un profond sentiment d’impuissance.

Si nous aspirons à la dignité, à l’autogestion et à ce que les peuples du monde décident de ce que le monde doit être, alors ce n’est qu’à travers notre réalisation personnelle qu’une réalisation collective sera possible. Nous ne pourrons changer le monde extérieur que si nous changeons notre monde intérieur. En un mot, se réaliser pour réaliser.

Si cette proposition est bel et bien une alternative aux postures réformistes (améliorer le système en place) ou révolutionnaires (changer radicalement le système), c’est parce qu’elle suggère une approche d’une toute autre dimension : construire un monde nouveau à l’intérieur même de l’ancien monde, sans chercher ni à le compléter ni à le détruire. Il s’agit donc d’innover, d’être créatif, de consacrer notre énergie à la réalisation et au développement d’un véritable espace public, par les citoyens et pour les citoyens.

Les barrières de cet espace public se trouvent en nous, nichées au plus profond de notre conscience. Sur le chemin vers notre humanité, nos doutes et nos peurs sont les obstacles qui nous enjoignent à faire demi-tour. Le long processus de reconquête que requiert la création d’un espace public réel ne peut donc s’enclencher que par la prise de cette conscience. C’est de là que jaillit la lumière, que l’on se rend compte d’une réalité, que l’on se réalise en acquérant de nouvelles connaissances qui nous permettent de mieux prendre la mesure du monde qui nous entoure et de découvrir des vérités jusqu’alors inconnues ou hors de portées. Cette évidence parait somme toute très simple, mais le fait est qu’elle semble encore inaccessible pour le plus grand nombre. Nous voyons tant de nos semblables hésiter, danser d’un pied puis l’autre en espérant qu’il ne s’agisse que d’un mauvais rêve. Pourtant, c’est notre éclatante réalité. Il est donc plus que temps d’en prendre conscience, chacun à notre niveau.

Naturellement, cette prise de conscience individuelle induit une responsabilité morale. En effet, comment ne pas réagir lorsque l’on a enfin réalisé ? Il devient alors inévitable de se repositionner. C’est un grand moment de vérité car il va falloir se redéfinir, implicitement ou explicitement, que cela débouche sur de l’indifférence ou de l’empathie. Mais il y a dès lors de grandes chances que, de cette petite graine de conscience en nous, une volonté puisse germer. Une volonté qui se marierait avec le besoin de revoir nos schémas de pensées et de se faire les avocats du diable de nos sociétés afin de libérer nos esprits de leur cellule de certitudes et enfin pouvoir atteindre l’étape ultime : mettre en place des actions nouvelles, constructrices et libératrices. Or le déclencheur de ces actions réside dans notre capacité technique. Les outils, réels ou virtuels, sont à notre portée, nous savons comment les utiliser. Ils sont notre pouvoir d’action, celui d’agir sur nos vies.

Rappelons brièvement le contexte à travers lequel la réalisation de cet espace public se dessine, car un des aspects paradoxaux de ce début de siècle transparait dans son individualisme mondialisé qui par la relativité des phénomènes, se révèle être également une opportunité inédite. En effet, pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, des êtres humains des quatre coins de la planète ont la possibilité de communiquer, d’échanger leurs compétences, de s’organiser et d’additionner leurs énergies. Les moyens techniques et matériels existent donc bel et bien. C’est un fait. Notre génération - tous les êtres humains vivants actuellement - a les outils nécessaires pour se réapproprier sa dignité.

Dès lors, face aux innombrables constats d’échec de nos politiques, si nous comprenons que les principes et les dogmes dont nous avons hérités sont le produit de la société telle que l’homme l’a construite, il devient évident que ceux-ci peuvent et doivent impérativement passer sous nos microscopes. Un gouvernement qui n’a plus que la peur, la manipulation et la violence à opposer à un mouvement profond d’expression populaire est en fait déjà mort.

Disons-le autrement : le savoir est sur le pas de la porte, le vouloir est tapi juste derrière. Et, le pouvoir populaire, lui, n’est plus un mythe. Sortons dans les rues, reparlons-nous, réunissons-nous en assemblées populaires, réapprenons le langage, l’écoute et le partage et réinventons. Reconnaissons que nous n’avons plus aucune excuse, aucun prétexte valable pour justifier notre inaction et notre silence.

Littéralement,

Badi Baltazar

www.lebuvardbavard.com

COMMENTAIRES  

13/09/2011 04:08 par oscar fortin

Profonde réflexion qui invite tout à la fois à prendre un certain recul par rapport à tout ce qui se passe pour mieux se ressaisir soi-même dans nos identités et nos valeurs profondes et en même temps à sortir dans la rue pour faire entendre notre voix.

Je pense que l’humanité est beaucoup plus que toutes les parties qui la composent. Elle porte une conscience qui résulte de la synergie qui émerge des rencontres, des débats, des prises de consciences individuelles partagées. Teilhard de Chardin parlait de la "conscience des consciences", cette conscience d’humanité qui passe progressivement dans chacune de nos consciences et nous sort de l’individualisme pour nous faire naître dans un "nous collectifs libérateur.

Merci à vous M. Baltazar pour partager avec les lecteurs et lectrices du Grand soir ces réflexions.

13/09/2011 09:30 par Prairial

Ben....c’est gentil tout plein , il y a plein de bonnes intentions et de bons sentiments , de belles phrases , et tout et tout ....mais cela ne me semble pas concerner en quoi que ce soit le début d’une ébauche de solution et n’amène à aucune lutte ou militantisme pourtant indispensables pour lutter contre ce qui est dénoncé ( pour moi ..).
Même en me drapant d’un sari safran et entouré de bougies multicolores je ne pense pas pouvoir m’associer à cette accumulation de propos intrinsèquement formés dans un creuset quelque peu ....théologique .
C’est gentil , voilà tout mais ce n’est pas ma façon de ne pas agir .

13/09/2011 09:55 par Zeca

Merci ...
On attend tous (quelques centaines de milliers selon la police) au fil des jours, un titre sur un site alternatif ou un autre, du genre "L’Appel". Celui qui va fédérer les individualismes exacerbés depuis quarante ans par la grande distribution d’écrans ou de yaourts allégés et donner ce coup de pied au cul qui envoie illico la nouvelle génération de sans-culotte forcer son destin dans la rue.
Ca y ressemble beaucoup, non ?
J’enfile mes pompes ...

13/09/2011 14:53 par Abdelkader DEHBI

« « Nous ne pourrons changer le monde extérieur que si nous changeons notre monde intérieur. En un mot, se réaliser pour réaliser. » »

Je vais faire hurler les athées, mais - loin de moi tout esprit de prosélytisme - le Coran ne dit pas autre chose :

إنٌ الله لا يغير ما بقوم حتى يغيروا ما بأن٠سهم"" (سورة الرعد - الآية 11

« « Dieu ne transforme une société qu’autant [que ses membres] se transforment eux-mêmes. » » (Sourate n°13 Le Tonnerre- -Verset 11)

Cet Appel à l’Humanité mérite un sérieux débat à l’échelle du monde entre hommes qui se sentent concernés par le sort de notre civilisation ; un débat sans aucun a priori ni exclusive, c’est-à -dire un débat qui n’écarte aucune philosophie, aucune idéologie, aucune religion, aucune croyance, aucune opinion, afin d’encourager l’émergence - par thèmes à déterminer - d’idées essentielles, réalistes et consensuelles, susceptibles d’être porteuses de réponses à la profonde crise multidimensionnelle dans laquelle risque de sombrer, en l’espace de quelques décennies, notre pauvre humanité.

« « En effet, pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, des êtres humains des quatre coins de la planète ont la possibilité de communiquer, d’échanger leurs compétences, de s’organiser et d’additionner leurs énergies. » »

écrit Badi Baltazar.

Et l’on est tenté de le paraphraser en ajoutant :
Et le vaste Agora sans frontières qu’est devenue notre planète aujourd’hui, ne permet

« « plus aucune excuse, aucun prétexte valable pour justifier notre inaction et notre silence. » »

Première proposition :

Le Grand Soir pourrait-il traduire cet Appel dans les langues les plus lues, en particulier l’anglais, l’espagnol et l’arabe ?

13/09/2011 15:15 par legrandsoir

Le Grand Soir pourrait-il traduire cet Appel

...appel aux bénévoles et bonnes volontés...

13/09/2011 16:46 par Prairial

@Abdelkader DHEBI

Rassurez-vous , du moins en ce qui me concerne vous ne me faites pas hurler croyez-le . C’est bien ce qu’intérieurement je pensais avant que vous n’éclairiez davantage et avec précision , mais je sentais le coté religieux sans penser au Coran que je ne connais pas ( j’ai des notions de christianisme étant né dans le milieu mais c’est tout ) .
Et après tout , si un groupe d’individus , que l’on dit appartenir à un Dieu ou non dit quelque chose de censé , comme le fait d’ailleurs Badi BALTAZAR et bien pourquoi faudrait-il le critiquer ou lui tomber sur le râble si je cautionne aussi ? Parce qu’il le dit au nom d’autre chose , pour le coup ce serait idiot je pense .
Simplement , pour avoir lu parfois des écrits de cet auteur sur un autre site , je trouve qu’il lui arrive d’être plus inspiré , plus concrèt , là c’est du ’’ peace and love ’’ , je connais , j’ y étais .

13/09/2011 21:36 par lulu

Abdelkader DEHBI

« « Dieu ne transforme une société qu’autant [que ses membres] se transforment eux-mêmes. » » (Sourate n°13 Le Tonnerre- -Verset 11)

Et pour se transformer soi même, il faut se positionner dans le présent, regarder la réalité en face en abandonnant ces filtres médiatiques, idéologiques, mystiques, spirituels qui ont tous en commun de nous promettre le paradis pour mieux nous maintenir en enfer. Je ne vois donc pas ce que vient faire dieu dans cette affaire.

13/09/2011 23:32 par Badi Baltazar

Merci pour vos commentaires.

Je tiens néanmoins à préciser pour les éventuels allergiques aux formes d’expressions spirituelles qu’il s’agit dans le cas présent d’un appel, pas d’une méthode révolutionnaire qui aurait la prétention de dévoiler les secrets de la pierre philosophale, fusse-t’elle une utopie.

@ Abdelkader :

Merci pour votre double pertinence.

Cet appel a déjà été traduit dans une dizaine de langues. Je vous invite à retrouver toutes les versions disponibles sur mon blog : www.lebuvardbavard.com

L’essence même de cet appel est illustrée par les réalisations individuelles et collectives des personnes qui ont contribué à sa rédaction, à ses traductions, à sa diffusion et à son partage.

Littéralement,
Badi Baltazar

(Commentaires désactivés)