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Assange est coincé, les Etats-Unis sont sur le déclin : Interview exclusive avec l’avocat d’Assange (Voice of Russia)

Le président émérite du Centre pour les droits constitutionnels (Center for Constitutional Rights - CCR), Michael Ratner, l’avocat américain de Julian Assange a répondu aux questions de John Robles de La Voix de la Russie, sur la situation actuelle de Julian Assange qui reste coincé à l’ambassade de l’Equateur à Londres. Lors de cette interview, qui est la première partie de l’entretien, l’avocat d’Assange aborde l’usage illégal des drones par les Etat-Unis, il parle de la réaction extrêmement agressive contre les lanceurs d’alerte et des « diseurs de vérité » (« truth sayers ») de l’Etat américain et qualifie ces actions d’illégales et d’irrationnelles, comme celles d’un Etat sur le déclin s’accrochant désespérément au pouvoir.

M. Ratner parle aussi de Bradley Manning, Jérémy Hammond, du Gouvernement secret US, mentionne ses clients de Guantanamo qui ont été torturés et le prix du courage, le fameux Yoko Ono-Lennon Award for Courage, qu’il a reçu récemment pour M. Assange à New York en son absence.

Robles : Bonjour Monsieur ! Comment allez-vous ce soir ?

Ratner : Je vais bien et je suis content de vous parler John, je vous remercie de me recevoir.

Robles : Très heureux de vous parler également, c’est un plaisir. Pouvez-vous parler un peu à nos auditeurs des différentes affaires juridiques dans lesquelles vous êtes engagé et de ce qui se passe en coulisses, si vous pouvez, aux Etats-Unis et en général, parce que les informations ne sortent pas ?

Ratner : Oui, beaucoup d’informations ne sortent pas et ça me contrarie vraiment. Je suis sûr que nombre de vos auditeurs connaissent Julian Assange, l’éditeur et le rédacteur en chef de Wikileaks et qui est maintenant à l’ambassade d’Equateur depuis 234 jours, soit les deux tiers de l’année. Il a été emprisonné ou en détention de quelque sorte depuis 796 jours et c’est d’abord et avant tout parce que les Etats-Unis veulent tôt ou tard lui mettre la main dessus et, je pense, le mettre en prison pour le reste de sa vie.

Ainsi, ce que Julian Assange a été forcé de faire, c’était de se réfugier à l’ambassade d’Equateur où heureusement il a été très bien accueilli et où il a pu se voir accorder l’asile diplomatique et se trouve en sécurité tant qu’il est à l’intérieur.

Le problème présent pour Julian Assange est bien sûr qu’il ne peut sortir sans être arrêté par les Anglais et ensuite être envoyé en Suède.

En Suède, il y a des allégations d’inconduite sexuelle mais ce n’est pas ce qui retient Julian Assange. Le problème est que s’il est remis à la Suède, il sera en prison et puis sera envoyé, je crois, très rapidement aux Etats-Unis.

Rodles : Que pouvez-vous nous dire sur ces allégations, très rapidement, si vous savez quelque chose à propos de la victime présumée ? Apparemment, elle avait des connections avec la CIA. Que pouvez-vous nous en dire ?

Ratner : Vous savez, je n’en sais pas grand chose. Je sais que j’ai lu une information que l’une d’elles est partie à Cuba et travaillait avec un groupe appelée les « Dames en Blanc ». Les Dames en Blanc sont des dissidentes à Cuba, si on veut les appeler comme cela, mais pour autant que je sache, elles sont financées par, si ce n’est la CIA, certainement par l’association AID qui est leur source de financements des Etats-Unis.

Donc, il y a cela, j’ai lu certaines choses sur l’une des personnes qui y est allée. Je n’en sais pas plus que cela sur ce qui se passe en Suède. Ce que je sais c’est qu’il y a des allégations et qu’il n’y a pas de charges.

Et Julian, ça aussi je le sais, est disposé à se rendre en Suède et répondre à ces allégations et témoigner mais il craint énormément - et je l’ai soutenu à ce propos très fermement, connaissant mon pays, connaissant les Etats-Unis, sachant ce qu’ils font aux personnes comme Julian - que s’il se rend en personne en Suède, il aura de graves problèmes si les Etats-Unis mettent la main sur lui.

Donc, c’est une question vraiment très grave pour moi à ce stade. A moins que nous obtenions des garanties de la Suède et du Royaume Uni, pour parler des coulisses, qu’il ne sera pas ensuite envoyé de la Suède aux Etats-Unis, je lui conseille très fermement de ne pas se rendre en Suède.

Robles : Pouvez-vous nous en dire un peu sur ce que vous faites aux Etats-Unis pour arrêter cette persécution ? N’y a-t-il aucune chance qu’ils abandonnent ? Exigent-ils quelque chose de précis ? Que pouvez-vous nous dire à ce propos ?

Ratner : Le contexte aux Etats-Unis est terrible. Je suis sûr que les gens peuvent se rappeler quand les câbles ont commencé à sortir, avec bien sûr les premiers portant sur les rapports de guerre en Irak et en Afghanistan, la vidéo « Collateral Murder » et puis les derniers câbles du département d’Etat qui n’étaient pas seulement embarrassants pour les Etats-Unis mais montraient leur hypocrisie, ainsi que les guerres secrètes menées au Yémen qui ont rendu les Etats-Unis furieux contre Wikileaks et Julian Assange. Et il y a des gens, des politiciens, des experts et d’autres qui ont réellement dit qu’il devrait tout simplement être tué par un drone, c’est ce qu’ils ont dit.

Robles : J’ai encore entendu cela il n’y a pas si longtemps. J’ai moi-même lu beaucoup d’articles publiés, je n’ai rien vu de particulièrement dommageable. Pourquoi une réaction si violente ?

Ratner : Il y a des informations là -dedans qui de toute évidence ont été très utiles aussi à des gens comme moi qui sont des avocats des droits humains. Elles montrent par exemple que les Etats-Unis essayaient de s’immiscer dans nos efforts d’envoyer les tortionnaires devant la justice en Espagne et montrent aussi la guerre clandestine menée au Yémen.

Mais je suis d’accord avec vous, il n’y a rien là -dedans qui soit assimilable à ce que les Etats-Unis appelleraient de l’espionnage : les mouvements de troupes ou comment fabriquer une bombe atomique ni absolument rien de cette envergure.

Vous savez, nous nous trouvons dans une mauvaise période en ce moment aux Etats-Unis. Nous sommes dans une période d’une incroyable agressivité en termes de torture à Guantanamo sous l’administration Bush, certainement, et sous l’administration Obama en ce moment avec sa politique d’assassinats par drones, même ceux qui ne constituent aucune menace immédiate pour les Etats-Unis. Nous venons d’assister à une audience sur ce sujet et il semblerait que la personne en charge de cette politique, Jon Brennan, sera notre prochain patron de la CIA.

Les Etats-Unis sont dans une attitude très agressive et il y a aussi une énorme quantité de d’actions tenues secrètes, ce qui fait que le nombre de documents classifiés est passé de 8 millions par an à 76 millions par an.

J’ai des clients, je représente certaines personnes à Guantanamo, qui ont été torturés et qui n’ont même pas le droit d’en parler. Un avocat ne peut pas parler du fait que ses propres clients ont été torturés.

Ainsi, le gouvernement a tout simplement imposé le silence sur tout. Donc, si vous regardez le travail de Wikileaks, d’autres diseurs de vérité, d’autres lanceurs d’alerte, ces gens rendent vraiment un très grand service aux Etats-Unis en ce moment ou aux gens aux Etats-Unis en dévoilant toute cette hypocrisie et toute cette illégalité.

Je pense donc que maintenant les Etats-Unis veulent tout simplement y mettre un coup d’arrêt. Le gouvernement dit : nous voulons continuer à garder le secret sur notre manière de gouverner, sur qui nous sommes et nous allons nous assurer que le message est bien passé.

Et regardez ce qu’ils ont fait ! Ils ont obtenu que Julian Assange soit confiné à l’ambassade. Ils ont mis Bradley Manning dans un cachot à Fort Meade. Il est en prison depuis 991 jours, presque mille jours (ça fera 1000 jours le 23 février prochain - NDT), presque trois ans.

Jeremy Hammond, une autre source alléguée de WikiLeaks, est emprisonné ici à New York depuis presqu’un an. (1)

Il y a un Grand Jury secret qui enquête sur Julian Assange et qui essaye, je crois, de l’inculper pour espionnage. Ce Grand Jury se déroule depuis presque trois ans.

Nous avons donc affaire à une offensive majeure des Etats-Unis contre les diseurs de vérité, contre ceux qui pubient la vérité et ils veulent y mettre un coup d’arrêt parce que je crois qu’au fur et à mesure que les Etats-Unis s’affaiblissent, ils deviennent plus agressifs dans le domaine international et ça, ça doit rester un secret.

Robles : Vous voyez cela comme un affaiblissement et peut-être une tentative désespérée de s’accrocher au pouvoir ?

Ratner : Je le pense oui. Je pense que si on examine dans une perspective historique à la fois la puissance des Etats-Unis et lorsqu’un pays se livre à des actes comme la torture et des assassinats partout dans le monde, il me semble qu’il s’agit d’une période de déclin marquée par leur crainte de ne plus savoir comment continuer à dominer le monde.

Les Etats-Unis ne représentent que 5% du monde consomment 25% de ses ressources. Ils ont de loin le plus gros appareil militaire au monde et ils ne voudront pas le lâcher si facilement. Je pense que ce à quoi on assiste ici, c’est la reconnaissance par le gouvernement de son affaiblissement et qu’il frappe d’une manière parfois irrationnelle mais toujours inhumaine.

Robles : Je ne sais pas si vous pouvez en parler, mais avez-vous été frappé par une lettre de la sécurité nationale ("National Security Letter" ) ou quelque chose de similaire à propos de Guantanamo ?

Ratner : Je n’ai jamais reçu de lettre de la sécurité nationale. Mais vous avez raison, il s’agit de savoir si on la droit de parler d’eux ou pas, et il a fallu des années pour simplement gagner le droit d’en parler à son avocat et d’aller en justice.

Je n’ai jamais reçu de lettre de la sécurité nationale. Mais vous savez, c’est concevable.

Ils ne me la donneraient pas forcément, ils l’enverraient à des lieux que je fréquente, à ma bibliothèque, à mon compte Twitter et sans forcément m’en avertir. Donc, si j’en avais une, je ne serais pas forcément au courant.

Je n’en ai jamais reçu personnellement mais ils la délivrent aux tiers détenteurs de vos dossiers, à votre société de carte de crédit, votre banque, votre bibliothèque, pour obtenir des informations sur le genre de livres que vous lisez, à qui vous téléphonez. Ils la délivrent à votre fournisseur d’accès à internet, pour savoir quels sites web vous visitez et tout ce genre de choses. Cela se produit massivement aux Etats-Unis en ce moment, cela arrive tout le temps.

L’état de surveillance aux Etats-Unis est absolument gigantesque en ce moment. Et Julian Assange en a parlé. Il a parlé de la façon dont ils n’ont plus besoin de cibler les individus, ce qu’ils font c’est qu’ils ont des ordinateurs qui enregistrent toutes les informations et puis ils décident de ce qu’ils en font. Ils ne prennent plus la peine de surveiller untel ou untel, ils prennent tout.

Robles : Pouvez-nous parler un peu de Julian et du prix que vous avez reçu en son nom ?

Ratner : J’ai vu que vous avez écrit un très bon papier sur ce prix.

Robles : Oh ?! Merci !

Ratner : "Assange reçoit le Prix du Courage Yoko-Lennon pour les Arts » (Yoko-Lennon Courage Award for the Arts) J’ai pensé que c’était vraiment important.

Je pense deux choses : j’ai rendu visite à Julian il y a dix jours à Londres. J’ai passé deux jours à l’ambassade d’Equateur et Julian allait plutôt bien.

Il va rester là jusqu’à ce que nous trouvions une solution pour le faire sortir de là sans lui faire courir le risque de se retrouver emprisonné dans une cellule clandestine d’une prison aux Etats-Unis.

Il travaille. WikiLeaks continue à fonctionner. Il y a des sites web qui sont toujours avec WikiLeaks et qui continuent à publier des documents.

Donc, il est assez fort. Et bien sûr parce qu’il est un spécialiste en informatique, il est avec son ordinateur et il a des amis et reçoit des visites, et il peut parler, etc. Donc, il va bien de mon point de vue.

Combien de temps pourra-t-il tenir ? Vous savez, je ne veux pas que cela s’éternise, nous devons le faire sortir de là tôt ou tard.

Et j’espère que le Prix du Courage accordé par Yoko Ono à Julian cette année nous aidera, parce qu’elle a accordé une reconnaissance à Julian Assange en dépit de tous ces « détracteurs » qui sont comme des girouettes - vous savez, quand tout va bien et que vous êtes populaire, ils sont là , mais quand ça va moins bien, on ne les voit plus - et elle s’est levée pour lui et c’est vraiment courageux de sa part.

Elle lui a donné le Prix du Courage Yoko Ono-Lennon au Musée d’Art Modern de New York devant 150 personnes. Et Yoko récompense tous les ans une personne d’un courage extraordinaire dont le travail a changé le monde.

Et elle croit que Wikileaks a joué un rôle crucial en changeant le monde et en faisant précisément ce qu’elle pense devait être fait, à savoir dire que le gouvernement est payé par le peuple et devrait être dirigé par le peuple des Etats-Unis aux Etats-Unis.

Nous avons droit à cette information et Julian Assange et WikiLeaks nous ont donné accès à cette information. Et elle lui a donné le Prix du Courage que j’ai accepté en son nom mais aussi et plus important encore par Baltasar Garzon.

Fin de la partie 1 - Interview réalisée le 9 février 2013

Source : http://english.ruvr.ru/2013_02_09/Assange-is-trapped-the-U-S-is-in-decline-exclusive-interview-with-Assanges-lawyer/

Traduction : Romane

1. Jérémy Hammond est accusé d’avoir piraté les fichiers Stratfor, les "Gifiles", ceux-là mêmes qui nous ont appris qu’il y avait une inculpation secrète d’Assange - "sealed indictment" - en vue de son arrestation - NDT


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