On pourra gloser sur le rôle de ce conseil : troisième assemblée de la République, il donne son avis sur les projets de loi, d’ordonnance ou de décret ainsi que sur les propositions de loi qui lui sont soumis.
Il est composé de 233 membres :
- 140 membres au titre de la vie économique et du dialogue social dont 69 représentants des salariés
- 60 membres au titre de la cohésion sociale et territoriale et de la vie associative
- 33 membres au titre de la protection de la nature et de l’environnement
C’est donc le lieu où se côtoient au nom du "dialogue social" et de la "cohésion sociale", représentants syndicaux, représentants du patronat, hommes politiques ...
Autrement dit où loin du terrain à partir de "diagnostics partagés" sous la domination de l’idéologie dominante et des idées "libérales en vogue s’élaborent des orientations et des choix politiques dans le droit fil des intérêts de l’oligarchie et des préconisations de l’union européenne.
La preuve ?
Pour s’en tenir à ce seul exemple c’est ainsi que Thierry Lepaon cosigne en juin 2012 un rapport avec Jean-Marie GEVEAUX, président UMP du conseil général de la Sarthe préconisant l’expérimentation de l’ouverture à la concurrence des TER !
Ou que sont organisées en son sein des réunions telles celles du 22 janvier 2014 avec
- Carole COUVERT,Présidente CFE-CGC
- Thierry LEPAON, Secrétaire Général CGT
- Laurent BERGER, Secrétaire Général CFDT
- Pierre GATTAZ, Président MEDEF
pour débattre de quoi ? Eh bien du "Nouveau visage du syndicalisme ...",
On peut donc à bon droit s’interroger sur le bien-fondé de la participation syndicale à ce genre d’assemblée sous couvert de la défense des intérêts des travailleurs.
Ou bien l’insistance à justifier cette présence dans ce genre de cénacle ne masque-t-elle pas la défense d’intérêts bien moins avouables ?
Car au fond quels sont les résultats de cette participation pour le monde du travail ?
C’est devant cette docte assemblée que François Hollande ce 18 janvier annonce l’agression contre le code du travail et la remise en cause de la durée du temps de travail dont la détermination est renvoyée au niveau de l’entreprise sous le chantage à la fermeture et aux délocalisations, là donc il y a le moins de garanties pour les travailleurs et où le rapport de force joue à plein en faveur du patronat.
Et que font les représentants syndicaux dans cette enceinte ? Quel est leur degré d’autonomie et d’indépendance ? En quoi cette présence contribue-t-elle au développement nécessaire des luttes pour bloquer les contre-réformes réactionnaires et la remise en cause généralisée de tous les conquis des luttes antérieures ?
Poser la question c’est y répondre.
L’institutionalisation syndicale
Car non seulement cette présence ne sert à rien mais de surcroît elle contribue au discrédit qui frappe les organisations contaminées comme le dit l’historien Stéphane Sirot par le virus de l’institutionnalisation.
Autrement dit par la bureaucratisation de la pratique syndicale.
Interview de S. Sirot au Populaire du Limousin
Lors des célébrations des 120 ans de la CGT, vous interviendrez sur l’institutionnalisation du syndicalisme. Pouvez-vous expliquer ce phénomène ?
C’est un thème que la direction de la CGT, en particulier Philippe Martinez, veut intégrer au prochain congrès qui se déroulera l’année prochaine. Au sens sociologique du terme, le syndicat estune institution, mais l’institutionnalisation, c’est ce qui l’a conduit, depuis le début, à être intégré à l’ordre politique et économique. Longtemps, la CGT a porté un projet de société que ses syndiqués qualifiaient volontiers de révolutionnaire. Mais à partir des lois Auroux, le mouvement syndical s’est orienté vers une fonction institutionnelle, de dialogue social et de rencontre avec les pouvoirs publics. Cela a eu un effet néfaste : le syndicat est moins présent sur le lieu de travail et moins tourné vers la création de mouvement social et de revendications.
Chiche !
Cette institutionnalisation de fait est une préoccupation pour Philippe Martinez le secrétaire général de la CGT qui souhaiterait l’intégrer au 51e congrès du syndicat, à Marseille, en avril 2016. Dans un entretien que publie l’Humanité du 23 septembre, il aborde la question admettant être « dans un cycle où les syndicats sont aspirés dans l’institutionnel, avec la multiplication de réunions. [...] Nous passons beaucoup trop de temps avec les patrons et avec le gouvernement, pour décider à la place des salariés. [...] Or, nous ne devons pas décider entre gens de bonne compagnie sans consulter les salariés, car c’est aller à l’encontre de notre conception du syndicalisme
Et précisément, la participation à ce genre d’institution pose la question de la véritable indépendance de réflexion et d’action des syndicats et de leur dé-institutionnalisation.
Et c’est donc à cela que le 51e congrès de la CGT doit aussi tourner le dos !
Et on voit bien par exemple dans l’intervention de Manuel Valls ce 12 janvier dernier, dans son souci de rehausser le rôle du CESE (voir ci-après) en flattant ses membres que l’objectif est bel et bien de faire accepter en particulier par les " partenaires sociaux" la politique de régression sociale mijotée par Macron ... et Valls.
Pour mise à jour rappelons que Patrick Bernasconi, le nouveau président du CESE est un ex dirigeant du MEDEF porté donc à la tête de l’institution également par les voix de la CFDT, de la CFTC, du CFE-CGC et de l’Unsa !!
Vous avez dit collaboration ?
Décidément, c’est bien dans la rue et dans les luttes que ça se passe et en dehors du sort propre (voir ci-après les intérêts en jeu) des parties prenantes de ces institutions on voit mal (c’est un euphémisme) en quoi la présence syndicale dans ce genre de fourre-tout est une garantie quelconque dans la défense des intérêts des travailleurs.
Le Front Syndical de Classe
Janvier 2016
Suite et complément de l’article à l’adresse :
http://www.frontsyndical-classe.org...