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Egypte : le coup d’Etat militaro-Etats-unien a réussi.

Le général Abdul Fatah Al-Sissi, chef d'état-major de l'armée égyptienne, auteur direct du coup d'état a été en contact direct durant tout le processus de renversement du gouvernement avec Chuck Hagel, secrétaire à la défense des Etats-Unis d'Amérique. Christian Mallard, chef du service étranger de la télévision publique France 3 l'affirmait hier le 05 juillet sur France 24 : "Al-Sissi fut en contact permanent avec Chuck Hagel".

C’est fait ! Le coup d’état militaro-Etats-unien vient de réussir en Egypte. L’armée a démis Mohammed Morsi de la présidence et lui interdit de sortir du pays. Systématiquement diabolisé depuis les tous premiers jours de son arrivée au pouvoir après des élections transparentes, Mohammed Morsi a fini par être éjecté après que "l’opposition", pourtant battue aux élections en 2012, ait réussi à faire descendre des millions d’Egyptiens dans les rues. Morsi est accusé (de façon ridicule mais très efficacement puisque les accusations seront médiatiquement relayées et largement amplifiées) tour-à-tour de n’avoir pu régler, après un an d’exercice du pouvoir, les problèmes des Egyptiens, de s’accaparer de tous les pouvoirs et d’avoir fait pire sur le plan des libertés que Moubarak et tous les régimes précédents. Mais c’est de la Tanzanie que viendra le coup de grâce. Séjournant dans ce pays, dernière étape de son périple africain entamé depuis bientôt une semaine, le président des USA, Obama prononçait une phrase lourde de sens indiquant que le président "Morsi doit écouter la rue". Laurent Fabius a embrayé à son tour en disant : "Quand il y a une telle masse de problèmes et une telle masse de population qui exprime plus qu’un malaise, un refus, une angoisse, il faut que le gouvernement égyptien écoute le peuple. (...) Il faut que le président Morsi entende ce qui se passe", a-t-il expliqué sur la chaîne i-Télé." (Et si François Hollande et sa clique de socialistes qualifiés d’incompétents à longueur de journées écoutaient aussi les Français !?). Le premier ministre britannique a fait des déclarations allant dans le même sens aujourd’hui même. David Cameron a précisé d’ailleurs qu’un "message vraiment clair est envoyé à Morsi". Ce soir, c’est fait, cette armée qui a réprimé des Egyptiens depuis des dizaines d’années, et qui est formée, équipée et soutenue par les USA et qui a fait disparaître des dizaines de personnes lors des manifestations populaires contre Moubarak a repris la situation en main. Au fond, elle n’a jamais perdu la maîtrise de la situation sous le regard sûr de qui on sait. Plus intéressant encore à savoir, le général Abdul Fatah Al-Sissi, chef d’état-major de l’armée égyptienne, auteur direct du coup d’état a été en contact direct durant tout le processus de renversement du gouvernement avec Chuck Hagel, secrétaire à la défense des Etats-Unis d’Amérique. Christian Mallard, chef du service étranger de la télévision publique France 3 l’affirmait hier le 05 juillet sur France 24 : "Al-Sissi fut en contact permanent avec Chuck Hagel".

Il faut dire que les Egyptiens viennent vraiment de commencer le "grand marathon démocratique" qui va les conduire en enfer, dans l’enthousiasme et l’avidité servile de certains de leurs propres frères, et parfois avec leur propre accord manipulé méthodiquement. Peut-être que les Egyptiens eux-mêmes comprendront un jour l’importance historico-géostratégique de leur pays et que pour ces raisons là, en aucun cas, les Occidentaux, Israël et leurs "amis arabes" ne leur permettront pas aussi facilement de décider, de l’intérieur, de l’avenir de l’Egypte. Nasser traité de Hitler par les mêmes qui acclament aujourd’hui "la deuxième phase de la Révolution en Egypte" n’avait pas été assassiné pour que 40 ans plus tard le peuple égyptien décide librement de son avenir.

Contrairement donc à certains commentaires qu’on entend ici ou là, Morsi n’a pas été placé au pouvoir par les Occidentaux. Il est faux de dire le contraire. Morsi a été élu et ce n’est qu’à contre-coeur qu’il a été toléré par les Occidentaux et Israël. Et, il faut le rappeler, dès les premiers jours de sa présidence, Morsi a subi la réalité du pouvoir dans un pays aussi important pour les Occidentaux et Israël comme l’Egypte. Non seulement l’Egypte a le Canal de Suez, un des nerfs de l’économie occidentale, mais il est le pays le plus peuplé de ce qu’on appelle "le monde arabe", sa proximité géographique avec Israël qui est en train d’éliminer totalement les Palestiniens font qu’on ne peut laisser n’importe qui le diriger. Dans le même temps, des cadres de l’armée, une institution véritablement américano-britannique dans le pays, et des dignitaires de l’ancien régime de Moubarak, qui n’ont nulle autre ambition pour leur pays si ce n’est qu’il reste un pays rentier et touristique, ont des intérêts économiques très forts (hôtels, compagnie de transport, magasins, agences de tourisme...), lesquels intérêts subissent les contrecoups de la campagne de diabolisation portant sur les "Frères Musulmans" au pouvoir en Egypte. Il fallait donc agir pour mettre au pouvoir des hommes plus lisses et plus obséquieux qualifiés de "modernistes" comme El Baradei, l’ancien président de l’AIEA (la fameuse Agence internationale de l’Energie atomique) ou Amr Moussa, l’ancien président de la Ligue Arabe. C’est ce qui est en train de se passer. 
Pour finir, disons que ce qui se passe là, en Egypte, n’est qu’un copier-coller parfait de ce qui s’est passé en Algérie dans les années 90 où le Front islamique du Salut avait remporté les élections avant d’être destitué par l’armée. La suite sera très sanglante. On a connu le même phénomène en Palestine où le Hamas avait gagné les élections alors que les Occidentaux et leurs amis ne le veulent pas au pouvoir.

Quelques minutes après le coup d’état, voici la réaction de Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères de la France :

"Dans la situation très dégradée et d’extrême tension de l’Egypte, de nouvelles élections ont finalement été annoncées, après une période de transition. La France en prend acte. Elle souhaite que les échéances soient préparées dans le respect de la paix civile, du pluralisme, des libertés individuelles et des acquis de la transition démocratique, afin que le peuple égyptien puisse choisir librement ses dirigeants et son avenir."

Que celui qui a des oreilles entende !

KPOGLI Komla
Web : http://lajuda.blogspot.com

 http://lajuda.blogspot.ch/2013/07/egypte-le-coup-detat-militaro-etats.html

COMMENTAIRES  

08/07/2013 05:22 par Dwaabala

Pas un mot, pas un seul mot de l’auteur sur les masses : il en laisse le privilège aux Obama et Fabius qu’il cite !
Partant de ces mêmes citations, donc de l’importance du peuple, qui n’existe pas pour l’auteur, il serait possible d’orienter tout autrement l’article, sans pour autant négliger l’interventionnisme impérialiste dans les affaires de l’Égypte.
Alors apparaîtrait la notion de lutte des classes et de l’influence énorme des opprimés qui pensent à leur ventre, mais auxquels échappe le contrôle politique de la situation.

08/07/2013 05:47 par Dwaabala

Quand on se dit "démocrate" on se range naturellement du côté de la légitimité...

Quand on fait la leçon au démocrates, on commence par distinguer la légalité de la légitimité.
Après tout, que par une sorte de miracle et de coup d’état dans le coup d’état survienne un nouvel Gamal Abdel Nasser, quoique complétement illégal ce dernier serait parfaitement démocrate et légitime.
Un premier progrès serait d’abandonner les catégories religieuses pour aborder la question politique, parce que jusqu’à preuve du contraire les Frères musulmans n’ont pas fait preuve de détermination, ni pour améliorer le sort des masses, ni contre l’impérialisme et le sionisme.

08/07/2013 08:55 par pilhaouer

On peut ne pas apprécier (euphémisme) les Frères et les islamistes et cependant remarquer que leur accès au pouvoir par les voies démocratiques est toujours mal apprécié (Algérie, Gaza, Egypte).
Quelle voie leur reste-t-il alors ?
Curieusement, les monarchies fondamentalistes, Arabie des Saoud, Qatar et autres émirats ne posent pas de problème (souvenons-nous de Bahrein).
Imaginer que l’Empire et son molosse local, Israël, laisse s’installer en Egypte un pouvoir qu’il ne contrôlerait pas relèverait de la naïveté. Quant à l’armée égyptienne ... ...
Et sur la place Tahrir, cette fois, il n’y a pas peut-être pas que ... "les masses"...
Lire ici :

Où sont les felouls ? Le blog de Sylvie Nony

http://blogs.mediapart.fr/blog/sylv...
... où l’on parle aussi de ce que "la presse" occulte : les grèves et les luttes syndicales.

08/07/2013 09:20 par pilhaouer
08/07/2013 10:37 par Quidam

Pour le malheur des Egyptiens Mohamed Morsi obéissait au doigt & à l’œil à Uncle Sam qui l’appuyait ainsi que le MB vu qu’ils satisfaisaient à tous ses desideratas. Mohamed Morsi appliquait également à la lettre les directives du FMI en mettant en place une politique ultraréactionnaire antisociale, d’où son impopularité croissante & les manifestations.

Toujours pour le malheur des Egyptiens, les généraux - corrompus jusqu’à la moelle - qui ont pris en main la situation sont tout aussi pro Yankee & réactionnaires, donc entre la peste & le choléra ils sont de toute façon dans la panade...

Parler de coup est en outre tout à fait excessifs car les militaires n’ont à l’évidence aucune intension de gouverner eux-mêmes le pays, la seule chose les intéressant étant que les politiques en place les laissent faire tranquillement leurs petites affaires juteuse & rampent aux pieds d’Uncle Sam pour qu’ils puissent continuer à bénéficier de leur aide financière...

Cela ne fera que la 2ème fois qu’ils se font voler leur mouvement de protestation & ils sont bien naïfs de croire que les militaires pourraient servir l’intérêt du peuple, pour cela ce ne sont pas des manifestations qu’il faut faire mais une véritable révolution & que le peuple prenne lui même le pouvoir, c’est un truisme !

08/07/2013 10:49 par legrandsoir

C’est forcément un coup d’état. Que l’armée prenne pour "elle-même" le pouvoir ou le "donne" à quelqu’un "d’acceptable" (pour elle) est une nuance de pure forme. Ou est-ce que quelque chose m’échappe ?

08/07/2013 11:25 par Komla KPOGLI

L’hypocrisie qui consiste à dire "ah noonnn ça n’est pas un coup d’état" est si pitoyable que je ne rentrerai pas en matière là-dessus.

Les attributs "Islamiste" "Frères Musulmans", "Radicaux islamistes", "dictature religieuse" justifient le renversement d’un gouvernement élu et la tuerie, les anti-Morsi ont compris l’usage des outils de la propagande. Une nouvelle fois, les faits montrent explicitement que l’élimination de l’opposant ou de l’adversaire requiert une légitimation préalable en lui donnant un qualificatif qui permet de l’exclure du cercle de l’humanité. Et le terme Islamiste est la désignation suprême qui trouve échos chez les occidentaux, de ce fait, étouffe la contre manifestation qui montre d’autres millions d’Egyptiens qui contestent l’armée et les autres de la Place Tahrir.

Quant à faire croire que les larmes de crocodile d’Obama et de on ne sait, sont du sérieux, disons simplement que nous devons avoir la capacité de voir très bien ce qui est visible pour aboutir à ce qu’on ne voit pas. Durant toute sa vie, un être humain conscient et averti, devra analyser ce qu’il voit afin d’en déduire et de comprendre ce qu’il ne voit pas.

08/07/2013 11:27 par Quidam

On ne va pas pinailler sur la sémantique mais généralement ce n’est pas ça un coup d’État :

" (...) Entreprise violente par laquelle un personnage s’empare du pouvoir (coup d’État du 18 brumaire par lequel le général Bonaparte devint maître de la France), ou mesure par laquelle un gouvernement change violemment et en dehors des lois la constitution (le coup d’État tenté par Charles X en 1830). (...)"
(Source : Le Littré)

Là ce n’est pas l’armée qui a provoqué les manifestations populaires à l’origine de la situation, elle a juste satisfait à une partie de leurs revendications & elle en profite pour garder un œil sur la suite des événements & que ses intérêts continuent à être préservés... Ils ont juste débarqué Mohamed Morsi, suspendu la constitution, nommé un gouvernement de transition dans l’attente d’élections, ça reste plutôt soft.... C’est plutôt un coup de force pour tenter d’éviter le chaos social qu’un coup d’État & pas un putsch ou un pronunciamiento, ceci étant ce n’est pas légal bien sûr... (& ça n’a rien d’une révolution non plus malheureusement pour les Egyptiens)

08/07/2013 13:01 par legrandsoir

Oui mais Napoléon n’a pas agi seul, dans son coin. Il s’est servi d’une "force" comme instrument de prise de pouvoir. Dans le cas qui nous intéresse, l’instrument est l’armée égyptienne. Qu’elle n’ait pas pris le pouvoir pour elle-même me paraît secondaire.

Si X donne l’ordre - ou complote avec - une armée pour éjecter un pouvoir en place, et que l’armée - en toute "neutralité" - lui remet ce pouvoir, X et l’armée ont bien effectué un coup d’état.

Je n’imagine pas l’armée décider de renverser le pouvoir sans un accord préalable entre différentes parties. Elle ne va pas proposer à X le pouvoir "en espérant qu’il accepte". X aura beau feindre la surprise, comme pour une remise des oscars, en remerciant son producteur, sa famille, etc... Ce n’est qu’une question de mise en scène.

Et même s’il n’y a pas eu d’ordres ou de connivence entre X et l’armée, le fait est que l’armée a renversé le pouvoir en place par la force. Si ce n’est pas un coup d’état, quel est le terme à employer ? Une transition forcée, peut-être légitime mais pas forcément légale ?

08/07/2013 11:33 par CN46400

Le propre d’un coup d’état c’est d’être minoritaire dans la population et d’être soutenu par les USA (Honduras, Paraguay...). En Egypte, 2013 comme 2011, j’ai l’impression d’un cas de figure légèrement différent. Quand Morsi, élu par 25% du corp électoral fait passer une constitution en force c’est quoi ?....

08/07/2013 11:36 par Komla KPOGLI

Et s’il fallait renverser par coup d’état militaire tous les dirigeants qui, sur cette terre, obéissent au FMI , par où va-t-on commencer ?
Le cas d’Edward Snowden que les bonnes et douces "démocraties" refusent d’accueillir ne nous montre-t-il pas ceux qui obéissent "au doigt & à l’œil à Uncle Sam ?" Ou bien quand on obéit au doigt et à l’oeil de l’Oncle Sam dans ces pays-là, c’est pour le bonheur de leurs citoyens ?

08/07/2013 13:45 par Quidam

Komla KPOGLI

Et s’il fallait renverser par coup d’état militaire tous les dirigeants qui, sur cette terre, obéissent au FMI , par où va-t-on commencer ? (...)

Par un coup d’Etat non, par une révolution tout à fait !!!! ;-)

Le cas d’Edward Snowden que les bonnes et douces "démocraties" refusent d’accueillir ne nous montre-t-il pas ceux qui obéissent "au doigt & à l’œil à Uncle Sam ?" Ou bien quand on obéit au doigt et à l’oeil de l’Oncle Sam dans ces pays-là, c’est pour le bonheur de leurs citoyens ?

Le fait que l’Occident en général & l’UE en particulier appliquent une politique inique me très difficilement pouvoir justifier une autre politique inique en Egypte telle que celle que Mohamed Morsi menait... ;-)

08/07/2013 15:36 par Dwaabala

Un coup d’État, s’il est dans la plupart des cas militaire, et fomenté par des forces extérieures au pouvoir légal qu’il s’agit de renverser n’est pas défini par ces deux aspects, qu’il revêt pourtant en général.
Quand F. Mitterrand écrivit Le Coup d’État permanent, il voulait dire que par les pouvoirs exorbitants concentrés entre les mains du Président de la République qui aurait dût être un arbitre, ce dernier entravait constamment la bonne marche des institutions, gouvernement et Parlement se trouvant relégués aux rôles d’exécutants de ses volontés et de godillots. C’était ainsi... en 1964.

10/07/2013 08:30 par Jacques Richaud

Un observateur particulièrement concerné, et qualifié pour s’exprimer, même si ‘diabolisé’ chez nous par la volonté de sœur Caroline F et de quelques autres, est Tarik Ramadan.
Peut être est il utile de considérer son propos , celui de 2012, puis celui de 2013, qui semble bien confirmer la gigantesque manipulation de l’armée, elle-même sous influence extérieure non dissimulable. On observe aussi le jugement sans complaisance aucune porté sur le régime élu en 2012, et les inquiétudes pour l’avenir…

29 6 2012 Les élections législatives et présidentielle égyptiennes n’ont servi à rien- Par Tariq Ramadan, professeur d’études islamiques contemporaines au St Antony’s College, Oxford
http://www.lemonde.fr/idees/article/2012/06/29/les-elections-legislatives-et-presidentielle-egyptiennes-n-ont-servi-a-rien_1727007_3232.html
La confusion règne en Egypte. La mobilisation populaire, qui avait été lancée le 25 janvier 2011, avait permis de déloger le président Hosni Moubarak et d’ébranler son régime dictatorial. L’optimisme était partout présent : le "printemps arabe" voyait le jour, la "révolution" était en marche, le peuple avait eu raison du dictateur et entamait sa marche vers la liberté. Les voix plus prudentes, appelant à analyser les données de l’équation politique nationale et régionale, étaient critiquées, disqualifiées d’office, parce que colonisées par un pessimisme dangereux ou complices des intérêts inavoués de l’Occident…//… La situation en Egypte nous impose de dépasser l’optimisme émotif des premiers mois pour revenir à une étude plus raisonnée et raisonnable des faits et des enjeux. Depuis le début du soulèvement populaire, force est de constater que la seule institution qui n’ait jamais vraiment perdu le contrôle de la situation est bien l’armée. Après quelques hésitations, la hiérarchie a d’abord décidé de ne pas intervenir (suivant l’exemple tunisien) et de laisser le peuple protester jusqu’à la chute du dictateur. Le Conseil supérieur des forces armées a ensuite accompagné, voire piloté, chacune des étapes de la refondation des institutions : les élections parlementaires, la commission chargée de l’écriture de la nouvelle Constitution, l’officialisation des partis politiques et de leur candidat à l’élection présidentielle, le procès de l’ex- président, etc. Jamais l’armée n’a perdu le contrôle des opérations et, à chaque étape, elle a imposé aux représentants de la société civile et aux partis politiques de composer avec elle. Les divers candidats, les Frères musulmans comme les salafistes, ont dialogué, rassuré et déterminé les termes d’un accord possible avec l’institution militaire. Il faut rappeler que celle-ci ne représente pas seulement la "force armée" en Egypte mais un pouvoir financier qui a de puissants intérêts dans de nombreux secteurs de l’économie égyptienne…//… Par ailleurs, il faut rappeler les intérêts très forts qui lient l’administration américaine et l’Union européenne à la hiérarchie militaire égyptienne depuis des décennies. La situation en Egypte est très inquiétante, comme elle l’est d’ailleurs en Syrie, en Libye, au Yémen, à Bahreïn et, dans une moindre mesure, en Tunisie (il se pourrait d’ailleurs que les relatives avancées en Tunisie soient un écran quant aux échecs de tous les autres pays).Où est donc passé le "printemps arabe" ? La seule vraie révolution qui se soit concrétisée est une "révolution intellectuelle" : les peuples ont pris conscience qu’ils pouvaient devenir maîtres de leur destin et, dans un esprit non violent, renverser les dictateurs. Ce n’est pas rien et c’est la condition des révolutions sociales et politiques que nous appelons de nos voeux…//… Si l’énergie des soulèvements veut se transformer en force révolutionnaire, il faut que les voix que l’on entend sur la place Tahrir disent désormais davantage que leur espérance de la fin du régime mais déterminent plus lucidement et plus clairement les priorités nationales et régionales de leur résistance. La mobilisation populaire est nécessaire, alors que le projet révolutionnaire reste encore à établir et à faire.

9 7 2013 Egypte : Coup d’Etat, Acte II tariqramadan
http://www.tariqramadan.com/spip.php?article12926
Depuis près de deux ans, on me questionnait sur les raisons de mon refus de me rendre en Egypte dont j’ai été banni depuis 18 ans. Je répétais inlassablement que les informations croisées qui étaient en ma possession (et que me confirmaient même des officiels suisses et européens) mettaient en évidence le fait que l’Armée égyptienne contrôlait la situation et n’avait, dans les faits, jamais disparu de la scène politique…//…L’armée égyptienne n’est pas revenue dans le jeu politique, elle ne l’a jamais quitté. La chute de Moubarak fut un premier « coup d’Etat » militaire interne qui a permis à une nouvelle génération de militaires de se positionner de nouvelle façon sur l’échiquier politique, derrière l’écran d’un gouvernement civil. Dans un article du 29 juin 2012, je rappelais…//… Ce qui surprend, a posteriori, c’est la naïveté, le manque d’expérience et la nature des erreurs de Muhammad Morsi, de ses alliés et de l’organisation des Frères Musulmans. Depuis 3 ans, je n’ai eu de cesse de faire la critique de la pensée, de l’action et de la stratégie du parti « Justice et Liberté » autant que des leaders des Frères Musulmans (par ailleurs depuis 25 ans, mes analyses et commentaires, en tant qu’observateur, ont été, et demeurent, sévères). En sus, le piège paraissait si évident et l’ensemble de mes écrits (livre et articles de mars à décembre 2012) relevait ces graves manquements. On ne peut reprocher au Président Morsi de ne pas avoir essayé d’établir des relations avec l’opposition et de les inviter soit au Gouvernement soit à un large dialogue national : ses initiatives ont toutes été rejetées et l’opposition n’a eu de cesse de s’opposer à toutes ses initiatives. Il demeure que la critique de sa gestion des affaires de l’Etat, de sa relation exclusiviste avec la direction de l’organisation des Frères Musulmans, de sa surdité envers le peuple et certains de ses conseillers, que ses décisions intempestives (dont il a admis que certaines étaient des erreurs après coup) doivent faire l’objet d’une critique sans concession. Plus fondamentalement, c’est l’absence de vision politique et de gestion des priorités quant à la politique économique, à la lutte contre la corruption et la pauvreté, à la gestion des affaires sociales et éducatives, qui fut le plus grave manquement. Les exigences du Fonds Monétaire International (et les atermoiements de ce dernier de la même façon) mettaient le pouvoir dans une situation intenable : le gouvernement de Morsi pariait naïvement sur un soutien de cette institution. Ce n’est pourtant qu’aujourd’hui, une fois le Président Morsi parti, que le FMI semble vouloir débloquer la situation (seulement trois jours après la chute du gouvernement démocratiquement élu)…//… La lecture politique superficielle tendrait à faire croire que l’Arabie Saoudite ou le Qatar soutiennent les Frères Musulmans alors qu’ils sont essentiellement les garants d’une politique américaine dans la région : il s’agit de diviser les diverses tendances de l’islam politique et les pousser à des confrontations déstabilisant les différents pays de la région. Cette stratégie est double et fonctionne entre les organisations politiques sunnites comme par l’entretien de la fracture entre shiites et sunnites. Les Etats-Unis comme l’Europe n’ont aucun problème avec l’islam politique des salafis littéralistes des Etats du Golfe (avec leur refus de la démocratie, leur non respect des minorités, la discrimination des femmes, l’application d’un strict code pénal « islamique » qualifié de « shari’a ») : ils protègent leurs intérêts géostratégiques et économiques régionaux et leurs politiques répressives et rétrogrades s’appliquent surtout sur le plan intérieur dont l’Occident n’a cure…//… Le Président élu est tombé au gré d’un Coup d’Etat militaire. Il faut appeler les choses par leur nom. Le peuple, dans son désir légitime de vie et de survie, de justice et de dignité, a participé à une belle opération médiatico-militaire. La situation est grave et le silence des administrations occidentales est révélateur. Il n’y a pas de printemps arabe et les révolutions ont des parfums amers. Au demeurant, il est fréquent désormais, quand on ne partage pas les analyses consensuelles, ou l’effervescence populaire et médiatique, de se voir traiter de « conspirationniste » et de voir son analyse rejetée avant même d’avoir étudié les faits et les intérêts en présence…//… Il faut analyser les faits et cesser les simplifications dangereuses. Le contraire de la lecture simplificatrice des faits n’est pas la posture « conspirationniste » mais bien celle de l’intelligence qui veut convoquer l’histoire, les faits et l’analyse circonstanciée des intérêts en présence. L’interprétation proposée ici peut être erronée ou inexacte mais de nombreux faits concordants en ont confirmé la pertinence au gré des mois, et sous de nombreux aspects. De ceux qui la critiquent ou la contestent, il est attendu des analyses fondées sur des faits, des mises en perspective qui ne se contentent pas de dénigrements ou de slogans faciles. Quand on refuse d’appeler un coup d’Etat militaire « un coup d’Etat militaire » et qu’une majorité de medias font mine de n’en plus savoir la définition, il est l’heure de réveiller son sens critique.

21/07/2013 23:14 par Bonois

Imaginez deux secondes le scenario suivant :
Les frères musulmans en Egypte, avec la complicité d’une poignée de généraux complotent un coup d’état militaire contre une président élu démocratiquement, par exemple El Bradei , et que les putschistes mettent ce dernier ainsi que toute son équipe présidentielle en prison dans un endroit secret.
Et que les sympathisants d’El Bradei sont interpellés par centaines et écroués pour des raisons politiques sans aucune accusation, tous les médias soutenant El Bradei sont interdits et que des journalistes sont écroués , la constitution est annulé, le conseil constitutionnel est dissout.
Et que par-dessus tout cela les putschistes aidés par des milices des frères musulmans tuent froidement plus de 100 manifestants pacifistes pendant leur prière.
İmaginez aussi que les pro El Bradei se manifestent dans toute les villes d’Egypte par centaines de milliers ou par des millions et que les medias pro putschistes les traitent de terroristes.
İmaginez enfin que les monarchies du golf soutiennent généreusement les putschistes avec plus de 15 milliards de dollars.
Apres avoir imaginé tout cela, posez vous les questions suivantes :
1. Quel sera la position des USA, de l’Europe, des nations unies, d’Israël ?
2. Quel sera la réaction des organisations des droits de l’homme dans le monde ?
3. Quel sera la réaction des intellectuels, des artistes, des juristes, des journalistes, des religieux et des non religieux ?
4. Enfin ! Quel sera la réaction du lobby Judéo chrétien ?
Je pense que vous n’avez pas besoin d’un fort esprit d’analyse pour répondre objectivement, et en faire les conclusions.

Je vous laisse la liberté de tout imaginer, en mettant en relief tous les coups d’états en Afrique ou en Amérique latine cuisiné et soutenus par les ‘’grandes puissances’’ ou plutôt les services obscures des securitates
En ce qui me concerne, je peux tout simplement imaginer une réaction planétaire contre le ‘’terrorisme ‘’ des frères musulmans et qu’une guerre sera déclaré pour rétablir la légitimité du président élu démocratiquement ‘’ El Bradei’’, la guerre mondiale contre l’Irak en est un très bon exemple.
Inverser les hypothèses maintenant et tirer les conséquences
Nous vivons un grand tournant dans l’histoire des civilisations et une grande inversion des ‘’valeurs universelles’’.
Nous vivons aussi, après la chute du bloc de l’est, le début de la fin du bloc ouest.
Quand on trahit les principes fondateurs de la civilisation, l’histoire ne nous le pardonnera jamais, et la facture sera payée immédiatement, et la civilisation émigre sous d’autres cieux
Le point de départ est l’Egypte pour inverser la donne, l’Amérique latine et l’Asie lointaine peuvent prendre le relai a condition de se détacher complètement de cette hégémonie des usa and Co.
Les despotes du troisième milliaire de tout genre et de tous bords sont en faillite
L’avenir appartiendra à ceux qui ont encore des valeurs humaines universelles à présenter sincèrement à l’humanité.

Bonois Sebti

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