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Entretien avec Carlos Lozano, Directeur de Voz - hebdomadaire du Parti communiste colombien (PACOCOL)

Carlos Lozano est un dirigeant du Parti communiste colombien. Apprécié dans son parti, à tel point qu’il a été le mieux élu des membres du comité central, haï par ses ennemis qui l’insultent quotidiennement, qui le menacent de mort, connu dans les cercles politiques et sociaux, de tous les partis et de toutes les classes, pour ses qualités intellectuelles et pour son militantisme entêté en faveur de la paix. Sa conversation est agréable et il sait écouter.

Nous avons voulu l’interviewer à l’occasion du congrès du Parti communiste colombien qui s’est tenu du 17 au 22 juillet 2012, mais la conversation s’est allongée parce que d’autres sujets se sont présentés. Nous n’avons pas pu l’éviter.

* * *

On dit que les débats internes au Parti communiste colombien sont intenses, il y a des rumeurs de divisions internes, de fractions qui menacent l’unité. Comment s’est achevé le 21e congrès ? Quelles sont les décisions principales ?

Carlos Lozano : Bien sûr dans le Parti communiste colombien il y a des débats internes, profondément démocratiques, avec une grande participation des dirigeants et des militants. Il ne manquerait plus que ce soit le règne de l’unanimité. L’unanimisme est antidémocratique, il empêche l’expression libre et il limite la liberté d’opinion. La politique des communistes se construit collectivement et sa formulation est la synthèse du débat interne. Le Parti n’étant pas non plus un club de discussions, on prend des décisions, à la majorité, ces décisions sont valables pour l’ensemble du Parti. Le Parti communiste colombien n’a qu’un seul programme, ses statuts sont les mêmes pour tous, la ligne politique et la direction nationale sont les mêmes pour tout le monde. Après le processus démocratique de discussion et d’approbation des documents, tous les dirigeants et tous les militants sont dans l’obligation de les respecter.

C’est ce que vous appelez le centralisme démocratique ?

Carlos Lozano : Absolument. C’est un principe léniniste d’organisation. Le fondement idéologique du Parti communiste colombien c’est le marxisme-léninisme, entendu comme théorie scientifique qui s’applique concrètement à des réalités concrètes, sans dogmatisme d’aucune sorte. A l’heure de vérité nous recourons au marxisme-léninisme, théorie inépuisable, en construction permanente. L’idéologie révolutionnaire est inépuisable, parce qu’elle est dialectique.

Bien. Mais dites-moi quelles sont les principales conclusions du congrès ?

Carlos Lozano : Le nouveau programme du Parti communiste colombien a été adopté, c’est la ligne stratégique, il correspond à la réalité colombienne analysée par nous. Le programme fait une radiographie politique, économique et sociale de la Colombie, de sa composition sociale et des caractéristiques du bloc de pouvoir dominant. Il effectue une caractérisation du régime, soumis à l’impérialisme états-unien et aux intérêts du grand capital, notamment le capital financier, à la bourgeoisie industrielle et aux grands propriétaires terriens. C’est sur cette base que sont formulés les changements et les réformes que nous proposons, avec l’objectif fondamental de parvenir au socialisme, démocratique et humaniste par excellence. C’est la voie vers le communisme, qui éliminera pour toujours l’exploitation capitaliste.

Les statuts ont été réformés, ils doivent être en adéquation avec les changements réels, sur le plan institutionnel, administratif, politique, social et économique du pays. La vie militante et le lien entre le Parti et les masses seront ainsi renforcés. L’idée c’est un Parti impliqué dans la lutte populaire, sa vocation est d’occuper le pouvoir.

La ligne politique également a été approuvée. Elles contient les orientations pour l’action immédiate, la tactique, elle s’appuie sur les bases suivantes : lutte contre le modèle néolibéral d’accumulation du capital, basé sur la soi-disant économie de libre-marché capitaliste ; résistance populaire à la volonté des dominants de vouloir faire porter le poids de la crise par les travailleurs et par le peuple ; mobilisation populaire avec un programme minimum, ce qui n’exclut pas la préparation d’une grève civique nationale à court terme ; lutte pour la paix, pour la solution politique et démocratique du conflit colombien, c’est-à -dire la mobilisation pour la paix avec la démocratie et la justice sociale ; l’unité de la gauche, la plus large unité, avec l’idée que seul un large front de gauche, populaire, social et démocratique permettra de construire une alternative au pouvoir bourgeois et oligarchique. C’est la proposition d’un nouveau pays, sur la base du pluralisme, la participation démocratique et la plus grande équité sociale. Un nouveau «  contrat social » sur la base d’un ordre politique, social et économique plus juste.

Pôle démocratique alternatif ou Marche patriotique, quel sera finalement le choix du Parti communiste colombien ?

Carlos Lozano : Ce dilemme n’existe pas pour nous. L’unité que nous proposons est beaucoup plus large, au-delà même de la Marche patriotique et du Pôle démocratique alternatif (PDA), parce que nous n’avons pas d’ennemi à gauche. La clé pour avancer vers le pouvoir démocratique et populaire c’est l’unité. Nous sommes dans le PDA parce que nous considérons que c’est un espace valable pour faire converger les forces politiques progressistes, nous sommes conscients de sa crise mais aussi de la possibilité de la résoudre si on parvient à des accords sur la base de l’autocritique, comme le demande le Maître Gaviria. Le Pôle démocratique alternatif est encore un bon outil, mais tout va dépendre de sa capacité à tracer une ligne politique claire et définie, de gauche, pour réaliser des changements démocratiques en étroite relation avec les masses populaires. C’est là que se trouve la clé des alliances nécessaires. Un PDA irréaliste pourrait croire que les alliances et les accords se décident d’en haut, en incorporant des «  patrons démocratiques », pour ainsi parvenir à l’«  unité nationale » ou autres chimères. Le PDA doit cesser de se considérer comme un appareil électoral. Les élections sont importantes, malgré tous leurs défauts ; elles sont loin d’être une expression de la démocratie, mais elles sont importantes et elles permettent une présence dans l’espace de la représentation parlementaire, ou à d’autres postes électifs. Cependant elles sont insuffisantes s’il n’y a pas de relation avec la lutte et les aspirations du peuple colombien. Il ne suffit pas d’aller à une manifestation, il faut être aux côtés des masses, les accompagner, souffrir avec elles, pour les mêmes raisons qui les font souffrir.

La Marche patriotique est un projet social et politique qui ôte le sommeil à certains dirigeants du PDA ; cela ne devrait pas être le cas. La base sociale de la Marche patriotique ce sont les organisations populaires, bien qu’il y ait aussi des partis, comme la Gauche libérale de Piedad Córdoba et le Parti communiste colombien. Mais le plus important c’est la présence de près de 2000 organisations de base, nationales et régionales, certaines de grande importance. C’est ce qui garantit la relation étroite avec les luttes quotidiennes dans le monde rural et dans les villes. Son appel, comme l’a fait la Conférence idéologique du PDA réunie il y a peu, c’est la plus large unité de la gauche et des secteurs démocratiques et progressistes. Comme vous voyez il n’y a point contradiction, mais complémentarité. Nous ne voyons donc aucun problème dans le fait d’appartenir à la fois au PDA et de contribuer au projet social et politique qui s’appelle Marche patriotique. Nous proposons des rapprochements vers d’autres secteurs comme le Congrès des peuples et la Minga. Le PDA doit aussi s’adresser à ces secteurs, parce que si ce qui l’emporte au PDA c’est l’ouverture au centre, en renonçant à représenter la gauche, il finirait par changer de nature. C’est la différend qui a existé avec Lucho Garzón et avec Gustavo Petro, et voyez où ils sont arrivés finalement. L’un est dans l’«  unité nationale » [droite représentée par Uribe, puis par Santos] et l’autre en est assez proche.

Le MOIR a envoyé au Parti communiste colombien une lettre pour l’inviter à se retirer du PDA. La même demande a, dit-on, été formulée par Carlos Gaviria Daz lors de la Conférence idéologique du PDA. Que répond le PCC ?

Carlos Lozano : Bon, autant que je sache, nous n’avons jamais reçu la lettre. Ils l’ont rendue publique et un journal télé y a fait allusion. C’est un manque de courtoisie, laquelle existe aussi en politique. Mais en plus il faudrait se demander : qui a donné le droit au MOIR de décider qui peut ou non appartenir au Pôle démocratique alternatif ? De leur vieille vie militante maoïste ils ont gardé l’habitude de se comporter dans les organisations unitaires comme des commissaires politiques ou comme des gardes rouges. C’est un manque de respect. C’est à celui qui n’apprécie pas un autre parti ou un allié de se retirer du PDA. Celui qui y entre de façon volontaire décide de la même façon s’il reste ou pas. Autant que je sache le Maître Carlos Gaviria Dà­az ne s’est pas exprimé de cette façon lors de la conférence idéologique, bien qu’il ait émis des opinions, comme c’est son droit bien entendu, opinions que nous ne partageons pas, ce qui est également notre droit. Cela ne change en rien notre respect, notre estime et notre sympathie pour le Maître Gaviria.

Quelles sont les différences ?

Carlos Lozano : Le Maître dit que la Marche patriotique n’a pas bien expliqué son éventuelle relation avec les FARC, et il recourt au vieil argument, anachronique, de la combinaison des formes de lutte, argument qui était celui de l’extrême droite et des bellicistes pour justifier l’élimination de la gauche et de l’Union patriotique. Mille et une fois les porte-parole de la Marche patriotique ont déclaré qu’ils n’avaient pas de lien avec les FARC, l’objectif c’est la paix, la solution politique et démocratique du conflit. La Marche ne défend pas la guerre, c’est un mouvement social et politique civil qui agit publiquement et légalement. Que veulent-ils de plus ? Que faut-il dire de plus pour qu’ils soient moins suspicieux ? Le reste c’est la répétition des accusations fallacieuses et dangereuses des dirigeants de l’armée et de l’extrême droite criminelle.

Pour discuter sur la combinaison des formes de lutte il faut ouvrir un débat sur le Nouvel État qui doit être construit, après élimination de la violence dans la relation entre les gouvernants et les gouvernés. Ici la violence a été inventée par l’État des bourgeois et des grands propriétaires terriens, parce que la classe dominante a pris l’habitude de gouverner par des moyens répressifs, autoritaires et violents. En Colombie il n’y a pas d’État démocratique, mais un État totalitaire, qui utilise des méthodes violentes pour éliminer l’opposant. Le PDA en a lui-même été victime, subissant persécution et lynchage politique et médiatique pour le liquider. Précisément c’est pour ça que le thème à débattre ce n’est pas la combinaison des formes de lutte, mais la nécessité de la paix par la voie du dialogue et la construction de la démocratie avec justice sociale.

La gauche a un futur ?

Carlos Lozano : Bien sûr. Mais une gauche luttant pour le changement, une gauche engagée dans la transformation révolutionnaire de la société. Pas une gauche light, au rabais, compromise avec le pouvoir, dans des alliances avec des «  bourgeoisies nationales », lesquelles n’existent pas. Une gauche qui ait son propre projet démocratique et social. Il y aura toujours de l’espace pour la gauche. Les idéologues de la droite ou de la pseudo-gauche se sont trompés quand après la chute du Mur de Berlin ils ont déclaré la mort du socialisme et y compris la fin de l’histoire. Norberto Bobbio les a démasqués et il a démontré que la délimitation gauche-droite est toujours pertinente et que les idéologies ne disparaissent pas dans le feu de la lutte idéologique, laquelle connaît forcément des avancées et des reculs.

Uribe et Santos s’affrontent violemment. Certains, y compris à gauche, prétendent pouvoir servir d’intermédiaire pour aplanir leur querelle. Qu’en pensez-vous ?

Carlos Lozano : Intermédiaire pour quoi ? Ce sont des contradictions au sein de la classe dominante, deux factions du bloc hégémonique, l’un représentant la bourgeoisie traditionnelle, assez aristocratique, et l’autre en décomposition, mafieuse, prête à tout pour détruire l’adversaire. Santos redoute cette dernière, c’est pour ça qu’il ne s’y oppose pas plus durement. Ce sont en fait des différences de forme, mais qui peuvent s’accentuer et qui peuvent devenir dangereuses. La gauche n’a rien à faire dans cette querelle, ce n’est pas son affaire, elle doit se concentrer sur son projet alternatif et unitaire, se préparer à devenir une option de pouvoir. Voyez la proposition trompeuse du vice-président qui consiste à asseoir Uribe et Santos à la même table, pour qu’ils se mettent d’accord pour la Constituante uribiste, laquelle n’a pas d’autre but que la réélection d’Uribe Vélez. Qui a dit que les litiges entre Uribe et Santos sont le principal problème du pays ? Allons. Il faut être sérieux et responsable quand on occupe des postes importants dans l’État.

Parlons de la paix. Vous voyez la possibilité d’un futur dialogue entre le gouvernement Santos et les FARC ?

Carlos Lozano : Il n’y a pas d’autre issue au conflit actuel que la voie politique, le dialogue pacifique et démocratique, une paix avec démocratie et justice sociale. La paix est étroitement liée au renforcement de la démocratie et de la justice sociale. Des causes précises sont à l’origine du conflit colombien et tant qu’elles ne disparaissent pas il sera difficile de parvenir à la paix. La réticence de la classe dominante à modifier ce qui est à l’origine du conflit, voilà ce qui fait que le conflit perdure. La paix n’arrivera pas gratuitement, je ne le crois pas, parce que ce serait comme une paix romaine. Si le gouvernement croit que le dialogue c’est pour négocier la reddition des insurgés, il perdra son temps. Ce n’est pas là que se trouve la porte de la paix. La clé fonctionnera s’il ouvre la discussion, publiquement, avec la participation de toute la société.

Certains disent qu’un dialogue secret existe déjà . Qu’en savez-vous ?

Carlos Lozano : C’est probablement vrai, pour l’élaboration de l’agenda. Mais je ne sais rien de sûr. De toute façon si ces approches existent cela me paraît bien parce que les FARC et l’ELN ont manifesté leur disposition au dialogue et à la recherche de la solution politique, et on a vu des signes évidents, lesquels ne sont pas suffisants pour le gouvernement, mais ils sont importants, et même historiques. Celui qui doit faire un geste, qui doit faire des signes, c’est le gouvernement ; ce dernier maintient avec insistance le choix de la guerre et du néolibéralisme, pour livrer le pays aux transnationales.

On dit que les approches c’est avec les FARC ; l’ELN ferait aussi partie du processus ?

Carlos Lozano : Le dialogue ça doit être avec les FARC et l’ELN. Ca n’aurait aucun sens de dialoguer avec l’un et d’exclure l’autre.

Humm... on dit que vous savez davantage que cela...

Carlos Lozano : Ne croyez pas trop à tout cela. Ce qui est important c’est que la paix est au centre du débat et il sera inévitable qu’à court terme s’ouvre le dialogue pour la démocratie et la justice sociale. De la paix avec justice sociale dépend le bien-être du pays. Avec la paix la Colombie deviendra un pays viable.

Que pensez-vous des FARC-EP ?

Carlos Lozano : C’est une organisation politique et militaire qui a surgi en raison de la violence de l’État et de l’exclusion sociale. Elles ont été un protagoniste important dans l’histoire du pays pendant plus d’un demi-siècle, c’est une réalité qui ne peut pas être ignorée. Pour les FARC il faut rechercher des solutions, et celles-ci se trouvent dans l’issue politique et non dans la guerre insensée.

Vous partagez leurs méthodes ?

Carlos Lozano : Je ne partage pas leurs méthodes, mais je comprends leur existence, d’un point de vue historique et sociologique. Cette position est basée sur une perception intellectuelle et académique. Si l’oligarchie colombienne n’avait pas employé la violence pour se maintenir au pouvoir et pour préserver le régime ploutocratique des privilèges, les FARC n’existeraient pas. Je ne fais pas l’apologie de la guerre, mais je suis obligé de faire une lecture sérieuse du conflit colombien, même si cela me coûte quelques problèmes, des menaces, voire même des procès. Les idées ne se vendent pas ; et les pressions et les intimidations ne changent rien aux idées.

Quelle est la situation du pays après deux années de gouvernement Santos ? Vous voyez plutôt un bilan positif, comme Santos, ou vous partagez les critiques émises par Uribe ?

Carlos Lozano : Je ne suis d’accord ni avec Santos ni avec Uribe. Uribe critique Santos alors qu’ils ont la même politique, parce qu’il veut le soumettre, le dominer, comme c’est son habitude. Il se prend pour un messie «  prédestiné par la Providence ». Mais le pays ne va pas bien. Loin d’être le pays des merveilles qu’ils veulent nous présenter pour le bilan de cette moitié de mandat présidentiel. La réalité est autre, très différente. La croissance économique n’a profité qu’aux riches, la pauvreté reste la même, les revenus des Colombiens baissent. Il est stupide de croire, comme le DANE (Département national des statistiques), qu’une famille qui a des revenus de 170 000 pesos mensuels n’est pas pauvre. Le président Santos confond la démocratie et l’unanimisme, comme pour le parti Unité nationale, qui contrôle 93% du Congrès, la plupart étant des corrompus. L’affaire de la réforme de la justice a échoué pathétiquement. Il a voulu satisfaire tous les pouvoirs d’État, mais les résultats ont été négatifs. Alors maintenant il feint d’être outragé. Le pays va mal, l’économie va mal, et les conditions sociales sont très mauvaises. Les seuls qui sont contents ce sont ceux qui tirent profit de ce modèle d’accumulation, du Traité de libre-commerce et des affaires liées aux transnationales qui emportent la richesse nationale et détruisent l’environnement.

L’Amérique latine n’est plus l’arrière-cour des États-Unis. Mais on ne voit ni grandes révolutions ni insurrections populaires. Comment analysez-vous la situation du continent ?

Carlos Lozano : L’Amérique latine est aujourd’hui le point faible de l’impérialisme états-unien. Comme vous dites, l’Amérique latine n’est plus l’arrière-cour des Yankees, parce que la majorité des peuples ont perdu patience, après tant d’années d’infamie et de gouvernements soumis à la férule de Washington. Les États-Unis n’ont jamais apporté quoi que ce soit de positif pour ce continent ; et ils en ont perdu le contrôle peu à peu. Aujourd’hui prédomine un courant émancipateur, souverainiste, fier et convaincu qu’il peut cheminer seul, en recourant à l’entraide dans la région. Il n’y a que les gouvernements soumis, comme celui de la Colombie, qui croient que leur destin est étroitement lié à la Maison Blanche.

Il ne s’agit pas de rompre avec les États-Unis, mais d’avoir des relations d’égal à égal, sans soumission, sans crainte. Les potentialités de l’Amérique latine et des Caraïbes, comme en a rêvé le Libertador Simon Bolivar, sont connues. Et c’est le choix de la majorité : L’UNASUR, la CELAC, l’ALBA, et d’autres formes d’intégration régionale, sans la tutelle yankee. Il y a ici énormément de ressources qui peuvent être placées dans une bourse commune latino-américaine et caribéenne pour négocier d’égal à égal avec le Nord, y compris avec l’Europe. Les Traités de libre-commerce sont des instruments de colonisation et ce sont des formes inégales de marché. Ils profitent aux économies puissantes qui prétendent nous imposer de force leurs voraces transnationales. La Colombie doit rejoindre ces processus démocratiques et émancipateurs. C’est le défi de la gauche.

Que pensez-vous des Indignés ? L’Europe est en crise ?

Carlos Lozano : Le capitalisme est en crise. C’est une crise systémique et historique ; mais cela ne signifie pas qu’il soit au bord du précipice. Il peut dépasser la crise, mais il est démontré que le capitalisme a échoué historiquement. Dans les conditions de l’unipolarité il n’a pas été capable de régler les conflits sociaux, parce que, bien sûr, il fait toujours le choix de favoriser les siens, les capitalistes. En Europe ils prétendent régler les crises en faisant payer le peuple et les travailleurs. C’est ce qui provoque l’indignation. Ainsi ont surgi les Indignés, expression du mécontentement. Ils rejettent le capitalisme, ils sont en colère contre le secteur financier, le pire de tout dans le capitalisme, parasite et profiteur, capitalisme de rapaces. Les Indignés pratiquent la résistance civile par l’action de masse, mais il ne présentent pas d’alternative. Les résultats électoraux en Espagne et en Grèce sont décevants ; ils ont favorisé la droite, qui tout aussi responsable de la crise. D’une certaine façon les Indignés avec leur discours anti-politique font le jeu du capital, qu’ils condamnent pourtant. Mais cela reste un mouvement important, reflet de la colère et du désespoir populaire face aux abus du capital.

On dit que vous avez refusé d’être secrétaire général du Parti communiste colombien à l’issue du 21e Congrès, alors que vous avez été le mieux élu des membres du comité central. Pourquoi ?

Carlos Lozano : Ce n’est pas exact. Personne ne me l’a proposé, alors qu’il y avait des opinions différentes dans la direction. Jaime Caycedo [secrétaire général sortant], qui a très bien rempli son rôle, a été reconduit à la tête du Parti, étant entendu que la direction est collective, c’est un effort de tous les dirigeants pour que les résolutions importantes du Congrès soient mises en oeuvre. Nous sommes à un moment historique, l’unité de la gauche est fondamentale et c’est le message que le Parti communiste colombien adresse à la gauche et aux secteurs démocratiques du pays.

Dites-moi, comment définissez-vous ces personnalités de la gauche colombienne : Lucho Garzón, Carlos Gaviria, Gustavo Petro, Jorge Enrique Robledo, Angelino Garzón et Piedad Córdoba ?

Carlos Lozano : Lucho, c’est celui qui pouvait être et n’a pas été, il a fini par intégrer la caste qu’il avait combattue quand il était communiste et syndicaliste. Carlos Gaviria, un homme respectable, un intellectuel honnête, il peut apporter à la gauche, étant entendu que l’unité passe par l’ouverture, sans exclusion. Gustavo Petro, un bon parlementaire qui s’est laissé séduire par l’idée du pouvoir à tout prix, un politicien avec trop d’ambiguïtés et trop d’ambitions. Jorge Enrique Robledo, un bon parlementaire. Angelino Garzón, pour l’instant souhaitons-lui de guérir de sa maladie. Piedad Córdoba, un femme extraordinaire, exemplaire, très courageuse, de la trempe de Policarpa et des femmes de notre peuple qui luttent pour leurs droits et pour l’égalité, qui s’indigne devant les injustices.

Freddy Vallejo

Bogotá, le lundi 6 août 2012

Source : http://www.pacocol.org/index.php/noticias/593-el-nuevo-pais-que-querem...

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