L’alphabet politique du libéralisme occidental : vouloir être démocratique ou vouloir être despote, comprendre ou ne pas comprendre le monde…

Emiliano Alessandroni est un jeune philosophe italien, élève de Domenico Losurdo, et militant communiste du PCI. Il enseigne à l'université d'Urbino comme son maître. Alessandroni a repris les principales catégories de Losurdo (sur le libéralisme, la démocratie, l'impérialisme et la lutte des classes) et continue à les développer dans la lignée de Losurdo. Il est l'auteur d'ouvrages très intéressants sur Hegel, Lukacs et Gramsci.

Le langage et les catégories employés par Zelensky dans ses discours publics sont directement calqués sur ceux de l’idéologie étasunienne, qui les emprunte à son tour à une longue et ancienne tradition coloniale de l’Occident : civilisés contre barbares, démocrates contre despotes, sains contre malades, intelligents contre stupides, etc.

Ainsi, la façon dont Zelensky comprend le terme "démocratie" n’est pas différente de la façon dont les idéologues étasuniens les plus fervents le comprennent : "démocratie" signifie, selon leur lexique, "sphère d’influence étasunienne", tandis que tout écart par rapport à cette sphère est subsumé par ces idéologues sous la catégorie du "despotisme".

Il en va de même pour les concepts de "comprendre" ou "ne pas comprendre le monde" (qui traduisent en termes différents les catégories "intelligent" ou "stupide" et "sain" ou "malade").

Ainsi, lorsque Zelensky accuse le président brésilien Lula de ne pas comprendre grand-chose au monde, il l’accuse essentiellement de vouloir se retirer de la sphère d’influence étasunienne et de ne pas croire que les dangers pour l’humanité dans son ensemble augmentent à mesure que l’on s’efforce de se retirer de cette sphère.

Par conséquent, selon Zelensky, la ligne de démarcation entre "comprendre" et "ne pas comprendre" est la distinction entre la légitimation et la délégitimation de l’unipolarité à bandes et à étoiles, entre l’augmentation et la réduction des inégalités mondiales, entre l’acceptation ou le rejet de la "Destinée Manifeste" ( et de ses différentes variantes).

L’idée de démocratie de Lula (qui vise à atteindre une égalité totale des droits et des devoirs entre toutes les nations du monde) est à l’opposé de l’idée de démocratie de Zelensky (qui vise une "monarchie universelle" dans laquelle un seul État-nation, autoproclamé supérieur à tous les autres et investi de pouvoirs d’intervention absolus, agirait en tant qu’arbitre de toute la justice mondiale).

En fait, bien plus que Zelensky, Lula semble avoir compris le cours de la nécessité historique, la tendance inexorable des événements mondiaux.

Penser que les Etats-Unis peuvent rester éternellement le pivot des équilibres (ou plutôt des déséquilibres) planétaires est une utopie conservatrice (entretenue à coups de milliards de dollars, de guerres et de cargaisons d’armes), destinée, tôt ou tard, à se briser sur les rochers de la dure réalité.

Lorsque Lula déclare : "La coopération entre les pays du Sud est essentielle pour faire face aux inégalités, à la crise climatique et pour un monde plus équilibré et plus équitable", il exprime en fait, en termes généraux, une prise de conscience et une volonté aujourd’hui mûries par environ 4/5 de la planète.

Pendant combien de décennies encore pensons-nous que l’axe États-Unis-Israël, avec l’UE en laisse, sera en mesure d’étouffer ou de freiner cette volonté ?

Emiliano ALESSANDRONI

COMMENTAIRES  

29/08/2023 21:01 par bostephbesac

Ce cher "Kiki de Kiev" qui ose dire que Lula ne comprend pas grand chose au monde - Lula, 2 mandats présidentiels (3ème en-cours) et une longue expérience syndicale - c’ est vraiment l’ hôpital qui se fout de la charité !

29/08/2023 22:43 par Danael

Je ne sais pas si "La coopération entre les pays du Sud est essentielle pour faire face aux inégalités, à la crise climatique et pour un monde plus équilibré et plus équitable" car elle ne remet pas en question l’ordre capitaliste mais la domination du dollar qui permet aux États-Unis toutes sortes de chantages , ce qui n’est déjà pas si mal pour rendre possible d’autres perspectives politiques et économiques dans beaucoup de pays et surtout moins d’instabilité peut-être si cette coopération insiste sur la résolution des conflits par la diplomatie et les intérêts communs .
https://www.rt.com/news/581890-brics-is-challenge-to-nato/

19/09/2023 13:11 par babelouest

Comprendre le monde ?

Manifestement, l’anti-civilisation qui se vautre entre le Rio Grande et les Grands Lacs ne veut surtout pas le comprendre, puisque pour elle, le monde, c’est elle à l’exclusion de tout le reste. Pas étonnant, qu’elle soit étonnée et choquée, qu’on puisse penser d’une façon différente. C’est aussi indécent por elle que, pour une femme faire seulement entrevoir un téton, pour un politicien mentir alors que "c’est le métier qui veut ça...", ou pour un militaire avouer qu’il a perdu. Pour la race exceptionnelle il y a des choses impensables. Il est vrai que, pour "elle", l’égalité est un des pires gros mots. Un peu comme dans l’empire eddorien de la série des Fulgurs, de Edward Elmer Smith... où selon le témoignage d’une sujette à cet Empire "vous êtes un peu au-dessus, ou au-dessous, JAMAIS au même niveau qu’un autre."
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Il faut faire remarquer que cet auteur est si manifestement étatsunien, que c’en est presque caricatural, comme la toute fin du film "La faille de San Andrea" avec soudain un immense drapeau qui se déploie sur fond d’hélicoptères en formation. Rien à voir avec la gestion tellement calamiteuse de la Nouvelle-Orléans et sa région après l’ouragan Katrina. (pour comparer, deux amis météorologues avaient débarqué en Guadeloupe juste après l’ouragan Hugo, et les choses se sont plutôt mieux passées avec le temps, malgré les inévitables complications). A l’époque les priorités françaises avaient encore de la tenue.

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