L’esprit du General Curtis LeMay plane sur Gaza.

En réponse à John Mearsheimer, que j'apprécie, sauf quand il cherche à me convaincre que le conflit avec la Chine serait inévitable, ou que les Américains sont de bien braves gars, entraînés dans un génocide immoral par la seule faute d'un Israël qui contrôle le congrès.

PHOTO / Curtis LeMay

Né dans l’Ohio le 15 novembre 1906, il ouvre la porte du paradis des criminels de guerre le 1er octobre 1990.

Fait notable, il aura participé à l’élection présidentielle de 1968 en tant que colistier de George Wallace.

Quoi de plus normal :)

LeMay fut un général de l’armée de l’air étasunienne, connu pour avoir mené la campagne de bombardement du Pacifique pendant la Seconde Guerre mondiale. Après la guerre, il a servi comme chef du Strategic Air Force Command, la branche militaire responsable de la plupart des armes nucléaires du pays.

LeMay fut un membre éminent de la Bomber Mafia, un groupe de généraux des années 1930 qui pensaient que le bombardement stratégique des infrastructures adverses pouvait imposer la volonté américaine à tout ennemi.

Il ne s’est pas contenté de le penser.

Comme il l’affirma plus tard : « Les avions de chasse sont amusants... Les bombardiers sont importants. »

Les équipages sous ses ordres l’ont surnommé « Iron-Ass LeMay » (LeMay cul de fer).
Il prenait très bien la chose. « Je ne suis pas réel, je ne suis pas humain », « Je suis une machine. »

D’abord déployé sur le front européen, Iron-AssMachine a mis au point une formation de vol (“combat box”) pour les .bombardiers, leur permettant de se défendre contre les chasseurs allemands. Premier succès enregistré lors du bombardement de St-Nazaire le 23 novembre 1942.

Le 17 août 1943, lors d’un raid contre les usines allemandes à Schweinfurt et l’usine de chasseurs Messerschmidt à Regensburg, il prends la tête d’une formation de 376 bombardiers. 60 seront perdus. On doit reconnaître qu’il a su prendre les mêmes risques que ses hommes.

En raison du coût prohibitif des vies étasuniennes et de leurs avions, les stratèges changent de cible.
Si les bombardiers ne peuvent pas détruire les capacités de combat de l’ennemi, ils peuvent détruire la volonté de l’ennemi en couvrant villes et civils de tapis de bombes. Iron-AssBomber approuva sans réserve cette stratégie. « Il n’y a pas de civils innocents. Vous combattez un peuple, son gouvernement et sa force armée. Tuer des civils ou des passants soit-disant présumés innocents ne me dérange pas. ».

De nuit, de jour, les villes allemandes ont été réduites en cendres. Les résultats du bombardement allié sont encore controversés aujourd’hui. Selon des estimations, 305 000 civils ont été tués, 780 000 blessés, et 7,5 millions finirent sans abri.

Janvier 1945, départ pour les îles Mariannes.

En utilisant les Boeing B-29 Superfortress, Iron-Ass fera au Japon ce qu’il a fait à l’Allemagne.
Les premiers bombardements à haute altitude s’avérant inefficaces, SuperIron-Ass adopta une solution démoniaque.

Si les Superfortress ne peuvent pas bombarder à haute altitude en plein jour, ils bombarderont à basse altitude la nuit, quand il n’y a pas de vents forts, ni de chasseurs ennemis. Les munitions seront des bombes au phosphore M47 et des bombes au napalm M69, une belle saleté.

Pour les maisons japonaises traditionnelles en bois et en bambou, entourées d’écrans en papier et recouvertes de chaume, ces munitions ne sont rien d’autre qu’une pluie de feu.

Iron-Man déclare : « Vous allez tuer beaucoup de civils. Des milliers. Mais nous sommes en guerre avec le Japon. Nous avons été attaqués par le Japon. Voulez-vous tuer les Japonais ou préférez-vous voir tuer plus d’Américains ? »

Le 9 mars 1945, de la piste de Guam en corail brisé, le major général Iron Curtis E. Asshole Lemay a vu décoller le premier de ses 300 bombardiers pour une attaque de minuit sur Tokyo, située à environ 1.500 miles, plein nord. Il prévoit de larguer le napalm incendiaire dans les quartiers surpeuplés du Centre de Tokyo. L’une des villes les plus denses du monde, avec plus de 50 000 civils par Km2. Il espère que tout soit réglé avant l’aube.

Ce n’est pas une tâche ordinaire. Les premières bombes devront former un cercle de feu tout autour du centre de la ville.

C’est un meurtre, et il le sait.

À ce jour, le bombardement de Tokyo reste le raid aérien le plus dévastateur de l’histoire.
Les Superfortress ont largué 2.000 tonnes de munitions incendiaires, et il aura fallu trois semaines pour nettoyer la ville des corps des civils.
Combien de victimes réduites en cendres ? Les estimations varient de 80 000 à plus de 200 000 morts, plus que les bombardements atomiques d’Hiroshima ou de Nagasaki.
Sans surprise, toutes les victimes sont des femmes, des enfants et des personnes âgées.

Que pense-t-il lorsque lorsque le Brigadier Général Thomas Power, RayBan sur le nez et pistolet en bandoulière, vient lui présenter le rapport de l’attaque ?

On le voit un peu bedonnant, fumer sa pipe, le rapport à la main.

L’armée des EU aura perdu 14 bombardiers et 96 pilotes. Triste, mais le compte est bon.

Des années plus tard, il dira « Je suppose que si on avait perdu la guerre, je serais jugé comme un criminel de guerre », « Heureusement, nous sommes du côté de la victoire, toutes les guerres sont immorales et si vous laissez cela vous déranger, vous n’êtes pas un bon soldat. »

Mi-1945, une ville après l’autre est incendiée.

Iron-BigFire déclare alors que les armes atomiques ne sont pas nécessaires : « Nos bombardements incendiaires ont été très efficaces, le Japon s’effondrera avant notre invasion. »

À la fin de la guerre, il commandait plus de 1 000 bombardiers, la Force aérienne la plus meurtrière de la planète, et à son actif au moins 220 000 civils japonais, probablement plus d’un demi-million.
Quand on aime, on ne compte pas.

Dans les standards actuels, il ferait figure de simple amateur.

COMMENTAIRES  

05/11/2024 20:06 par xiao pignouf

Pour avoir une petite idée, une toute petite idée de ce que furent ces bombardements des villes japonaises, je recommande le magnifique Tombeau des Lucioles, d’Isao Takahata.

06/11/2024 02:51 par Georges Rodi

A quoi ressemble GAZA ?
A une ville japonaise après le passage des B-29.
Il y a eu des cas en France et en Allemagne aussi.
Mais leurs gouvernants l’ont oublié, et se rangent une fois de plus derrière les armées les plus morales du monde...

L’aviation israélienne n’a même pas besoin de créer un mur de feu tout autour de la ville, il y en a déjà un en béton. Elle peut prendre son temps pour finir le travail.

Do not call it “war”. It is a genocide
@FranceskAlbs

There are many ways in which Israel is destroying the Palestinians in Gaza. Creating unsustainable and inhumane conditions of life is the most complex and cruel.

Do not call it “war”. It is a genocide. The motives are irrelevant. The intent (ie the determination) to destroy is… https://t.co/BBoFmzqIiD

— Francesca Albanese, UN Special Rapporteur oPt (@FranceskAlbs) November 5, 2024

Israel dropped multiple 2000 pound bombs on an UNRWA school full of displaced children
@NOWAR_02

Israel dropped multiple 2000 pound bombs on an UNRWA school full of displaced children at Nasairat Refugee Camp

Dozens of children dead and hundreds more injured, every politician who backed this should be charged, every business and celebrity boycotted.

Devils in suits pic.twitter.com/dNUWdPBged

— NO WAR (@NOWAR_02) November 5, 2024

IDF attack on Kamal Adwan Hospital
@MccarthyFintan

#IDF attack on #KamalAdwanHospital destroyed an oxygen station in the hospital’s nursery killing children and leaving only 1 survivor. His entire family were killed. #IsraeliWarCrimes #GazaGenocide‌ pic.twitter.com/yr9KCvoDGo

— Fintan McCarthy

06/11/2024 14:19 par Vincent

Cette traduction bancale d’une déclaration de Le May sur la guerre de Corée, une autre belle réalisation made in USA après 1945 (454 000 tonnes de bombes, 3,2 millions de litres de napalm) :
« Nous sommes allés là-bas et avons combattu la guerre et finalement incendié toutes les villes de Corée du Nord de toute façon, d’une manière ou d’une autre, et certaines en Corée du Sud aussi.... Sur une période d’environ trois ans, nous avons tué - quoi-vingt pour cent de la population coréenne en tant que victimes directes de la guerre, ou de la famine et de l’exposition ? »

Une autre, qui peut illustrer le titre de ce très bon billet :
« Si vous allez utiliser la force militaire, alors vous devez utiliser une force militaire écrasante. Utilisez-en trop et délibérément trop ; vous sauverez des vies, non seulement les vôtres, mais aussi celles de l’ennemi. »

Et ça, tiré de cet article :
« Lorsqu’une sous-commission du Sénat américain nommée en 1953 par le sénateur Joseph McCarthy a enquêté sur les atrocités de la guerre de Corée, la commission a explicitement déclaré que « les crimes de guerre étaient définis comme les actes commis par les nations ennemies. » »

12/11/2024 08:46 par Georges Rodi

Bye Bye Curtis.

Tu vas bientôt disparaître de la une du GS.
Merci d’être passé.
Si tu pouvais nous donner quelques nouvelles fraîches de Madeleine Albright, ce serait avec plaisir de te lire.

Ps : lorsque je dis nouvelles fraîches, je ne parle pas de leur température, on se comprends bien je pense :)

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