Le 1er mars à Paris Ali Zeidan, porte parole de la "ligue libyenne des droits de l’homme" qui vit en exil aux Etats-Unis, déclare que les violences liées à la répression de l’insurrection libyenne avaient fait 6000 morts dont 3000 dans la seule ville de Tripoli, 2000 à Benghazi et 1000 dans d’autres villes.
Quelques jours auparavant les bombardements opérés par Kadhafi sur la population libyenne et se résumant sur Al Jazeera, la chaîne du Quatar en arabe que je regarde (1), à quelques nuages de fumées noires dans le ciel libyen avaient été infirmés par les satellites de l’armée russe... Mais qu’importe... La machine de propagande est lancée et tout se met en place pour permettre l’intervention des puissances occidentales.
Je ne suis qu’une femme du peuple et ce que j’ai vu et analysé comment des personnalités médiatiques et informées comme Ignacio Ramonet (2) et Serge Halimi (3) peuvent-ils l’ignorer et justifier encore cette intervention occidentale qui a reposé sur le seul argument de protéger les populations civiles ?
L’apparition bondissante, d’un plateau télé à un micro radio, d’un Bernard Henry-Lévy était pourtant la signature d’une arnaque de l’appareil de désinformation. L’entendre se vanter dans les médias français d’avoir présenté les dirigeants du conseil national de transition à Sarkosy donnait une idée de ce qui était en train de se préparer ( BHL et son invention des indiens mosquitos du Nicaragua (4)), donnait une idée de ce que l’intervention française n’allait pas soutenir une guerre de libération nationale ou protéger une révolte populaire semblable à celle de la Tunisie et de l’Egypte.
Aucun des premiers expatriés européens n’a mentionné à sa descente d’avion devant micros et caméras des massacres de la population libyenne par son "dictateur" (témoignages rapidement occultés).
Le 8 mars une commision de l’Union européenne avait constaté l’absence de bombardements à Tripoli, son rapport a été enterré.
Le conseil de sécurité, violant allègrement la Charte des Nations Unis, adopte le 17 mars une résolution autorisant le recours à la force contre le régime libyen bien qu’il "n’existait pratiquement aucune information crédible sur la situation sur place"(5).
La Libye n’agresse personne, ne bombarde ni ne détruit aucun de ses voisins, n’enferme pas un million et demi de personnes dans un blocus illégal comme à Gaza... mais qu’importe on nous assure que cette guerre vise à protéger les civils du massacre projeté par Kadhafi.
Parmi les volontaires qui iront bombarder la Libye aux noms des "droits humains" et du "droit international" se trouvent pourtant deux états du Golfe gouvernés par des monarchies héréditaires qui ont envoyé leurs troupes au Barhein pour écraser dans le sang la requête populaire de démocratie 3 jours avant le 17 mars.
Plus de 350 avions, des dizaines de navires de tout l’occident bombardent dès après le 17 mars un pays sans défense.
Celà s’appelle un carnage humanitaire et c’est ce qu’on fait les avions français couverts, notamment au soir des bombardements les plus meurtriers, par un reportage de Mémona Hinterman sur antenne2 où devant des millions de téléspectateurs un vieux monsieur d’une ville de l’est libyen parlant un français parfait montrait sa maison par endroits mitraillée par les forces kadhafistes.
Cette guerre humanitaire à l’uranium appauvri restera problablement dans l’histoire comme l’une des plus grandes opérations de désinformation et de violation du droit international de notre époque.
Les français qui se sont forgés leurs opinions d’après ce qu’en ont dit leurs médias et leur gouvernement ont été abusés et doivent le reconnaître, fussent-ils eux mêmes journalistes en retraite ou en activité. S’ils pensent encore que tel n’est pas le cas qu’ils fournissent alors des sources alternatives et crédibles.
Dans les médias français nous avions déjà au moins deux dictateurs : Fidel Castro et Hugo Chavez, nous avons maintenant Kadhafi.
Quoique l’on pense du personnage... je demeure persuadée que le mal qu’il a pu faire à son peuple en 42 ans est sans commune mesure avec les crimes d’Alvaro Uribe en 2 mandats présidentiels à la tête de la Colombie (6).
Le peuple libyen sait ce que Kadhafi lui a apporté (7). On se demande comment, pourtant armé et bombardé le grand petit peuple de Libye peut encore le supporter ? Tout simplement parce que la majorité des libyens le soutient. Les africains savent ce qu’il a apporté à l’Afrique (8)
Les 30 milliards de dollars saisis par Obama appartiennent à la Banque centrale libyenne et étaient prévus pour la contribution libyenne à la finalisation de la fédération africaine à travers 3 projets phares :
1 - la Banque africaine d’investissement à Syrte en Libye.
2 - la création dès 2011 du Fonds monétaire africain avec un capital de 42 milliards de dollars et son siège à Yaoundé.
3 - la Banque centrale africaine avec son siège à Abuja au Nigéria dont la première émission de monnaie africaine aurait sonné la fin du franc CFA grâce auquel Paris a la main mise sur certains pays africains depuis 50 ans.
Je me souviens aussi qu’à peine libéré de ses 27 ans de prison, outre son voyage à La Havane Nelson Mandela décide d’aller rompre l’embargo des Nations Unis contre la Libye le 23 Octobre 1997.
L’agression actuelle contre la Libye devrait être condamnée sans réserves par tous les partis et organisations progressistes. C’est une guerre de capitalistes que vont payer les gens du peuple de France.
Déjà la présence française en Afganistan coûte à nos salaires et retraites 700 millions d’euro/an. La dépense la plus élevée du porte-avions Charles de Gaulle est d’1 million d’euro/jour. Selon les estimations les 3 premiers jours de furia française auraient coûté entre 4,5 et 5,2 millions d’euro.
Combien coûtera cette guerre 200, 300 millions ou plus.. Les marchands d’armes propriétaires de la plupart des médias français doivent se féliciter de ce bon retour sur investissements....
"En Libye il y a maintenant des milliers de victimes innocentes et les médias y ont une grande part de responsabilités" a dit Jordan Rodriguez (9).
Les journalistes français et les partis et organisations progressistes portent une grande responsabilité dans le fait que ne se lèvent pas en France plus de protestations contre cette guerre criminelle.
Pourtant maintenant ils savent beaucoup de choses sur "les insurgés de la liberté" de cette guerre civile dont le pivot est la ville de Benghazi et sur l’aide qui leur a été apportée par les puissances occidentales hier et aujourd’hui.
Peuvent-ils encore croire ou faire semblant de croire que nous y protégeons les populations civiles ?
Gabrielle Gangai