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Le Monde Diplomatique (janvier 2015)

À l’occasion de la parution de son premier numéro pour l’année 2015, le mensuel vient d’apprendre qu’il ne bénéficierait plus du fonds stratégique pour le développement de la presse. Contrairement à Closer (qui aime tant Hollande et sa Julie), Le journal de Mickey et Télécable Sat Hebdo. Le solférinisme aime la culture, le journalisme de qualité et leur diffusion à l’étranger.

Serge Halimi revient sur l’évolution des relations entre Washington et Cuba : « Sa défaite électorale de novembre dernier semble avoir revigoré le président des Etats-Unis. Elu triomphalement à la Maison Blanche en 2008 et disposant pendant ses deux premières années de mandat d’une confortable majorité parlementaire, il n’a tiré de tout cela qu’une modeste réforme du système de santé et une litanie d’homélies prêchant le compromis à des parlementaires républicains déterminés à le détruire. Depuis que son parti a été écrasé lors des élections de mi-mandat, que sa carrière politique s’achève, M. Barack Obama multiplie en revanche les choix audacieux. Annoncée juste après un important accord climatique avec la Chine et l’amnistie de cinq millions d’immigrés clandestins, sa décision de rétablir les relations diplomatiques avec La Havane en témoigne. La démocratie américaine exigerait-elle qu’un président n’ait plus ni sénateur forcené à satisfaire ni lobby fortuné à ménager pour qu’il puisse prendre une décision raisonnable ? »

À Cuba (Salim Lamrani), on se dirige vers la fin du plus long embargo de l’histoire : « Le 17 décembre 2014, La Havane et Washington annonçaient le rétablissement de leurs relations diplomatiques. « Cela ne veut pas dire que le problème principal est résolu », a observé le président cubain Raúl Castro lors de son allocution télévisée. Demeure en effet la question de l’embargo, que seul le Congrès américain peut lever. Depuis bientôt cinquante-trois ans, celui-ci étrangle l’économie de l’île.

Les premières mesures de rétorsion économique – la réduction des importations de sucre en provenance de l’île – ont été imposées à Cuba en 1960 par l’administration républicaine de Dwight D. Eisenhower, officiellement en raison du processus de nationalisations entrepris par le gouvernement révolutionnaire de Fidel Castro. En février 1962, John F. Kennedy étend les mesures et décrète un embargo.

L’impact est dramatique. Les Etats-Unis ont toujours constitué le marché naturel de Cuba. En 1959, 73 % des exportations de l’île étaient destinées au voisin du Nord ; 70 % des importations en provenaient. En quelques semaines, ces échanges s’assèchent totalement…

La rhétorique justifiant cet état de siège économique a évolué au fil des années. En 1960, Washington mettait en avant l’expropriation d’entreprises américaines. A partir de 1961, la Maison Blanche justifie sa position par le rapprochement de l’île avec Moscou. Plus tard, ce seront le soutien aux guérillas latino-américaines en lutte contre les dictatures militaires ou encore les interventions cubaines en Afrique qui fourniront aux Etats-Unis la justification de l’embargo. »

Quentin Ravelli a enquêté sur “ les dessous de l’industrie pharmaceutique ” : « Les scandales rythment l’information sur l’industrie pharmaceutique et focalisent l’attention sur ses excès. Suivre le parcours d’un médicament sans histoire, de sa conception à sa prescription, montre pourtant que la frontière est mince entre les dysfonctionnements et les pratiques routinières. »

« J’ai compris que j’étais fliquée, qu’on savait exactement ce que je prescrivais, s’indigne une médecin installée à Paris. J’étais naïve, moi, je ne savais pas. [Un jour], une visiteuse médicale m’a dit : “Vous ne prescrivez pas beaucoup !” Je me suis demandé : “Comment peut-elle savoir cela ?” » Cette pratique de surveillance, qui choque de nombreux praticiens, est orchestrée par les services commerciaux des laboratoires. Pour augmenter ou maintenir leurs parts de marché, les grands groupes pharmaceutiques déploient des trésors d’ingéniosité. Ils n’hésitent pas, par exemple, à modifier les indications de leurs médicaments pour gagner de nouveaux clients.

À lire l’article de Mathilde Goanec sur les hopitaux psychiatriques italiens : “ Fous à délier ” : « Les derniers hôpitaux psychiatriques judiciaires italiens devraient disparaître dans les prochains mois. Cette mesure, saluée par les militants de l’abolition de l’enfermement, parachève un long combat contre les préjugés ayant trait à la dangerosité des malades mentaux. A Trieste, des pionniers expérimentent avec succès des approches thérapeutiques alternatives depuis le début des années 1970.
A Trieste, on dit que la bora rend fou. Ce glacial vent du nord traverse chaque année la ville, s’engouffrant entre les immeubles sévères de la place de l’Unité italienne pour s’accrocher aux branches des arbres de San Giovanni. Dans ce parc, de petits pavillons verts sont les dernières traces de l’hôpital psychiatrique fermé au début des années 1970 par le médecin Franco Basaglia. Pour célébrer la fin de l’asile, malades, soignants et artistes avaient alors construit un immense cheval bleu en carton-pâte. Poussé hors du parc où vécurent reclus des années durant près de mille deux cents « fous », le cheval symbolisait le retour à la vie civique, la réappropriation d’une citoyenneté et un appel à une autre psychiatrie. »

Pour Renaud Lambert, Podemos « bouscule l’Espagne » : « La perspective d’une victoire de la formation de gauche radicale Syriza lors d’élections législatives anticipées en Grèce a suffi à alarmer la Commission européenne. Ailleurs en Europe, la résistance aux politiques d’austérité s’organise loin de structures partisanes soupçonnées de faire partie du problème plutôt que de la solution. Ce fut longtemps le cas en Espagne, jusqu’à la création d’un parti qui semble changer la donne. »

À propos du PCF, Julian Mischi se demande comment un appareil « s’éloigne de sa base » : « De multiples facteurs expliquent l’affaiblissement du Parti communiste français. La volonté d’adapter son discours aux attentes des classes moyennes l’aurait-il précipité ?

Janvier 2014. Nous arrivons au siège du Parti communiste français (PCF), place du Colonel-Fabien à Paris, pour demander des données sur les adhérents. Combien sont-ils ? Mais surtout, qui sont-ils ? D’après tous les indicateurs, les catégories populaires sont de moins en moins présentes au sommet de l’organisation. Mais qu’en est-il à la base ? La réponse devrait être facile à obtenir. Le département « Vie du parti » centralise depuis 2009 les nombreux renseignements que la formation possède sur ses membres : âge, sexe, lieu d’habitation, secteur d’activité... Mais nul mot sur la catégorie socioprofessionnelle. On peut savoir que tel militant travaille à la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) ou dans l’aéronautique, mais pas s’il est cadre ou ouvrier. Ce manque d’intérêt pour la condition sociale des adhérents illustre une tendance à l’œuvre au sein du PCF depuis trente ans : jadis centrale, la question de la représentation des classes populaires est devenue secondaire. »

Simon Borja, Guillaume Courty et Thierry Ramadier réfléchissent au concept de mobilité : « L’idéologie dominante s’appuie sur des notions si communément admises qu’elles finissent par se dispenser de toute mise en perspective. Tel est le cas de la « mobilité ». A première vue, le terme rassemble sous la bannière du bon sens les traits saillants d’une époque où tout bouge, tout change, tout se déplace. Analyser ce qu’il recouvre comme on épluche un oignon révèle pourtant bien des surprises. »

Pour les Afro-Américains, le bilan de la présidence d’Obama est amer amer (Desmond King) : « Le 20 novembre 2014, Akai Gurley a rejoint Michael Brown sur la liste des Noirs tués, aux Etats-Unis, par des policiers blancs. Les jours suivants, des milliers de citoyens ont manifesté contre ces crimes impunis, ravivant le débat sur l’équité de la justice. Pour seule réponse, M. Barack Obama leur a demandé d’être « persévérants », au prétexte que « les choses vont mieux » qu’avant. Les Afro-Américains semblent parfois en douter... »

Wendy Kristianasen analyse le « splendide isolement de la Turquie » : « « Zéro problème » avec les voisins, tel était l’objectif de la politique étrangère du Parti de la justice et du développement (AKP). Mais les « printemps arabes » ont bouleversé la donne régionale, et la Turquie se trouve désormais en froid avec la Syrie, l’Arabie saoudite, l’Iran et l’Egypte. Alors que le régime connaît une dérive autoritaire, le choix de la « solitude dans la dignité » constitue-t-il une option ? »

Selon Marie Chambrial et Erwan Manac’h , la communauté rom se réveille : « Longtemps invisible, la plus importante communauté rom d’Europe a accompli une renaissance identitaire à la faveur d’une ouverture du pouvoir islamo-conservateur turc. Mais son émancipation économique et sociale s’avère beaucoup plus délicate. »

Marc Humbert évoque l’immigration choisie à la japonaise : « Le premier ministre Abe Shinzo et son Parti libéral-démocrate ont remporté les législatives anticipées du 14 décembre 2014. Malgré le niveau record d’abstention (47,4 %), ils auront les mains libres, durant les quatre prochaines années, pour engager des réformes de structure impopulaires, dont l’adoption d’une politique d’immigration visant à faire face à la baisse accélérée de la population. »

Tandis que Suzuki est « défié par la jeunesse ouvrière indienne » (Naïké Desquesnes) : « Pour attirer les investisseurs en Inde, le premier ministre Narendra Modi propose d’accroître la flexibilité du travail. Comme le montre l’importante grève de 2011-2012 chez Maruti Suzuki, l’affaire n’est pas complètement jouée. Solidarité entre précaires et titulaires, renouveau syndical : les jeunes travailleurs résistent et bouleversent le répertoire traditionnel de la lutte en usine.

Une réflexion intéressante sur la « résistible dérive oligarchique » (Antoine Schwartz) : « Plus d’un siècle s’est écoulé depuis la publication de l’essai classique de Robert Michels, « Les Partis politiques ». Mais la question qu’il soulevait conserve son actualité : nos sociétés démocratiques seraient-elles condamnées à la domination des élus sur les électeurs ?

Comment éduquer les militants aujourd’hui (Allan Popelard) ? : « Formation ? Formatage ! La méfiance suscitée par les organisations politiques semble avoir déteint sur leur prétention à éduquer les militants. De Lutte ouvrière au Front national, comment les partis conçoivent-ils désormais leur fonction pédagogique ?

Selon Olivier Zajec, l’Australie est séduite par la Chine : « En écho aux préoccupations des pays du Sud-Est asiatique bousculés par les ambitions économiques et territoriales de Pékin, l’Australie semble tenir son rôle de lieutenant dans le cadre de la stratégie américaine de rééquilibrage vers le Pacifique. Pourtant, son insertion économique dans la région révèle une politique beaucoup plus équivoque, marquée par une volonté d’émancipation et par une fascination pour la Chine. »

À lire la nouvelle de Moustapha Belhocine sur le travail précaire “ Gestion du flux ” : « Se voir agir, et saisir d’un même regard les circonstances qui nous font agir : cette distance au rôle est un trait commun à de nombreux observateurs critiques de la société. Combinée à la prise de notes quotidienne et à la faculté littéraire de rendre vivantes des situations, elle fait un écrivain. »

Rodrigue Nana Ngassam dépeint le Cameroun sous la menace de Boko Haram : « Devant la multiplication des attentats et des enlèvements perpétrés par Boko Haram, le ministre français de la défense Jean-Yves Le Drian a demandé, le 16 décembre, la création d’un comité régional de liaison militaire. Née au Nigeria, où elle multiplie les exactions, la secte opère désormais avec une grande maîtrise du terrain au Niger et dans le nord du Cameroun, obligeant Yaoundé à une riposte armée. »

Claudio Gramizzi et Jérôme Tubiana évoquent les “ Arbitraires sanctions internationales, du Soudan à la Russie ” : « Mi-décembre 2014, la Cour pénale internationale a abandonné les charges pesant sur le président du Kenya Uhuru Kenyatta et suspendu ses enquêtes au Darfour. L’adoption de sanctions serait-elle plus efficace ? »

Sommes-nous désormais « privés de vie privée » ? (Jérôme Thorel) : « Le « droit à l’oubli » dans les moteurs de recherche a été consacré par une décision très commentée de la Cour de justice de l’Union européenne en mai 2014. Un mois plus tôt, la même juridiction rendait dans l’indifférence un arrêt portant sur une autre dimension du droit à la vie privée : celui de pouvoir s’exprimer et se déplacer physiquement sans laisser de traces numériques. »

« Le nègre docile est un mythe « , affirme Matthieu Renault : « Qui, en Europe, connaît C.L.R. James ? Engagé dès les années 1930 dans les luttes anticoloniales, il fut aussi un militant socialiste. Au croisement des questions raciales et sociales, son œuvre explore en profondeur une dimension que nombre d’intellectuels semblent découvrir depuis peu. »

Frédéric Kaplan et Dana Kianfar se demandent se que valent vraiment les traducteurs automatiques de Google (“ Il pleut des chats et des chiens ”) : « Au début du mois de décembre dernier, quiconque demandait à Google Traduction l’équivalent italien de l’expression « Cette fille est jolie » obtenait une proposition étrange : Questa ragazza è abbastanza, littéralement « Cette fille est assez ». La beauté s’était lost in translation — perdue en cours de traduction. Comment un des traducteurs automatiques les plus performants du monde, fort d’un capital linguistique unique constitué de milliards de phrases, peut-il commettre une erreur aussi grossière ? La réponse est simple : il passe par l’anglais. « Jolie » peut se traduire par pretty, qui signifie à la fois « joli » et « assez ». Le second sens correspond à l’italien abbastanza. »

Bernard Gensane

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