Le pacte transatlantique, le coup d’État néolibéral

Marc DELEPOUVE

Pourquoi faut-il dénoncer et se rassembler contre le pacte transatlantique ?

Le 8 juillet 2013, les négociations du pacte transatlantique ont été ouvertes. L’objectif est de parvenir à un accord de libéralisation accrue du commerce et des investissements entre l’Union européenne (UE) et les États-Unis. La Commission européenne est chargée de mener ces négociations au nom de l’UE. Mi-juin, un mandat précisant cet objectif a été donné à la Commission par le Conseil des ministres des pays membres de l’UE en charge du Commerce extérieur.

Le 8 juillet 2013, les négociations du pacte transatlantique ont été ouvertes. L’objectif est de parvenir à un accord de libéralisation accrue du commerce et des investissements entre l’Union européenne (UE) et les États-Unis. La Commission européenne est chargée de mener ces négociations au nom de l’UE. Mi-juin, un mandat précisant cet objectif a été donné à la Commission par le Conseil des ministres des pays membres de l’UE en charge du Commerce extérieur.

Le 29 juillet dernier, dans une tribune publiée par le journal Libération, la ministre française du Commerce extérieur, Nicole Bricq, nous informe qu’elle a «  demandé au commissaire en charge du Commerce, M. Karel De Gucht, de rendre public le mandat de négociation  », ce qu’elle complète en précisant que «  ce mandat est déjà disponible sur de nombreux sites Internet  » en raison de «  fuites  » (1), alors même qu’à ce jour son propre ministère n’a toujours pas publié le document qu’elle a elle-même validé il y a maintenant près de deux mois. Peut-on s’étonner du double jeu de la ministre, sachant que, selon les «  fuites  » dont elle fait état, le mandat de la Commission déborde en réalité largement de la sphère économique et présente un important recul de la démocratie doublé d’une nouvelle menace sur les droits sociaux ?

Ainsi, le mandat de la Commission comporte la mise en place d’une nouvelle instance juridique internationale devant laquelle un État pourra attaquer un autre État, mais aussi et surtout devant laquelle un investisseur pourra directement attaquer un État, en particulier quand ce dernier aura mis en place des mesures pouvant réduire les profits de cet investisseur. Les entreprises et les États seraient alors mis sur un pied d’égalité et le capital juridiquement hissé au même niveau que la souveraineté démocratique.

Les droits sociaux sont dans la ligne de mire du pacte transatlantique. L’intensification du libre-échange et son extension à de nouveaux secteurs constituent le cœur du mandat de la Commission, avec pour conséquence l’aggravation des contraintes imposées par la compétitivité, et donc de la pression qui s’exerce sur les droits sociaux et les salaires. Cependant, le mandat précise que «  le commerce et l’investissement direct étranger ne seront pas encouragés par l’abaissement de la législation en matière de travail ou de santé au travail  ». Ce propos est en opposition frontale avec la politique socialement dévastatrice actuellement imposée à des pays tels que la Grèce, le Portugal ou la Hongrie (baisse de rémunération, augmentation du temps de travail, etc.). De plus, ce propos n’est guère qu’une caution politicienne irréaliste tant que, dans le contexte de libre-échange extrême, ne sont pas mises en place des politiques de solidarité en faveur des économies nationales en manque de compétitivité. De cette politique de solidarité, il n’est nullement question dans le mandat de la Commission. Enfin, il nous faut souligner l’uniformisation des normes sanitaires, environnementales et de sécurité que vise le mandat de la Commission, cela afin de favoriser les échanges et investissements transatlantiques. La politique des États-Unis en matière agroalimentaire (hormones, OGM…) et énergétique (gaz de schiste…) doit alerter.

L’ambition générale du pacte transatlantique, telle que définie par le mandat de juin, est d’accroître la soumission des institutions démocratiques de l’UE et de ses États membres (idem outre-Atlantique) aux lois du marché et aux entreprises multinationales. La plupart des secteurs de la société en seront impactés. Le coup d’État et la transformation de la société que le néolibéralisme opère par vagues successives depuis trois décennies franchiraient une étape majeure, au bénéfice des entreprises multinationales, de leurs dirigeants et de leurs principaux actionnaires. Le pacte transatlantique est la tentative d’un nouveau coup de force néolibéral. Sera-t-il la tentative de trop ? Celle qui enclenchera, en Europe, un rassemblement et un développement des forces attachées à la démocratie, au progrès social et à la défense de l’environnement ?

Marc Delepouve

(1) L’Humanité, par souci de transparence 
et de démocratie, avait décidé de publier ce document caché aux citoyens sur son site Internet et d’en décrypter 
le contenu secret dans son édition du lundi 24 juin.

http://www.humanite.fr/tribunes/le-coup-d-etat-neoliberal-546985

Par Marc Delepouve, syndicaliste et universitaire.

COMMENTAIRES  

12/08/2013 16:18 par BOB

Cette intégration USA/UE permettra d’accorder des droits sans précédent aux entreprises, leur permettant de poursuivre des gouvernements pour des législations ou réglementations qui interfèreraient avec leurs profits, (on pense à l’extraction des gaz de schiste ou l’utilisation d’OGM entre autre). Il s’agit de « fluidifier » les échanges internes, ce qui permettrait, selon la commission européenne, d’augmenter de 28 % les exportations de l’UE vers les USA. Cela se traduirait par, tenez-vous bien, 547 euros d’augmentation de revenu par an pour une famille de 4 personnes......on nous prends vraiment pour des cons !

voir :
http://2ccr.unblog.fr/2013/06/26/le-grand-marche-transatlantique-et-puis-et-puis-et-puis/

12/08/2013 16:48 par cunegonde godot

"L’ambition générale du pacte transatlantique, telle que définie par le mandat de juin, est d’accroître la soumission des institutions démocratiques de l’UE et de ses États membres (idem outre-Atlantique) aux lois du marché et aux entreprises multinationales. La plupart des secteurs de la société en seront impactés."

La soumission des Etats aux lois du marché et aux entreprises de dimension mondiale est déjà commencé depuis longtemps. C’est même la vocation première de la f(u)ameuse Union Européenne. Et parler de l’UE en termes d’ "institutions démocratiques" est proprement délirant au sens psychiatrique, ou simplement malhonnête. Au choix...

12/08/2013 17:07 par legrandsoir

question d’interprétation sans doute mais : "Et parler de l’UE en termes d’ "institutions démocratiques" est proprement délirant" —> il s’agit moins de l’UE en termes d’institutions démocratiques (globalement) que d’institutions démocratiques au sein de l’UE (ou ce qu’il en reste).

12/08/2013 17:22 par cunegonde godot

Le Grand Soir :
question d’interprétation sans doute mais : "Et parler de l’UE en termes d’ "institutions démocratiques" est proprement délirant" —> il s’agit moins de l’UE en termes d’institutions démocratiques (globalement) que d’institutions démocratiques au sein de l’UE (ou ce qu’il en reste).

Ben voyons.
Manière (demi)habile de (se) mettre un voile sur la vraie nature de l’UE, son essence même, ses buts et ses fins...

12/08/2013 17:54 par legrandsoir

Je n’exprime pas une opinion, je dis simplement que dans la phrase que vous avez citée, je ne lis pas la même chose que vous. càd je n’ai pas l’impression que l’auteur a dit ce que vous lui reprochez (crûment) d’avoir dit.

12/08/2013 18:20 par cunegonde godot

Le pacte transatlantique est un "coup Etat néolibéral" (sic !) de plus. Il est le prolongement logique de l’UE. Rien de plus. C’est justement par cette méthode faux derche que le totalitarisme "européen" s’est mis en place : par petites touches et une succession de faits accomplis pour endormir les crédules (sous les applaudissements des mondialistes de tous bords et les accommodements des altermondialistes de tous bords aussi)...
Afin d’éviter cette nouvelle piqûre certes nocive, une seule solution : sortir de cette "Europe" mortifère avant qu’il ne soit trop tard. Tout le reste n’est que pleurnicheries et (mauvaise) littérature.
Mais ne dramatisons pas, il nous restera les sujets petits-bourges typiques : la "bataille du voile", la "bataille du genre", la "bataille du mariage tous pour", etc. Ce n’est pas rien tout de même, et ça occupe...

12/08/2013 23:24 par Dwaabala

Les forces de gauche constituées jouent la carte de la démocratisation de l’UE dans le cadre de l’UE, comme elles jouent celle de la démocratisation de la France dans le cadre des institutions républicaines.
On peut les taxer de réformistes et ne pas être d’accord avec elles sur ces points.
Il n’empêche que cet article informe et alerte sur ce qui est en train de se passer avec la signature du traité, et sur la manière dont cela se passe : le futur fonctionnement du marché transatlantique et ses conséquences semblent être davantage à l’ordre du jour que la sortie de l’UE.

13/08/2013 09:05 par Ardwenn

Pourquoi ne pas parler, tout simplement, d’"Anschluss" ?
Ce terme a deux grands mérites :
1- Il correspond exactement au contexte idéologique qui sous-tend ces soi-disantes négociations.
2- Il évoquerait dans l’opinion une image forte, correspondant aux boulevresements prévisibles dans notre vie quotidienne.

14/08/2013 08:32 par cunegonde godot

Ardwenn :
"Pourquoi ne pas parler, tout simplement, d’"Anschluss" ?
Ce terme a deux grands mérites :
1- Il correspond exactement au contexte idéologique qui sous-tend ces soi-disantes négociations.
2- Il évoquerait dans l’opinion une image forte, correspondant aux boulevresements prévisibles dans notre vie quotidienne.

Il s’agit bien d’une annexion, en effet. Concrétisation de toute idéologie mondialiste, y compris l’idéologie altermondialiste. Mais cette annexion de l’ "Europe" par les Etats-Unis d’Amérique a commencé en 1945, en France p.ex. avec les accords Blum-Byrnes de mai 1946 contre l’annulation de la dette de guerre à l’égard des Etats-Unis qui, cela va sans dire, ne nous avaient pas "libérés" pour rien...
Pour ne parler que de notre pays la France, son annexion par l’UE a été approuvée par ses parlementaires, contre l’assentiment de son peuple s’étant préalablement prononcé contre par référendum le 29 mai 2005.
Nous n’en sommes donc plus à une annexion près. Et quand on voit la haine que suscite la France parmi la militance d’extrême-gauche française sur ce forum, mais pas seulement sur ce forum, on comprend facilement que celle-ci ne peut qu’applaudir à la disparition pure et simple de "ce pays" peuplé de fascistes à tous les coins de rue (sans compter que le combat "antifasciste" étant éternel, il occupe à plein temps si l’on peut dire)...

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