RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher

Le terrorisme : forme désespérée de la critique ?

Il y a maintenant plusieurs décennies – et plus spécifiquement à partir des années 1970, pour être précis – que nous assistons à la réinvention constante de la critique et de l’indignation contre la logique socioéconomique dominante. Que cela soit sous l’angle de la justice sociale, de la crise écologique, de la vacuité spirituelle, de la manipulation marchande, etc., la critique a tout essayé sans jamais réellement percer le modèle qu’elle critique. À l’inverse, ce que nous constatons c’est que sous toutes ses formes : du livre à l’article en passant par la conférence au documentaire vidéo, la critique a toujours été instrumentalisée pour devenir, elle-même, un bien de consommation parmi d’autres. À côté de cela, nous ne pouvons pas négliger la critique sous forme d’action ; je pense ici aux manifestations, aux grèves, et aux nombreux mouvements qui sont nés, pour ceux que j’ai à l’esprit, après la crise de 2008. Or, il est important de dire qu’actuellement, nous sommes encore en plein là-dedans ; la crise qui nous touche n’est assurément pas qu’économique ou politique. D’ailleurs, en amont de cette critique et de ces actions, il y a des existences réelles. Il y a la critique de ceux qui ne trouvent pas les mots pour exprimer leur souffrance et qui, par ce manque de moyens, deviennent des spectateurs malheureux d’une réalité qu’ils pensent fatale. Puis, nous ne pouvons pas l’ignorer, il y a le suicide, cette forme de critique qui devient corps avec l’esprit (lorsque ce n’est pas le contraire). Le suicide est alors, souvent, la réponse à un monde dont le sens n’a pas été perçu. Car, c’est évident, pour survivre dans ce monde, il faut avoir un esprit combatif, mais surtout il faut pouvoir s’inventer individuellement un sens à ce combat. Or, il semble que certaines personnes ne comprennent pas le sens de celui-ci ni ne comprennent le sens de cette fatigue que le producteur s’impose à lui-même pour devenir ensuite un bon consommateur.

Toute la question est de savoir si l’on peut véritablement, sans trop se marginaliser, ne pas accepter ce combat. L’autre question qu’on pourrait se poser est celle de la cible ou de la responsabilité ? En effet, contre qui ou contre quoi pouvons-nous nous révolter, nous indigner ? Il y a tellement de raison. Puis, on peut être indigné un jour, deux jours, un mois, deux ans, et après ?... On reste seul, car personne n’a envie de s’infliger longtemps la conscience critique alors que le contexte dans lequel on se trouve tente par tous les moyens d’exciter nos désirs pour qu’on les réalise et pour qu’on rentre volontairement dans la danse des consommateurs.

Cela dit, si l’on veut traiter du terrorisme contemporain, il faut envisager les limites du désir à la consommation. On peut certes se satisfaire de l’objet et de l’apparence, mais pour certains la question du sens et de l’être est trop forte. Ils voient alors dans la critique, une forme désespérée pour exprimer de manière radicale leur cri au monde. C’est ainsi que la folie, l’exclusion, la violence – qui se trouve, je le souligne, en puissance dans nos sociétés - les conduits à construire des actes qui donneront, croient-ils, un sens à leur critique. Dès lors, on peut dire que le suicide et le terrorisme sont très proches ; ils sont des épiphénomènes qui cachent un problème plus grand que l’on ne veut pas voir, car – dans le cas global qui nous concerne – il rapporte du capital au système dont nous sommes entièrement dépendants. Surtout, le terroriste est un peu comme un bouc émissaire ; pendant qu’on le fixe, on ne s’interroge pas soi-même. Il devient alors un divertissement, au sens d’un détournement ou d’une diversion. Il peut également être perçu comme une sorte de projection. On se rassure alors que nous sommes les « gentils », alors qu’ils sont les « méchants ». Ainsi, la seule définition correcte que l’on peut donner au mot ’terrorisme’ c’est le suicide que l’on montre pour dissimuler le meurtre. Pourtant, il faut le redire, ce type de suicide ne doit pas être compris comme un acte isolé, car le terrorisme est un état total inhérent au relativisme et au cynisme de la société de consommation.

Pour conclure, je dirais que combattre le « terrorisme » ce n’est pas combatte contre une cible extérieure, mais bien plutôt se mettre à l’écoute de la critique et percevoir la violence qu’on subit et qu’on fait subir, par notre résiliation ou notre égocentrisme, à ceux qui osent encore croire en d’autres valeurs.

Luca V. B.

Doctorant en philosophie politique et sciences sociales

URL de cet article 28275
  

Même Thème
Propagande impériale & guerre financière contre le terrorisme
Ibrahim WARDE
« Après chaque attentat, des experts autoproclamés dénoncent les réseaux de financement du terrorisme. Les enquêtes ont beau démontrer que ces attentats nécessitent en réalité très peu de fonds, pour les idéologues endurcis qui forment les bataillons des "guerriers de la finance", l’absence de preuve ne signifie rien : il faut multiplier les attaques contre l’argent caché des terroristes. Or les frappes financières, si elles sont le plus souvent sans effets réels sur leurs cibles officielles, (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

Si j’étais le président, je pourrais arrêter le terrorisme contre les Etats-Unis en quelques jours. Définitivement. D’abord je demanderais pardon - très publiquement et très sincèrement - à tous les veuves et orphelins, les victimes de tortures et les pauvres, et les millions et millions d’autres victimes de l’Impérialisme Américain. Puis j’annoncerais la fin des interventions des Etats-Unis à travers le monde et j’informerais Israël qu’il n’est plus le 51ème Etat de l’Union mais - bizarrement - un pays étranger. Je réduirais alors le budget militaire d’au moins 90% et consacrerais les économies réalisées à indemniser nos victimes et à réparer les dégâts provoqués par nos bombardements. Il y aurait suffisamment d’argent. Savez-vous à combien s’élève le budget militaire pour une année ? Une seule année. A plus de 20.000 dollars par heure depuis la naissance de Jésus Christ.

Voilà ce que je ferais au cours de mes trois premiers jours à la Maison Blanche.

Le quatrième jour, je serais assassiné.

William Blum

L’UNESCO et le «  symposium international sur la liberté d’expression » : entre instrumentalisation et nouvelle croisade (il fallait le voir pour le croire)
Le 26 janvier 2011, la presse Cubaine a annoncé l’homologation du premier vaccin thérapeutique au monde contre les stades avancés du cancer du poumon. Vous n’en avez pas entendu parler. Soit la presse cubaine ment, soit notre presse, jouissant de sa liberté d’expression légendaire, a décidé de ne pas vous en parler. (1) Le même jour, à l’initiative de la délégation suédoise à l’UNESCO, s’est tenu au siège de l’organisation à Paris un colloque international intitulé « Symposium international sur la liberté (...)
19 
La crise européenne et l’Empire du Capital : leçons à partir de l’expérience latinoaméricaine
Je vous transmets le bonjour très affectueux de plus de 15 millions d’Équatoriennes et d’Équatoriens et une accolade aussi chaleureuse que la lumière du soleil équinoxial dont les rayons nous inondent là où nous vivons, à la Moitié du monde. Nos liens avec la France sont historiques et étroits : depuis les grandes idées libertaires qui se sont propagées à travers le monde portant en elles des fruits décisifs, jusqu’aux accords signés aujourd’hui par le Gouvernement de la Révolution Citoyenne d’Équateur (...)
"Un système meurtrier est en train de se créer sous nos yeux" (Republik)
Une allégation de viol inventée et des preuves fabriquées en Suède, la pression du Royaume-Uni pour ne pas abandonner l’affaire, un juge partial, la détention dans une prison de sécurité maximale, la torture psychologique - et bientôt l’extradition vers les États-Unis, où il pourrait être condamné à 175 ans de prison pour avoir dénoncé des crimes de guerre. Pour la première fois, le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture, Nils Melzer, parle en détail des conclusions explosives de son enquête sur (...)
11 
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.