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Oligarchie et capitalisme sauvage : demain, mondialisation de l’indignation ?

Dans le chaos social et l’hypnose collective qui nous jouent l’ode du racisme d’État banalisé sous le son des sirènes policées et des coercitions arbitraires que les lois des Hommes imposent à leurs subalternes de respecter, je regarde mes semblables commencer à se réapproprier collectivement les clés de leur destin. Les maîtres capitalistes les leurs avaient subtilisées en verrouillant l’action collective dans les articles des constitutions démocratiques. Du moins, ils les lorgnent envieusement, ces clés. Ils lèvent des poings serrés en l’air et crient leur colère dans l’ère de l’indignation par leur détermination à ne plus s’assujettir aux chefs qui ont piétiné et cadenassé leurs droits sociaux par pure idéologie. Espérons que ces huées plébéiennes ne seront pas des clameurs vaines récupérées par d’autres classes d’affameurs de la première heure.

Car la violence structurelle qui accompagne le pouvoir est telle que la misère et les embûches ne sont jamais très loin de nos bottes. Le goût de l’autorité, l’influence dans les arcanes du pouvoir qui corrompent les âmes les plus saines, mènent souvent à la récupération des révoltes collectives à des fins personnelles. Les gens qui clament depuis janvier 2011 leur mépris envers les gouvernants qui, à la rigueur de leur arrogance élitaire, imposent sans vergogne des plans d’ajustement structurels, ne devraient pas uniquement aspirer à faire vaciller les trônes des empereurs. C’est la pratique même du pouvoir et ses hiérarchies verticales qui doivent être détruites si le mot d’ordre est bel est bien démocratique.

A la lecture de la presse impériale, nous n’y sommes pas. La désinformation médiatique, qui laisse une sensation de liberté mise sous verrous et nous force à incorporer des artefacts de vérité, peut nous faire tous tomber sous la coupe de l’instinct mortifère des bourreaux que l’on est souvent amenés à engraisser de nos mains, jusqu’au trépas si lumière n’est pas faite en nos consciences. Mais une fois de plus, bien que la page soit lourde à tourner, il est possible d’espérer que le prochain chapitre dans l’Histoire de la planète puisse être écrit par tous. Il n’est pas encore interdit de rêver.

Depuis quelques mois, du nord de l’Afrique à l’Europe du sud en passant par la France et le Royaume-Uni, un sirocco d’indignation et de colère semble frapper aux portes de l’Europe néolibérale. Les médias furent autant timides sur l’indignation espagnole que sur les mobilisations grecques, et renâclaient d’en parler avant qu’il n’y ait plus rien à marteler et matraquer sur une affaire de moeurs outre atlantique. Alors qu’il n’y a plus de fait divers d’envergure mondiale à revendre, la presse est à présent contrainte de s’empresser d’évoquer tout de même quelques manifestations à Madrid ou à Athènes (mais sans dire que dans des centaines de villes, se forment des collectifs d’indignés, réunis en AG le soir, sans dire aussi qu’en France, la répression policière fait rage…).

De plus en plus, l’adversaire commun des mouvements sociaux devient les banques, les organisations internationales (FMI, OMC, Banque Mondiale), mais surtout les gouvernements factices qui s’accaparent les richesses produites en privatisant à outrance les services de l’État. Les militants altermondialistes reprennent du galon, et la résignation collective se substitue à l’espoir d’un changement politique et social proche. Ce qui est tout nouveau, est bien la spontanéité de ces gens en apparence dépolitisés, autonomisés des syndicats et partis politiques, mais qui ont pourtant compris qu’ils ont été enrôlés de force dans une guerre des classes impitoyables, et que même les diplômés deviennent des cibles de cette mondialisation fécale, féodale et mafieuse.

La révolte mondiale ainsi que la radicalisation des opinions a commencé dès 2008. Mais l’enjeu vertigineux des années à venir, qui verront sans doute la vigueur des mouvements sociaux se renforcer après l’aigreur des peuples d’avoir été si longuement écrasés et spoliés, sera celui d’être en mesure d’opposer intelligemment la contestation aux chiens de gardes surarmés et mandatés pour protéger les douves de Babylone. Car les paroles militantes remplies d’amour ne durent pas longtemps en face des balles policières. Quand viendra l’éveil populaire à l’autel de la plèbe ? De la précarité globalisée, sommes-nous en train de renverser la machine pour mondialiser les progrès sociaux et tirer pour une fois la condition humaine vers le haut ? Rien n’est moins sur tant que les « indignés » croient au mythe républicain et démocratique que l’on leur a vendus à l’école, et ne se trompent pas d’ennemis à combattre à travers les contradictions diffuses du système. Par exemple, on se déclare souvent contre le gouvernement dans telle ou telle réforme, sans penser au fait que celle-ci est aussi et surtout une résultante de la logique néolibérale mondialiste. C’est une contradiction importante, car sans ces Hommes politico-affairistes des institutions publiques, les financiers ne seraient rien.

1. Démocratie, vous disiez ?

On nous dit que la démocratie veille sur nos droits fondamentaux comme une louve surveille sa progéniture. Alors je n’aimerais pas être à la place du louveteau. En ces temps où l’on martèle que le mouvement des indignés réclame une démocratie réelle et maintenant, il me semble intéressant de rappeler quelques notes à propos de ce système juridique, notamment de sa genèse philosophique.

On nous avait dit que dans ce régime politique, soit disant parlementaire et représentatif des peuples, le citoyen faisait vivre la démocratie en votant ou en clamant calmement son mécontentement. La démocratie, serait uniquement la liberté d’expression, en somme. J’entends dire ci et là depuis 2008-2009, que nous ne sommes plus en démocratie. Mais laquelle ? Encore faut-il s’entendre sur les sens du terme, comme s’il n’y en avait qu’une : celle voulue par les peuples à l’indignation en effervescence, ou l’oligarchie pratiquée par les classes dirigeantes des pays du monde entier, qui ne connaissent que la légitimité du vote pour confondre les institutions et concentrer le capital ?

Celle que la classe versaillaise souhaitait appliquer au 19ème siècle avait pour vocation à freiner justement tous les mécanismes de contrôles démocratiques populaires envers les élites : limiter la répartition équitable du Capital entre les classes sociales, instaurer le suffrage à bulletin secret et à destination d’une élite sociale cultivée, reproduction des notables (banquiers, avocats, gros propriétaires) à la tête des institutions, faire croire aux citoyens que la division hiérarchique du travail, -légitimant la concurrence, le productivisme et le pillage des pays du Sud-, permet de mieux vivre (ce qui n’est autre que l’institutionnalisation de la guerre économique). Les maîtres de ce monde avaient même réussis à faire intérioriser l’idéologie que la privatisation de l’État était une solution pour pallier aux crises économiques. Alors que ces crises, entraînant famines, misère ou précarité, sont à chaque fois instrumentalisées par les pouvoirs publics qui oeuvrent au service des empires économiques pour en faire un terrain de jeu électoral. La prédation des marchés financiers serait-elle démocratique ? La duperie était de taille, tant la pilule était dure à avaler. Mais la bourgeoisie possède deux cent ans de propagande libérale à son actif. A l’appui de ses croyances idéologiques dans le dogme démocratique, celle-ci pouvait sélectionner au peigne fin les philosophes que l’Histoire devait retenir et qui satisfaisaient les intérêts de l’Empire, et ensuite les inscrire dans la mémoire hypnotique collective de tous les êtres scolarisés. Tant et si bien qu’aujourd’hui, l’on pense démocratie là où l’oligarchie panse ses appétits de domination politique, économique et sociale.

La République bourgeoise mit à pied l’école pour adapter chaque cerveau à consentir à ce système de représentation politique de sélection sociale des élites par le haut de l’échelle. De telle manière que l’on oublie trop souvent qu’il existe d’autres formes de démocratie ayant été testées avant la Seconde Guerre Mondiale. Ainsi, il est bénéfique pour un régime politique que les êtres socialisés soient démis de leurs pouvoirs individuels sur l’ordre des choses, et qu’ils ne développent pas une culture historique, politique et sociale contestataire trop volumineuse. Les gens sont lettrés et alphabétisés, certes, mais ce n’est pas à l’école qu’ils risquent d’apprendre que l’exercice des fonctions politiques peut se faire sur une hiérarchie horizontale et sur une base non professionnalisée.

L’école devait donc inculquer que la participation égale des acteurs au processus de production en coopératives de travail mutualisé, la gestion locale décidée à main levée par des conseils populaires fédérés en Communes, l’abolition de toute hiérarchie économique, est un régime antidémocratique qui mène à la terreur populaire. Gérée par le peuple, donc démagogique. Que toute expérience collective à l’échelle d’une Nation ne peut mener qu’à du totalitarisme soviétique, et que l’émancipation de l’Homme moderne passe par l’individualisme et la propriété privée. Aux oubliettes aussi dans les manuels scolaires le rôle des grandes multinationales dans les guerres mondiales, personnes morales depuis 1865, -qui phagocytent le contrôle des lois, saccagent les écosystèmes, offrent chaleureusement leurs dettes aux États, introduisent l’intérêt privé dans les prises de décisions politiques, réduisent la majorité au servage pour le profit décuplé de quelques cartels, et éloignent donc les acteurs du processus de production de la participation aux bénéfices créés- qui se réclament de l’intérêt général. (Évidemment, un salarié exténué par les pressions hiérarchiques de sa direction, qui boit sa bière de mauvaise marque devant la boîte cathodique à décerveler, cet individu est une garantie pour la sureté de l’État, c’est un indigné potentiel en moins empêché de se joindre au collectif pour s’affranchir de son oppression, et qui plus est, qui se procure une maigre consolation en consommant du rêve publicitaire télévisé.)

Bref, l’école républicaine a vocation à faire la transition entre l’héritage révolutionnaire populaire et la novlangue ploutocratique : nombre de concepts furent dénaturés de leur véritable sens politiques. Petit à petit, « démocratie » se réduisit à « vote », « l’intérêt général » masqua « appétit de la finance », « esclavage » se transformait en « travail », « colonisation » devint « guerre propre à frappes chirurgicales » ou « opération de pacification », « socialisme » fit penser à « terrorisme », et « domination » se commuait en « condition naturelle des êtres humains ». La grève et les luttes sociales pour l’obtention de droits sociaux devenaient des conflits dont « on ne peut régler les problèmes avec des solutions du 19ème siècle » (dixit N. Sarkozy). Une classe exploitée par l’avidité d’un système économique qui sous paye ses serfs, devenait un groupe socialement défavorisé (sous entendu, pas de bol pour toi, tu n’avais qu’à naître ailleurs, c’est biologique). Ainsi pourrait-on lire dans ce type de manuel voué aux étudiants de science politique : « Les conflits sociaux du 20ème siècle, anciens dans leur mode d’action violent sont le fruit des classes défavorisées, et fortement trompées par l’idéal révolutionnaire du 19ème siècle ». Le mal de ces temps contemporains est que nous passons notre temps à prémâcher la soupe institutionnelle que l’on nous impose sans chercher à avaler autre chose.

Le pouvoir politique et ses acteurs décentralisés se parent de l’obsession sécuritaire pour y camoufler un racket permanent. Pour le bien de tous, l’État fait les poches du peuple. Pour l’intérêt général, le pouvoir grignote les libertés et instaure un régime Orwellien. Prit dans la nasse d’une crise qu’il a contribué à faire éclater par ambition électorale, (-un taux de chômage excessif permet aux néolibéraux de lutter contre l’inflation, détruire progressivement le droit du travail en baissant les salaires conjointement à la hausse du temps de travail, pour ainsi prendre des points auprès des classes bourgeoises, entre autres-), l’État sarkozyste pilonne le niveau de vie du français moyen en faisant reposer sur lui seul le prix de la crise au lieu de sanctionner les spéculateurs qui s’engraissent via les agences de notation et les marchés financiers (ce n’est pas seulement le cas en France, mais aussi dans toute l’Europe). Ce ne sont que des exemples non négligeables et non exhaustifs, mais ceux-ci montrent bien en quoi nous sommes démis de nos pouvoirs citoyens. Il est urgent que nous nous indignions tous et toutes, mais en oubliant ce dogme bourgeois que la république dans ses formes actuelles puisse être démocratique.

2. Le libéralisme politique des Lumières en philosophie politique, un héritage ambigu.

La république, au sens entendu par les penseurs des Lumières (Rousseau, Montesquieu, Voltaire, Locke, Tocqueville, Constant, etc.) pensait les masses comme trop stupides pour décider des affaires de la Cité, s’en remettait à un despotisme éclairé pour canaliser les pulsions populaires ignares. Le terme même de démocratie était vu depuis Aristote comme la tyrannie démagogique des foules. Donc à la base même de ce dont s’inspire le socle institutionnel juridique de notre actuelle république, il y a l’idée que la population ne peut pas faire de politique, au sens premier donné par les grecs de la gouvernance de la Cité. Pour un régime qui se targue de dire que le peuple décide, déjà , ça partait mal. Il faut dire que les philosophes retenus par l’Histoire étaient des gens cultivés, héréditairement fortunés, issus de l’aristocratie, et donc ils n’allaient pas écrire pour détruire les intérêts de leur classe sociale.

Loin s’en faut, la séparation des trois pouvoirs (Montesquieu dans De l’Esprit des Lois) fut un progrès considérable, s’affranchissant de l’arbitraire du monarque absolu sur le politique. Cette idée aurait pu permettre un contrôle populaire démocratique si le régime proposé fut direct et participatif (il aurait été censuré par l’Histoire). Mais ce contrôle de l’exercice du pouvoir devait être dévolu aux propriétaires et aux aristocrates. La liberté politique, au sens de J. Locke, par exemple, devait veiller au respect de la propriété privée. Donc, une liberté au service des riches propriétaires terriens. L’intérêt général au sens de Rousseau, c’est la dictature de la loi sur la minorité insatisfaite : si une loi est votée par la majorité, alors les mécontents n’ont qu’à s’incliner et s’excuser devant la collectivité d’avoir eu tort de mal penser ou de mal voter, car ils vont à l’encontre de la volonté générale. La théorie politique libérale, au sens du libéralisme politique (et non économique), dépossédait l’individu de son pouvoir sur sa société : les constitutions républicaines et monarchistes ont toutes été obtenues par coups d’États (1791, 1848, 1871, 1958 en France) et n’étaient autre qu’une reféodalisation des rapports sociaux entre les classes sociales. L’instauration gaulliste de l’élection au suffrage universel direct du président de la République, si elle apparaît comme participative en l’essence, légitime en réalité une monarchie élective où la gouvernance publique est l’apanage des élites sociales (par le plus charismatique qui sera élu aux primaires de son parti) et la mainmise de la bourgeoisie sur l’ordre social. Et il n’y a qu’à voir la manière dont les médias et les responsables politiques ont traités l’affaire DSK pour se rendre compte qu’en France, il faut absolument protéger la Cour Neuilléenne et tout ce qui gravite autour. Est-il démocratique de distinguer des citoyens ordinaires et des citoyens intouchables ?

Vu comment l’histoire des idées politiques a toujours veillé à ce que le gouvernement s’effectue par les riches et les notables, craignant les rugissements populaires, il n’est pas étonnant que les néolibéraux s’accommodent à merveille de ce régime représentatif présidentiel : le citoyen n’a aucun moyen de contrôle, il subit un rapport de force profondément inégal et est contraint d’appliquer stricto sensu ce qu’on a décidé à sa place pour régir sa vie. Et pire encore : si la coercition est proche, par le conformisme social qu’elle impose, le pouvoir, lui, est lointain et cette distanciation permet aux dirigeants politiques déguisés en hommes d’affaires d’assoir leur hégémonie. Sans parler du faux bipartisme que ce régime gangréné par la finance fait jouer (républicain/démocrate, libéral/social démocrate) qui prend le rôle de croupier pour distribuer les cartes électorales aux maîtres du monde à 
la table de poker mondial… La bourgeoisie financière a réussi son contre coup d’État : n’importe quel parti (UMP ou PS) qui sera plébiscité au pouvoir politique lui sera assujetti. Au fait, comment qualifie-t-on un régime politique qui, en finalité, n’offre à ses gouvernés qu’un parti unique, et qui place une armada de militaires dans la rue pour étouffer les mouvements sociaux de contestation aux réformes néolibérales qui voudraient imposer en toute impunité une régression sociale sans précédent ?

Lorsqu’une "réforme" (ou démantèlement de service public) est votée, souvent l’été à la va-vite, c’est pour ériger un contrat d’affermage public-privé (privatisation des profits, socialisation des pertes financières) entre l’État et Veolia ou Suez. Quand se décrète une libéralisation des capitaux, un partenariat public-privé, ou ce qu’ils dénomment une « modernisation de l’économie », il y a toujours un fond de pension spéculatif, une multinationale ou bien des actionnaires influents qui tirent profit de la manoeuvre. Notre État est tellement démocratique que ses "réformes" fiscales permettent aux multinationales de s’exempter de l’imposition (Areva en sait quelque chose), aux actionnaires de défiscaliser leurs revenus annuels, et aux avocats d’affaires de devenir membres du gouvernement, pendant que la majorité des gens rongent leurs os pour tentent de lutter contre la nouvelle pauvreté, habitant un logement de fortune loué en banlieue à un coût exorbitant, mal nourris et ulcérés par l’angoisse de l’avenir de leur budget (santé, éducation, logement, alimentation, etc.).

La démocratie, c’est toujours faire croire aux dominés que leurs vies ne valent rien, qu’il est possible qu’avec infiniment plus d’efforts gratuits au service des autres, ils pourront s’en sortir. Mais ce n’est pas garanti car le droit de vivre peut parfois être abrégé, taxé d’interdits en tous genres, et les libertés sont conditionnelles. La mise au ban, l’exclusion et la précarité deviennent des lois naturelles de la société, l’état de guerre sociale perdure et la méfiance devient la norme, favorisant l’inquisition fasciste de la droite réactionnaire lepéniste. Lorsque l’on entend « démocratie » au micro de la bouche d’une tête médiatiquement autorisée à déployer ses codes de communication pour séduire et canaliser la vindicte populaire, il s’agit toujours de vendre un produit révolutionnaire qui équilibrera les comptes publics, pourvu que les petits pions que nous sommes acceptions de vendre notre force de travail à moindre coût, dans une répartition à sens unique du Capital. C’est la religion d’État qui ostracise les pauvres et les faibles tout en faisant son fond de commerce électoral sur un ton de racisme institutionnel en triant avec véhémence les bons et les mauvais. Établir une distinction entre des dominants et des dominés, entre des gouvernants et des gouvernés, constitue d’ailleurs en elle-même une dérive antidémocratique qui aurait déjà du mettre la puce à l’oreille de nos descendants depuis plusieurs siècles.

Ce tsunami d’indignation est donc cruellement tardif, mais mieux vaut tard que jamais. Il vient à point nommé pour espérer que la planète ne s’enfoncera pas à nouveau dans un matérialisme historique qui veut qu’en conséquences d’une crise économique mondiale, les continents s’enlisent dans la guerre, le fascisme et la barbarie. La déliquescence de l’idéologie néolibérale semble être en marche. Sans savoir vers quoi la logique va tendre. Depuis bien longtemps, les populations de tous les pays observent les mêmes problèmes et en font des constats similaires que la majorité est asphyxiée sous les manipulations et les profits abyssaux de la minorité capitaliste. Mais suffit-il de clamer son indignation dans la rue pour être indigné, politisé ou non, contre ces terribles rouages compresseurs de la globalisation ? Les mobilisations collectives en tant que telles ne peuvent plus aboutir à cette révolution mondiale pacifique dont se réclame ce mouvement. Le répertoire d’action de toutes les résistances doit aussi s’accoupler des actions individuelles.

Gérer une ferme basée sur une agriculture raisonnée, mutualiste et autogestionnaire est une forme de résistance, d’indignation. Rédiger des pamphlets militants de critique sociale, avec des diatribes à faire tomber les pavés bien érodés de Babylone, en est une. Ne pas se prostituer à la morale et à l’absurdité de certaines lois, vivre comme bon nous semble, dans le respect d’autrui permet aussi certainement de tendre vers la coopération « démocratique » entre les peuples. Réfléchir, même de chez soi dans les livres ou sur internet, à des formes d’alternatives solidaires, écologiques et sociales est un autre moyen de s’indigner. Sans aucun engagement militant, consommer des produits locaux et artisanaux ne constitue pas moins une action quotidienne de démarcation vis-à -vis du Capital. Même dialoguer avec l’entourage proche peut permettre d’étendre le champ des luttes sociales. Les médias et leur mutisme déconcertant ne souhaitent pas donner trop d’importance à l’ampleur des manifestations grecques et espagnoles, qui se radicalisent en grève générale non plus contre le gouvernement, mais contre l’idéologie du Capital, soit. Laissons-les faire, ils ne profèrent rien de bon. La résistance et l’indignation ne sont pas possible si l’on se trouve dans l’attente qu’un jour, une population morne, au pied du mur, se révolte. Elles seront salutaires, en revanche, si chacun d’entre-nous se réapproprie les clés pour comprendre les mécanismes d’endoctrinement du pouvoir économique et politique mondial, et si chacun trouve sa serrure pour déployer sa propre contribution dans le champ social. Le principal est que les gens comprennent le pot-aux-roses, et je pense que la prise de conscience arrive à maturation. Cependant, si l’indignation se transforme en insurrection mondiale un jour, celle-ci ne sera pas heureuse, car il est bien triste de devoir en arriver à un tel point de non-retour avec des grèves générales et tant de haine réactionnaire contre ces castes d’oligarques alors que les sociétés pourraient s’auto-organiser librement. Il paraît que c’est la vie : une lutte perpétuelle pour des idées, pour codécider ou décéder.

Samuel Moleaud.
http://sam-articles.over-blog.com.

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