RSF, Giuliana Sgrena et l’US Army


L’otage italienne Giuliana Sgrena a été libérée dans des circonstances tragiques.

Comment savoir s’il s’agit d’une bavure, d’un accident, d’une erreur, d’un dérapage (pour reprendre les mots qu’on a pu lire dans la presse) ou d’une agression délibérée, d’une tentative d’assassinat (mots qui ont aussi été imprimés) ?

Le mieux, pour approcher une vérité que nous ne connaissons pas, est peut-être d’appliquer les méthodes éprouvées en regardant : A qui profite le crime ? et ce que disent les témoins directs oculaires

1- A qui profite le crime ? Une dépêche de l’AFP nous apprend que Giuliana Sgrena est la fille d’un ancien résistant italien, une ex-militante d’extrême gauche, engagée contre la guerre, journaliste à Il Manifesto (journal de gauche), qu’elle est une spécialiste de l’Irak et du monde arabe, qu’elle est l’auteur d’un livre sur (contre) la guerre en Irak, qu’elle a écrit un reportage sur le calvaire d’une Irakienne détenue à Abou Grhaib, qu’elle préparait un reportage sur la prise de Falloujah et qu’elle aurait recueilli des informations sur l’expérimentation d’armes interdites pendant le siège de la ville.

2- Que disent les témoins oculaires ? Le premier témoin, le principal témoin est Giuliana Sgrena. Ecoutons-là  : « les ravisseurs m’ont dit : « les Américains ne veulent pas que vous rentriez vivante en Italie ». « Notre voiture roulait à 40 Km/h, un véhicule blindé nous a aveuglé avec un projecteur et a ouvert le feu sans sommation. 300 à 400 projectiles ont été tirés. »
Du côté des tireurs, c’est : « Nous ne savions pas, la voiture roulait à vive allure et n’a pas répondu aux sommations. »

Alors, bavure, tentative d’assassinat ?

En Italie, Giuliana Sgrena penche pour un guet-apens. Son compagnon parle d’« attaque délibérée. » Le Garde des Sceaux italien a adressé une commission rogatoire à Washington pour « homicide et tentative d’homicide ».

Aux USA, le Pentagone affirme qu’une enquête sera ouverte sur cet « incident » et la Maison Blanche parle d’un « accident horrible. »

En France l’organisation Reporters Sans Frontières déplore cette « intervention », cette « bavure » aux « conséquences tragiques ». Son communiqué se conclut par un paragraphe où la parole est offerte sans la moindre réserve à l’Etat-major US qui nous apprend que « la procédure a été respectée » et qu’il y a eu « une mise en garde du convoi. » Cette thèse est contredite par deux « experts » (pourtant complaisants) invités au journal télévisé de 13 heures aujourd’hui lundi sur France 2. Les deux parlent de tirs intempestifs par de jeunes soldats inexpérimentés.

RSF exige (sans grande chance de l’obtenir, nous dit Libération) une enquête de l’ONU sur la « bavure ». L’affaire est donc entendue : une fois de plus, ils ne l’ont pas fait exprès. C’est la faute de « Pas de chance ». Dès lors, on se demande presque si le fait de réclamer une enquête n’est pas la manifestation d’un esprit anti-américaniste primaire.

Par ailleurs, il faut bien s’étonner ici de la mise en doute, par RSF, organisation chargée de défendre les journalistes (et non les militaires), du témoignage du principal témoin, une journaliste professionnelle.

Si RSF est une ONG (une Organisation Non Gouvernementale) et non une officine crypto américaine, un des bras médiatiques de l’US Army, est-ce qu’elle n’aurait pas repris dans son communiqué (au moins pour les citer) les propos de Giuliana Sgrena ?

Le constat est aveuglant : dès lors que des journalistes apportent à Reporters sans Frontières des informations hostiles à des gouvernements visés par les USA, RSF les répercute sans trop de scrupules. Mais si ces informations peuvent nuire aux intérêts des USA, à ses actions guerrières, RSF les rétrécit illico en « bavures » et demande l’ouverture d’une hypothétique enquête pour s’assurer que la journaliste (c’est-à -dire le grand reporter, le témoin, la victime) ne ment pas.

Mais pourquoi l’ONU ? Il nous avait semblé que l’établissement et la médiatisation de la vérité sur la guerre étaient aussi du ressort des grands reporters.

Pourquoi ne pas demander d’enquêter à un groupe de journalistes (ce qui réduirait les délais) ?

Pourquoi l’organisation RSF, qui dispose d’un budget considérable pour défendre les journalistes, ne finance-t-elle pas cette enquête comme elle rétribue des journalistes dans des pays pauvres pour qu’ils enquêtent contre leur gouvernement ?

Demander à l’ONU d’enquêter apparaît comme une manière de botter en touche (« le problème nous embarrasse, créons une commission ».) Lui demander d’enquêter sur une « bavure » revient à lui suggérer le rapport final.

* * *


RSF s’est spécialisée dans la critique de la presse pauvre des pays pauvres. La vassalisation de la presse par les puissances d’argent ne lui a jamais arraché le plus petit soupir. Par suite logique, pas question de critiquer le chef de file mondial du néo-libéralisme.

Ce positionnement, venant d’une organisation largement subventionnée par l’UE, conduit à des aberrations politiques qui ont des conséquences néfastes pour notre pays.

Par exemple RSF a été la seule ONG qui s’est félicitée du coup d’Etat organisé en avril 2002 par le patronat vénézuélien (avec l’appui des USA) contre Hugo Chavez (président démocratiquement élu). A Paris, RSF annonçait mensongèrement la « démission » de Chavez, tandis que ses correspondants à Caracas s’extasiaient au spectacle des défilés de l’armée et « savouraient la démocratie retrouvée ». Chavez sera en France dans deux jours, il va falloir gérer ça.

Quant à l’acharnement hystérique de RSF envers Cuba, il a eu aussi des conséquences négatives. RSF a poussé l’Europe a prendre des sanctions contre Cuba en 2003 (contre Cuba, mais pas contre quelque autre pays que ce soit). Résultat, la France qui était le premier exportateur de denrées alimentaires vers Cuba se retrouve troisième, derrière la Chine et (tiens tiens !) les USA.

C’est dans ce contexte que j’ai déposé, le 8 février 2005, une plainte devant l’Union européenne en ma qualité de citoyen européen et de contribuable.

J’ai fait valoir que l’argent versé par l’Europe à Reporters Sans Frontières est en principe destiné à défendre les journalistes dans le monde.

« Il s’avère (ai-je écrit) qu’il sert en partie à promouvoir les intérêts d’une grande puissance (non européenne et concurrente) et à l’aider à atteindre ses objectifs de déstabilisation de gouvernements qui résistent à son expansionnisme et avec lesquels l’Europe entend normaliser ses relations. [...]

N’est-il pas permis de parler alors, si la chose perdure, de "mauvaise administration de la part des institutions ou organes de la Communauté européenne". Peut-il y avoir une "bonne administration " si des fonds issus des impôts versés par les citoyens européens sont détournés de leur affectation affichée en l’absence de vérification attentive de l’usage qui en est fait ?

Dans sa réponse, le Bureau du Médiateur européen m’informe entre autres que ma plainte a été enregistrée sous la référence 04 89/2005/DK.

Elle sera traitée par Monsieur Daniel KOBLENCZ [...]

A suivre, et vivent les journalistes qui cherchent la vérité et qui la disent !


Maxime Vivas, écrivain, lundi 7 mars 2005


Giuliana Sgrena vient d’ être enlevée à Bagdad. - il manifesto.


Réponse aux mensonges de Reporters sans frontières, par Salim Lamrani.

Robert Ménard confirme : RSF est bien financé par Bush.

Les USA financent Reporters Sans Frontières, par Diana Barahona.


Du même auteur :


- RSF adjure l’UE de l’aider à renverser Castro.

- Amnesty international éclaboussée par RSF via Le Monde

- Les otages, Reporters Sans Frontières et l’US Army.

- Le PCF, les USA et Cuba.

- Reporters sans frontières ou l’art de dédouaner les USA.

- Fête de l’Huma 2004.

- Quand Gilles Martinet parle de Battisti, de Gaulle s’attriste.

- Berlusconi, Chirac : deux hommes intègres face à Battisti.

- Les larmes de Romain Goupil.

- Urgent : La vérité sur Cesare BATTISTI.

- Une palpitante histoire d’espionnage et de terreur en 4 chapitres.

- Kouchner et les tyrans sanguinaires.

- La dérive d’un patron de presse : Philippe Val, épurateur ?

- RSF, les USA, Cuba, l’argent.



COMMENTAIRES  

18/03/2005 23:12 par Vavavoom

"Le mieux, pour approcher une vérité que nous ne connaissons pas, est peut-être d’appliquer les méthodes éprouvées en regardant : A qui profite le crime ?..."

Il est clair que cet événement dégrade un peu plus l’image de l’armée US dans le monde, s’il en était besoin.

Le "crime" profite donc directement aux anti-américains.

Suivant votre logique, je penche pour une embuscade fomentée par un groupuscule gauchiste.

06/04/2005 02:01 par DALTON

Pauvre Giuliana Sgrena,petite paparazzie,qui cherchait à faire un papier désinformateur-propagandiste,anti-Américains. Quelle tristesse,d’avoir mis la vie de tant de gens en danger,et d’avoir mis son pays dans la merde,pour une simple idéologie gauchiste.

07/04/2005 16:59 par Leo

On peut effectivement s’interroger sur l’impartialité des propos de Giuliana Sgrena étant donné son hostilité au régime américain. Il n’empêche qu’on ne peut nier certains faits :
- un convoi italien a subi une fusillade de la part de militaires américains, bien que le convoi se soit conformé aux règles de sécurité (vitesse réduite entre autre)
- un homme (le chef des services secrets italiens) est mort en s’interposant (manifestement, à lui, le crime ne profite pas...)

D’où quelques interrogations qui mériteraient effectivement que l’on ne se contente pas d’une enquête américaine, ni d’une hypothétique enquête onusienne :
- pourquoi Giuliana Sgrena aurait-elle été la seule victime si le chef des ervices secrets italiens ne s’était pas interposé ?
- pourquoi des soldats américains ont-ils déclenché une fusillade sans sommation et sans que rien ne le justifie ?
- pourquoi, alors que les italiens avaient annoncé la passage de se convoi à l’état major américain, les troupes sur place n’ont pas été prévenu ? Ce convoi avait pourtant une importance capitale et il était clair qu’une "bavure" aurait des rententissements.

Pour finir, qu’il s’agisse d’une "bavure" ou d’un acte délibéré est tout aussi grave. La polémique autour de la question détourne notre attention d’un fait pourtant primordial : s’il s’agit bien d’une bavure, que penser d’une armée qui a à ce point la gachette facile. Est-ce que cette affaire n’est pas l’arbre qui cache la forêt ? Combien d’irakiens anonymes et innocents ont été victimes du même genre de bavure ?

22/03/2005 18:00 par Schleuder

Abracadabrantesque ! Si j’ai bien compris votre raisonnement, le crime vous permet de rappeler que vous avez déposé une plainte devant l’Union européenne.
Seriez-vous donc le commanditaire des coups de feu ?
Relisez-vous... Votre haine de RSF vous fait dire n’importe quoi...

24/03/2005 12:53 par Anonyme
24/03/2005 13:25 par Schleuder

C’est censé être une réponse ?

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