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Un peu d’histoire #5 : le (vrai) rôle de l’URSS durant la Seconde Guerre mondiale - partie 1/3

L’Histoire nous permet d’apprendre ce qui nous a précédé. En son temps, Karl Marx avait averti que « celui qui ne connaît pas l’histoire est condamné à la revivre », démontrant ainsi la nécessité pour chacun de connaître les événements passés qui, bien souvent, fournissent une source d’explication pour les événements présents et futurs. Mais connaître l’histoire c’est aussi raconter ce qui est passé sous silence, ou volontairement oublié par certains. Au travers de cette série d’articles, je vais m’efforcer de mettre à jour des faits ignorés aujourd’hui mais ô combien importants. Pour ce cinquième épisode de cette série historique il me semblait important de mettre l’accent sur le rôle joué par l’Union soviétique durant la Seconde Guerre mondiale. En effet depuis plusieurs années en France, et plus généralement dans les pays de l’Europe de l’Ouest, il y a une tendance qui vise à minimiser, voire à oublier la lutte déterminante de l’Armée rouge et le rôle de celle-ci dans la chute du IIIe Reich.

D’ailleurs la non-invitation de Vladimir Poutine pour commémorer le 75e anniversaire du D-Day, alors qu’Angela Merkel était elle bel et bien présente, par Emmanuel Macron reflète parfaitement cela. Pourtant il est bon de rappeler que sans l’URSS la victoire des Alliés aurait été fortement compromise, voire impossible. Il est aussi bon, et nécessaire, de rappeler et de se souvenir que c’est l’URSS qui a payé le plus lourd tribut lors de ce conflit avec plus de 25 millions de pertes.

Pour rétablir des faits il faut s’appuyer sur les vérités historiques. Il y a un peu plus de deux ans j’avais déjà rédigé un article sur les faits oubliés de la Révolution russe, qui traitait des avancées pour les femmes, de l’aide internationale pour divers mouvements et pays, mais aussi de sa contribution pendant la seconde guerre mondiale (voir : 100 ans après certains faits oubliés de la Révolution russe).

Ce sujet important nécessitera trois parties réparties en trois articles distincts. Les deux premières parties montreront comment et pourquoi l’URSS et l’Allemagne nazie en sont venus à signer un pacte de non-agression. En réalité nous verrons que la responsabilité des gouvernements français et britannique est importante puisqu’au cours des années 30′ ils n’ont eu de cesse de rejeter toute velléité d’accords avec l’URSS, malgré l’insistance du ministre soviétique de la Défense, et ont cherché en partie à s’entendre avec Hitler.

Cette première partie traitera donc d’abord de la non-possibilité d’un accord entre la France, la Grande-Bretagne et l’Union soviétique au cours des années 30′ . La deuxième partie sera consacrée aux scandaleux Accords de Munich qui entérinent la dislocation de la Tchécoslovaquie ainsi qu’à la dernière tentative d’une alliance dirigée contre Hitler avant le déclenchement de la seconde guerre mondiale. C’est aussi dans cette partie qu’il sera question du Pacte Germano-soviétique car entre temps nous aurons fait la démonstration qu’avec un peu plus de bonne volonté de la part des Occidentaux ce Pacte n’aurait jamais vu le jour.

Enfin dans la troisième et dernière partie il sera question de la guerre à proprement parler et du rôle militaire joué par l’Union soviétique dans la libération de l’Europe du joug nazi.

L’URSS : un pays isolé qui cherche des alliances

Le 23 août 1939, à la stupeur générale, l’Allemagne nazie et l’Union soviétique signent le pacte Germano-soviétique qui garantit la non-agression entre les deux pays, du moins pour un temps, mais comporte aussi des annexes secrètes sur des revendications territoriales. Pourtant tout oppose ces deux nations qui signent là un accord après s’être affrontées idéologiquement, et d’une manière indirecte militairement pendant la guerre d’Espagne, durant des années.

Pourquoi un tel pacte a pu être possible ? Surtout, ce dernier aurait-il pu être évité si les pays occidentaux avaient consenti à un accord avec Staline et ne s’étaient pas été entêtés par leur anticommunisme primaire ? Sans doute que oui, et voici pourquoi.

L’URSS fut le premier état de la planète à se proclamer « socialiste », et cette situation ne plaisait évidemment pas aux pays de l’Europe de l’Ouest qui voyaient d’un très mauvais oeil le fait que le plus grand pays du monde soit gouverné par un parti communiste. L’Union soviétique était donc traitée en paria sur la scène internationale.

Pourtant, dans les années 30′, un autre phénomène commence à inquiéter bien des pays : la montée des mouvements fascistes en Europe, et des nazis en Allemagne. En France l’opinion publique voit au grand jour ce que souhaite l’extrême-droite lors de la crise du 6 février 1934, prélude à l’union des forces de gauche dans le Front populaire. En Espagne, à partir de 1936 la guerre civile éclate opposant Franco, soutenu par l’Italie et l’Allemagne, aux républicains, soutenus par les Brigades internationales et l’URSS. Cette dernière voit bien tout le danger des forces fascistes, d’autant qu’à sa frontière orientale, le Japon commence à manifester ses intentions expansionnistes et impérialistes.

C’est donc tout logiquement que l’URSS essaye à nouveau de se rapprocher de la France, et de la Grande-Bretagne afin de récréer l’alliance effective durant la première guerre mondiale, celle d’avant la Révolution russe.

L’action de Maxime Litvinov

Maxime Litvinov occupe un poste clé au sein du gouvernement soviétique puisqu’il en est le ministre des Affaires étrangères. Juif, et communiste de la première heure, il affiche dès le début son antinazisme et va œuvrer pour lutter contre l’Allemagne en tentant de bâtir une sécurité collective afin que les pays européens soient solidaires contre Hitler. Parmi ses faits d’armes, il a notamment réussi à convaincre les Etats-Unis de reconnaître, officiellement, l’Union soviétique.

Dans son combat Litvinov peut s’appuyer sur Louis Barthou, le ministre des Affaires étrangères du gouvernement français (9 février 1934 – 9 octobre 1934) qui, bien qu’étant lui-même anticommuniste, est aussi un homme d’état pragmatique. D’abord c’est lui qui arrive à faire rentrer l’URSS à la Société des Nations (SDN). Mais surtout il souhaite qu’une alliance voit le jour entre les différents pays européens, dont la Grande-Bretagne et l’Union soviétique contre l’Allemagne. Les deux ministres s’entendent donc sur un possible accord.

Mais sa charge de ministre des Affaires étrangère le conduit à accueillir le 9 octobre 1934 le roi Alexandre 1er de Yougoslavie à Marseille. Et alors qu’ils sont dans la même voiture ce dernier est victime d’un attentat mortel. Dans la confusion un policier français tire et blesse accidentellement Louis Barthou qui, mal soigné, décède quelques heures plus tard, emportant avec lui l’idée d’un accord avec l’URSS. En effet son successeur, Pierre Laval, est lui fermement opposé à tout arrangement avec l’Union soviétique.

De son côté la Grande-Bretagne semble ne pas s’inquiéter des tensions qui montent en Europe, exacerbées par les nazis. Pourtant, Ivan Maïski, ambassadeur à Londres du gouvernement soviétique, a la lourde tâche d’essayer d’arracher un accord avec le Royaume-Uni. Et le 29 mars 1935 Anthony Eden, un des futurs premiers ministres d’après-guerre, se rend à Moscou et rencontre personnellement Joseph Staline. En vain, l’idée d’un accord tombe une nouvelle fois à l’eau.

Hitler profitant de ces tergiversations met peu à peu en place ses pions. :

- En 1935 les lois raciales sont proclamées à Nuremberg
- Le 7 mars 1936 la Rhénanie est remilitarisée

Qui réagit ? Ni la France, ni la Grande-Bretagne n’haussent réellement le ton même si l’idée d’une intervention armée effleure le gouvernement français après la remilitarisation de la Rhénanie, contraire au traité de Versailles. Mais les généraux français, dont Gamelin, ne veulent pas s’engager dans un conflit si le Royaume-Uni ne suit pas. Et comme les Britanniques ne souhaitent pas intervenir militairement, Hitler n’est pas inquiété.

Vers un accord avec l’Allemagne nazie ?

Mais cet épisode a marqué Hitler. Celui-ci ne veut sous aucun prétexte que les autres pays puissent mener à bien ce projet de sécurité collective. Alors il tente lui aussi un rapprochement avec la Grande-Bretagne. En ce sens il est bien aidé par la nomination en 1937 au poste de premier ministre de Neville Chamberlain qui exècre les communistes. De plus le 21 février 1938, succédant à Anthony Eden qui ne veut pas d’accord avec l’Allemagne, Lord Halifax est nommé Secrétaire d’état du Foreign Office (ministre des Affaires étrangères). Ce dernier est un des tenants de la politique d’apaisement avec Hitler. Ce choix est un coup dur pour Maïski dans sa perspective d’accord avec la Grande- Bretagne.

Cette volonté d’apaisement permet à Hitler de réaliser l’Anschluss (littéralement le rattachement, même s’il s’agit en réalité d’une annexion) de l’Autriche sans que les pays européens s’en émeuvent plus que cela. Un mois plus tard la nomination de Georges Bonnet, le 10 avril 1938 au poste de ministre des Affaires étrangères de la France, entérine un peu plus cette idée d’accord avec l’Allemagne.

Les tragiques, et honteux, Accords de Munich en seront une conséquence directe. A suivre...

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