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Se battre jusqu’à la mort … pendu à un chêne.

Lettre d’un chômeur au banquier/ministre Macron

Gilles, chômeur

« Si j’étais chômeur, je n’attendrais pas tout de l’autre, j’essaierais de me battre d’abord » (1), nous a sorti dernièrement Emmanuel Macron.

Il se dit déterminé à se « battre » sans prendre le risque de perdre son combat devant l’Assemblée. Craignant de voir son projet de loi retoqué par la représentation nationale, il est passé en force avec l’article 49-3. Petit bras !

Et lui, « l’immunisé du chômage » par son statut ultra privilégié d’énarque et d’Inspecteur des Finances, le voilà qui nous donne la leçon sur la posture à adopter face à la perte d’un emploi. Comme si Liliane Bettencourt prodiguait ses conseils aux smicards pour ne pas finir dans le rouge en fin de mois. Désopilant !

Eh bien, Monsieur Macron, je vais vous conter la vraie vie du vrai chômeur que vous ne serez jamais. D’un demandeur d’emploi du bas de l’échelle, accroché à son RSA comme une moule à son rocher.

Moi, Monsieur Macron, je n’attends rien des autres qui pourtant m’empoisonnent la vie avec leur contrôle social. Tout ça pour moins de 400 euros par mois d’allocations, de quoi ne pas crever de faim.

Tous les deux mois, je dois rendre des comptes sur mes recherches d’emploi auprès du centre d’insertion qui me suit à la demande du département qui subventionne ma misère.

Tous les trimestres, j’ai obligation de déclarer l’ensemble de mes ressources et de mes avoirs à la CAF (Caisse d’allocations familiales) qui, en fonction, fixe le montant de mon RSA.

Vous savez quoi Monsieur Macron ? Comme j’ai mis de côté 30 000 euros (en 33 ans de boulot) dans lesquels je pioche pour me tenir à flot, la CAF défalque de mon RSA annuel 3% de ce montant (c’est la règle), c’est-à-dire 900 euros par an ou encore 75 euros par mois, sous prétexte que je touche des intérêts de mes « juteux placements ».

En réalité, Monsieur Macron, mes 30 000 euros ne m’en rapportent pas la moitié. Mon RSA est donc amputé injustement de 500 euros par an que je n’ai jamais perçus.

Et quand ce n’est pas le centre d’insertion qui me convoque, c’est chez Pôle Emploi que je dois traîner ma carcasse.

Là encore, passage en revue de mes actes positifs de recherche, de mes candidatures spontanées, de mes investigations, de mes réponses…

Tous les mois, Monsieur Macron, je perds une demi-journée à me justifier, à expliquer encore et toujours que personne ne veut embaucher un vieux de 57 ans. C’est bien simple, je n’ai pas obtenu un seul entretien ces 5 dernières années. Mon CV est invariablement éliminé de la liste des postulants. Pas pour insuffisance de références professionnelles et savoir-faire probants, juste pour une question d’âge.

Monsieur Macron, cela fait 8 ans que je me bats au quotidien pour retrouver un emploi digne de ce nom, que je suis ouvertement discriminé des procédures d’embauche, que je n’en dors plus, que j’en suis malade tellement mes démarches infructueuses me minent le moral, me désespèrent.Et vous savez quoi Monsieur Macron ? Je suis condamné à double peine car ces années que je passe au RSA ne m’ouvrent aucun droit à la retraite.

J’ai été un travailleur au revenu modeste. Je suis un chômeur enraciné sous le seuil de pauvreté. Je serai un « retraité » miséreux. Je mourrai indigent. Voilà la perspective des 10, 20 ou 30 ans qu’il me reste à vivre.

Je n’en aurai certainement pas le courage Monsieur Macron. À force de se battre, on s’épuise, on se résigne peu à peu à l’inéluctable. La corde au cou, une balle dans la tête, une capsule de cyanure, un cocktail mortel de médicaments… J’ai passé en revue toutes les possibilités de me foutre en l’air pour en retenir une.

On me retrouvera probablement, un jour ou l’autre, pendu à la branche d’un chêne en forêt de Melun-Sénart. J’ai repéré l’endroit. L’arbre centenaire n’attend que moi.

Le seul infime espoir que je caresse encore, est qu’un jour on vire les comme vous à grands coups de pied où je pense. La France a su le faire parfois, se débarrasser des arrogants, des possédants, des donneurs de leçon profiteurs du système inégalitaire auquel ils nous soumettent. Je crains malheureusement qu’elle n’en aie plus la volonté, la capacité, tant les comme vous Monsieur Macron ont gagné la bataille.

En 2015, la lutte des classes est toujours d’actualité, sauf que ce sont les riches et les nantis qui l’ont remportée.

Plus que mon statut de pauvre, de chômeur, de Rsaste, cette cruelle défaite me désole. Le jour où je n’y croirai vraiment plus, je partirai me perdre en forêt de Melun-Sénart…

Gilles – 57 ans

Chômeur depuis 8 ans qui survit avec quelques centaines d’euros par mois.

Note

(1) Propos tenus face à Jean-Jacques Bourdin sur BFMTV. Mercredi 18 février.

PS : Ici, le durcissement dans l’austérité et la précarité que préparent Hollande et Valls selon Mélenchon (on doute qu’il se trompe) pour le lendemain des élections départementales [LGS].

 http://www.actuchomage.org/2015022326512/L-actualite-du-site/se-battre-jusqua-la-mort-pendu-a-la-branche-dun-chene.html

COMMENTAIRES  

21/03/2015 16:48 par Le Fou d'ubu

Non vous n’êtes pas tout seul Gilles ...

" Frère Humain qui avec moi vivez
Ayez contre eux le cœur endurci
Mais si pitié d’eux, avez
Eux n’en auront jamais de vous
Merci ... "

J’aurais souhaité dans votre "balade"que votre choix se porta sur le roseau ... Les vents mauvais qui arrivent, briseront les chênes les plus hauts. Croyez-le ...Mais il est encore temps de changer de potence. Histoire du désir et plaisir d’entendre les "sentences" ...

Amitié solidaire et doigt au macron ...

21/03/2015 18:30 par Clémence

Gilles, ne renoncez pas à votre existence pour des questions d’argent, ce serait aller dans le même sens que ces misérables ministres et autres donneurs de leçons bien au chaud dans leurs héritages. Vous donneriez comme tant de gens perdus une valeur numéraire à ce qui est par essence hors de prix. Votre existence vaut bien mieux que tout l’or du monde. J’aime les arbres et les grands chênes, et vous aussi je crois. N’en faisons pas les symboles de notre défaite. Résistez, accrochez vous aux beautés que les ministres ne voient jamais. Enfin j’imagine qu’ils ne les voient jamais, parce que dans le cas contraire, ils ouvriraient les yeux et ne pourraient plus jamais dire des conneries pareilles. Amicalement ;-) .

22/03/2015 00:53 par Vagabond

@Gilles
Résistez, n’abandonnez pas à cause d’un système scélérat. Vous valez mieux que ces misérables rats des salons.
Quant aux commis du système qui vivent de la détresse des gens, ignorez-les.

Vous êtes à proximité d’un bois, vous êtes à proximlité de la vie, soyez commes les arbres, les pieds bien plantés en terre et la tête haute face au soleil.

Il n’y a pas eu de défaite car il n’y a pas encore eu de véritable lutte.

Vous n’êtes pas seul, gardez le contact avec LGS. Ne cédez pas au désespoir.

22/03/2015 10:16 par tchoo

Allez Gilles un peu d’espoir
J’étais dans la même situation que vous, il y a seulement 5 mois après 9 ans et six mois de chômage et un miracle c’est produit, j’ai trouvé du boulot.
Alors gardez espoir
Ceci dit, j’aime ce que vous avez écrit, ce que vous dites et le façon dont c’est écrit

Merci pour ça

22/03/2015 13:35 par michele

Bonjour Gilles
"Ring the bells that sill can ring
Forget your perfect offering
There is a crack in everything
That’s how the light gets in"
Leonard Cohen. Anthem

22/03/2015 14:53 par reymans

Courage à vous Gilles
On ne sait jamais de quoi demain sera fait, mais il est clair que, comme vous, dans une phase ou le système tout entier fait méticuleusement en sorte de vous broyer, l’orage est des plus durs, et on pourrait le penser potentiellement fatal
D’accord avec ce que déjà dit, certes la lutte des classes semble gagnée, mais après la bataille des textes et des idées, je reste convaincu que, forcemment, le peuple fini tjs par reprendre la main d’une manière ou d’une autre
Le pire que je vous souhaite est d’être là pour le voir
C’est même presque un devoir quelque part, la meilleure des revanches envisageable

Respect et courage à vous, et finger au macro(n) également

23/03/2015 09:26 par ADSkippy

J’imagine une large manifestation nationale de 5,ooo,ooo de "je suis gilles"

23/03/2015 10:40 par Feufollet

Beaucoup attendent le retour du balancier
C’est sûr qu’il arrivera
Mais on ne sait pas quand, ni comment
Des fois j’aimerais voir ces cyniques au bout d’une corde

23/03/2015 11:56 par Maxime Vivas

Des fois j’aimerais voir ces cyniques au bout d’une corde

Tss, tss !

23/03/2015 12:31 par Juju

Mon ami Gilles , tu dois pas abandonner ta vie à la place de celle de tous ces marquis et barons locaux. Je pense tout simplement qu’il faut se donner l’énergie pour les virer. Même si ça prends du temps, on le fera. Garde confiance, ta vie et plus importante que leur mépris. C’est tous ensemble qu’on le fera.

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