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Ces caricatures qui gouvernent nos esprits

En zappant, je tombe tout récemment sur un débat organisé par LCI, chaîne d’information en continu, surgeon de TF1. Les chaînes d’info en continu ont développé cette combine qui consiste à faire débattre des “ spécialistes ” – spécialistes de tout, il faut bien le dire – largement de droite, sur des sujets dictés par l’actualité immédiate. Ça ne coûte pas cher et on peut toujours espérer une empoignade, un coup de buzz qui sera repris ad nauseam pendant 12 à 36 heures. Le débat en question mettait en scène, outre le modérateur, quatre spécialistes, donc, tous bien de droite. L’un d’entre eux a titillé mon intérêt : Louis Marie Cyril Servane de Raguenel de Montmorel de Corvée de Chiottes de Bon Matin de Bonne Heure. Bernard, il faut toujours que tu exagères ! Enlève cette corvée de chiottes superfétatoire.

Je simplifie un peu plus : je l’appellerai désormais “ Loulou ”.

Par la faute de la Révolution française, cette chienne, le ci-devant Loulou (Balzac, faux noble, adorait l’expression « ci-devant ») est né en 1987 à Colombes, fils d’Arnaud Paul Yvan Jacques Marie de Raguenel de Montmorel et d’Isabelle Hélène Marie Gabrielle de Secondat de Montesquieu. Second d’une fratrie de six enfants, Loulou à fréquenté l’école Sainte Marie des Bourdonnais à Versailles, l’école Saint-Jean de Béthune, également à Versailles, le lycée Saint-Thomas de Villeneuve à Chaville et le lycée Saint-Bonnet à Châteauneuf de Galaure dans la Drôme (où a vécu la célèbre mystique catholique Marthe Robin). Loulou a épousé la roturière Inès Carayon qui lui a donné quatre enfants.

Durant le (faux) débat qui m’a hérissé le poil, Loulou a passé le plus clair de son temps à critiquer les attaques de Philippe Poutou contre les violences de la police. Mais pourquoi donc, me demandais-je ? Parce qu’entre notre bon Loulou et la police, il y a comme une affaire de cœur. Il fut responsable des réseaux sociaux au ministère de l’Intérieur et rédacteur en chef du service “ Défense, police justice ” de l’hebdomadaire d’extrême droite Valeurs actuelles.

Avant de devenir journaliste, Loulou avait milité au sein de la Droite forte de l’UMP, fondée par Guillaume Peltier et Geoffroy Didier, proche de l’UNI, de Sens commun et de la Manif pour tous. Il avait été le “ Monsieur Communication numérique ” de Claude Guéant au ministère de l’Intérieur puis chef du groupe « nouvelles technologies et veille » au cabinet du directeur général de la Police nationale, Claude Balland. Il s’était fait remarquer par des prises de position extrémistes, en particulier contre le mariage homosexuel. Discrètement écarté par Manuel Valls, il devint le nouveau rédacteur en chef internet de Valeurs actuelles qui s’était droitisée sous la direction d’un autre aristo, Yves de Kerdrel, deux fois condamné pour provocation à la haine raciale et également pour avoir injurié les journalistes du Monde Gérard Davet et Fabrice Lhomme, qu’il avait accusés d’être des « valets » d’un « cabinet noir » contre Nicolas Sarkozy.

En mars 2013, comme l’a révélé l’Express à l’époque, Loulou finit par être discrètement écarté par Manuel Valls, qui se méfiait de son activisme. A 26 ans, il devint alors le nouveau rédacteur en chef Internet de Valeurs actuelles. Une reconversion éclair qui ne manqua pas de faire jaser en interne. Aux côtés de quelques autres plumes fraîchement débauchées, la nouvelle recrue incarna le virage radical pris avec l’arrivée d’Yves de Kerdrel aux manettes, en octobre 2013. Depuis, de révélations anonymes en dossiers complaisants, l’hebdomadaire s’efforça de servir au mieux la cause sarkozyste. Une stratégie offensive dans laquelle Loulou occupa une place discrète mais efficace. La semaine de son scoop, il s’était ouvertement targué d’avoir obtenu ses informations par l’intermédiaire d’un ancien policier proche de la galaxie sarkozyste, reconverti depuis dans le privé. Loulou ne s’est jamais épanché sur cette période de sa vie.

Il annonça subrepticement son départ de Valeurs actuelles parce qu’il était pressenti pour prendre la tête du service politique d’Europe 1. Il y eut malheureusement une vigoureuse réaction de la plèbe des journalistes sous la coupe du – horreur ! – SNJ, syndicat de lutte connu pour son progressisme historique. Par 104 voix contre 3, la rédaction et les techniciens refusèrent l’arrivée de Loulou et finirent par accepter sa nomination comme adjoint au chef du service.

Ce que les journalistes plébéiens n’acceptaient pas, c’est qu’un « service politique d’une radio généraliste soit désormais dirigé par quelqu’un ayant un passé assumé de militant politique », rappelant les liens étroits de Loulou avec Claude Guéant. Le directeur de l’information, Donat Vidal-Revel, justifia la nomination de Loulou en ces termes : « Louis de Raguenel ne quitte pas Valeurs actuelles pour faire du Valeurs actuelles, ce qui n’aurait aucun sens, mais pour faire du Europe 1. C’est pour cela qu’il ne devient pas éditorialiste ou chroniqueur, dans une fenêtre de libre expression. Ce ne sont pas ses idées qui m’intéressent mais ses qualités professionnelles, ses contacts et son envie ».

Derrière les « qualités » et les « envies » fort respectables, Loulou, c’est bel et bien les méthodes et l’activisme de l’extrême droite tels qu’on les connaît depuis Édouard Drumont.

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