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Egypte : "Nous manifesterons jusqu’à ce que le régime militaire tombe"

Photo : Ali Garboussi
Al-Akhbar

«  La démission annoncée du gouvernement ne va pas nous empêcher de manifester, » déclare le militant égyptien Mohamed Hamama. « Après tout ce qui s’est passé, nous n’arrêterons pas de manifester jusqu’à ce que le régime militaire cède le pouvoir à un gouvernement civil. »

Membre des Socialistes Révolutionnaires Egyptiens, Mohamed Hamama est l’un des centaines de milliers de protestataires ayant participé à des manifestations sur l’emblématique Place Tahrir pour la troisième journée consécutive. « Lorsque le gouvernement de Moubarak a démissionné, on n’a pas arrêté de protester. Nous voulions que le président s’en aille. Nous n’allons pas arrêter maintenant. Le régime militaire est notre objectif »

Le gouvernement égyptien a démissionné lundi soir dans le sillage de trois jours de manifestations au Caire, laissant au moins 35 morts. Le Conseil Suprême des Forces Armées en Egypte (CSFA) n’a pas encore accepté sa démission. [1]

Les manifestants se sont affrontés avec des agents de sécurité égyptiens qui ont utilisé une force extrême dans leurs tentatives pour disperser les protestataires de la place Tahrir.

Les manifestants pro-démocratie sont retournés sur la place Tahrir - le point de ralliement de la révolution qui a renversé l’ancien Président autocratique Hosni Moubarak - ce vendredi, mettant en place des campements afin de récupérer une révolution qu’ils voient balayée par les militaires au pouvoir.

« Les gens sont arrivés au Caire de tous les coins du pays, » déclare le manifestant Mohamed Ammar. « Notre nombre s’accroit, même si la police et l’armée utilisent la violence contre nous. »

Le CSFA, dirigé par le Maréchal Tantaoui, a assumé la direction intérimaire de l’Egypte après la démission de Moubarak, et semble resserrer son emprise sur le pouvoir. Le CSFA a renouvelé les lois d’urgence tant redoutées en septembre, et a réprimé les journalistes dissidents, les militants et les blogueurs, avec en particulier la détention du blogueur égyptien de premier plan Alaa Abdel Fattah.

« L’emprisonnement de Alaa n’est pas seulement un message du CSFA à ma famille, qui s’est longtemps opposé à l’utilisation des procès militaires de civils, » déclare Seif Sanaa, la soeur cadette d’Abdel Fattah. « C’est aussi un message à tous les militants. Le CSFA veut que chacun sache que nous sommes tous des cibles. »

Les manifestants réclament le transfert du pouvoir du CSFA à un gouvernement civil.

Des élections parlementaires sont prévues pour se tenir à partir du 28 novembre. « Les élections sont inutiles à ce stade, » déclare Mohamed Hamama. « Aucune élection ne peut être juste tant que l’armée sera au pouvoir. »

Le refus de négocier du régime militaire de remettre le pouvoir vient du fait qu’il a commis des crimes contre la population égyptienne, pour lesquels il doit être tenu responsable, selon Khaled al-Dalshi, rédacteur en chef du journal Al-Badeel.

« La démission du gouvernement n’est pas la solution au problème auquel l’Égypte fait face, » déclare Khaled al-Dalshi. « C’est peut-être un début. Cependant, ce sur quoi nous devons nous concentrer maintenant, c’est que le CSFA rende des comptes pour ses crimes commis contre les manifestants. »

Sans une transition complète à un gouvernement civil, la violence policière et de l’armée va probablement continuer. « Les crimes commis ces derniers jours rappellent ceux commis sous le régime de Moubarak, » ajoute Khaled al-Dalshi. « Le CSFA a échoué dans son mandat à superviser la transition vers la démocratie. Il doit démissionner maintenant, ou bien faire face à une vague encore plus forte de protestations. »

Al-Akhbar, le 22 novembre 2011.

Notes :

[1] Selon The Guardian le CSFA aurait depuis accepté la démission du Gouvernement.

Source : Activists : We Will Protest Until the Military Regime Falls

traduction par un lecteur assidu du Grand Soir

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COMMENTAIRES  

23/11/2011 15:48 par yapadaxan

Le régime militaire tombe. Ok. On met quoi, après ? C’est ça qui reste opaque...

23/11/2011 17:43 par Palmer

23/11/2011 à 15:48, par yapadaxan

Le régime militaire tombe. Ok. On met quoi, après ? C’est ça qui reste opaque...

Ca ne me semble pas plus obscur que dans tout autre mouvement révolutionnaire, les Egyptiens ne sont pas des habitants d’Alpha Centauri ! Chaque chose en son temps, d’abord virer ce pouvoir militaire inique puis ils auront tout le temps de trouver la meilleure solution alternative possible... Ils ont un gros avantage sur les Polonais ou les Français, c’est de savoir quelles sont les solutions alternatives qu’il ne faut pas choisir, c’est déjà ça ! Ils ont un autre avantage aussi par rapport aux Européens et aux Yankee, c’est qu’ils ne sont pas décérébrés par la dictature rampante orwellienne occidentale, ce ne sont pas des robots décérébrés et décadents, on ferait bien de s’en inspirer !

23/11/2011 18:19 par rouge de honte

C’est impressionnant ! Quelle leçon ils nous donnent ! C’est incroyable ! Magnifique ! Formidable ! Et plus encore !!

23/11/2011 21:35 par Louise

via twitter,

Compte-rendu sur la situation en Egypte :

Cher tous,

N’étant pas assuré de la pertinence des médias, je vous écris pour vous rendre compte de la situation actuelle en Egypte. Vendredi dernier a eu lieu une grande manifestation sur la place Tahrir appelant à la fin du régime militaire, à la fin des poursuites militaires des civils (plus de 12 000 civils ont été envoyés devant des tribunaux militaires depuis la révolution) et s’opposant aux principes supra-constitutionnels (rédigés par le Conseil Suprême des Forces Armées afin d’encadrer l’écriture de la future constitution). De nombreux manifestants d’allégeances variées ont participé à cette manifestation et la plupart d’entre eux ont quitté la place dans la soirée.

D’autre part, les blessés de la révolution et les familles des martyrs tiennent des sit-in depuis plusieurs mois dans différents lieux, y compris sur la place Tahrir, afin de demander à l’Etat de prendre en charge le coût de leurs soins et de leur accorder des compensations. Samedi 19 novembre, la police a dispersé ces blessés par la force, ce qui a provoqué le retour de manifestants à Tahrir pour les soutenir (comme les 28 et 29 juin [eng]). De nombreuses personnes prétendent qu’il s’agit d’une révolte d’islamistes voulant prendre le pouvoir, ce qui est aberrant : il s’agit d’une révolte du peuple égyptien contre la violence policière et le régime militaire.

Les forces de sécurité utilisent intensivement différentes sortes de gaz lacrymogène, des balles en caoutchouc, de la grenaille et des balles réelles contre les manifestants et deviennent chaque jour de plus en plus violentes, ce qui a déjà causé la mort de 30 personnes et fait 1700 blessés (chiffres officiels du Ministère de la Santé), dont nombre d’entre eux ont été visé dans les parties supérieures du corps (notamment les yeux). Des gens sont arrêtés de façon arbitraire et violente, dont des médecins bénévoles qui aident les blessés et des journalistes couvrant les évènements. Les hôpitaux de fortunes sont attaqués volontairement afin d’empêcher la prise en charge des blessés.

Alors que la violence des forces de sécurité contre les manifestants non-armés se perpétue pour le 5° jour, de plus en plus de personnes décident de descendre dans la rue pour soutenir ceux déjà présents sur le terrain dans plus de cinq villes. Ce qui pourrait le plus nous nuire serait de présenter la situation comme un combat pour le pouvoir entre des groupes religieux ou politiques et l’armée, ou de décrire les manifestants comme des faiseurs de trouble recherchant la destruction du pays et le chaos. Nous nous battons tous contre la violence policière et le militarisme.

Soutenez-nous en répandant la vérité sur la situation et en corrigeant la désinformation qui s’est propagée depuis le départ de Moubarak.

Vidéos : http://youtu.be/zJ7FHUtxePw - http://youtu.be/54-1qNeef0E - http://youtu.be/O94sWWDc8Ig 

Images : http://goo.gl/OkNPL - http://goo.gl/qpA6A - http://goo.gl/Qxm2H - http://goo.gl/wK4Ia -

http://goo.gl/EhjrA - http://goo.gl/edRSw - http://goo.gl/Nw3Iu 

Déclaration de groupes de droits de l’Homme :
 Déclaration commune de groupes égyptiens : http://goo.gl/UzEqC [En]

 Human Rights Watch  http://goo.gl/zq5nR [En]

Ce que nous demandons est la justice.
Merci

Document orginal [eng] par Ramy Raoof @RamyRaoof
Traduction par @maud2501

23/11/2011 22:06 par Safiya

Un formidable démenti à tous ceux qui ont essayé de réduire la Révolution égyptienne en "révolution colorée"...

Les Egyptiens ne veulent plus ni des Yankees, ni du FMI, ni de la Banque mondiale, ni de l’U.E et encore moins d’Israël !

Sauf que "l’axe du mal" veille et la contre-révolution guette. Je crains un charnier pire que celui de Libye...

24/11/2011 11:50 par yapadaxan

Il faut bien comprendre qu’il y a eu, dès le départ, en Tunisie et en Egypte, 2 aspects de la révolution.

L’un téléguidé par Washington, l’autre éminemment populaire et spontané. Le problème a toujours été le rapport des forces entre les 2.

La question qui demeure est celle du projet révolutionnaire. Se contenter d’une revendication à la seule démocratie ne constitue pas un projet révolutionnaire au sens marxiste du terme. Au mieux, cela débouche sur une société à l’occidentale : multipartisme, élections dites libres, confiscation du pouvoir par une bourgeoisie au service des puissances impérialistes. Alors qu’une révolution réelle aboutit à la transformation complète de la société sur des bases de classe.

On en est pas encore là .

25/11/2011 16:27 par Palmer

24/11/2011 à 11:50, par yapadaxan

Il faut bien comprendre qu’il y a eu, dès le départ, en Tunisie et en Egypte, 2 aspects de la révolution.

L’un téléguidé par Washington, l’autre éminemment populaire et spontané. (...)

S’il faut bien le comprendre, alors vous devez très certainement être le seul à l’avoir compris, car y compris à Washington, que ce soit du côté des faucons ou a contrario de leurs adversaires radicaux, tous affirment qu’aussi bien aux USA qu’en Europe personne n’avait prévu les insurrections en Tunisie puis en Egypte... C’est ce qu’affirme par exemple Noam Chomsky, qui n’est pas connu ni pour être tendre avec Uncle Sam, ni pour être un blue moon pour ce qui concerne la géopolitique étasunienne...

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