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Internet à Cuba : A propos de largeur de bande passante (débit internet) et autres questions...

I’m singing
When the cat’s away
The mice will play
Political violence fill ya city
Yeah-ah
Don’t involve rasta in your say-say
Rasta don’t work for no CIA

Bob Marley + Wailers

Le 29 Octobre la revue cubaine "Temas" a tenu sa réunion-débat mensuelle (à la Havane) qui en est venue à s’appeler "Le dernier jeudi" [car elle a lieu le dernier jeudi de chaque mois]. La discussion a porté sur Internet et la culture cubaine. C’est un sujet extrêmement compliqué, et d’autant plus compliqué dans le cas de Cuba, vu que la question de l’utilisation et de l’accès à Internet ont été politisés par les opposants au gouvernement de l’île. Internet, dans le même temps, est devenu l’un des nombreux instruments utilisés par le gouvernement des USA pour projeter sa politique extérieure et influencer les processus internes du reste du monde. [1]

Pendant la discussion du Dernier Jeudi, la blogueuse Yoani Sánchez a demandé la parole , qui lui a été accordée. Sa première intervention a été pour remettre en cause l’argument selon lequel c’est la largeur de bande passante qui fait que la majorité des Cubains n’a pas accès à Internet.


Yoani Sanchez "déguisée" pour le débat sur internet

J’ai traité ce thème d’Internet à Cuba dans des travaux précédents [2]. Dans cet essai j’ai exposé la thèse selon laquelle la largeur de bande passante est un élément essentiel dans le type de topologie et d’architecture qu’un pays peut avoir car le nombre d’utilisateurs et la rapidité de la transmission des données en sont affectées. Cet argument est actuellement bien connu du grand public. Cette thèse, évidemment, se base sur les prix de connexion (lignes numériques, serveurs, routeurs, etc.) et, de plus, il faut tenir compte de la manière dont l’accès se fait, par satellite ou par un autre moyen. Dans les pays très industrialisés, le coût par personne serait meilleur marché puisque l’infrastructure nécessaire serait à la portée des personnes qui ont suffisamment de ressources - en d’autres termes, l’économie d’échelle réduirait le coût par usager. Pour une population moins nombreuse et des recettes plus petites, le coût de la connexion augmenterait considérablement.

Ces éléments économiques ne sont généralement pas pris en compte dans le débat sur la connectivité. Cependant, il existe bien au niveau mondial une "fracture numérique". Cette même inégalité se retrouve aussi à l’intérieur de nombreuses sociétés. Et on peut rencontrer l’inégalité d’accès à Internet - et à des plus grandes vitesses - jusque dans les sociétés les plus développées. [

A cela il faut ajouter que le modèle d’utilisation du monde capitaliste est fondé sur une utilisation individuelle, avec un ordinateur fixe à la maison ou portable, dont la majorité des pauvres du monde ne dispose pas.

En outre, il convient de remarquer qu’Internet est la négation, de par sa nature même, de toute une série d’anciens paramètres. D’abord, Internet rompt avec la pensée ou l’argumentation relevant de la logique séquentielle*. Le haut débit détruit le sens de l’historicité. Il n’y a pas de commencement, de milieu et de fin. Maintenant, on saute d’un côté à l’autre, sans rime ni raison. Il n’est pas toujours facile de savoir si la source d’une information est fiable ou pas. L’information est de toute nature, et presque toute l’information est commerciale. On paie pour publier, envoyer ou recevoir l’information.

Penser que cette technologie sera libératrice n’est pas surprenant. Le déterminisme technologique n’est pas nouveau. Ce qui est singulier c’est que ce sont maintenant les conservateurs qui adoptent cette thèse. On pensait la même chose de la radio, de la télévision, du téléphone, du télégraphe et aujourd’hui on dit que le PC, Twitter, Bluetooth, etc. contribueront à la démocratisation des sociétés. De telles projections conquièrent les naïfs, les politiciens et les opportunistes. Les implications inhérentes à Internet ont à voir avec les systèmes politiques, sociaux et économiques ; mais elles affectent aussi notre propre épistémologie et nos valeurs culturelles. Une relation personnelle et sociale entre personnes occupant un espace géographique commun et les fameux "réseaux sociaux" qui sont virtuels, ce n’est pas la même chose. Appeler quelqu’un au téléphone, ce n’est pas pareil que le "touch someone" , bien que ce soit ce que nous vend la pub.

Il est clair, cependant, que le débat sur Internet à l’intérieur de Cuba et sur l’île part de prémices propres aux pays hautement développés. La réponse à la question sur le débit devrait être donnée par les autorités cubaines chargées de la question. Cependant, il vaut la peine de mentionner que l’administration de Barack Obama a décidé de dépenser rien moins que 6 300 millions de dollars pour améliorer la pénétration du haut débit aux USA, pays qui, bien que constituant le marché le plus vaste de bande large de tous les pays de l’OCDE, avec 770 millions d’abonnés, n’occupe que la 15ème position mondiale pour ce qui est du rapport abonnés/population.
Une seule personne utilisant Youtube, HDTV,et autres, a besoin de 8 megabits par seconde dans les deux directions pour fonctionner normalement. Tout Cuba - en utilisant son infrastructure actuelle - peut avoir des débits descendants et ascendants de 65 et 124 megabits par seconde. Les dissidents virtuels, par conséquent, ne peuvent envoyer leurs images qu’en utilisant des connexions, qui ne dépendent pas des structures cubaines, car s’ils le faisaient, tout Cuba devrait s’arrêter pour leur mettre de télécharger leur matériel sur Youtube et autres.

Il y a une série de questions pertinentes à poser aux Yoanis virtuel-les que l’on trouve à Cuba et qui, on l’a vu, ont pu accéder à Internet alors que la largeur de bande passante n’est pas suffisante pour tout le pays. Leur expérience pourrait avoir un effet positif auprès des gens qui ont moins de ressources.

Qu’est-ce exactement que la largeur de bande, quelle est son importance ? Et combien peut-elle coûter ? 33% des usagers usaméricains d’Internet n’ont PAS la bande large, bien que l’accès au haut débit par câble soit disponible pour 96% des usagers et que 79% d’entre eux disposent de connexions DSL.

La majorité des pays pauvres ne dispose d’un accès majoritaire à aucune des trois modalités évoquées. Steve Song, spécialiste de bande large du Centre international de recherche et développement, a déjà noté en 2008 que « l’université moyenne africaine dispose de la même largeur de bande qu’un usager privé aux USA ou en Europe ». Il a également fait remarquer qu’une université africaine moyenne « paye plus de cinquante fois pour la bande large que ses homologues européenne sou usaméricaines, alors que celles-ci paient pour une capacité de beaucoup supérieure ». [4]

¿Qué relación hay entre banda ancha, utilización y coste ? Puede que sea un precio que Cuba no serà­a capaz de ofrecer a todo el mundo a modo de derecho o, como dicen en Cuba, porque « me toca ». El pasado mes de octubre, en Finlandia se estableció 1 MB de ancho de banda como derecho legal a partir de julio de 2010. Por su parte, Francia resolvió que el acceso a Internet es un derecho humano « básico », sin tener en consideración la velocidad. Pero hay que pagar por ello.

Quelle relation y a-t-il entre la largeur de bande, son utilisation, et son coût ? Un prix que Cuba ne serait pas en mesure de fournir à tout le monde comme un droit ou, comme ont dit à Cuba, parce que « ça m’est du ». En octobre dernier, la Finlande a instauré la largeur de bande d’1MB comme droit légal à partir de juillet 2010. Pour sa part, la France a décidé que l’accès à Internet est un droit humain « de base », sans prendre en considération le débit. Mais pour lequel il faudra payer.

Comme le disait Cantinflas, le comique mexicain : « En el detalle está la diferencia » [La différence est dans le détail]. L’initiative française ne dit rien sur l’accessibilité ; l’utilisateur privé devra payer. Le Helsinki Times rapporte que par « droit légal » on doit entendre qu’il n’y aurait plus aucun foyer « à plus de 2 km d’une connexion Internet à une bande large avec une débit minimal de 100 MB par seconde ». De cette façon, pour peu que la grande autoroute de l’information passe près de chez vous, ce sera l’affaire de chacun de payer pour se connecter. [5]

Le 6 novembre, Business Week annonçait que le Parlement Européen « aurait rejeté une proposition qui déclarait l’accès à Internet un droit fondamental ». Cinq mois auparavant, les blogueurs dissidents cubains avaient émis un communiqué dans lequel ils proclamaient le droit à l’accès à Internet. [6]

La presse étrangère en place à Cuba prétend qu’une dissidente à la Havane a un blog qui est traduit en 16 langues ou plus et qui reçoit entre oscillait entre un million et quatorze millions de visites mensuelles, quelque chose d’impressionnant quelle que soit la partie du monde où l’on se trouve. Mais pour quelqu’un qui se trouve à Cuba, cela ressemble plus à un miracle de Fátima qu’à autre chose. [7]

D’un point de vue logistique, il s’agit-là d’une prouesse peu commune. Est-il possible que Cuba puisse actuellement brasser un trafic si volumineux ? Qui sont ceux qui peuvent administrer des sites web dans toutes ces langues ? La traduction est une discipline complexe, absorbante, et une équipe internationale de traducteurs est très coûteuse. Comment ce travail est-il géré ? Qui paie ? Et par quel mécanisme l’argent est-il transféré ?

Nous savons qu’à Cuba personne n’a la possibilité de gagner suffisamment pour maintenir tous ces services et méthodes si onéreux. Toutefois, le blog est là . Quelqu’un ou quelque institution se chargera des coûts d’accès à Internet, à Twitter, etc. Il se peut qu’il existe de bons Samaritains. Qui sait…

Nous savons que le programme Cuba de l’USAID soutient économiquement « des journalistes indépendants » sur l’île. [8] Est-ce aussi le cas des « blogueurs indépendants » ?

De fait, un des fondements de la politique extérieure des USA est qu’Internet pourrait provoquer un changement de régime. C’est pourquoi, le Département du Trésor US (équivalent du Ministère des Finances) a fait savoir autant à Google qu’à Microsoft qu’ils peuvent permettre les services de chat à Cuba. [9]

Le Département de la Défense US laisse entrevoir la possibilité d’utiliser Internet pour parvenir aux objectifs des USA, c’est à dire, un « changement de régime ». Parmi ces objectifs il est prévu le « développement d’une toile internationale qui relaie les objectifs stratégiques US au niveau de la communication » ; dans cette toile, « les contenus parviendraient principalement de tierces personnes ou de tierces organisations plutôt que des sources gouvernementales US, ce qui aurait une plus grande crédibilité pour le public étranger ». Mieux encore : dans le même rapport il est noté que le Pentagone devrait « identifier et diffuser les positions de parties tierces qui soutiennent les positions US. Il se pourrait que de telles sources n’articulent pas les positions US comme le ferait le gouvernement US. Cependant, il est probable qu’elles puissent exercer une influence positive ». [10]

Il existe aux USA un grand nombre de sous-traitants privés et d’universités plus que disposés à servir les intérêts de l’Empire tout en se prétendant « indépendants » de la politique étrangère de Washington [11]

Alors, quel type d’Internet ?

Est-ce qu’Internet est une technologie capable de développer et de libérer le potentiel humain, la connaissance, la pensée et la coopération entre les nations ? Ou bien serait-il, comme par le passé, un instrument de plus pour maintenir et étendre les échanges et les relations de pouvoir inégaux qui ont existé entre les nations du monde ? Aujourd’hui, c’est une lutte qui se livre à léchelle planétaire. Est-ce qu’Internet est un forum public ou un commerce ? C’est là le débat qui a lieu aux USA et dans d’autres sociétés capitalistes. [12] C’est une lutte à l’intérieur même de Cuba, où l’autodétermination nationale et l’hégémonie usaméricaine s’affrontent de plusieurs façons, et elles ne sont pas évidentes.

Nelson P. VALDÉS

Source : Cibercuba : sobre banda ancha y cuestiones afines

Source de cette traduction : Cuba Si Lorraine

Références :

[1] New Inequality Frontiers : Broadband Internet Access by Economic Policy Institute, 2006].

[2] 03/09/08 - Cuba-L Analysis (Albuquerque) - Cuba and Information Technology - 2001[Part 1] http://cuba-l.unm.edu/?nid=45032&q=Nelson%20P%20Valdes%20and%20Internet&h=

03/10/08 - Cuba-L Analysis (Albuquerque) - Cuba and Information Technology - 2001 [Part 2] http://cuba-l.unm.edu/?nid=45055&q=Nelson%20P%20Valdes%20and%20Internet&h=

03/09/08 - Cuba-L Analysis (Albuquerque) - Cuba and Information Technology - 2001[Part 3] http://cuba-l.unm.edu/?nid=45100&q=Nelson%20P%20Valdes%20and%20Internet&h=

03/12/08 - Cuba-L Analysis (Albuquerque) - Cuba and Information Technology [Final] http://cuba-l.unm.edu/?nid=45151&q=Nelson%20P%20Valdes%20and%20Internet&h=

[3] Organization for Economic Cooperation and Development, broadband Growth and Policies in OECD Countries, Seoul, Korea, 17-18 June 2008. OECD Ministerial Meeting. http://www.oecd.org/dataoecd/32/57/40629067.pdf et Bill Schrier, Third World Broadband - In the United States. Vea : http://www.digitalcommunitiesblogs.com/CCIO/2009/03/third-world-broadband-in-the-u.php

[4] IDRC, Acacia news, February 2008 http://www.idrc.ca/en/ev-122116-201-1-DO_TOPIC.html y Indrajt Basu, "Not All Americans View Broadband as Necessity, But Finland’s Another Story," [October 26, 2009.] Vea : http://www.digitalcommunitiesblogs.com/international_beat/

[5] http://www.helsinkitimes.fi/htimes/domestic-news/politics/3179.html
[6] http://www.businessweek.com/globalbiz/content/nov2009/gb2009116_710422.htm et le communiqué des blogueurs : http://bottup.com/200906014676/Internet/comunicado-para-defender-los-derechos-en-cuba.html

[7] http://en.wikipedia.org/wiki/Yoani_S%C3%A1nchez
[8] http://www.usaid.gov/locations/latin_america_caribbean/cuba/photogallery/cu01.html

[9]"US Wants Microsoft to End Message Ban in Iran,Cuba" Bloomberg, October 29, 2009. http://news.yahoo.com/s/bloomberg/20091029/pl_bloomberg/afpeerwgcyla_1

[10] U. S. Department of Defense, Information Operations Roadmap, 30 October 2003, p. 27. http://www.gwu.edu/ nsarchiv/NSAEBB/NSAEBB177/info_ops_roadmap.pdf

[11] Un bon exemple est le Berkman Center for Internet & Society de la Harvard Law School, qui a obtenu pour son projet Internet et démocratie une subvention d’1,5 million de $ sur deux ans de la Middle East Partnership Initiative du département d’État. Voir : http://blogs.law.harvard.edu/idblog/the-internet-and-democracy-project/

[12] "FCC Set To Take On Aggressive Role As Internet Traffic Cop,"SiliconValley.com, October 20, 2009. Voir : http://www.siliconvalley.com/sectors/ci_13603357


Yoani Sánchez, la "blogueuse star" cubain : une folle furieuse

Elle ne pense qu’à ça..
AUTEUR : MACHETERA

Traduit par Esteban G..Édité par Fausto Giudice

La maladie mentale non traitée n’est jamais un très beau spectacle à voir. C’est pourquoi il est très difficile de comprendre la cruauté dont fait preuve le Département d’État US envers Yoani Sánchez, la blogueuse cubaine qui s’autoproclame « censurée », car au lieu de lui suggérer gentiment de demander de l’aide psychologique, il se consacre à divulguer et à répéter ses délires pour la simple raison que ces derniers lui servent d’arme dans la guerre de la propagande qu’il entretient contre Cuba depuis cinquante ans.

Lundi dernier, (9 novembre), ce même Département d’État qui était resté imperturbable et silencieux face aux nombreuses agressions criminelles et aux assassinats perpétrés par ses courroies de transmissions putschistes au Honduras durant les derniers mois, avait décidé de publier un communiqué dans lequel « il déplorait grandement l’agression contre les blogueurs Yoani Sánchez, Orlando Luis Pardo et Claudia Cadelo ». En prenant le gouvernement cubain une fois de plus sur ses genoux paternalistes, le Département d’État l’a grondé sur la répression et la violence, la liberté et la réconciliation. Toutefois, l’inquiétude émouvante du Département d’État pose un réel problème.

Tout d’abord, il n’y a aucune confirmation indépendante des allégations faites par les trois blogueurs itinérants, selon lesquelles ils auraient été embarqués de force dans une voiture de marque chinoise et de couleur noire conduite par des membres de la sécurité de l’État, puis, frappés pour les empêcher de participer à une manifestation vraiment bizarre (Contre la violence ? A Cuba ? Allons voyons… !). Si l’on tient compte de l’enthousiasme de Yoani avec lequel elle s’accapare la largeur de bande limitée de Cuba pour publier sur le web des photos et des vidéos d’elle-même, l’absence de preuve photographique de l’agression dont elle dit avoir été victime est remarquable. La blogueuse exhibitionniste, n’a pas eu la moindre gêne à se déguiser en parodie clownesque de touriste allemande pour se donner en spectacle au beau milieu d’une conférence sérieuse entre journalistes et universitaires, est soudain devenue réticente, timide et renfermée, soignant en privé les blessures qui, selon elle, lui avaient été infligées, avec l’assistance du personnel de la clinique de son quartier (dont les soins, mais elle ne le mentionne pas, sont gratuits)

Lorsque les doutes sur la nature étrangement dramatique de l’histoire de Yoani ont commencé à apparaitre, celle-ci en a rajouté - toujours sans photo à l’appui de ses allégations - en accusant les sceptiques de culpabiliser la victime. Sa pathologie est vraiment bizarre. Il n’y a que les spécialistes cubains de la santé mentale qui pourront pronostiquer si Yoani Sánchez est une personnalité bipolaire paranoïaque ou paranoïde, mais les indices - des délires de grandeur prononcés et répétitifs avec en même temps d’extravagantes histoires de persécution, fabriqués clairement pour l’usage externe - montrent à première vue, que nous avons affaire à une jeune fille perturbée, dont la perception disjonctée de la réalité s’amplifie au lieu de diminuer.

Son mari, Reinaldo Balayer, ex-journaliste raté, trainant derrière lui une longue histoire de torchons brûlés avec la communauté dissidente cubaine, est à mon avis le plus grand fautif. Selon Yoani, elle et Reinaldo sont retournés à Cuba après une vie très difficile en Suisse, où l’âge de son mari - qui n’est pas très jeune - et son incapacité à apprendre une langue étrangère ne lui ont offert que les perspectives d’emploi s’offrant aux immigrants dans la même situation : des boulots pénibles, subalternes et mal payés. Ce n’était pas le niveau de vie que tous les deux attendaient. Effectivement, aujourd’hui ils vivent beaucoup mieux, en se pavanant autour de l’hôtel Meliá Cohiba à la Havane avec des portables et des caméras cachées qui leur permettent de se filmer harcelant le personnel tandis que, leur collaborateur Ernesto Hernández Busto se charge de faire la manche pour récolter de l’argent et les financer depuis Barcelone. (Hernández Busto est un Cubain qui survit sans travail ni revenus déclarés dans la métropole catalane - une ville où tout est très cher -, il a créé son propre blog, Penúltimos Dà­as, sur lequel il publie les articles de Yoani et collecte des « dons » pour la soutenir.)

Cela fait une éternité que Yoani rêve que la police l’arrête, mais, à son plus grand regret, à Cuba on peut pas l’arrêter et on ne l’arrêtera jamais pour ce pour quoi elle voudrait l’être : le fait de se rendre ridicule. Toutefois, elle sait très bien qu’elle pourrait être arrêtée pour avoir reçu de l’argent de l’étranger pour s’en prendre à Cuba, et c’est ici que l’aide de Hernández Busto est inestimable, car elle constitue un sas entre Yoani et ses sponsors.

Je n’ai jamais considéré comme particulièrement productif de s’interroger sur l’affiliation de quelqu’un à la CIA, car la question de savoir si quelqu’un est ou non un agent n’est pas très importante. La question qu’il fauts e poser, c’est si les activités de cette personne sont profitables ou non à l’Agence. Dans le cas de Yoani et Reinaldo, la réponse est un oui catégorique. La semaine passée, juste après la prestation de Yoani dans le débat d’Internet sur la culture cubaine sponsorisé par le magazine Temas du Centre Culturel Fresa y Chocolate à La Havane, tandis que Reinaldo organisait, dans la rue, une conférence de presse impromptue avec les journalistes étrangers, elle en profitait pour accorder une interview complètement ouf à rien moins que Radio Martà­, financée, elle, par la CIA.

Après avoir affirmé au cours de l’interview qu’elle avait été contraint de porter une ridicule perruque blonde platine pour tromper la police qui cernait son immeuble (il convient de noter qu’elle n’a pas eu cette idée pour pénétrer dans le Centre Culturel Fresa y Chocolate, ce qui aurait été plus logique), elle enchaine avec son chapelet de mensonges, parmi lesquels celui sur une journaliste cubaine, Rosa Miriam Elizalde, qui selon elle, l’avait accusée d’être un agent de la CIA, une chose totalement fausse car jamais Elizalde n’a dit une telle chose. La contribution au débat de cette dernière a été calme, éloquent, sans nommer quiconque : elle avait indiqué qu’en ce qui concerne Internet, Cuba était victime d’une situation schizophrène : tandis que l’île devait faire face à de réels obstacles technologiques imposés par le blocus US, à l’extérieur Cuba recevait une déferlante de critiques contre la censure, revendiquées par Yoani. « Une des choses que vous devriez vous demander », disait Elizalde, « est de quelle manière est construite cette image… Il y a une manipulation évidente de tout ce système… Il y a ici une importante manipulation politique au sujet de la censure de l’image et je pense qu’il faut remettre les choses dans leur contexte. »

Yoani est tellement intimidée par Rosa Miriam Elizalde qu’elle n’a même pas osé prononcer son nom ni dévoiler son véritable titre (elle est rédactrice du site web Cubadebate.cu), préférant la citer comme un professeur universitaire anonyme à la pointe du combat, autant au cours de l’interview qu’elle a accordé à Radio Martà­ que sur son propre blog. Jorge Sariol, un autre journaliste cubain qui était présent à la conférence, a écrit sur son blog :

« …Puis ce fut au tour des interventions de l’assistance ; les unes étaient naïves sous un déguisement dur, d’autres incisives sous un déguisement naïf, certaines sérieuses, d’autres qui n’étaient ni l’un ni l’autre, jusqu’à ce qu’une personne prenne la parole, et dise "qu’elle se moquait de la persécution policière", coiffée d’une perruque blond platine dont elle seule croyait qu’elle la rendait invisible ; elle arrache théâtralement sa perruque, ça ressemblait plus à une scène de soap opera qu’à autre chose ».

Un projecteur de mille watts essayant d’attirer l’attention, n’aurait pas fait mieux, car ce qu’elle avait dit n’étaient que des bêtises cent fois répétées qui n’avaient rien à voir avec le débat et n’ont suscité qu’une légère agitation de quelques phoques de dessins animés. J’ai été déçu par cette Yoani, considérée par une certaine presse comme une des 100 personnes les plus je-ne-sais-quoi du monde.

Dans les débats je désapprouve le choix de dévaloriser celui qui argumente plutôt que s’attaquer à ses arguments, mais dans ce cas ce n’est même pas nécessaire. J’avais pensé que dans tout cela, il devait y avoir quelque chose d’un certain niveau, dans son discours, dans ses manières ou dans son attitude. La seule chose que j’ai vue n’est seulement qu’une bouffonnerie. Pire encore, une bouffonne grotesque. Quelques collègues étrangers ont avalé le poisson, et l’hameçon avec.

Ou alors ils sont allés à la gamelle en connaissance de cause ?

Je ne sais pas ce que c’était, mais il y a eu quelque chose qui n’est pas passé dans la comédie que j’ai vue. »

Rosa Báez, une autre journaliste cubaine qui était également présente, a décrit cette scène dans un article intitulé « Quand le mensonge se transforme en vice » :

« Pour alimenter l’idée que Cuba est un pays qui restreint l’accès à Internet, un certain nombre de petites gens élevés au rang de « figures », à coups de dollars et de manipulations médiatiques ont surgi tout d’un coup ; j’ai eu le malheur de participer pour la première fois en personne et en direct, à une des performances de Yoani Sánchez, « la blogueuse star », baptisée par la soussignée « l’asticot blogueur », pour sa ressemblance évidente avec cette bestiole et pour leurs caractéristiques communes, à savoir : les deux servent d’appât. Là , au Centre Fresa y Chocolate, nous avons pu entendre tout un tas de mensonges, sur la supposée censure de son blog Generación Y (qui est complètement dupliqué un peu partout, toujours sous son nom, et qui se présente comme une « voix cubaine », ce qui démontre le caractère fallacieux de cette censure supposée car comment est-il possible de censurer un blog, et permettre qu’à côté son clone fonctionne dans toute sa « splendeur » ? C’est tout à fait illogique !), de même lorsque dans son discours elle nomme certains sites qui sont censés être bloqués ou censurés, entre autres celui de sa partenaire Claudia Codelo, « Octavo cerco »…alors que, comme le montre cette capture d’écran prise à partir de mon PC, on peut vérifier qu’il n’existe aucune preuve de sa censure :

J’ai également pu examiner certains des liens que Yoani donne sur son clone, comme par exemple, Bloggers Cuba ; Itinerario blogger (où je me suis amusée avec les cours de cyber-terrorisme qu’elle donne dans sa « maison assiégée » : comment les 13 ou 14 participants ont-il pu tromper la vigilance de« l’encerclement policier » de son appartement ? Auraient-ils grimpé, tels des ninjas modernes, les 14 étages par la façade extérieure de son bâtiment ?!) ;… »

Báez inclut dans son article cette observation de Rosa Miriam Elizalde :

« C’est épuisant. Lorsque nous écrivons dans la presse cubaine, nous le savons bien, et nous y sommes habitués, que pouvons-nous faire si un grand nombre de gens s’entêtent à tout gober ? Le mensonge en tant que norme, et l’absurde comme devise. […] Mais le plus fatigant n’est pas cet insupportable épanchement de médiocrités, chose qui dure depuis plus de quatre décennies avec presque tout ce qui a trait à Cuba, et qui tôt ou tard se dégonfle comme une montgolfière. Le plus angoissant, et ce qui chaque jour s’étend et s’amplifie, c’est ce qui pourrait s’appeler « le corporatisme du mensonge », cette façon frivole de coller à tout un pays l’étiquette d’un préjugé. Et ceci n’est pas seulement nuisible et malsain, mais également irrationnel et fanatique. »

Et donc nous en arrivons à la dernière production irrationnelle et fanatique de Yoani et Reinaldo, qui s’est déroulée quelques jours après le spectacle avec la perruque dans le Centre Culturel Fresa y Chocolate ; elle l’avait complété avec les affirmations de l’existence des mystérieux véhicules noirs de la sécurité de l’État, par des raclées de la police secrète, par la peur qu’ils la kidnappent (ce n’est pas une plaisanterie, c’est la raison que Yoani a donné pour refuser d’entrer dans une voiture non identifiée au moment où, selon elle, ils l’ont sommée de le faire : elle craignait qu’ils la kidnappent ou/et qu’ils puissent la violer, comme si elle se trouvait à Bogotá au lieu de La Havane. Ou à Tegucigalpa.).

La scène, décrite par Yoani/Reinaldo, est digne de celles de Hollywood :

« Orlando se trouvait déjà à l’intérieur, immobilisé par une prise de karaté qui le maintenait avec la tête plaquée au tapis. L’un d’eux avait mis son genou sur ma poitrine et l’autre, depuis son siège avant me cognait dans les reins et me frappait la tête pour que j’ouvre la bouche et que je crache le papier. A un moment, j’ai cru que je ne sortirais jamais de cette voiture. « Ton chemin s’arrête ici, Yoani », « et tes conneries sont terminées » me disait celui qui était assis à côté du chauffeur en me tirant par les cheveux. Un curieux spectacle se déroulait sur le siège arrière ; mes jambes étaient en l’air, mon visage tout rouge par la pression et le corps endolori, de l’autre côté il y avait Orlando maintenu par un voyou professionnel. Dans un geste de désespoir, j’ai seulement réussi à saisir mon agresseur par les testicules à travers son pantalon. J’ai enfoncé mes ongles, car j’imaginais qu’il allait continuer à écraser ma poitrine jusqu’au dernier souffle. « Tue-moi maintenant », lui ai-je crié, avec le peu d’air qui me restait. « Laisse-la respirer », dit celui qui était à l’avant du véhicule au plus jeune. »

Le scénario est émouvant, mais beaucoup l’ont critiqué… sauf le Département d’État et les bureaux d’Ileana Ros-Lehtinen et Lincoln Dà­az Balart. Un commentateur a dit ironiquement : « Comment Yoani a-t-elle pu enfoncer ses ongles dans un tel endroit, alors qu’elle n’en a presque pas [des ongles] ? »

Soudain, l’histoire a été quelque peu modifiée. A la BBC, Yoani a raconté qu’elle ne pouvait pas montrer les marques de bleus car les coups lui avaient été infligés sur les fesses et que naturellement elle ne pouvait pas les exposer ; elle avait insisté sur le fait que durant la fin de semaine, ses joues et ses arcades sourcilières étaient enflées (le lundi, Oh, miracle ! Les gonflements avaient disparus). Et enfin, elle a livré des photos et des vidéos absurdes, qui rappellent celles du grand comique Armando Valladares : Yoani avec des béquilles et Yoani en train de boiter avec de grandes douleurs. A vrai dire, Valladares était un amateur comparé à Yoani ; ses affabulations selon lesquelles il était devenu paralytique avaient été démasquées au moment de il avait été libéré de prison à la seule condition qu’il monte et descende par lui-même les passerelles de l’avion qui le conduirait à Miami. Valladares avait manigancé ses mensonges pour être libéré. Par contre, celles de Yoani semblent faites sur mesure pour la conduire en prison, même si le gouvernement cubain est plus que réticent à céder face à cette fantaisie singulière et malsaine.

Pendant ce temps, à Cuba les graves insuffisances d’Internet continuent ; ses journalistes, ses professionnels, ses scientifiques, ses éducateurs et ses techniciens se battent chaque jour avec une connexion si lente et tellement coûteuse qu’elle les fait revenir à l’âge de pierre alors que nous sommes à l’ère de la fibre optique et de l’ADSL généralisées dans le monde développé. Ce doit être frustrant et désespérant de devoir faire face en permanence à l’indifférence totale de la presse étrangère sur cette situation épouvantable, alors que dans le même temps celle-ci fait ses choux gras des shows pathologiques de Yoani et Reinaldo. Mais aussi longtemps que le spectacle médiatique continuera à remplir la fonction qui lui a été assignée - alimenter le business du couple tout en détournant l’attention de l’information authentique et, au passage, diaboliser Cuba -, les dégâts qu’elle occasionne sur le mental passent au second plan.


Source : Yoani Sánchez : a few cards short of a full deck

Article original publié le 11/11/2009

Machetera, Esteban G. et Fausto Giudice sont membres de Tlaxcala, le réseau de traducteurs pour la diversité linguistique. Cette traduction est libre de reproduction, à condition d’en respecter l’intégrité et d’en mentionner l’auteur, le traducteur, le réviseur et la source.

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