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le Revue Relations : Le combat contre l’impunité (dossier)

Le combat contre l’impunité

Jean-Claude Ravet

Combien de crimes, commis par des États - dictatures et démocraties - ou à caractère économique et financier, restent impunis ? De combien de crimes les multinationales et leurs pdg soi-disant respectables sont-ils responsables ou se sont-ils faits complices ? Combien de dirigeants, de spéculateurs, de militaires et policiers ont les mains sales mais continuent à oeuvrer sans entraves dans leur sphère respective comme si de rien n’était ? Combien de populations, de peuples, de pauvres ont été spoliés, dépossédés de leurs biens, agressés, écrasés sans qu’aucune instance ne se dresse pour les protéger ou traîner les coupables devant les tribunaux ? Combien de dictateurs ont pris le pouvoir grâce au concours de démocraties ? Combien de Kissinger ont été jugés ? L’impunité a non seulement un triste et long passé, elle a, si l’on ne s’y oppose pas, un bel avenir devant elle.

Nous avons tous en mémoire les guerres coloniales : les pillages et les massacres commis au nom de la civilisation et des intérêts des métropoles ; ou encore les juntes militaires et les dictatures : répression, torture, disparitions, assassinats collectifs, exécutions et procès expéditifs des opposants politiques au nom de la sécurité nationale. Tout cela en toute impunité. Plusieurs dictateurs, chassés du pouvoir, ont pris la fuite avec les coffres de l’État vers un pays ami… démocratique. Pensons, entre autres, à Bébé Doc, ex-dictateur d’Haïti, résidant en France. Qui plus est, la loi immémoriale de la justice des vainqueurs semble gouverner toujours : il y a eu, après la Deuxième Guerre mondiale, le procès mérité de Nuremberg lors duquel les nazis responsables de crimes contre l’humanité furent jugés. Mais qu’en fut-il des crimes des Alliés, comme le bombardement de Dresde qui réduit la ville en cendres sans autres motifs que punitifs ? Qu’en est-il d’Hiroshima et de Nagasaki ? Qu’en sera-t-il de la Guerre d’Irak ?

Bien des crimes sont marqués du sceau de l’impunité parce qu’ils sont recouverts du voile de la légalité. Quand oserons-nous, comme le fait Jean Ziegler, employer le terme de « crime contre l’humanité » s’agissant des programmes d’ajustement structurel du Fonds monétaire international, des politiques de la Banque mondiale et des traités « entre requins et sardines » de l’OMC, qui sont à l’origine de tant de misère, de famine, de souffrance ? Ils ont livré des pays pieds et mains liés aux multinationales étrangères, après les avoir contraints à se déposséder de leurs institutions politiques de régulation économique, au nom de la compétitivité.

La destruction de forêts, l’empoisonnement de rivières, le déplacement forcé de populations locales n’en sont pas moins des crimes si ceux qui les commettent sont des multinationales qui oeuvrent dans un État corrompu ou incapable de réglementation adéquate. Elles devraient être mises au banc des accusés. Mais tout au plus paieront-elles une amende ou une compensation dérisoire.

Que nous enseignent ces exemples d’impunité, au-delà de l’indignation et du scandale qu’ils peuvent susciter ? Le nécessaire combat contre l’impunité doit se déployer sur de nombreux fronts. Notre dossier en aborde quelques-uns. Il s’agit d’abord d’étendre le pouvoir et la juridiction des instances de justice internationale que se donnent les nations pour juger les responsables de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité (voir l’article de Gaëlle Breton-Le Goff). Il s’agit aussi de renforcer et d’élargir les luttes sociales, courageuses et tenaces, pour abolir les lois d’amnistie dont jouissent, entre autres, les militaires qui ont ordonné la torture pendant qu’ils étaient au pouvoir (voir l’article de Marie-Christine Doran). Ces luttes sont aussi essentielles parce qu’elles introduisent, dans la vie collective, une dimension fondamentale que la nouvelle élite, obnubilée par la promesse de rendement et de profit, voudrait évacuer : la mémoire.

Le combat contre l’impunité devrait s’étendre davantage au système économique. Si un petit nombre de rapaces s’est retrouvé derrière les barreaux à la suite de la crise récente, le système financier qui les produit et encourage la cupidité est resté, quant à lui, intact et intouchable. Pire encore, il a été renforcé. C’est aussi vrai chez nous, où des lois sont adoptées pour protéger le jeu révoltant de la spéculation (voir l’article de Georges Lebel) tandis que le gouvernement se refuse à tenir une enquête publique sur la corruption dans le domaine de la construction. Et que dire de la faiblesse des gouvernements québécois et canadien face aux compagnies minières qui, au Québec comme à l’étranger, jouissent d’un pouvoir excessif et d’une large impunité pour leurs méfaits (lire les articles d’Ugo Lapointe et de Catherine Coumans) ? Tout cela a assez duré.

Qui décide d’entrer dans ce combat acharné pour que justice soit rendue, et, avec elle, la dignité de tout être humain, pourra puiser certainement des forces, s’il le désire, dans la protestation véhémente contre l’impunité qui s’élève de la Bible depuis le fond des âges (voir l’article d’André Myre).

« Pour aimer les hommes, il faut détester fortement ce qui les opprime. »
Jean-Paul Sartre

POUR EN SAVOIR PLUS
http://www.revuerelations.qc.ca
février 2010

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