Menace de coup d’Etat en Equateur ?

Le président socialiste d’Equateur, Rafael Correa, a affirmé samedi qu’"une conspiration (était) en marche" pour le "renverser".
"Cela a été une semaine très dure pour le pays (...). Une conspiration est en marche", a déclaré Rafael Corréa lors de son émission hebdomadaire radiotélévisée, cette fois depuis Milan (Italie) dans le cadre de sa tournée européenne.

"Ce sont des gens très violents, ils ont la complicité éhontée des médias", a-t-il poursuivi. "Il ne s’agit pas d’empêcher la loi sur les héritages, il s’agit de renverser le gouvernement", a-t-il poursuivi.

Au cours des cinq derniers jours et aux cris de "Dehors Correa, dehors !", des politiciens, hommes d’affaires et membres des classes moyennes et élevées ont manifesté à Quito, mais aussi à Guayaquil et Cuenca, contre le projet de loi controversé de "redistribution de la richesse".

Le 5 juin, le président Correa, une des figures de la gauche radicale en Amérique latine, a en effet présenté au Parlement une réforme de la fiscalité prévoyant de taxer les héritages supérieurs à 35.400 dollars, l’équivalent de cent salaires de base, abaissant de près de moitié le seuil du montant imposable jusqu’à présent.

Le projet doit être approuvé en juillet par le Parlement, où le parti présidentiel Alianza Pais (AP) détient la majorité.

Pour défendre le gouvernement, des milliers de sympathisants sont également descendus dans la rue, mais aucun incident ni blessé n’a été signalé entre les deux camps.

Si la mesure a soulevé un tollé dans les milieux d’affaires, avec lesquels M. Correa entretient des relations conflictuelles depuis son élection en 2007, son effet devrait toutefois être limité : seuls trois Equatoriens sur 100.000 perçoivent un héritage d’une valeur supérieure à 50.000 dollars, selon des chiffres officiels.

Selon le ministre de la Politique économique, Patricio Rivera, "la loi sur les héritages vise le secteur le plus élevé de la société, les 0,1% plus riches (....), 98% des Equatoriens ne paieront pas un centime".

Face à ces protestations, Rafael Correa a appelé ses partisans à "faire très attention", jugeant que "la situation du pays est assez grave".
De nouvelles manifestations sont prévues par l’opposition de droite, ce dimanche.

Eugénie Barbezat avec AFP

 http://www.humanite.fr/menace-de-coup-detat-en-equateur-576825

COMMENTAIRES  

16/06/2015 10:48 par Roger

Nous avons pu entendre ou lire ça et là, énoncé comme une évidence par des responsables politiques (y compris "de gauche") que la lutte de classe n’existe plus, voire n’a jamais existé...
J’aimerais bien que ces gens là aillent le dire, les " yeux dans les yeux" , aux Equatoriens...

16/06/2015 17:31 par Pablo Caller

L’article est intéressant et éclaire quelque peu sur la situation équatorienne. Il est vrai que les manifestations de ces derniers jours ont rassemblé essentiellement les classes moyennes contre la mise en oeuvre d’un système d’imposition qui me semble somme toute assez juste.

Ceci dit cet article, me semble-t-il, passe à coté d’un éléments essentiel du gouvernement de Correa, son manque de concertation sociale. Ce gouvernement a tendance à imposer des lois (souvent depuis l’exécutif, le pouvoir législatif n’ayant que très peu de poids) sans consultations ni information préalables, de telle sorte que, concernant cette loi, beaucoup de petits paysans craignent, à tort il me semble, que soient confisqués leurs terres communautaires.

Enfin, Rafael Correa n’est pas de gauche radicale et il ne l’a jamais été. J’aimerais savoir quels sont les éléments qui permettent à l’auteur de lancer une telle affirmation. La Revolución Ciudadana est un processus post-néoliberal, certes, mais pas post-capitaliste.

Rafael Correa le disait lui—même dans un entrevue al Telegrafo : "El modelo de acumulación no lo hemos podido cambiar drásticamente. Básicamente estamos haciendo mejor las cosas con el mismo modelo de acumulación, antes que cambiarlo, porque no es nuestro deseo perjudicar a los ricos, pero sí es nuestra intención tener una sociedad más justa y equitativa.".

En francais, cela donne "Nous n’avons pas pu modifier radicalement le modèle d’accumulations. Schématiquement, nous faisons mieux les choses en gardant le même modèle d’accumulation, avant de pouvoir en changer, parce que notre souhait n’est pas de nuire aux riches, mais bien de construire une société plus juste et plus égalitaire".

Cette poursuite d’un modèle capitaliste "social", et non de gauche radicale, est flagrant lorsqu’on analyse la Ley de tierras y Territorios qui régit l’activité agricole ; en effet, aucune réforme agraire n’est en vue. De même lorsqu’on s’intéresse à la situation des mines où sont exploitées les ressources naturelles et les travailleurs au mépris des conséquences sociales et environnementales. Pcq, conformément à la conception capitaliste, ces conséquences, aussi désastreuses soient elles, ne sont que de simples externalités qui n’entrent pas dans le calcul cout-bénéfice. Le profit pour l’exploitant, les pertes sociales, environnementales pour la collectivité.

17/06/2015 19:28 par RV

Merci pour cet article
je vous invite à lire celui de Martine Billard qui donne quelques chiffres fort éclairant
http://www.martine-billard.fr/post/2015/06/15/Equateur-%3A-tentative-de-d%C3%A9stabilisation-du-gouvernement-de-Correa

20/06/2015 02:32 par DePassage

Deux articles intéressant traduit par Françoise Lopez de Cuba Si France Provence :

Equateur : POURQUOI L’ATTAQUE CONTRE Rafaël Correa ?

Equateur : 10 CLEFS POUR CONNAITRE LE PROJET DE LOI SUR LES SUCCESSIONS

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