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Tunisie- Transition : bilan confus ou rêve brisé ?

Il y a huit mois, nous avons publié un article intitulé « transition à mi-parcours : bilan mitigé ». Aujourd’hui, quinze mois après la chute de la dictature, nous affirmons qu’il est confus. Agissons pour que le bilan de la seconde transition ne soit pas catastrophique…

"Le monde ne sera sauvé, s’il peut l’être, que par des insoumis." André Gide

Avons-nous suffisamment de recul pour procéder à un exercice objectif d’évaluation d’une transition imposée et de ses acteurs autoproclamés ? Sommes-nous capables d’engager une réflexion sur un vécu euphorisant à ses débuts et un futur plein d’incertitudes ? Quelques que soient les réponses possibles, une gymnastique intellectuelle délicate et difficile s’avère nécessaire pour faire le point sur les actes importants, les décisions prises ou non prises, ainsi que pour décortiquer et analyser le processus entamé afin de "débenaliser" la politique et "détrabelsiser" l’économie du pays. En outre, l’exercice exige de notre part des propositions adéquates en vue de poursuivre la marche vers l’instauration et la durabilité de la légitimité / impartialité de l’Etat de droit. Cette démarche n’a nullement la prétention d’être exhaustive et intégralement objective, elle se contentera d’établir le bilan d’une année sur des sujets essentiels afin de marquer le cadrage du Futur tunisien. Nous nous attarderons sur les questions politiques, la gestion de la crise de notre voisin du Sud, et le dérapage économique annoncé accompagné du désenchantement local.

La transition peut être scindée en trois périodes :

i- période post 14 janvier caractérisée par un refus total de la population du pouvoir issu d’un coup d’Etat constitutionnel confirmant Mohamed Gannouchi comme Premier Ministre. Ce dernier a été très rapidement contesté par les rassemblements des forces de gauche appelés Kasbah 1 et Kasbah 2 qui ont fini par dégager le locataire d’Al Kasbah. L’action gouvernementale de cette période (14 janvier - début mars) a été marquée par la décision de renoncer à la Constitution de 1959 et l’appel à une Constituante afin de rédiger principalement une nouvelle Constitution et installer une légitimité transitoire.

ii-période allant du dégagement de Ghannouchi jusqu’aux élections du 23 octobre 2011. Béji Caïd Essebsi a dirigé la deuxième partie de cette deuxième étape. Notre évaluation porte principalement sur cette période.

iii-Période post élections du 23 octobre dernier à ce jour. Dans un article précédent intitulé « Bilan de la Constituante : 120 jours gâchés ! » nous avons établi un bilan et une analyse du fonctionnement de la Constituante. Comme le titre l’indique, rien de consistant ou de concret n’a été entrepris. Quant à l’action gouvernementale, elle est brouillée par des messages contradictoires en apparence mais visant à créer la diversion et centrer le « débat » sur des questions anachroniques en lieu et place d’un vrai projet socio-économique prenant en compte les difficultés du pays réel. A la date d’aujourd’hui, le gouvernement Jbali n’est pas encore parvenu à présenter une loi de finances complémentaire. Cette étape a vu l’émergence des mouvements salafistes-jihadistes qui agissent en toute impunité et paralysent le fonctionnement normal du pays. Faut-il croire qu’il a là une stratégie du pire pour pousser le peuple à la résignation et l’acceptation du fait accompli (régime théocratique). Cependant, cette stratégie rencontre une vive opposition dans la population qui se mobilise. En attestent les nombreuses manifestations et meetings dans toutes les grandes villes du pays. Les dernières déclarations de Rached Ghannouchi, chef d’Ennahdha, principal parti au pouvoir concernant le renoncement à la Chariaa résulte de la mobilisation populaire. En définitive, cette période est caractérisée par le sur-place du gouvernement et la déstructuration progressive des institutions. L’Institut National des Statistiques exemplifie cette affirmation. L’INS refusant toute manipulation des chiffres de l’inflation a été l’objet de réprimandes de la part du pouvoir en chassant son directeur général.

La constituante : erreur stratégique, manoeuvre politique et non fatalité

L’option de la Constituante pour réinstaller la légitimité après l’implosion du régime illégitime de Ben Ali constitue le fait marquant de cette transition et certainement l’acte le plus décisif pour l’avenir de la Tunisie. Le choix de cette feuille de route au détriment de l’option Référendaire réclamée par plus de la moitié de la population, plus d’une cinquantaine de partis politiques et surtout par l’écrasante majorité des intellectuels indépendants, signe, à notre avis, l’absence d’une lecture visionnaire de notre pays. L’optique référendaire, solution, peut-être moins spectaculaire dans les mots et l’émotion, mais plus démocratique, facile, rapide, se serait révélée garde-fou contre l’inconnu et pratique réellement citoyenne en phase avec les demandes du peuple tunisien. Cette décision a provoqué un découplage total et brutal entre la classe politique pressée d’accaparer le pouvoir et la population à la recherche d’une autre alternative dans la conception des prises de décision et de forme de gouvernance. Le faible taux d’inscription sur les listes électorales en est une preuve éclatante et indiscutable, ce qui a poussé la fameuse commission indépendante pour les élections à prolonger ad infinitum les délais d’inscription et à autoriser tout citoyen et citoyenne à voter et in fine à les inscrire d’office au besoin ! Questions évidentes : pourquoi toute cette perte de temps et pourquoi toute cette perte d’argent ? Le peuple tunisien est en droit d’exiger des comptes aux décideurs de cette haute instance.

Les élections du 23 octobre 2011 ont dégagé une majorité grâce à l’amateurisme ou la connivence de nos instances « indépendantes » issues de la transition. La majorité « guignolesque » et anti-historique cherche, à présent, par tous moyens, à capter l’ensemble des pouvoirs pour soi-disant asseoir une autorité forte en vue d’affronter les difficultés qui assaillent et paralysent le pays.

Le choix d’une Constituante censée tracer un parcours démocratique, cohérent et adéquat, demeure, à notre avis, une aberration et une imposture. La composition de cette institution corrobore nos affirmations : rappelons l’image du 23 novembre, jour de l’installation de la Constituante de tous ces hommes et femmes compétents à l’extérieur, derrière les grilles du palais du Bardo alors qu’ils auraient dû être appelés à y siéger ! Quel gâchis, quelle honte pour la Tunisie sous les caméras du monde entier !

Aberration : le système électoral retenu par l’ISROR « dinosaure » pour la Constituante préconisant un vote à un seul tour et à la proportionnelle a réduit à néant plus de la moitié des voix et a privilégié sans conteste les partis dominants eu égard au nombre de partis en présence et de listes indépendantes (1600). Ce choix relève de l’incompétence, de l’intrigue et /ou du calcul. Ainsi, la proportionnelle, dépouillée de son caractère juste, n’était que vitrine de communication et de démagogie comme la parité homme/femme. Ce mode de scrutin a favorisé, à l’évidence, les partis politiques disposant de moyens financiers et logistiques importants leur permettant de mobiliser et intéresser leurs partisans de même l’électorat captif.

Imposture : le peuple se voit déjà transformé en figurant passif d’une comédie constitutionnelle écrite d’avance sans sa participation au profit d’une classe politique qui n’a en rien ou très peu pris part au changement. Est-ce pour un tel "avenir" que la jeunesse s’est sacrifiée ? Est-ce pour cela que le peuple tunisien a adhéré à la révolution et s’est engagé … pour subir encore une fois un régime totalitaire, sans vision socio-économique, avec un seul projet : l’anéantissement des acquis républicains et sociétaux de la Tunisie depuis la libération du pays du colonialisme.

Cet état de fait, imposé au peuple par un premier ministre dégagé par les tunisiens pour sa connivence avec le régime fasciste benaliste, comme alternative unique aurait dû être interrompu par le second premier ministre qui a su sauver les acquis du soulèvement et assuré une transition au moindre coût. Béji Caïd Essebsi avait les moyens, l’influence et le charisme nécessaires pour convaincre l’ISROR de l’opportunité d’interrompre cette feuille de route au profit d’une autre plus réaliste, juste et réfléchie tenant compte des conditions objectives du pays et de l’éclatement du paysage politique (120 partis !). Pourquoi cet homme averti ayant côtoyé les grands de ce Monde s’est-il contenté d’exécuter avec brio un agenda auquel il n’aurait pas dû adhérer ? A-t-il subi des pressions ? De la part de qui, pourquoi et à quelles fins ? L’Histoire le jugera. Il doit s’expliquer devant le peuple tunisien surtout s’il a l’intention de rester acteur de la vie politique tunisienne. Pour tout dire, n’est pas Bourguiba qui veut !
La classe politique au pouvoir est-elle en mesure de redresser la situation en réduisant volontairement la durée de cette Constituante ? Acceptera-t-elle de restituer la parole au peuple pour qu’il choisisse son futur régime politique et adopte son propre projet de société ? Cet acte républicain, s’il se concrétise, pourrait redonner aux tunisiens et tunisiennes le goût et la volonté de l’engagement politique. Sinon, une seule alternative s’offrira au peuple : faire sa révolution, sa vraie révolution citoyenne quelques soient les coûts, les épreuves et les sacrifices.

Réinstallation de l’autorité de l’Etat sans dérive autoritaire : une urgence

L’aveuglement du pouvoir concernant la gestion du territoire a généré une zone d’ombre durant la première transition. Pourquoi le pouvoir intérimaire s’est-il empressé de dissoudre les conseils municipaux pour les remplacer par des conseils désignés, des appendices des partis ? Cette dérive, en apparence, démarche non réfléchie et précipitée, fût en réalité dictée par des considérations politiciennes et électoralistes. Les nouveaux locataires peu préparés à la gestion des affaires publiques se sont illustrés par des interventions semant le doute sur leur capacité d’appréciation des situations. Les villes et villages tunisiens sont devenus des déchèteries à ciel ouvert, des dépotoirs d’ordures et de gravats, les constructions anarchiques et illégales se multipliant à un rythme inquiétant au vu et au su de toutes les autorités du pays. De plus, certaines personnes mal intentionnées empiètent sur les domaines publics (routier, maritime, espaces verts). Nos Cités se transforment en bidonvilles. Ce dérapage sans précédent dans l’histoire de la Tunisie remet en cause nos acquis en matière d’urbanisme et de salubrité publique. A cela s’ajoute la mafia organisée du commerce informel qui a transformé les trottoirs, chaussées et espaces publics en marchés permanents. La police municipale et ses agents d’application de règlements brillent par leur "invisibilité" ! Dérives et incivilités deviennent la norme, d’où la difficulté pour les prochains conseils municipaux à redresser la situation. L’Etat devra rapidement définir une stratégie et des solutions de sortie de ce gouffre de non droit. Ignorer cet état de fait en laissant les pouvoirs locaux se débrouiller revient à condamner nos villes à l’anarchie et les livrer à la mafia. Comment prétendre faire de la Tunisie une destination touristique privilégiée avec des villes-bidonvilles, sales, dépouillées de leurs équipements urbains.

Gestion désastreuse des biens mal acquis et urgence de repenser une économie à la dérive

"La trabelsisation" de l’économie tunisienne s’est traduite par la confiscation de pans entiers de l’économie : terrains, biens immobiliers, exploitations agricoles, carrières, entreprises publiques avec la complicité active et l’assistance d’une petite minorité de hauts dirigeants-zélés. Selon les experts, ce pillage représente au moins les deux-cinquièmes de l’économie du pays. La Commission chargée de confiscation des biens, malgré la bonne volonté de ses membres, a échoué dans sa méthodologie d’attaque de ce dossier épineux. Cette instance aurait dû établir en toute urgence un rapport préliminaire d’information et d’explication sur les moyens utilisés par le clan pour s’approprier en toute impunité et dans la durée tous ces biens appartenant majoritairement à l’Etat. Ce rapport aurait permis de dégager une nouvelle approche, plus efficace, suite à un débat national pour solutionner ce dossier délicat. L’inexpérience de cette commission, en dépit de la présence de sommités universitaires et de professionnels, a provoqué des pertes énormes pour l’économie tunisienne. Que compte faire l’Etat tunisien des 285 entreprises récupérées ? Les revendre, mais dans quelles conditions ? Les garder en attendant un débat national sur cette question ? Que fait l’autorité publique pour aider les administrateurs judicaires en charge de ces entreprises en difficulté (grèves, sit-in, absence de trésorerie, cadres dirigeants peu coopératifs, etc..) ? Sont-ils outillés pour préserver ce patrimoine de l’Etat et les postes d’emploi ? Laisser ces sociétés encore sous contrôle judicaire ne risque-t-il pas d’anéantir tout espoir de redynamisation de ces entités ? Le Gouvernement ferait bien d’engager une réflexion globale sur la confiscation des biens, cadeau empoisonné qui achèvera l’économie tunisienne si ces entreprises continuent d’être gérées au jour le jour. La commission de confiscation a montré ses limites compte tenu de ses vagues attributions, de sa courte durée de vie (6 mois) et de sa configuration, dans sa capacité à apporter une solution optimale au problème dans son ensemble.

Afin d’éviter des arrangements douteux, il est urgent de convoquer une conférence nationale sur ce sujet pour : i- faire l’état des lieux et tirer les conclusions sur l’implication des institutions de l’Etat dans ce dérapage, ii- examiner les propositions du gouvernement en matière d’assainissement de ces entreprises, iii- établir un cadre institutionnel pour la gestion de ce patrimoine et, éventuellement, les modalités de cession de certaines sociétés, iv- mettre en place des mécanismes de contrôle et d’audit pour préserver ce patrimoine reconquis, v- créer un fonds d’investissement pour les zones déshéritées avec les actifs des biens confisqués, manière de rendre justice aux oubliés/spoliés du dictateur/usurpateur Ben Ali.

Les déficits publics et ceux de la balance des paiements, conséquences de la "trabelsisation" de l’économie

La mafia tunisienne a non seulement mis la main sur les principales entreprises du pays, mais aussi ouvert l’économie tunisienne à l’investissement direct étranger (IDE) non exportateur. Ce concept et cette stratégie prônés et exécutés via la vente des "bijoux de famille" (cimenteries, cession d’une part importante du capital de Tunisie Télécom, concessions de téléphonie, banques, assurances, tourisme, etc..) sont imputables essentiellement à Ben Ali avec l’aide des institutions internationales. Cette ouverture pose de sérieux problèmes à la balance des paiements de la Tunisie. Des études récentes se basant sur les statistiques de l’INS montrent que, pour la période comprise entre 2000 et 2008, les dividendes exportés ont été multipliés par 3,47 alors que le PIB ne l’a été que par 1,85. Cette situation résulte d’une politique de liquidation de tous les projets rentables au profit de l’investissement direct étranger. Ces IDE non-exportateurs participent à l’endettement et creusent le déficit de la balance des paiements. Ces IDE fabriquent l’appauvrissement du pays. Est-ce un hasard ou une pratique mûrement réfléchie par Ben Ali et son clan ? Les tunisiens se demandent si ces investisseurs étrangers sont des sociétés-écrans servant d’abri au clan mafieux. Le gouvernement provisoire aurait dû diligenter un audit indépendant pour connaître la vérité sur ces IDE. A son insu, le peuple tunisien serait en train de payer environ 2 Milliards, voire plus, de dollars par an en tant que bénéfices exportés des IDE au profit du clan mafieux et ainsi lui permettre un exil doré. L’Etat tunisien devrait s’atteler sérieusement aux IDE, car sont en jeu sa crédibilité et l’intérêt national. La Tunisie est en droit de nationaliser les entreprises cédées d’une manière peu transparente aux investisseurs soi-disant étrangers.

Mesures préventives nécessaires pour éviter au pays le calvaire grec :

i-interdiction du déficit public, seul moyen pour nous éviter gaspillage et projets "bidons" et nous permettre d’avoir un meilleur recouvrement fiscal en criminalisant la fuite fiscale ;
ii- obligation pour la Banque Centrale de garantir un solde positif, au pire nul, de l’encours de la balance des paiements, unique paravent de notre souveraineté et indépendance nationale (l’épargne nationale pourrait suffire avec un peu d’imagination …).
Ainsi, ces deux règles d’or, garde-fous, engendreront une nouvelle conception de développement économique et social fondée sur une juste redistribution des richesses du pays et l’épargne nationale afin de nous éloigner du cercle infernal de l’endettement, porte ouverte au néocolonialisme et à l’asservissement du peuple tunisien. Les nouveaux prédateurs, de l’économie libérale, particulièrement ceux des pays du golfe, nous guettent, prêts à nous achever.
A partir de cette année 2012, nous serons confrontés à des pressions internes provenant des zones de l’intérieur (demande d’investissement démesurée et probablement non rentable), et à des pressions externes venant de la montée en puissance de nos IDE non exportateurs. Ajoutons à cela l’effondrement du secteur du tourisme, l’impact négatif de la guerre civile larvée en Libye, la crise de la dette souveraine européenne et du risque de l’implosion de zone Euro, et les incertitudes de la deuxième transition qui pourraient provoquer le blocage de l’économie tunisienne. Tous ces facteurs vont aggraver le déficit de la balance des paiements qui avoisinera les 7 à 8 % du PIB, alors que nous réclamons le déficit zéro.

Se prémunir de la "somalisation" de notre voisin du Sud

Le concept de non ingérence dans les affaires internes de nos voisins pourrait entraîner le pire si nous continuons à observer religieusement ce dogme. La Libye a subi et subit toujours une déstabilisation plus grave encore que celle imposée à l’Irak et orchestrée par des intérêts étrangers pour des raisons géopolitiques. Aujourd’hui, nous pouvons affirmer que la Libye est devenue le second Irak dans la partie occidentale du Monde Arabe. Cette seconde articulation et plateforme de déstabilisation régionale aurait pour objectif de justifier dans le futur des opérations militaires en Afrique subsaharienne et certainement en Afrique du Nord.

La Tunisie de la transition (Gouvernement et surtout Partis Politiques) est restée et reste muette : rares, voire absentes ses prises de position sur cette guerre civile. Les tunisiens s’étonnent des hésitations, atermoiements de la part des autorités pour condamner la destruction de la Libye - erreur historique en soi. Cette guerre civile a préparé le lit de la "Somalisation" de notre voisin du Sud et l’installation définitive des forces d’El QAIDA et la circulation d’armements voués à l’instabilité permanente des Etats de la région et de l’Afrique entière. La Tunisie devra peser rapidement sur le processus de pacification et de réconciliation de la Libye, condition primordiale de la stabilisation de notre propre pays. Seuls l’Egypte, la Tunisie, l’Algérie et peut être le Tchad sont à même de pousser les libyens vers une solution pérenne qui préserverait les intérêts du peuple libyen et ceux de leurs voisins. L’attentisme renforce l’insécurité des quatre pays et de leur périphérie (Afrique subsaharienne) et met en jeu leur indépendance. Les moyens pacifiques restent préférables à une intervention militaire maghrébine qui pourrait, pourtant, devenir unique alternative. La sous-région toute entière se trouve menacée de déstructuration, porte grand’ouverte à l’obscurantisme et à la violence, plus encore à l’inconnu et à l’abîme.

L’institution militaire, la banque centrale et l’administration tunisienne : belle surprise et fierté des tunisiens

L’institution militaire, dès le déclenchement des événements en décembre 2010, a joué un rôle de premier ordre surtout le 14 janvier 2011 en faisant avorter le coup d’Etat contre la République en dégageant Ben Ali et son clan mafieux. L’Armée tunisienne a compensé, lors de la stabilisation sécuritaire du pays, le défaut voire l’absence des forces de l’ordre. Nous devons aussi reconnaitre à l’armée la réussite logistique des élections. Nul ne peut nier l’efficacité de cette institution pour défendre le territoire tunisien et surtout son apport en matière de solidarité avec nos voisins libyens. Cette institution a prouvé son "républicanisme", elle doit jouer un rôle-clé pour accompagner la démocratisation du pays et surtout la non ingérence religieuse dans la vie politique. La future Constitution devra confirmer ce rôle de préservation du modèle républicain et de ses institutions.

Les tunisiens sont souvent très critiques à l’égard de l’administration publique. Cependant cette année de transition a permis à tous d’apprécier le rôle positif joué par les fonctionnaires et les structures administratives dans l’amortissement de la crise. La fonction publique a prouvé son indépendance par rapport aux politiques et esquissé le prototype d’une fonction publique non partisane, démarche encourageante pour éviter la politisation non souhaitée de l’Administration. Cette période a favorisé l’émergence d’une vraie administration républicaine.

La Banque Centrale Tunisienne (BCT) a su intelligemment, grâce à ses compétences, préserver durant la transition son indépendance à la fois politique et économique. Son indépendance politique s’est traduite par l’absence d’interférence du pouvoir politique sur ses prises de décision. L’indépendance économique s’est concrétisée à la fois par le libre choix des objectifs et le refus de financer le déficit budgétaire par la création monétaire, ce qui a permis de stabiliser l’inflation à des niveaux raisonnables avec pour conséquence le maintien du pouvoir d’achat des classes moyennes et modestes. La BCT indépendante du pouvoir politique trouvera les moyens de défendre la frange vulnérable de la population en barrant la route à l’irrésistible attraction de la planche à billets.

La Tunisie réconciliée à l’intérieur, sera plus forte à l’extérieur pour peser davantage sur la scène arabe, africaine et internationale et offrir à nouveau au Monde un message universel de dignité et d’insoumission. A notre avis, trois conditions sont à satisfaire pour atteindre cet objectif :

i- impliquer sérieusement le peuple tunisien dans la prise de décision et surtout celle concernant le projet de société à mettre en place,

ii- assainir le pays des dérives politiques benalistes et "détrabelsisation" de l’économie,

iii- garantir l’indépendance de la troïka institutionnelle (Administration, Armée et BCT).

Il y a huit mois, nous avons publié un article intitulé « transition à mi-parcours : bilan mitigé ». Aujourd’hui, quinze mois après la chute de la dictature, nous affirmons qu’il est confus. Agissons pour que le bilan de la seconde transition ne soit pas catastrophique…
Pour terminer et en paraphrasant un grand Monsieur, Stéphane Hessel, nous dirons à ceux et celles en train de créer la Tunisie de demain, aux insoumis et insoumises : "construire, c’e st résister. Résister, c’est construire" et aux commerçants de la politique qu’ils dégagent...

Mustapha STAMBOULI, républicain

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