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Un peu d’histoire #10 : [DOSSIER ESPAGNE] : La guerre civile espagnole et les Brigades internationales – partie 1/3

A l’image du dossier qui traitait du (vrai) rôle joué par l’URSS durant la Seconde guerre mondiale, j’aborde aujourd’hui un autre événement central pour l’Europe qui s’est tenu en amont de ce conflit. La guerre civile espagnole a meurtri tout un pays, allant même jusqu’à diviser les familles, et a abouti à une dictature fascisante qui dura jusqu’en 1975, année de la mort de Franco. Le dossier sera divisé en trois parties. La première traitera de l’avant guerre-civile, en revenant notamment sur la création de la Seconde République espagnole et les mesures des gouvernements. La deuxième partie sera consacrée à la guerre civile en elle-même. Les différentes phases du mouvement ainsi que les soutiens dont a bénéficié chaque camp. Les Brigades internationales ne seront pas directement évoquées dans la seconde partie, puisqu’elles seront l’objet de la troisième et dernière partie.

Le 14 avril 1931 la Seconde République espagnole est créée. Elle succède au régime dictatorial de Miguel Primo de Rivera, père du fondateur de la Phalange, mouvement dont on reparlera lors de la Guerre civile, et à la fuite du roi Alphonse XIII. La Seconde République est proclamée après la victoire de la gauche aux élections municipales. Sa Constitution, adoptée quelques mois plus tard le 9 décembre 1931, définit, dans son article Ier que « l’Espagne est une République démocratique de travailleurs de toutes catégories organisée sous le régime de la Liberté et de la Justice [...]. »

Que se passe-t-il entre la proclamation de la République et les élections du 19 novembre 1933 ?

Plusieurs réformes sont entreprises par le gouvernement qui regroupe alors plusieurs forces républicaines, socialistes et régionalistes – comme le Parti républicain catalan. Deux hommes sont alors à la tête du pays : Niceto Alcala-Zamora le président qui symbolise la Nation et Manuel Azana le Premier ministre qui gouverne.

Parmi les réformes mises en place par les républicains, il y a tout d’abord une réforme de l’armée. Le nombre d’officiers est ainsi réduit de plus de la moitié. En revanche les soldats gagnent à ce moment là le droit de vote, tout comme les femmes.

Mais c’est surtout au niveau de l’éducation que de grands progrès sont réalisés. Le budget augmente considérablement et l’accent est mis sur l’alphabétisation du pays. Surtout le gouvernement concentre ses efforts sur les écoles dans les campagnes. Plusieurs milliers d’écoles primaires sont créées en deux ans, ainsi que près de 7 000 postes d’instituteurs. Dans le même temps le projet de séparation de l’Eglise et de l’Etat s’accompagne d’autres mesures comme la suppression de l’ordre des Jésuites, entraînant la fermeture d’un certain nombre d’écoles tenues par ceux-ci ou par d’autres ordres religieux. Mais globalement le secteur de l’éducation est renforcé.

En 1932 un projet de réforme agraire est présenté. Il prévoit l’expropriation des grands propriétaires terriens et la répartition des terres parmi les paysans. Toutefois cette réforme met du temps à être adoptée et le bilan en reste très mitigé. Autre mesure notable : la reconnaissance d’une certaine autonomie de la Catalogne. La région est, par exemple, autorisée à élire une Assemblée. Enfin, au niveau social, la durée journalière du temps de travail est réduite à huit heures.

Toutes ces mesures entraînent des résistances et des oppositions au gouvernement, à droite surtout mais aussi du côté des anarchistes qui estiment que le gouvernement ne va pas assez loin. Bien avant Franco le général Sanjurjo tente un pronunciamiento (coup d’état) dès 1932. Il échoue, est arrêté, condamné à mort. Cette peine se commue finalement en exil au Portugal, pays dont il reviendra pour participer à la Guerre civile qui débutait alors. Mais son avion s’écrasa le 20 juillet 1936. Certains accuseront Franco d’être à l’origine de cet incident.

Le 19 novembre 1933 : la droite revient au pouvoir

Il n’aura pas fallu attendre longtemps pour que les partis de droite reprennent le pouvoir. Dès le 19 novembre 1933, à l’issue des élections générales la Confédération espagnole des droites autonomes (CEDA), créée en 1931) remporte le scrutin et obtient 115 sièges. Avec 112 parlementaires, le Parti républicain radical talonne de peu la CEDA. Les deux formations décident de s’unir afin de former une coalition. Troisième de ces élections le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) ne dispose que de 59 sièges.

Les partis de droite au pouvoir vont mettre un point d’honneur à déconstruire les mesures mises en place par la majorité précédente. Exit ainsi la réforme agraire ou bien l’autonomie de la Catalogne. Et, en 1934, alors que la région des Asturies connaît des grèves importantes dans le secteur minier,la situation devient rapidement révolutionnaire. Pendant un court laps de temps (du 5 au 18 octobre) une éphémère République des ouvriers et paysans des Asturies est même instaurée. Sa proclamation s’accompagne de la création d’une Armée rouge et de la constitution d’un comité révolutionnaire. Face à ça le gouvernement décide d’employer la manière forte. La terrible répression est orchestrée par... Franco (déjà).

En parallèle la Phalange espagnole, mouvement politique fasciste, financée par l’Italie, poursuit son développement. Fondé en 1933, mais n’ayant obtenu qu’un seul député, cette organisation reste, lors de ses premiers mois d’existence, anodine dans le paysage politique espagnol. Dirigée par José Antonio Primo de Rivera, fils de l’ancien dictateur, la Phalange va se refuser à une alliance avec la CEDA lors des élections de février 1936.

La courte expérience du Front populaire espagnol

Devant la montée du nazisme et du fascisme en Europe, et en particulier après la victoire d’Hitler en Allemagne, le Komintern, l’Internationale communiste, prend une décision importante lors de son 7ème Congrès. Désormais les partis communistes devront s’unir avec les autres forces de gauche. Cela va conduire à la création en Espagne, comme en France, des Fronts populaires. En Espagne celui-ci est constitué de plusieurs partis de gauche et d’organisations ouvrières, même les anarchistes apportent un soutien critique au Front populaire car la libération des prisonniers politiques est inscrit dans le programme- acté le 15 janvier 1936.

Face au Front populaire se dresse une coalition de la droite : le Front national. Le scrutin qui se déroule en février 1936 est très serré et démontre la division qui règne déjà en Espagne. D’autant plus que le système électoral espagnol est constitué d’une telle manière que les faibles écarts en terme de pourcentages ne se traduisent pas en nombre de députés. Pour la droite et les milieux conservateurs la victoire du Front populaire est une catastrophe synonyme de progression du communisme.

Le président Niceto Alcala-Zamora est destitué et remplacé par Manuel Azana, l’ancien Premier ministre entre 1931 et 1933. Comme prévu ce sont près de 30 000 prisonniers politiques (dont une grande partie d’anarchistes) qui sont libérés, des travailleurs licenciés retrouvent leur poste, et la réforme agraire est reprise. De nombreuses mobilisations sociales, à l’image de ce qu’il se passera en France par la suite, sont menées afin de rappeler au gouvernement ses engagements.

D’ autre côté la violence réapparaît dans les rues. Les oppositions sont de plus en plus vives, elles se traduisent notamment par des assassinats des partisans des deux camps. Entre les élections et le mois de juin 1936 on dénombre ainsi plus de 260 tués, plus de 1 200 blessés, des centaines de bâtiments détruits ou endommagés et plus de 140 attentats à la bombe.

Le 13 juillet se produit un événement qui servira de prétexte aux militaires pour débuter leur coup d’état : José Calvo Sotelo, chef de file de la droite à l’Assemblée est assassiné le 13 juillet 1936. Quelques jours plus tard, le 17 juillet 1936, des unités de l’armée espagnole, basées au Maroc se soulèvent contre le gouvernement légitime.

(A suivre...)

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