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Élections régionales de mars 2010, acte II : résultat d’une mascarade élective supplémentaire au bal de la démocrature.

tableau : The Masquerade www.flickr.com/photos/osm_art

Au tout début de ce mois, j’avais publié sur internet un article intitulé : «  Les élections régionales de mars 2010 : un voile démocratique peut cacher une dictature. »

Voici en quelque sorte le second tour…

Je fais partie de ces quelques millions de personnes qui ne se sont même pas inscrites sur les listes électorales, ces brebis galeuses que les ENArchistes et les technocrates considèrent comme trop stupides pour aller s’inscrire. Même pas reconnu juridiquement comme abstentionniste, j’attire donc les foudres des pratiquants de la religion démocratique, qui viennent me dire que mon refus catégorique du vote dans cette république rend ma critique systémique illégitime, que je dois voter pour être en mesure de pouvoir m’exprimer. Faut-il se tirer une balle dans le pied pour pouvoir dire que ça fait mal ? Pourtant, que l’élection soit municipale, régionale, législative, présidentielle ou européenne, il n’y aura jamais de changement (social et populaire) possible par les urnes telles qu’elles sont organisées à l’heure actuelle, car elles constituent un consensus citoyen tacite, un sentiment collectif généralisé d’acceptation à ce système de domination et de spoliation légalement organisée du peuple.

«  Ils ne sont grands que parce que nous sommes à genoux ». Cette citation d’Etienne de la Boétie (1530-1563) vient nous rappeler que de tous temps, le but d’un pouvoir politique (monarchique ou républicain) est d’assurer le contrôle et la servitude de son peuple s’il ne veut pas péricliter. Pour ce faire, ce pouvoir doit obtenir le consentement de son peuple pour ne pas qu’il se révolte, de gré ou de force, cela lui permet alors d’asservir et exploiter toute sa population en toute légitimité. Pour obtenir ce consentement, la recette est simple. Il suffit d’incorporer des années de propagande, et d’endoctrinement journalistique avec la sauce du mythe démocratique qui sévit aujourd’hui dans tous les pays subissant la globalisation néolibérale. En fin de cuisson, une fois que l’on a enlevé au peuple sa liberté de penser par lui-même et que les cerveaux sont atrophiés, prévoir quelques échéances électorales, des bus remplis de forces de l’ordre armées jusqu’aux dents (on ne sait jamais, la crise économique, le chômage, la précarité sont encore de mise même si les éléphants roses sont à l’exécutif des régions), un peu de foi dogmatique consumériste, une once d’émotivité dans les sujets traités sans débats public démocratiques, et enfin une bonne dose d’obscurantisme. Ne laissez surtout pas refroidir et mangez vous ça tout chaud devant votre poste de télévision à 13h. Pardon pour ces propos un peu hautains, mais le traitement des élections du 21 mars 2010 montre bien à quel point il est possible pour la démocrature politique et médiatique de masquer les vrais résultats du vote, qui n’est autre que le plébiscite du libéralisme en France.

En ce premier dimanche printanier de 2010, voila qu’une grande information semble retentir et faire vibrer les enceintes des machines cathodiques à décerveler : la gauche aurait largement remporté les élections régionales. Hum… gauche, vous dites ? Nous savions déjà , depuis François Mitterrand et ses privatisations plus nombreuses que celles de la droite, que la gauche en France ne désigne qu’un grand parti de masse, de fausse opposition et qui a épousé la doxa atlantiste néolibérale lorsque j’étais haut comme trois pommes, dans les années 1985. Assimiler le Parti Socialiste à la gauche de l’échiquier politique est un non sens. Je sais qu’en écrivant ces lignes, je ne vais pas attirer un large lectorat, pire, je vais attiser le feu et attirer les critiques des bobos ne voyant aucuns paradoxes à se dire de gauche tout en allant se gaver au resto puis écluser une bouteille de mauvais whisky en boîte à cent euros pour arroser ses amis le samedi soir. En criant gare à l’écologie en achetant du café commerce équitable du Kenya, en portant des ponchos importés par avion du Népal ou du Pérou. Mais je me lance quand-même dans la fosse aux lions. Le principal parti d’opposition ne fait plus que de l’antisarkozysme primaire, oubliant tout ou partie des revendications sociales, des résistances anticapitalistes au bénéfice des travailleurs et non au Medef et aux multinationales privées dont nos gouvernants sont souvent actionnaires…bref, ce parti n’est plus socialiste, il est cancéreux. En surface, les petits pantins du PS qui se félicitent de cette mascarade électorale, sont contre ce gouvernement ploutocratique. En substance, ceux-là même qui versent dans la conquête de parts de marchés encartés à la rose, voudraient juste que l’argent change de main, pas qu’il soit réparti égalitairement…

Bref, si l’on se penche sur les résultats de ce second tour, on observe un nombre total de 43 354 968 électeurs inscrits (1). Mais avec un taux d’abstention de 48.78%, seules 22 206 420 personnes sont allés voter. Or, au 1er janvier 2010, l’INSEE estime la population française totale à 65 447 374 personnes. Par un simple calcul de pourcentage, (nombre d’inscrits x 100 / population totale) on obtient que seuls 33.9% des français sont allés voter dimanche 21 mars. Le rapport est bien faible, surtout que le processus de dépouillement des voix ne tient pas compte du vote blanc pour le résultat final…
1 013 554 bulletins blancs passent donc à la trappe. En ne comptabilisant que les suffrages exprimés, (48.88%), voila comment la république oublie ainsi 51.12 % des électeurs inscrits qui se sont soit abstenus, soit qui ont voté blanc ! Si je ne m’abuse, c’est donc avec un électorat représentant à peine plus d’un tiers seulement de la population française (33.9%), et moins de la moitié des inscrits (48.8% des suffrages exprimés) que nos élus s’estiment légitimes pour gouverner les régions.

Ensuite, s’il y a quelque chose que les médias masquent dans l’analyse des résultats, c’est bien ce qui se cache derrière le rose bonbon du PS de cette carte de France. Au niveau national, si la «  gauche unie » remporte 54.3% des voix, que les alliances des partis de «  gauche » récupèrent la majorité des sièges, on ne peut pas affirmer que cette élection est le résultat d’une large défaite de la droite, contrairement à ce que titrent tous les journaux du jour. D’une part, la politique sécuritaire, les licenciements et le processus de démantèlement des services publics continueront de faire des ravages dans le paysage économique, et d’autre part, les valets ministres du sarkozysme vont pouvoir jouer sur la forte abstention pour la récupérer à leur compte. A un tel point qu’aujourd’hui lundi 22 mars 2010, Mr Copé estime qu’il est «  temps de solliciter des gens de droite » après la fausse politique d’ouverture. L’UMP a perdu les sièges régionaux, mais pas le pouvoir qu’elle a sur ces mêmes sièges. Elle ose clamer en public au premier tour que si les «  français » se sont abstenus, c’est à cause de leur mécontentement envers le PS, et qu’il n’y a donc pas eu de vote sanction. L’arrogance des politiques de l’UMP à rester perchés en haut de leur tour d’ivoire est telle qu’elle est à graver dans les livres d’histoire de la propagande. La droite extrême prend 36%, l’extrême droite frôle les 10%, où est la «  très large victoire de la gauche » ? Nulle part.

Dans un contexte où de plus en plus de gens se sentent spoliés et pillés par la politique sarkozyste, par ce virage imposé dans le libéralisme européen géré par les élites économiques de la planète, on ne peut que redouter une montée en flèche des votes frontistes. Le FN, qui semble se redorer le blason s’accommode en effet à merveille de cette défaite sarkozyste. 1 943 463 électeurs ont placé leur bulletin en faveur des listes du FN, et dans certaines régions de l’est de la France, ce même parti rafle 20% des suffrages exprimés. On sait à quoi à servi la mixture UMP que préparaient Éric Besson et le reste de la sarkozie depuis octobre autour du faux questionnement sur l’identité nationale, et de la politique fasciste de l’immigration. Il y a donc de fortes raisons de penser que, comme les frontistes redeviennent une force politique de troisième rang national, la politique autoritaire qui jusque là prévalait sur tous les plans, se renforcera d’ici 2012. D’ici là , j’espère avoir tort. Le socialisme représenté en politique en France est mort, et trop de gens lisent vérité sur les écrans pour que l’avenir soit à l’optimisme. La plupart des électeurs sont des gens qui votent pour l’ordre et la sécurité en recrachant toute la rhétorique de la peur qu’ils ont avalés en presses et journaux télévisés, l’autre moitié sont des gens qui votent à droite en pensant voter à gauche. De temps en temps, l’un bascule un peu plus que l’autre, et inversement à l’élection suivante. Et les médias, dont la force d’action quotidienne maintient le mythe d’un clivage politique gauche/droite, se régalent avidement de ces futilités idéologiques et versent volontiers de l’huile sur le feu en véhiculant l’idée que les masses sont stupides. «  Ceux qui ont crevé les yeux du peuple, lui reprochent d’être aveugle » (John Milton, 1642).

Samuel MOLEAUD
http://sam-articles.over-blog.com

(1) http://elections.interieur.gouv.fr/FE.html

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