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Iran : réponse à Jean-Luc Mélenchon.

illustration : www.farshidmesghali.com

Monsieur Mélenchon,

Dixit Debray, la fonction de l’intellectuel est de refroidir la fièvre, de ralentir les délais de réponse. Au risque de décevoir "l’opinion". On peut aussi parler d’autres thèmes. Ou même aller à contre-courant.

Malgré la répression sanglante des manifestants d’opposition en Iran, le président sortant a très probablement gagné les élections. Malgré des fraudes partielles mais insuffisantes pour remettre en cause la victoire d’une majorité d’électeurs. Le Figaro avait titré à la veille de ces élections sur le "pourquoi de sa popularité". Les deux correspondants du Washington Post concluaient dès le 15 juin "Le fait est que le peuple iranien a peut-être tout simplement choisi de réélire le Président Ahmadinejad" (http://www.legrandsoir.info/Le-peuple-iranien-s-exprime-Washington-Post.html )

Vous pouvez lire aussi l’article mesuré du 19 juin signé de Robert Fisk - journaliste de The Independent et qui fait autorité sur le Moyen Orient - sur ce qui se passe en Iran http://www.rebelion.org/noticia.php?id=87349 ("Peligrosa fusión entre realidad y fantasà­a en Iran"). Son analyse confirme ce que l’historien Richard Gott nous racontait après un voyage sur place. Il y a un fossé entre ce que l’Occident veut voir à travers ses médias, et la réalité profonde de l’Iran. Tant sur la réalité du vote que sur les reformes sociales entreprises en faveur de couches populaires que nous ne voyons pas, et pour cause, à la télé. Je parle d’un abîme sociologique entre un Téhéran américanisé (eh oui), où on parle beaucoup l’anglais et l’autre Iran, qui pense et qui vote, aussi...

Cela excuse-t-il qu’un Etat se défende, par la suite, en tirant dans la foule ? Personne n’appuie la répression, pas plus le président Chavez que vous. Pourquoi dire alors comme vous le faites si lapidairement comme pour mieux vous en démarquer, qu’il donne raison au président iranien ? Pour faire croire au lecteur qu’il appuie un massacre ? Vous ne donnez aucun autre élément à votre lecteur, ce qui est grave lorsqu’on connaît l’image construite par les médias du "Chavez dictateur", "assassin" et donc identifié à un Iran répressif.

J’imagine déjà votre protestation, celle que j’entends souvent à Paris : "soutenir le processus de Chavez, cela n’empêche de pouvoir le critiquer sur tel ou tel point, un soutien aveugle n’a pas de sens, nous ne sommes plus chez les stals ni le doigt sur la couture, etc... etc..."

Nous en sommes bien d’accord, Monsieur Mélenchon, mais ce qu’a dit Chavez, et nous espérons que vous saurez le transmettre avec autant de chaleur que votre rectificatif sur Bové, c’est ceci : une partie de la population qui perd des élections ne peut se substituer à la décision de la majorité, et on ne peut tolérer aucune ingérence en ce sens.

Fisk parle aussi de certaine ingérence : http://www.rebelion.org/noticia.php?id=87396. Pas vous, curieusement, ni de qui est ce candidat d’opposition, ou de qui vote pour lui, etc... Autant je partageais, admiratif, votre analyse sociologique, historique tout en résistance au discours dominant sur le Tibet et au chantage médiatique en faveur de ces potentats féodaux-theocratiques reçus en héros à Paris ou votre démontage de RSF, etc.. autant je regrette dans ce cas ce qui me semble relever du conformisme le plus primaire sous un bel élan laïc et aussi inattaquable que celui de Val ou Sarkozy.

Votre "islamisme égal fascisme", etc.. ne correspond guère à la réalité de la société iranienne ni de ses institutions, qui ne dépendent pas que du religieux. Le socle laïque et républicain auquel nous adhérons serait mieux servi par des réflexions plus analytiques, moins soumises à l’Église médiatique et aux papes qui semblent vous faire peur par leurs mises en demeure. Pourquoi ne pas leur répondre, à contre-courant, qu’il n’est pas normal que l’Occident, qui parle tant de démocratie électorale, refuse l’exercice de celle-ci dès lors que les résultats ne lui conviennent pas ? Pourquoi ne pas dénoncer ce circuit fermé des medias occidentaux, inquiétant pour l’avenir de la démocratie sur cette planète ? On en sait quelque chose ici, au Venezuela, ou récemment avec le cas Colom au Guatemala, dont on n’imagine pas une seconde, en Europe, les enjeux et la perversité mediatico-politique et dont le scénario réel est l’inverse de que nous ont dit les médias.

Accepter d’entrer dans le tribunal du parti de la presse et de l’argent, c’est déjà légitimer son "agenda". Projeter sur Chavez ce que vous croyez qu’il dit sans vérifier à la source est grave.

Coupé de notre réel, couplé aux médias de France, vous ne concevez que la politique extérieure de la république bolivarienne qu’en creux, comme pure dialectique négative "primaire, erronée".

"Les ennemis de nos ennemis sont nos amis", vous moquez-vous. Vous trouverez normal que pour comprendre le Parti de Gauche on étudie Robespierre, la Commune, Jaurès ou le Front Populaire . Sachez que le Venezuela a une Histoire, lui aussi, et que Bolivar en parlant de l’équilibre du monde, des deux tiers du monde, en organisant contre l’Empire naissant, un congrès de Panama (1826), se fichait des contingences électorales "Ahmadinejad" ou autres et se situait déjà dans une construction à long terme d’États souverains, indépendants et libres de coopérer entre eux. L’histoire laïque, multipolaire, s’avance sous des masques obligés. Celui de l’islamisme, du Hamas, du Hezbollah ou des islamistes iraniens ne sont que ceux d’États qui se cherchent, déjà en prise avec la globalisation capitaliste. Rabaisser le jacobinisme au niveau de Charlie-Hebdo, se fabriquer une identité politique en creux par rapport à tout ce qui fleure l’islamisme, c’est abdiquer l’initiative de l’Histoire en faveur des Obama. Dans une France qui a toujours éprouvé quelque difficulté à comprendre ce qui se passe aux limites d’un monde dont elle se croit encore le centre, votre discours aidera sans doute quelques militants du PG, déjà réticents face aux brèves références initiales à Chavez, à s’en éloigner un peu plus. Et sans doute à nous éloigner de vous.

Thierry Deronne

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