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L’esprit de Philadelphie. La justice sociale face au marché total - Alain Supiot.

Cet ouvrage - ce n’est pas si fréquent que cela - est dédié à la mémoire de Bruno Trentin, grand syndicaliste (à la CGIL qu’il dirigea) et homme politique communiste italien (né dans le Gers où son père Silvio, militant antifasciste, avait dû se réfugier), membre de la Résistance française. Cette dédicace réjouit et surprend un peu dans la mesure où Alain Supiot inscrit son analyse dans une optique réformiste : s’il pourfend de manière magistrale le capitalisme financier, il ne dénonce pas le capitalisme en tant que tel.
C’est à Philadelphie, le 10 mai 1944, qu’a été proclamée la première Déclaration internationale des droits à vocation universelle. Cette déclaration stipulait que :

a) le travail n’est pas une marchandise ;

b) la liberté d’expression et d’association est une condition indispensable d’un progrès continu ;

c) la pauvreté, où qu’elle existe, constitue un danger pour la prospérité de tous ;
La Conférence proclamait également que « les représentants des travailleurs et des employeurs, coopérant sur un pied d’égalité avec ceux des gouvernements, participent à de libres discussions et à des décisions de caractère démocratique en vue de promouvoir le bien commun. » Précédant de quatre ans la Déclaration universelle des droits de l’homme, ce texte entendait faire de la justice sociale l’une des pierres angulaires de l’ordre juridique international. Il s’agissait de libérer l’homme du besoin (« freedom from want »), dans une optique keynésienne qui liait de manière indissoluble justice sociale et prospérité économique.

C’est à tout autre film que nous assistons depuis les années soixante-dix. La foi dans l’infaillibilité des marchés financiers a remplacé la volonté de faire régner la justice dans la production et la répartition des richesses. Le capitalisme financier joue les peuples les uns contre les autres, ce qui entraîne de vastes mouvements de population, de l’exclusion, de la violence.

Pour l’auteur, il y a quelque chose de fasciste dans le nouvel ordre économique mondial. Il cite Hitler, pour qui « Les richesses, par la vertu d’une loi immanente, appartiennent à celui qui les conquiert. Ceci est conforme aux lois de la nature. » Mais les systèmes de démocratie parlementaire ne sauraient être dédouanés, dans la mesure où, selon Supiot, l’idéologie de la gestion scientifique n’a pas été l’apanage des pays totalitaires. L’Exposition universelle de Chicago en 1933 s’ouvrait sous l’égide du slogan : « La science trouve, l’industrie applique, l’homme s’adapte. » S’il ne s’adapte pas, il est dégraissé, purgé, considéré comme une maladie parasitaire.

Dans l’esprit de Philadelphie (Supiot rappelle que le nom de cette ville signifie en grec « amour fraternel »), les humains devaient jouir de la sécurité physique et économique et être « libérés de la terreur et de la misère ». Les libertés collectives devaient être respectées, ainsi que la solidarité et la démocratie sociale. Ces libertés fondamentales ont cédé la place à la libre circulation des capitaux et des marchandises et à la concurrence « libre et non faussée ». Au lieu d’indexer l’économie sur les besoins de l’homme, et la finance sur les besoins de l’économie, l’hyper capitalisme a indexé l’économie sur les exigences de la finance et a traité les hommes comme une "ressource" , du capital humain au service de l’économie.

L’esprit de Philadelphie a ainsi cédé la place à son exact contraire, « sous la double influence de la contre-révolution ultralibérale anglo-américaine et de la conversion des pays communistes à l’économie de marché. » Avec un peu d’optimisme, l’auteur estime que l’édification d’une Europe sociale est demeurée, malgré l’obstruction constante du Royaume-Uni, « un objectif partagé par tous les autres membres de la Communauté européenne jusqu’à l’élargissement de celle-ci aux anciens pays communistes. » La chute du Mur de Berlin a effectivement débouché sur une rupture fondamentale : en un tournemain, les fils des maîtres sont devenus les maîtres des fils, les meilleurs pratiquants du capitalisme nouvelle manière. Obéissant aux diktats de la finance, les politiques ont élargi l’Europe au lieu de la réunir, détruisant les bases fragiles du modèle social européen En foi de quoi, explique l’auteur, « on a plaqué l’économie de marché et le " dialogue social " sur des pays sans entrepreneurs et sans syndicats. » Ces pays sont passés en quelques semaines de la dictature du prolétariat à la dictature des marchés. Les États anciennement communistes sont devenus des « républiques des affaires », suivant ainsi le modèle des pays capitalistes, avec Berlusconi, l’homme le plus riche d’Italie, ou la France dominée par des avocats d’affaires autour du Pacte du Fouquet’s. De Dublin à Vladivostok, le vieux rêve de Hayek de démocratie limitée s’est accompli. Ainsi, en France, une alliance UMP/PS a foulé aux pieds le résultat du référendum de 2005 sur le TCE. Autant, dans les pays anciennement communistes, des dirigeants se sont mués en parfaits dirigeants capitalistes, autant on a pu voir, dans les pays d’Europe de l’Ouest d’anciens gauchistes devenir de parfaits néo-conservateurs, l’exemple le plus glorieux étant l’ancien maoïste Manuel Baroso.

En France, cette rupture proclamée s’est traduite par les visées d’une frange importante du patronat, sous l’égide de l’ancien communisant Denis Kessler, grand ami de Dominique Strauss-Kahn. « Défaire méthodiquement le programme du Conseil national de la Résistance », puis, au niveau européen comme ailleurs, dégager l’ordre " spontané " du Marché des contingences démocratiques, du pouvoir des urnes et des juges. En d’autres termes, soustraire à la sphère politique la répartition des richesses et la monnaie. Chez nous, la déréglementation des marchés financiers a été largement l’oeuvre du gouvernement Bérégovoy et l’importation du modèle anglo-américain d’entreprise celle du gouvernement de Lionel Jospin et de son ministre de l’économie Strauss-kahn (détaxation des stock-options, autorisation du rachat par les sociétés de leurs propres actions etc.). A noter que, chez nous, la déréglementation des marchés financiers a été largement l’oeuvre du gouvernement Bérégovoy et l’importation du modèle anglo-américain d’entreprise celle du gouvernement de Lionel Jospin et de son ministre de l’économie Strauss-kahn (détaxation des stock-options, autorisation du rachat par les sociétés de leurs propres actions etc.). Parisot l’a dit : l’amour est précaire. La doctrine libérale verra donc, dans l’insécurité économique des travailleurs, un corollaire de la prétendue insécurité financière : les gouvernements du monde entier voleront au secours des banques et des compagnies d’assurance.

L’ordre néolibéral n’a rien de spontané, de naturel. Il est profondément dogmatique. Les Marchés sont infaillibles, la concurrence apporte plus de bienfaits que la coopération, les services publics doivent être privatisés, le travail déréglementé, les capitaux et les marchandises aussi libres que l’air. C’est pourquoi la liberté d’entreprendre a été presque complètement émancipée des cadres juridiques nationaux tandis que la liberté syndicale et le droit de grève y demeuraient enfermés. Pourquoi, comme l’affirmait en ricanant Sarkozy, les grèves sont-elles devenues invisibles ? Parce que la pratique de la grève est de plus en plus inopérante. Tout d’abord parce que la masse grandissante des travailleurs précaires ne peut pas faire grève. Ensuite, souligne Supiot, parce que la grève n’a de sens que dans un face-à -face entre un employeur clairement identifiable et une collectivité de salariés placés sous ses ordres. Or les collectivités de travail sont « fragmentées par la sous-traitance, l’externalisation et l’intérim. Et l’employeur est souvent différent des véritables décideurs. » La grève tend à devenir l’arme des forts : les pilotes d’Air France, mais pas les bagagistes qui ne dépendent pas d’Aéroport de Paris. L’auteur en conclut (un peu rapidement à mes yeux) que « La dégénérescence corporative du syndicalisme et le repliement sur des revendications identitaires sont les deux faces d’une même médaille. »

Le droit social est en voie de déconstruction totale. Il s’opère des glissements qui ne sont pas que sémantiques. « Le droit collectif du logement est devenu un droit individuel opposable au logement. » La règle du repos dominical a été démantelée au nom de l’« équité », en d’autres termes du nivellement par le bas ou de la légalisation de ce qui est illégal. Durant ces vingt dernières années, la proportion de salariés en intérim ou CDD a été multipliée par quatre. Les droits sociaux ont été de plus en plus concentrés sur ceux qui en avaient le moins besoin. Par exemple, les ouvriers et employés cotisent plus longtemps que les cadres pour des retraites abrégées par une espérance de vie plus faible.

Dans l’Union européenne, cela a été accompli sous la vigilance biaisée de la Cour de Justice des Communautés Européennes qui se permet (parce que l’on ne l’en empêche pas), non seulement de dire le droit, mais de créer du droit, systématiquement dans une perspective réactionnaire. Bien qu’elle n’ait aucune compétence en matière de fiscalité, cette Cour a désarmé les États membres, peu résistants, face aux stratégies d’évasion fiscale. Grâce à la Cour, les riches sont de plus en plus à l’abri du risque d’augmentation des prélèvements obligatoires, ce qui n’est pas le cas des pauvres ou des classes moyennes. La Cour a exempté les entreprises qui délocalisent dans l’Union européenne du respect des conventions collectives ainsi que des lois indexant les salaires sur le coût de la vie. Elle a condamné les dispositifs permettant aux États d’accueil de contrôler efficacement le respect des droits des travailleurs qu’elles emploient. Elle a affirmé que le recours aux pavillons de complaisance ressortissait au principe de libre établissement.
C’est en Droit communautaire, explique Supiot, que le retour de la suzeraineté est le plus manifeste. La puissance publique à l’oeuvre dans les institutions européennes ne saurait être considérée comme une puissance souveraine. L’engrenage est diabolique : les directives que la Cour adresse aux États membres ne sauraient passer pour des lois. La caractéristique essentielle de cet ordre juridique est d’inféoder les États membres à une Union européenne, qui est elle-même privée de l’essentiel des attributs de la souveraineté sur ses propres citoyens.

Alors que l’urgence aurait été de réglementer la finance, la Commission européenne n’a eu qu’une seule obsession : réformer les marchés du travail dans un sens qui plie les hommes aux impératifs de la recomposition permanente du tissu productif, et « maximise ainsi la création de valeur pour les joueurs d’une économie réduite à l’état de casino. » Il en va de même de certaines organisations économiques internationales (FMI, Banque mondiale) dont le pouvoir, généralement destructeur, sur la vie des peuples ne peut s’exercer que par l’allégeance des États qui se soumettent à ses programmes d’ajustement structurel et renoncent à une part de leur souveraineté.

Comme l’avait proclamé Reagan, lui aussi en ricanant, « Les pouvoirs publics [government] ne sont pas la solution mais le problème ». Aujourd’hui, ces pouvoirs publics, l’État ne sont plus un recours, un outil de régulation mais un objet de prédation, comme lorsqu’il a servi à renflouer les banques ou les assureurs faillis. Dans la même optique, les groupes de pression médicaux tirent l’essentiel de leurs revenus de prélèvements obligatoires, mais n’acceptent aucune contrainte en contrepartie. Mieux (ou pire), on a vu que lorsqu’ils ont perdu leur emploi, les traders londoniens, qui avaient mis le système en faillite, avaient pu, « en application du droit social communautaire, percevoir des caisses françaises de chômage auxquelles ils n’ont jamais cotisé, des indemnités représentant quatre fois le montant du plafond de la sécurité sociale. »
L’accroissement de la production et du commerce est une fin en soi qui ne peut être atteinte que par une mise en concurrence généralisée de tous les hommes dans tous les pays. Pour les libéraux (" socio " ou pas), toute différence autre que monétaire doit être abolie, d’où le programme de démantèlement des statuts professionnels et des services publics. L’activité des travailleurs, leurs rémunérations, les " charges " , sont inscrites au passif des entreprises.

Supiot s’attarde sur une donnée tellement évidente qu’elle n’est jamais prise en compte : pas plus la Commission de Bruxelles que l’OCDE ou encore l’OIT ne donnent une définition de ce qu’est une entreprise ; et surtout pas une multinationale. Or des filiales « peuvent devenir opaques lorsque l’entreprise se ramifie en liens contractuels de dépendance unissant des sociétés sans lien capitalistique, par exemple dans le cas de sous-traitance ou de concession d’exploitation de brevets. » La liberté d’organisation juridique de l’entreprise (en anglais firm, du latin firmus, ferme, durable) est devenue un moyen pour l’entrepreneur, non plus de s’identifier sur la scène des échanges, mais tout au contraire de « disparaître derrière les masques d’une foule de personnalités morales et de fuir ainsi les responsabilités inhérentes à son action économique. » D’où, par exemple, des catastrophes sanitaires, les problèmes liés à l’amiante, la vache folle etc. L’irresponsabilité des entreprises peut être accompagnée par celles des personnes, comme les joueurs de tennis de l’équipe de France et autres sportifs et artistes qui payent leurs impôts en Suisse, ou les hommes d’affaires qui payent les leurs en Belgique. Ce faisant, ils se désolidarisent des règles sociales de leur pays et échappent à leurs devoirs de citoyens.

La Banque mondiale publie chaque année depuis 2004 un rapport évaluant les droits nationaux à l’aune de l’efficacité économique. Le rapport « Doing Business » 2005 contient par exemple un chapitre intitulé « Hiring and Firing Workers » (Embaucher et licencier les travailleurs), spécialement consacré à la mesure des entraves à l’investissement que représenterait dans chaque pays le Droit du travail. Pour la Banque mondiale, un salaire de 20 dollars par mois est jugé trop élevé pour un ouvrier en Afrique (En Côte d’Ivoire, en 1990, le salaire moyen d’un boy était de 80 dollars).

Les États doivent être gérés sous l’égide du New Public Management, donc être soumis aux mêmes règles de fonctionnement que les entreprises opérant sur des marchés concurrentiels. Les indicateurs conçus par l’Union européenne tiennent pour négligeable la précarisation de l’emploi, privilégient l’" employabilité " (concept popularisé par le social-libéral Tony Blair dès 1996) au détriment de la capacité des travailleurs. La mise en oeuvre à l’université d’indicateurs comme le nombre de soutenance de thèses pour attribuer primes ou crédits en fournit une bonne illustration : rien de plus facile que d’afficher des résultats conformes, il suffit de baisser le niveau des exigences. On ne parle plus à Bruxelles d’êtres humains, de capacités professionnelles ou de libertés, mais de capital humain, de flexibilité ou d’employabilité. Pour la Commission, une personne est employable « quand elle possède les caractéristiques, qualifications ou compétences négociables, qui sont considérées sur le marché du travail comme des conditions nécessaires à l’embauche ».

Ceux qui sentent le sol institutionnel se dérober sous leurs pieds cherchent appui ailleurs : dans l’affirmation ostentatoire de leur religion, de la couleur de leur peau, de leur genre ou de leur orientation sexuelle. Cette montée des revendications identitaires éclipse les causes socio-économiques de l’injustice sociale. La question de l’injustice est ainsi déplacée du terrain de l’avoir vers celui de l’être, du terrain du savoir vers celui du paraître. Selon une formule frappante de l’auteur, la « loi pour soi » devient le « soi pour loi ».

Bernard Gensane

Alain Supiot
L’esprit de Philadelphie. La justice sociale face au marché total.
Paris : Le Seuil, 2010


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