Grain, décembre 2007.
Depuis quelques temps déjà , on entend parler d’une nouvelle révolution verte pour l’Afrique, car "La première révolution verte a raté l’Afrique" ou parce que "l’Afrique a raté la première révolution verte". Aujourd’hui, un nouveau projet, l’Alliance pour une révolution verte en Afrique, tente de mettre ce concept en application.
Cet article a pour but de décrire ce que signifie réellement une révolution verte et pourquoi des projets de ce type n’ont pas fonctionné en Afrique auparavant pour les agriculteurs africains et pourquoi le nouveau programme AGRA ne pourra pas non plus marcher, afin d’aider à ce que les gens puissent prendre position aux niveaux locaux, nationaux et régionaux. (...)
Le CGAIR a dépensé une bonne moitié de son budget en Afrique ces vingt ou trente dernières années, mais la révolution verte n’a jamais pris racines. Maintenant, avec un apport financier des fondations Bill Gates, Rockefeller et d’autres donateurs des Etats-Unis, beaucoup des organisations mêmes qui avaient fait une première tentative vont essayer à nouveau. Elles s’appellent elles-mêmes "Alliance pour une Révolution Verte en Afrique", AGRA, et sont en train de mettre leur nouveau plan à exécution.
L’AGRA déclare que son principal objectif est d’aider l’Afrique à accroître sa productivité pour un certain nombre de plantes alimentaires majeures, tout comme cela avait été envisagé par les programmes initiaux de la révolution verte.[3] Et une fois de pus, cela est censé se faire via la sélection végétale de type occidental dans les instituts nationaux de recherche agricole. La différence étant que cette fois-ci une nouvelle fournée de sélectionneurs de plantes sera formée en Afrique même, au lieu d’être formée dans les université du Nord, mais l’université de Cornell, la principale institution des premiers programmes de la révolution verte, sera cependant là pour superviser la formation. (...)
L’une des premières étapes de l’AGRA cependant est de créer un réseau de "fournisseurs en agroalimentaire", pour vendre les semences, les pesticides et les engrais. L’AGRA a déjà recruté une ONG étasunienne appelée Citizens’Network for Foreign Affairs (Réseau de citoyens pour les affaires étrangères) pour effectuer ce travail au Kenya, en Tanzanie et au Malawi. Jusqu’à présent, cette ONG a reçu près de 14 millions de dollars de subventions, ce qui en fait de loin le plus gros bénéficiaire des financements de l’AGRA jusqu’à présent. Pour approvisionner les fournisseurs, les donateurs de l’AGRA financent aussi des entreprises privées de semences. La fondation Rockefeller est le principal investisseur dans l’African Agricultural Capital (Capital agricole africain), un fonds d’investissement en capital-risque qui investit dans plusieurs petites entreprises de semences africaines qu’il contrôle en partie et qui sont aussi soutenues par l’AGRA.[6] (...)
Que ce soit l’ancienne ou la nouvelle révolution verte, les premiers perdants sont les agriculteurs, en particulier les petits. L’AGRA cherche à remplacer les semences que les agriculteurs africains ont soigneusement développées pour leurs fermes et leurs cultures, par des variétés adaptées aux monocultures industrielles. Ces semences ouvriront la voie à l’industrialisation des cultures alimentaires africaines, laissant le champ libre à l’introduction et à la domination de l’agrobusiness. (...)
Au moment où l’AGRA a été lancée, ses fondateurs se sont empressés de souligner que l’AGRA n’utiliserait pas de plantes cultivées génétiquement modifiées (GM). Pas pour l’instant, bien sûr. Lors de la troisième assemblée générale des collaborateurs du programme de l’AGRA sur les " Biotechnologies, sélection et systèmes de semences pour les plantes cultivées africaines", un certain nombre de présentations de recherches et d’essais sur des plantes cultivées GM ont été intégrées.[16] Il est donc difficile de prendre au sérieux la déclaration que l’AGRA n’avait rien à faire avec les semences GM. Tous ceux qui financent l’AGRA, dont Rockefeller et Gates, essayent déjà d’imposer l’introduction des technologies des modifications génétiques en Afrique. Mais ils se sont rendu compte que l’initiative de l’AGRA serait plus facile à introduire sans inclure les cultures ou les semences GM. La stratégie est sans aucun doute de l’introduire plus tard, une fois que le programme sera installé et que les agriculteurs auront déjà adopté les nouvelles semences. De plus, la plupart des pays d’Afrique n’ont pas encore mis en place de législation de biosécurité, et cela n’a donc aucun sens de se focaliser sur les cultures GM actuellement. Il faut plutôt se concentrer sur l’harmonisation des politiques, en s’assurant que les durées d’autorisation des plantes cultivées sont plus rapides et en construisant l’infrastructure nécessaire à l’introduction rapide des cultures GM. (...)
- Lire l’ article www.grain.org
L’USAID : comment faire pour que le monde ait faim de cultures génétiquement modifiées, par Grain.
Une autre solution miracle pour l’Afrique ? Bill Gates va ressusciter la Révolution verte déclinante de la Fondation Rockefeller, par Grain.
Dix raisons de soupçonner que "Sauver le Darfour" est une arnaque de relations publiques, par Bruce Dixon.
Les APE et l’introduction des OGM dans notre politique agricole représentent un suicide économique pour le Mali, comme pour d’autres pays pauvres, par Mariétou Konate.