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L’expression qui sied le mieux au système qui nous gouverne est celle de capitalisme de casino, complètement déconnecté de l’économie réelle.

Capitalisme de casino

« Capitalisme de casino », une expression qu’on doit à Susan Strange, une des fondatrices de l’économie politique internationale, auteure d’un ouvrage du même titre, Casino Capitalism, paru en 1986, dans lequel elle soutient en substance que « logiquement, cette structure financière obtient de très bons résultats en termes de valeurs américaines d’efficacité et de liberté, et de très mauvais en ce qui concerne la sécurité et la justice distributive ».

L’histoire économique lui donne raison. Alors que la crise de 2008 na pas fini de produire ses effets, Wall Street trône sur une capitalisation mondiale qui a doublé en dix ans. Selon Bloomberg, la capitalisation boursière mondiale s’élevait à 61 975 milliards de dollars à la fin de l’année écoulée – bien plus que les 60 000 milliards d’avant la crise, en 2007… Les principales places boursières mondiales jubilent donc : + 29,6% aux Etats-Unis, + 18% en France, + 25 % en Allemagne, + 14 % au Royaume-Uni et + 57 % au Japon.

Cette année, les huit plus grosses entreprises cotées du monde sont étasuniennes et Wall Street truste à elle seule 47 des 100 plus grosses valeurs mondiales.

Pourtant, partout l’odeur de la récession ne s’est pas totalement dissipée. Le Japon du Premier ministre Shinzo Abe n’a pas encore tourné la page de quinze années de déflation. Les pays émergents peinent à dessiner un nouveau modèle de croissance. Dans la zone euro la sortie de récession a, certes, été confirmée au troisième trimestre 2013, mais la reprise est loin d’être vigoureuse. En l’état actuel des échanges commerciaux internationaux, des tendances déflationnistes, du ralentissement des IDE et des difficultés de régulation, la zone euro ne peut espérer dépasser la barre du 1% de croissance.

Outre qu’elle est déconnectée du réel, l’économie capitaliste de casino a pour autre caractéristique d’être foncièrement maffieuse.

Ce que Gabriel Zucman (*) appelle « la richesse manquante des nations », exilée dans les paradis fiscaux, représente 6 000 milliards de dollars, soit au minimum 8% du patrimoine financier des ménages en 2008. L’essentiel de l’argent offshore est investi dans des titres financiers (actions, parts de fonds d’investissement, obligations) auprès de banques suisses (elles gèrent environ un tiers des fortunes offshore), des Caraïbes ou asiatiques (Singapour et Hong Kong).

Les premières activités offshore aux États-Unis remontent à 1921 – et aux années 1950 pour le Royaume-Uni. C’est, en effet, à partir de 1921 que les États-Unis autorisent les déposants étrangers dans les banques américaines à percevoir leurs intérêts exonérés d’impôts à condition qu’ils ne soient pas liés aux affaires étasuniennes.

Pour rester dans ce qui peut représenter, à un titre ou un autre, un centre d’intérêt indigène, les 2 000 milliards placés auprès des banques suisses proviennent pour l’essentiel (60%) des fraudeurs européens et, pour le restant, des pays arabes, principalement (mais pas seulement) du Golfe.

Les experts ont aujourd’hui à cœur de démonter les mécanismes d’envoi et de gestion des fortunes offshore. Il est admis qu’il est impossible de les chiffrer au milliard près et de connaître exactement leurs détenteurs car elles échappent à toutes les sources de données disponibles, qu’il s’agisse des comptabilités nationales, des données fiscales ou de toutes autres enquêtes. Ce déficit d’information laisse le champ libre aux groupes de pression qui œuvrent à ce que rien ne change.

Chez nous, le phénomène de fraude fiscale s’ajoute à un autre fléau : l’évasion de capitaux.

Les fuites de capitaux sont juridiquement associées aux infractions au change sur lesquelles pesaient 64 milliards de dinars de pénalités en 2011, selon des sources douanières. Une goutte d’eau dans l’océan du marché informel florissant autour des grands bazars du pays.

75 % de ces infractions avaient été enregistrées dans le cadre d’opérations du commerce extérieur.

Les Douanes algériennes fixent les surfacturations comme principal canal pour l’évasion de capitaux. En l’espèce, les fraudeurs recourent au « gonflement exagéré de leurs factures à l’importation pour pouvoir transférer un maximum de devises vers l’étranger ».

Les majorations sur les prix de certains équipements constituent un autre levier d’action des importateurs fraudeurs. Tout comme les fausses déclarations d’origine.

Ainsi, selon les chiffres rapportés par la presse nationale, les faux documents représentent, pour les deux dernières années 2011-2012, 6,6 % des infractions constatées ­­— les pénalités encourues par les fraudeurs à ce titre s’élèvant à 5,6 milliards de dinars.

Pour durcir le dispositif formel de répression des infractions se rattachant aux fuites de capitaux, une loi adoptée en 1996 explicite les délits de l’infraction au change et de mouvements de capitaux de et vers l’étranger. Cette loi a encore été amendée en 2010, dans le sens d’un énième durcissement, les autorités monétaires ajoutant que désormais, « les pénalités dans les infractions à la législation de change sont aggravées lorsque le fraudeur est une personne morale ». Ces pénalités atteignent quatre fois la valeur du corps du délit.

Aussi, pour assurer le maillage de la fraude, un fichier national des contrevenants en matière de la législation de change et de mouvements des capitaux de et vers l’étranger a été institué dans le but évident de dissuader les contrevenants de récidiver.

Ce fichier institué auprès du ministère des Finances et de la Banque d’Algérie constitue une sorte de banque de données dans laquelle est enregistrée toute personne, physique ou morale, résidente ou non résidente, ayant fait l’objet d’un procès-verbal de constat d’infraction à la législation en la matière.

Ammar Belhimer

(*) Thomas Vendryes, Les paradis fiscaux ; visite guidée, Entretien avec Gabriel Zucman, www.laviedesidees.fr, 15 novembre 2011.

lesoirdalgerie.com

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