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La question préalable des sources de la série « Apocalypse Staline » sur France 2

Les trois heures de diffusion de la série « Apocalypse Staline » diffusée le 3 novembre 2015 sur France 2 battent des records de contrevérité historique, rapidement résumés ci-dessous.

Une bande de sauvages ivres de représailles (on ignore pour quel motif) ont ravagé la Russie, dont la famille régnante, qui se baignait vaillamment, avant 1914, dans les eaux glacées de la Baltique, était pourtant si sympathique. « Tels les cavaliers de l’apocalypse, les bolcheviques sèment la mort et la désolation pour se maintenir au pouvoir. Ils vont continuer pendant 20 ans, jusqu’à ce que les Allemands soient aux portes de Moscou. […] Lénine et une poignée d’hommes ont plongé Russie dans le chaos » (1er épisode, « Le possédé »).

Ces fous sanguinaires ont inventé une « guerre civile » (on ignore entre qui et qui, dans cette riante Russie tsariste). L’enfer s’étend sous la houlette du barbare Lénine, quasi dément qui prétend changer la nature humaine, et de ses acolytes monstrueux dont Staline, pire que tous les autres réunis, « ni juif ni russe », géorgien, élevé dans l’orthodoxie mais « de mentalité proche des tyrans du Moyen-Orient » (la barbarie, comprend-on, est incompatible avec le christianisme). Fils d’alcoolique, taré, contrefait, boiteux et bourré de complexes (surtout face au si brillant Trotski, intelligent et populaire), dépourvu de sens de l’honneur et de tout sentiment, hypocrite, obsédé sexuel, honteux de sa pitoyable famille, Staline hait et rackette les riches, pille les banques, etc. (j’arrête l’énumération). On reconnaît dans le tableau de cet « asiate » les poncifs de classe ou racistes auxquels le colonialisme « occidental » recourt depuis ses origines.

Vingt ans de souffrances indicibles infligées à un pays contre lequel aucune puissance étrangère ne leva jamais le petit doigt. Il y a bien une allusion sibylline aux années de guerre 1918-1920 qui auraient fait « dix millions de morts » : les ennemis bolcheviques sont encerclés partout par une « armée de gardes blancs ». On n’aperçoit pas la moindre armée étrangère sur place, bien qu’une cinquantaine de pays impérialistes étrangers eussent fondu, de tous les points cardinaux sur la Russie, dont la France, l’Angleterre, l’Allemagne, les États-Unis, etc. (c’est au 2e épisode seulement, « L’homme rouge », qu’on apprend que Churchill a détesté et combattu l’URSS naissante : quand ? comment ?).

Pour échapper à cette intoxication sonore et colorée, le spectateur aura intérêt à lire l’excellente synthèse de l’historien Arno Mayer, sympathisant trotskiste auquel son éventuelle antipathie contre Staline n’a jamais fait oublier les règles de son métier : Les Furies, terreur, vengeance et violence, 1789, 1917, Paris, Fayard, 2002. L’ouvrage, traduit par un gros éditeur pour des raisons que je ne m’explique pas, vu les habitudes régissant la traduction en France, compare aussi les révolutions française et bolchevique. Comparaison particulièrement utile après une ère Furet où la française a été aussi malmenée que la russe [1]. Pour Mme Clarke et M. Costelle comme pour les historiens et publicistes qui ont occupé la sphère médiatique depuis les années 1980, la Terreur est endogène, et dépourvue de tout rapport avec l’invasion du territoire par l’aristocratie européenne. Et, de 1789 à 1799, expérience atroce heureusement interrompue par le coup d’État, civilisé, du 18 Brumaire (9 novembre 1799), la France a vécu sous les tortures des extrémistes français (jacobins), mauvaise graine des bolcheviques.

« Le peuple soviétique » est soumis sans répit aux tourments de la faim notamment à « la famine organisée par Staline au début des années trente, catastrophique surtout en Ukraine », où elle aurait fait « 5 millions de morts de faim », victimes de l’« Holodomor » [2] , à la répression permanente, incluant les viols systématiques, aux camps de concentration « du Goulag » (« enfer pour les Russes du désert glacé », où toutes les femmes sont violées aussi) si semblables à ceux de l’Allemagne nazie (un des nombreux moments où les séquences soviétique et allemande sont « collées », pour qu’on saisisse bien les similitudes du « totalitarisme »). Mais il gagne la guerre en mai 1945. On comprend d’ailleurs mal par quelle aberration ce peuple martyrisé pendant plus de vingt ans a pu se montrer sensible, à partir du 3 juillet 1941, à l’appel « patriotique » du bourreau barbare qui l’écrase depuis les années 1920. Et qui a, entre autres forfaits, conclu « le 23 août 1939 » avec les nazis une « alliance » qui a sidéré le monde, l’indigne pacte germano-soviétique, responsable, en dernière analyse, de la défaite française de 1940 : « Staline avait tout fait pour éviter la guerre, il avait été jusqu’à fournir à Hitler le pétrole et les métaux rares qui avaient aidé Hitler à vaincre la France ».

Il est vrai que l’hiver 1941-1942 fut exceptionnellement glacé, ce qui explique largement les malheurs allemands (en revanche, « le général Hiver » devait être en grève entre 1914 et 1917, où la Russie tsariste fut vaincue avant que les bolcheviques ne décrétassent « la paix »). Il est vrai aussi que l’aide matérielle alliée a été « décisive » dès 1942 (épisodes 2 et 3), avions, matériel moderne, etc. (4% du PNB, versés presque exclusivement après la victoire soviétique de Stalingrad).

Il n’empêche, quel mystère que ce dévouement à l’ignoble Staline, qui vit dans le luxe et la luxure depuis sa victoire politique contre Trotski, alors que « le peuple soviétique » continue d’être torturé : non pas par les Allemands, qu’on aperçoit à peine dans la liquidation de près de 30 millions de Soviétiques, sauf signalement de leur persécution des juifs d’URSS, mais par Staline et ses sbires. Ainsi, « les paysans ukrainiens victimes des famines staliniennes bénissent les envahisseurs allemands ». Ce n’est pas la Wehrmacht qui brûle, fusille et pend : ces Ukrainiens « seront pendus par les Soviétiques revenus, » et filmés à titre d’exemples comme collabos. Staline fait tuer aussi les soldats tentés de reculer, tendance bien naturelle puisque le monstre « déclare la guerre à son peuple » depuis 1934 (depuis lors seulement ?), qu’il a abattu son armée en faisant fusiller des milliers d’officiers en 1937, etc.

La critique mot à mot de ce « documentaire » grotesque s’avérant impossible, on consultera sur l’avant-guerre et la guerre l’ouvrage fondamental de Geoffrey Roberts, Stalin’s Wars : From World War to Cold War, 1939-1953. New Haven & London : Yale University Press, 2006, accessible désormais au public français : Les guerres de Staline, 1939-1953, Paris, Delga, 2014 [3]. La politique d’« Apaisement » à l’égard du Reich hitlérien fut l’unique cause du pacte germano-soviétique, que les « Apaiseurs » français, britanniques et américain avaient prévue sereinement depuis 1933 comme la seule voie ouverte à l’URSS qu’ils avaient décidé de priver d’« alliance de revers ». Cette réalité, cause majeure de la Débâcle française, qui ne dut strictement rien à l’URSS, est absente des roulements de tambour de Mme Clarke et de M. Costelle. On en prendra connaissance en lisant Michael Jabara Carley, 1939, the alliance that never was and the coming of World War 2, Chicago, Ivan R. Dee, 1999, traduit peu après : 1939, l’alliance de la dernière chance. Une réinterprétation des origines de la Seconde Guerre mondiale, Les presses de l’université de Montréal, 2001 ; et mes travaux sur les années 1930, Le Choix de la défaite : les élites françaises dans les années 1930, Paris, Armand Colin, 2010 (2e édition) et De Munich à Vichy, l’assassinat de la 3e République, 1938-1940, Paris, Armand Colin, 2008.

La seule émission de France Inter du 30 octobre au matin (disponible sur Internet jusqu’au 28 juillet 2018) a donné une idée des conditions du lancement « apocalyptique », tous médias déployés, de cette série Staline qui rappelle, par les moyens déployés, l’opération Livre noir du communisme en 1997. Elle éclaire aussi sur les intentions des réalisateurs installés depuis 2009 dans la lucrative série « Apocalypse » (http://apocalypse.france2.fr/

La musique et le son de ces trois heures éprouvantes sont adaptées à leurs objectifs. La « colorisation », qui viole les sources photographiques, porte la marque de fabrique de la série « Apocalypse » : elle s’impose pour attirer « les jeunes gens », faire sortir l’histoire de la case poussiéreuse où elle était confinée, argue Isabelle Clarke, éperdue de gratitude (bien compréhensible) à l’égard de France 2 qui « a remis la grande histoire en prime time (sic) » ; aussi modestement, le coauteur Daniel Costelle attribue cette place d’honneur sur nos écrans domestiques à la qualité du travail accompli par le tandem depuis les origines de la série (2009). La « voix de Mathieu Kassovitz » est jugée « formidable » par les auteurs et leur hôtesse, Sonia Devillers : l’acteur débite, sur un ton sinistre et grandiloquent, le « scénario de film d’horreur » soviétique et stalinien qui fascine tant Mme Clarke.

Pour que la chose soit plus vivante, les auteurs, qui font « des films pour [s’]enthousiasmer [eux]-mêmes », ont décidé qu’ils n’auraient « pas de parti pris chronologique » : ils ont plus exactement pris le parti de casser la chronologie, par de permanents retours en arrière supposés rendre le « travail un peu plus interactif ». La méthode empêche toute compréhension des événements et des décisions prises, 1936 ou 1941 précédant l’avant Première Guerre mondiale, le conflit et 1917, une de ses conséquences. On sautille sans arrêt d’avant 1914 à 1945 dans chaque épisode et en tous sens : il est d’autant plus impossible de reconstituer le puzzle des événement morcelés que les faits historiques sont soigneusement épurés, sélectionnés ou transformés en leur exact contraire (c’est ainsi que les perfides bolcheviques auraient attaqué la Pologne en 1920, alors que c’est Varsovie qui assaillit la Russie déjà envahie de toutes parts). On nous explique souvent que le montage d’un film est fondamental, l’escroquerie « Apocalypse Staline », qui y ajoute le mensonge permanent et les ciseaux du censeur, le confirme.

La conjoncture est au surplus du côté des auteurs :

1° la propagande antisoviétique est depuis 1917 obsédante en France comme ailleurs en « Occident », mais elle a été infléchie pendant quelques décennies, à la fois par une fraction du mouvement ouvrier (surtout) et des intellectuels et par les circonstances, en particulier celles qui ont précédé et accompagné la Deuxième Guerre mondiale. Ce n’est plus le cas depuis les années 1990 où le mouvement ouvrier, toutes tendances confondues, s’est aligné sur les développements du Livre noir du communisme  : seul défenseur de l’URSS depuis la naissance de la Russie soviétique, le PCF ne cesse depuis 1997 d’expier ses affreuses années staliniennes et de déplorer sa non-condamnation du si funeste pacte germano-soviétique. Rappelons que sa mise en œuvre offrit aux Soviets un répit de près de deux ans et leur permit de doubler les effectifs de l’armée rouge à leurs frontières occidentales (portés de 1,5 à 3 millions d’hommes). Laurent Joffrin, dans un article qui se veut nuancé sur le « bourreau » Staline, auquel cependant « nous devons beaucoup », a légitimement relevé qu’il était délicat naguère de raconter en France absolument n’importe quoi sur l’URSS mais que l’obstacle a été levé par les rapports de forces internationaux et intérieurs (http://www.liberation.fr/planete/2015/11/02/staline-gros-sabots-contre-un-bourreau_1410752).

2° La liquidation de l’histoire scientifique française de l’URSS a été d’autant plus aisée depuis les années 1980 que l’offensive antisoviétique et anticommuniste s’est accompagnée d’une entreprise de démolition de l’enseignement général de l’histoire, soumis à une série de « réformes » toutes plus calamiteuses les unes que les autres. Le corps enseignant du secondaire l’a déploré, mais sa protestation n’est plus guère soutenue par des organisations autrefois combatives sur le terrain scientifique comme sur les autres. « Les jeunes gens », auxquels la casse de l’enseignement historique inflige désormais 1° la suppression de pans entiers de la connaissance, 2° l’abandon de la chronologie, sans laquelle on ne peut pas saisir les origines des faits et événements, et 3° le sacrifice des archives originales au fameux « témoignage », se sont trouvés, s’ils ont eu le courage de supporter les trois heures de ce gavage, en terrain particulièrement familier.

3° L’histoire scientifique relative à la la Russie, anglophone notamment, est en fort développement depuis une vingtaine d’années mais elle est en général inaccessible au public français : les ouvrages idoines sont traduits dans les six mois, les autres pratiquement jamais, sauf exception. Quelques-uns de ces « trous » percés dans le Rideau de Fer de l’ignorance historique du monde russe ont été mentionnés ci-dessus. Quoi qu’il en soit, quand les ouvrages sérieux sont traduits, ils sont ensevelis dans le néant, tous médias confondus.

Isabelle Clarke admet qu’« Apocalypse Staline » ne relève pas de la catégorie de l’histoire, elle le revendique même. Elle se déclare fascinée par l’immense travail de Svetlana Alexievitch, dont l’attribution du prix Nobel de littérature d’octobre 2015 rappelle le couronnement « occidental » de l’œuvre d’Alexandre Soljenitsyne (https://fr.wikipedia.org/wiki/Alexandre_Soljenitsyne), lauréat de 1970, avec des motivations semblables. Quelles que soient ses éventuelles qualités littéraires, Mme Aleksievitch n’a été promue que pour des raisons idéologico-politiques, conformément à une tradition d’après-guerre que la documentariste et historienne britannique Frances Stonor Saunders a exposée en 1999, dans un ouvrage essentiel sur la Guerre froide culturelle : c’est l’intervention expresse des États-Unis, via l’action clandestine pratiquée sur les questions culturelles (comme sur les les opérations politiques et même militaires) par le truchement de la CIA ou d’institutions financées par elle. Ce fut en l’occurrence via le Congress for Cultural Freedom (CCF) fondé, après une série d’initiatives préalables, en juin 1950, et qui bloqua l’attribution du prix Nobel de littérature à Pablo Neruda au début des années 1960 : Neruda fut écarté en 1964, au profit de Jean-Paul Sartre, dont Washington suivait de près et appréciait les démêlés avec le PCF, mais qui eut l’élégance de le décliner [4]. Le pouvoir positif de soutien des États-Unis, depuis 1945, aux « dissidents » ou à des anticommunistes très divers a été aussi efficace que leur capacité de nuisance contre les intellectuels combattus : le Nobel de littérature a récompensé un nombre tout à fait disproportionné d’adversaires notoires du communisme en général et de l’URSS ou de la Russie en particulier : la consultation systématique est éclairante :

https://fr.wikipedia.org/wiki/Prix_Nobel_de_litt%C3%A9rature#Ann.C3.A9es_1960

Isabelle Clarke se félicite du « travail de témoignage » réalisé par Svetlana Aleksievitch, grâce à laquelle « les crimes communistes », jamais jugés, ont enfin pu être recensés : en l’absence d’instruction et d’accès aux faits, il a fallu compter sur les témoignages, très longs à obtenir, et autrement plus éclairants que la recherche historique. Ces témoignages égrenés au fil des trois films, jamais liés à l’établissement des faits, forment donc la trame historique du « scénario de film d’horreur ». Svetlana Aleksievitch ne prétend pas, elle, faire œuvre d’historienne. Obsédée par la quête de l’Homo sovieticus, concept proclamé impossible, puisqu’on ne saurait changer les humains en changeant le mode de production, l’auteur de La Fin de l’homme rouge ou le temps du désenchantement (traduction publiée en 2013 chez Actes Sud) (http://www.actes-sud.fr/la-fin-de-lhomme-rouge-de-svetlana-alexievitch) « enregistre sur magnétophone les récits des personnes rencontrées, et collecte ainsi la matière dont elle tire ses livres : “Je pose des questions non sur le socialisme, mais sur l’amour, la jalousie, l’enfance, la vieillesse. Sur la musique, les danses, les coupes de cheveux. Sur les milliers de détails d’une vie qui a disparu. C’est la seule façon d’insérer la catastrophe dans un cadre familier et d’essayer de raconter quelque chose. De deviner quelque chose... L’Histoire ne s’intéresse qu’aux faits, les émotions, elles, restent toujours en marge. Ce n’est pas l’usage de les laisser entrer dans l’histoire. Moi, je regarde le monde avec les yeux d’une littéraire et non d’une historienne” » (https://fr.wikipedia.org/wiki/Svetlana_Aleksievitch).

Nous sommes donc avisés que ce spectacle « émotionnel » et « occidental », organisé à grand tapage par les responsables de la série « Apocalypse Staline », est fondé sur de la littérature antisoviétique larmoyante, appréciée et récompensée comme telle par « l’Occident » civilisé.

Quand on passe à « l’histoire » stricto sensu, le bilan est pire, et caractérisé par des pratiques malhonnêtes et non explicitées. Isabelle Clarke se flatte d’avoir « remis en prime time (sic) la grande histoire » et de ne pas avoir négligé l’histoire qu’elle aime moins que la littérature : elle aurait étudié tous les ouvrages « recommandés par nos conseillers historiques » : « Robert Service, Jean-Jacques Marie, Simon Sebag Montefiore » (ce dernier toujours traduit dans les mois qui suivent ses publications anglophones), dont les travaux sont caractérisés par une vision à peu près caricaturale du monstre, avec des nuances dont le lecteur de leurs travaux peut seul juger. Quels « conseillers historiques » ? On a pourtant le choix parmi les historiens français de l’URSS, presque également soviétophobes et médiatiques : aucune carrière académique n’étant depuis trente ans ouverte à un spécialiste de l’URSS soviétophile, il n’en existe pas.

Dans la rubrique « crédits » du 3e épisode, figure la mention de citation(s) d’un seul ouvrage d’historien, le Staline de Jean-Jacques Marie, spécialiste du monstre sur la base d’ouvrages de seconde main (les seules autres citations proviennent de Mme Aleksievitch). Les « conseillers historiques » allégués n’ont pas été mentionnés, mais on relève, parmi les sept personnalités qui ont fait l’objet de « remerciements », juste nommées mais non présentées, un seul « historien » présumé : Pierre Rigoulot (les six autres sont artistes ou spécialistes techniques [5]).

M. Rigoulot dirige l’institut d’histoire sociale, fondé en 1935 par Boris Souvarine, célèbre et précoce transfuge du communisme (1924) qui, fut, selon une tradition née en même temps que le PCF, embauché par le grand patronat français. Souvarine, trotskiste proclamé antistalinien (catégorie de « gauche » très appréciée pour la lutte spécifique contre les partis communistes [6]), fut employé comme propagandiste par la banque Worms. Il fut un des rédacteurs de la revue les Nouveaux Cahiers, fondée en 1937 en vue de la scission de la CGT, financée et tuteurée par le directeur général de la banque Jacques Barnaud, futur délégué général aux relations économiques franco-allemandes (1941-1943). La revue, qui chanta sans répit les louanges d’une « Europe » sous tutelle allemande, fut publiée entre la phase cruciale de la scission, d’origine patronale, de la CGT (n° 1, 15 mars 1937) [7], et la Débâcle organisée de la France (n° 57, mai 1940). Souvarine y voisinait avec la fine fleur de la « synarchie » issue de l’extrême droite classique (Action française) qui allait peupler les ministères de Vichy : il n’y était requis qu’en tant que spécialiste de (l’insulte contre) l’URSS et de la croisade contre la république espagnole assaillie par l’Axe Rome-Berlin [8].

Cette « petite revue jaune », qui attira bien des « collaborations », selon l’expression du synarque et ami de Barnaud, Henri Du Moulin de Labarthète, chef de cabinet civil de Pétain [9], est annonciatrice de presque tous les aspects de la Collaboration. Elle est conservée dans les fonds d’instruction de la Haute Cour de Justice des Archives nationales (W3, vol. 51, en consultation libre : régime de la dérogation générale, série complète jusqu’au n° de décembre 1938) et des archives de la Préfecture de police (série PJ, vol. 40, sous dérogation quand je l’ai consultée). Le lecteur curieux constatera que « Boris Souvarine, historien » (ainsi qualifié au 3e épisode, « Staline. Le maître du monde »), dans ses articles, réguliers, dresse entre 1937 et 1940 un portrait de l’URSS (et) de Staline en tout point conforme à ce que le spectateur français a appris, le 3 novembre 2015, sur le cauchemar bolchevique. Souvarine partit pour New York en 1940, y passa la guerre, et prit alors contact avec les services de renseignements alors officiellement voués à la seule guerre contre l’Axe (notamment l’Office of Strategic Services (OSS), ancêtre de la CIA, mais fort antisoviétiques. Il ne revint en France qu’en 1947 C’est le soutien financier clandestin du tandem CCF-CIA qui lui permit d’éditer et de faire triompher son Staline : en panne d’éditeur et de public de la Libération à la fin des années 1940, le chef de l’« Institut d’Histoire sociale et de Soviétologie » (définitivement reconstitué en mars 1954) accéda ainsi au statut d’« historien » que lui accorde « Apocalypse Staline » [10].

Deuxième « historien », non signalé comme tel, mais « remercié » dans les crédits, Pierre Rigoulot, présumé cheville ouvrière des films sur Staline, fait peser sur les trois épisodes de la série une triple hypothèque.

1°. M. Rigoulot n’est pas un historien mais un idéologue, militant au service de la politique extérieure des États-Unis, officiellement apparenté depuis les années 1980 aux « néo-conservateurs », selon Wikipedia, qu’on ne saurait taxer d’excessive complaisance pour le communisme : aucun des ouvrages qu’il a rédigés sur l’URSS, la Corée du Nord (sa nouvelle marotte depuis sa contribution sur le sujet dans Le Livre noir du communisme), Cuba, ne répond aux exigences minimales du travail scientifique (https://fr.wikipedia.org/wiki/Pierre_Rigoulot)

2°. Faussaire avéré sous couvert de prendre la défense « des juifs », il a été, pour son ouvrage L’Antiaméricanisme (éditions Robert Laffont, 2005), condamné en diffamation par jugement de la 17e chambre du TGI de Paris, le 13 avril 2005, « ayant inventé de toutes pièces [une] fausse citation » antisémite (absente) d’un ouvrage de Thierry Meyssan, adversaire manifestement jugé sans péril (même référence en ligne).

3°. L’IHS, que M. Rigoulot a rejoint en 1984 comme bibliothécaire, puis « chargé des recherches et publications », et dont il est le directeur, n’est pas une institution scientifique : c’est une officine de Guerre froide et, après la Libération, de recyclage des collaborationnistes de sang et/ou de plume issus de l’extrême droite classique et de la gauche anticommuniste. Cet organisme a été depuis la Libération financé par la banque Worms, le CNPF et, quasi officiellement, par la CIA. Il a été intimement lié à Georges Albertini, second de Marcel Déat déjà employé avant-guerre par la banque Worms et recyclé à sa sortie de prison (1948) dans la propagande anticommuniste et antisoviétique de tous ces bailleurs de fonds. On trouvera sur tous ces points une ample bibliographie, fondée à la fois sur les archives policières françaises (de la Préfecture de police) et sur les fonds américains qui établit la convergence de tous les auteurs [11]

Les trois volets d’« Apocalypse Staline » traitent, et sur le même ton haineux, tous les thèmes serinés depuis sa fondation par l’IHS, notamment ceux du Goulag (« la terreur et le goulag sont la principale activité du Politburo », 3e épisode, « Staline. Le maître du monde »), dont M. Rigoulot a fait depuis 1984, date de son entrée dans cette officine, un des thèmes privilégiés de ses travaux, et de l’« Holodomor », « organisé » par Staline.

On pourrait proposer au spectateur de visionner, en supprimant le son de cette projection grotesque, les bandes de « rushs » (les auteurs des films prétendent avoir livré du pur document brut, particulièrement authentique, mais le film de fiction, soviétique d’ailleurs, y occupe une part non négligeable). Il percevrait ainsi immédiatement qu’on pourrait faire une tout autre histoire de l’URSS sous Staline que celle qui s’appuie sur un matériau frelaté.

Là n’est pas l’essentiel. Le service public de télévision français a une fois de plus, en matière d’histoire, bafoué les principes minimaux de précaution scientifique et ridiculisé les spectateurs français, en leur servant un brouet de pure propagande antisoviétique : il avait déjà ouvert, entre 2011 et 2013, le service public aux seuls héritiers de Louis Renault, venus se lamenter, avec ou sans historiens complices, sur la spoliation de leur grand-père quasi résistant. Est-il normal que la société France Télévisions, financée par la redevance versée par tous les contribuables, se prête à une opération digne du « ministère de l’information et de la propagande » de Göbbels ? On attend le « débat » qu’impose la malhonnêteté avérée de l’entreprise. J’y participerai(s) volontiers.

Annie Lacroix-Riz

[1Atmosphère historiographique générale depuis l’ère Furet, Lacroix-Riz, L’histoire contemporaine toujours sous influence, Delga-Le Temps des cerises, 2012

[2À propos de ce concept emprunté, non pas à l’Ukraine soviétique de l’entre-deux-guerres mais né dans la Galicie polonaise, et devenu un thème allemand et américaine de la stratégie de scission URSS ou « Russie »-Ukraine depuis 1933, ma mise au point archivistique et bibliographique « Ukraine 1933 mise à jour de novembre-décembre 2008 », http://www.historiographie.info/ukr33maj2008.pdf ; et Mark Tauger, ouvrage à paraître chez Delga en 2016 sur les famines en Russie tsariste et en Union Soviétique, dont je rédigerai la préface.

[3Voir aussi Lacroix-Riz, « Le rôle de l’URSS dans la Deuxième Guerre mondiale (1939-1945) », mai 2015, http://www.les-crises.fr/annie-lacroix-riz-le-role-de-lurss-dans-la-deuxieme-guerre-mondiale/

[4Frances Stonor Saunders, Qui mène la danse, la Guerre froide culturelle Denoël, 2004 ; traduction de The cultural Cold War : the CIA and the world of art and letters, New York, The New Press, 1999, origine de la pagination présente, p. 347-351 sur Neruda ; sur Sartre, souvent cité, index.

[5Seuls les noms des sept sont cités, pas leur qualité : Emi Okubo est musicien ; Sonia Romero, artiste ; Karine Bach, monteuse sur France Télévisions ; Thomas Marlier, réalisateur ; Kévin Accart, assistant monteur ; Philippe Sinibaldi, gérant de société de production.

[6Frédéric Charpier, Histoire de l’extrême gauche trotskiste : De 1929 à nos jours, Paris, éditions 1, 2002.

[7Lacroix-Riz, Impérialismes dominants, réformisme et scissions syndicales, 1939-1949, Montreuil, Le Temps des cerises, 2015, chap. 1, et De Munich à Vichy, l’assassinat de la 3e République, 1938-1940, Paris, Armand Colin, 2008, chap. 3 et 6.

[8Sur Jacques Barnaud, tuteur depuis 1933-1934 de l’héritier présomptif de Jouhaux René Belin, directeur de cabinet de Belin (juillet 1940-février 1941) et véritable ministre du Travail quand son pupille occupait officiellement le poste ; sur les Nouveaux Cahiers, Lacroix-Riz, Le choix de la défaite, De Munich à Vichy et Industriels et banquiers français sous l’Occupation, Paris, Armand Colin, 2013.

[9Du Moulin de Labarthète, « La synarchie française », article publié le 25 mai 1944 dans la revue helvétique Le Curieux, sous le pseudonyme de Philippe Magne, joint au rapport de « l’inspecteur spécial » de la PJ Vilatte, chargé à la Libération de l’enquête « sur la synarchie », 1er juin 1947, PJ 40, Barnaud, APP.

[10Roger Faligot et Rémi Kauffer, « La revanche de M. Georges » (Albertini), in Éminences grises, Paris, Fayard, 199, p. 150 (p. 135-170) ; Emmanuelle Loyer, Paris à New York. Intellectuels et artistes français en exil (1940-1947), Paris, Hachette, 2007 ; Peter Coleman, The Liberal Conspiracy : the Congress for Cultural Freedom and the Struggle for the Mind of Postwar Europe, New York, Free Press, 1989, index, ouvrage non traduit dans lequel Pierre Grémion, Intelligence de l’Anticommunisme : Le Congrès pour la Liberté de la Culture à Paris 1950-1975, Paris : Fayard, 1997, a très largement puisé ; Lacroix-Riz, « La Banque Worms et l’Institut d’histoire sociale » et « Des champions de l’Ukraine indépendante et martyre à l’institut d’histoire sociale », http://www.historiographie.info/champuk.pdf

[11N. 10, et Jean Lévy, Le Dossier Georges Albertini. Une intelligence avec l’ennemi. L’Harmattan-Le Pavillon 1992 ; Charpier, Génération Occident, Paris, Seuil, 2005 ; La CIA en France : 60 ans d’ingérence dans les affaires françaises Paris, Seuil, 2008 ; Les valets de la guerre froide : comment la République a recyclé les collabos, Paris, François Bourin éd., Paris, 2013 ; BenoîtCollombat et David Servenay, dir., Histoire secrète du patronat : de 1945 à nos jours. Paris, La Découverte, Arte éditions, 2e édition, 2014 (dont article de Charpier) ; Lacroix-Riz, tous les op. cit. supra ; Saunders, op. cit., etc.


COMMENTAIRES  

08/11/2015 18:43 par CN46400

Curieusement ce documentaire était proposé juste avant un autre, d’un tonneau voisin, sur Poutine. Mais c’était sans doute totalement fortuit, juste une coïncidence... Mais revenons à Staline.

La critique, très serrée, d’ALR est évidemment pertinente. Mais elle ne relève pas que la critique exclusive du dictateur est un arbre qui cache la forêt des autres responsabilités. Responsabilités économiques, politiques et intellectuelles qui doivent être situées si on veut éviter, à l’avenir, d’autres démarches aussi calamiteuses.
A partir du moment où on se limite aux responsabilités du N1, on s’exonère des conditions du moment et des choix économiques, donc politiques qui ont conduit à l’intronisation du N1, aussi bien qu’à la victoire de 45 ou au désastre final. En évitant de traiter de la NEP, du "socialisme dans un seul pays", on ne peut plus comprendre pourquoi, sans aucun coup d’état, le N1 a, quand même, capté tous les pouvoirs. Et a trouvé assez de forces politiques pour engager un pays de 200 millions d’âmes, dans un processus volontariste ubuesque.
60 années après, c’est donc, encore, l’explication, purement politicienne, de Kroutchev qui prévaut, aussi bien chez les Costelle que chez ceux qui croient avoir fait le tour du pb en désignant de manière péremptoire le mal dans le "déficit démocratique" ou la "dictature du prolétariat", formules simplistes, galvaudées, rejetons, mal dégrossis, de la langue de bois post stalinienne.
Comme si les politiques économiques que chacun s’accorde à placer en première ligne chaque fois qu’on parle d’un pays bourgeois, devenaient secondaires quand il est question de l’URSS.
Le "prolétaires unissez vous" de Marx commande à tous les communistes de veiller à unir le prolétariat, mais il commande aussi, en filigrane, à travailler à diviser la bourgeoisie. Or en cherchant à intéresser, par la NEP, le capital, notamment allemand et US, au développement de l’URSS, Lénine divisait la bourgeoisie entre ceux qui voulaient détruire l’URSS et ceux, les plus cupides, qui voulaient tenter de tirer des profits de son développement. Avec le "socialisme dans un seul pays", autarcique par définition, Staline refaisait, contre l’URSS, l’union des bourgeoisie des pays développés. Bien sûr, personne ne peut affirmer que la situation politique européenne en aurait été transformée, mais Hitler n’aurait peut-être pas trouvé autant d’appui parmi ces bourgeoisies. Sans oublier que l’Internationale aurait peut-être pu, en 33, dans ce contexte, bloquer la montée de Hitler au pouvoir en rendant possible une unité d’action SPD-KPD (55% des voix contre 35% aux nazis)

08/11/2015 19:57 par T 34

Première partie de soiré : propagande anticommuniste sur Staline.
Seconde partie de soirée : propagande russophobe contre Poutine.

Ce qu’a diffusé France 2 sur Staline peut -être résumé dans cette chanson : Slava Staline

Traduction

C’était un sauvage, un barbare, un génocidaire et il manquait de sympathie
Un assassin d’enfant, Il mangeait les enfants vivants !!
Il voulait seulement du pouvoir et encore plus de pouvoir
Il était boiteux et était laid ... un traitre qui quand il gouverna
laissa des trainées d’hémoglobine

Il voulait tuer tout le monde et a fait 6.000.000.000.000.000.000 de morts
plus ou moins, je ne sais pas très sur (des chiffres)

J’ai éternué ... je suis sur que c’est de la faute de Staline
Ma fiancé m’a quitté avant-hier ... je suis sur que Staline a quelque chose à voir là dedans

Staline libéra le monde des nazis en suivant l’œuvre de Lénine
Quel con me parle du camarade Staline ?
Staline... Quel con me parle du camarade Staline ?
Camarade Staline, Slava (vive en russe) Staline

PS : quelques commentaires de la chanson :

Staline était tellement maléfique qu’il tuait les gens puis les ressuscitaient pour pouvoir les tuer de nouveau. (Comme Kim Jon Un avec son ex).

Staline dévorait le bébé en commençant par les jambes pour pouvoir écouter les cris de douleur - donnée fiable.

Hahaha, oui j’ai entendu qu’il sacrifiait des vierges et qu’ils e baignait dans son sang pour rester toujours jeune, je crois qu’on pouvait le voir voler dans le ciel de Stalingrad avec ses grande ailes noires à la recherche de victimes. Comme il était un démon après les avoir tuer ils descendait en enfer pour dévorer leurs âmes et sans que personne ne le sache il viola Hitler dans le Reichstag.

08/11/2015 22:31 par Luniterre

En mettant fin à la NEP, Staline et ses partisans ont simplement pris les mesures de salut public qui s’imposaient pour empêcher l’aggravation de la catastrophe qu’elle avait engendrée, notamment avec l’accaparement spéculatif des réserves alimentaires par les Koulaks et les Nepmens.

Ce que démontre par soi-même la constance et aussi la violence des luttes politique de l’époque, c’est précisément que le pouvoir "absolu" de Staline est plus une fiction pseudo-"historique" qu’une réalité...

C’est aussi ce que montre, précisément, une étude sérieuse des sources, même accessibles au public.
https://tribunemlreypa.wordpress.com/2015/11/06/en-reponse-au-mensonge-mediatique/

Et enfin, comment peut-il être "ubuesque" le processus d’industrialisation qui a permis la victoire sur le nazisme ?
Le vrai bilan du socialisme en URSS reste à faire...
Et les leçons positives et utiles, à en tirer.

Luniterre

09/11/2015 05:57 par Hamid Benzekri

Informons, débattons et agissons

Décidemment, les falsificateurs/propagandistes et leurs chiens de garde ne connaissent aucune limite pour imposer le fait accompli : un système capitaliste dit libéral semeur de guerres, de violences et de misère matérielle, intellectuelle et morale.
Pour cela la propagande, les contrevérités et les mensonges sont présentés aux citoyens -non avertis- comme la vérité.
Pour aller vite, après « le livre noir du communisme » voici un moyen d’information « public » mis au service d’une propagande à la Goebbels avec « apocalypse Staline ».

Voici la conclusion d’une analyse fouillée et documentée d’Annie Lacroix-Riz, Professeur émérite d’Histoire contemporaine, Paris VII. (*)
« On pourrait proposer au spectateur de visionner, en supprimant le son de cette projection grotesque, les bandes de « rushes » (les auteurs des films prétendent avoir livré du pur document brut, particulièrement authentique, mais le film de fiction, soviétique d’ailleurs, y occupe une part non négligeable). Il percevrait ainsi immédiatement qu’on pourrait faire une toute autre histoire de l’URSS sous Staline que celle qui s’appuie sur un matériau frelaté.
Là n’est pas l’essentiel. Le service public de télévision français a une fois de plus, en matière d’histoire, bafoué les principes minimaux de précaution scientifique et ridiculisé les spectateurs français, en leur servant un brouet de pure propagande antisoviétique : il avait déjà ouvert, entre 2011 et 2013, le service public aux seuls héritiers de Louis Renault, venus se lamenter, avec ou sans historiens complices, sur la spoliation de leur grand-père quasi résistant. Est-il normal que la société France Télévisions, financée par la redevance versée par tous les contribuables, se prête à une opération digne du « ministère de l’information et de la propagande » de Göbbels ? On attend le « débat » qu’impose la malhonnêteté avérée de l’entreprise. J’y participerai(s) volontiers. »

Voici ce qu’écrivait Mario Benedetti dans « El País » du 17 septembre 1990 (Ed. internationale), déjà, « … Sur les 180 interventions réalisées jusqu’à maintenant par les États-Unis ( soit plutôt plus que celles menées au cours des siècles par Gengis-khan, Alexandre le Grand, Jules César, Hernan Cortés, Napoléon, Hitler, Mussolini et Staline tous réunis ), près de la moitié concerne des pays d’Amérique Latine… »
Sans parler des dernières interventions qui se poursuivent sous nos yeux en Irak, en Afghanistan, au Pakistan, au Yémen, en Syrie, en Palestine, en Afrique… et des autres crimes commis dans des centres de tortures révélés, en partie, par le fait du hasard et/ou par le courage de femmes et hommes indignés par de telles monstruosités …
Sans parler des autres crimes révélés par le site Wikileaks …
Peut-on continuer à croire aux fables du choc des civilisations, de la lutte contre le terrorisme, du combat pour la démocratie et la libération de la femme ?
Croire tout ce que nous servent et resservent ces machines à décerveler qui se sont spécialisées dans la propagande et la désinformation ?
Et si Hitler, Mussolini et consorts ont été qualifiés de monstres ; comment pourrait-on qualifier les États-Unis et Israël ?
La barbarie « civilisée » et ses portevoix sont mal, très mal placés pour donner des leçons sur le respect dû à la vie…
Qui arment et encadrent, aujourd’hui encore, les mercenaires, d’Al Qaïda, d’An Nosra,…, de Boko Haram et du Daesh, équipés et payés par leurs fidèles alliés, les régimes arabes réactionnaires d’Arabie Saoudite, du Qatar… ?
Qui reconnait avoir livré des armes à ces mercenaires pour « neutraliser » B.Al Assad ?
Qui veut choisir à la place des libyens, des palestiniens, des afghans, des africains, des Latino-américains et des syriens ?
Qui trouvent que ces mercenaires low cost « font du bon boulot » ?

Une autre alternative à cette barbarie « civilisée » existe.
Elle repose sur un principe simple : l’humain d’abord
Elle exige un partage équitable et juste des avoirs et des devoirs
Elle nécessite un engagement de chacun(e) pour arracher nos droits et nos libertés

Les moyens d’information, aussi, font parties de nos biens communs, ne les laissons entre les mains de ceux qui nous manipulent au quotidien -avec la compromission de consciences faibles achetées- pour nous rendre éternellement complices de cette servitude volontaire… Servitude dont rêvent les défenseurs du système capitaliste source de profits et de luxe indécents de quelques-uns éclaboussant la misère noire de beaucoup d’autres qui réclament en silence, qui réclament avec les yeux… Les rapaces volent, volent de plus en plus et font mine de ne rien entendre et de ne rien voir…
On fait quoi ? On les laisse parader en tenue de parade et poursuivre leur bal masqué ou on les déshabille pour les ramener à la raison ?
(*) « Les sources de la série ‘Apocalypse Staline’ sur France 2 », par Annie Lacroix-Riz.
NB : j’avais écrit mon texte suite à cette contribution reçue il a peu et avant de la revoir aujourd’hui dans le site LGS. Désolé si cela fait doublant... Je suis parti de la conclusion... de Annie Lacroix-Riz

09/11/2015 09:12 par CN46400

@ luniterre

Vous admettez que c’est bien Staline qui a mis un terme à la NEP, mais vous êtes bien incapable de produire un texte de Staline expliquant ce changement de pied par rapport à la politique de Lénine que, jusque là, il a, consciencieusement, défendue en public. En fait, plutôt que s’appuyer sur les résultat positifs évidents sur tous les approvisionnements des populations, Staline, au lieu d’expliquer aux jeunes adhérents, post guerre civile, ( ex Kroutchev) le B A BA de Marx sur la nécessité de l’accumulation primitive du capital pour démarrer une expérience communiste, a décidé de conquérir les pouvoirs qui lui échappaient encore en s’appuyant sur la perception par ces jeunes des inégalités voyantes dues à la NEP. Une démagogie politique classique sous tous les cieux, qui proposait, en autarcie, de construire une "société radieuse" qui par son exemple devait servir de phare au autres nations.

Avec le "socialisme dans un seul pays" de Staline, on changeait de paradigme. Plus de capitaux étrangers, d’abord l’industrie lourde, le travail nourrit le travailleur, mais c’est tout, il est, soit volontaire (Il y en avait...), soit obligé (quota par village...) soit forcé (pénitentiaire plus ou moins justifié...). C’est aussi la ruralité qui fournit l’essentiel de la force de travail, moins de paysans pauvres mais plus de "koulak" et surtout des paysans moyens que Lénine considérait comme étant les agriculteurs les plus compétents appelés, dans une lettre à Renaud Jean (député du Lot et Garonne des années 20) à devenir l’axe de la nouvelle classe paysanne soviétique.... A l’exode rural classique qui voyait des paysans pauvres aller, dans les usines, trouver un travail plus rémunérateur, Staline a substitué un exode rural forcé qui amène un grand nombre d’ouvrier à vivre cette mutation plutôt comme une punition que comme une promotion.

L’alliance de classe que Lénine voulait, par les échanges mutuellement profitables des productions, sceller entre les ouvriers et la paysannerie, la faucille et le marteau, est soumise, par la politique stalinienne,à une épreuve telle qu’elle n’attendra jamais sa pleine réalisation. Aujourd’hui encore, la Russie importe beaucoup de sa subsistance.

09/11/2015 09:51 par Pascal de Nice

Ouf, ça me rassure qu’on soit nombreux à penser que cet Apocalypse c’était de la m... en barre.

Déjà, complètement d’accord sur le choix non- chronologique. Même moi qui ait fait des études d’histoires, je me suis perdu et ne comprenait plus le fil directeur.

Même si j’ai bien compris que c’ets pour balayer tout le contexte expliquant chaque décision de l’URSS.

Prenons un exemple : Je focalise tout le temps sur le pacte germano-sociétique. Aucune explication du pourquoi de ce pacte.

Staline a signé avec Hitler, bouh, honte à lui, lapidation. .... Mais qui parle aux français de l’accord du 6 décembre 1938 ? https://www.youtube.com/watch?v=f9zVf-JKfTM

Ribbentrop signe le 6 décembre 1938, avec le gouvernement français représenté par Georges Bonnet, une déclaration exprimant leur volonté de « collaboration pacifique », aux termes de laquelle les parties s’engagent à se concerter mutuellement sur les questions intéressant les deux pays en cas de difficultés internationales et considèrent leurs frontières comme définitives. En se rapprochant de l’Allemagne, la France abandonne sa politique d’intransigeance qui avait prévalu jusque là. Malgré les assurances répétées par Bonnet, les ministres et les ambassadeurs de Tchécoslovaquie, de Pologne et de l’URSS ne se font pas trop d’illusion. Ils sentent que dans les faits les liens avec la France se relâchent.

Mais Staline aurait dû ne rien faire et se laisser plumer. la France avait le droit de signer un accord avec l’Allemagne, pas les russes ! L’Allemagne a en fait fait le choix de se tourner d’abord vers l’Est. Pour des raisons d’ordre économique, nous l’avons vu, mais aussi car la Grande-Bretagne aurait été intransigeante face à des revendications en Europe occidentale alors qu’elle était beaucoup plus disposée à fermer les yeux sur l’Europe de l’Est. Ce ne sont pas les idées de Hitler qui ont changé mais simplement l’ordre de ses priorités.
La déclaration Bonnet-Ribbentrop est pour l’Allemagne un moyen de continuer son avancée à l’Est. Hitler et Ribbentrop cherchent à apaiser la France avant, ce que le nationaliste Kérillis appelle, « la grande affaire ». En d’autres termes Hitler et Ribbentrop font patienter la France avant que son tour ne vienne.

Et qui parle des accords de 1935 sur l’assitance franco-russe, signé à Paris par Pierre Laval, ministre des affaires étrangères et sénateur, et Vladimir Potemkine, membre du Comité central exécutif et ambassadeur d’URSS en France. Qui rappellera que le traité n’a jamais été appliqué car la coopération dans le domaine militaire s’est heurtée à l’hostilité de l’état-major français que les gouvernements successifs n’ont pas cherché à contourner.

Mais là aussi, Staline aurait dû ne rien faire et se laisser envahir gentiment.

Indigne d’un service public de passer une émission de propagande en faisant croire qu’elle était historique.

Est-ce qu’on a une adresse pour écrire aux auteurs ?

09/11/2015 10:28 par xpfo

Dans le 1e documentaire, il nous est dit que Lénine prit le pouvoir par la force en décrétant la dictature du prolétariat 3 semaines après le 7-8 novembre 17 suite à des élections perdues (168 députés bolcheviks contre 400 plus "modérés" nous dit la voix d’outre tombe). Qui peut m’en dire davantage ? Je n’avais jamais entendu cela et n’ai su que répondre quand je fus interpellé sur ce point. Merci.

Pour le reste, j’ai été consterné par cette présentation construite en parallélisme flagrant entre Hitler et Staline. Tout est fait dans l’époque actuelle pour nous convaincre qu’aucune alternative n’est possible. Des crimes à l’écran avec l’internationale en musique de fond, rien de tel pour bien dégoûter les esprits des pauvres gens devant leur télé ! Et comme le cerveau consomme moins d’énergie quand il gobe passivement n’importe quoi face à un écran que quand il dort, ça donne à nos désinformateurs en chef des armes de destructions massives en puissance.

Allez, tous au front à la bataille des idées !

09/11/2015 13:49 par CN46400

Bonjour Luniterre,

J’ai pris le temps de suivre votre lien. Si j’avais 18 ans, l’age que j’avais quand j’ai adhéré au PCF, j’aurais sans doute approuvé votre prose, et surtout je me serais enthousiasmé pour la constitution de 36. Sauf que je n’ai plus 18 ans et que je sais qu’en 37-38 le "camarade" Staline qui semble, en 36, prêcher la modération, a fait exécuter 790 000 individus, dont beaucoup de communistes, catalogués "ennemis du peuple". On peut toujours imaginer qu’il y avait là pas mal d’arrivistes, mais on sait que certains ont été cochés, de la main de Staline, sur des listes qu’il ne connaissait même pas. Vous avez donné aussi un lien avec la critique de cette constitution par Trotski, on vous en remercie, quelle lumière par rapport au monument de langue de bois précédent !

Enfin, dans votre post vous semblez ne rien comprendre à l’accumulation primitive du capital que visait Lénine avec la NEP. En 74, lors de la campagne présidentielle, Marchais est venu dans mon entreprise (Telecom Arcueil) pour une réunion d’entreprise. Au cours du repas qui a suivis à la cantine il vint à parler d’un récent voyage en URSS :
Il m’ont fait visiter une entreprise aéronautique, je leur ai demandé de me montrer l’atelier de contrôle des pièces. J’ai été sidéré, il y avait plus de pièces au rebut que déclarées bonnes. Chez "Voisin" avec un tel résultat on était tous foutu dehors !
L’accumulation du capital c’est aussi cela, compétence des travailleurs, amour du travail bien fait. Le "socialisme dans un seul pays" n’a pas résolu ce pb et ce n’est sans doute pas neutre dans l’échec final......

09/11/2015 19:43 par CN46400

@xpfo

La dictature du prolétariat est l’antithèse de la dictature de la bourgeoisie. De même que lorsqu’elle détient le pouvoir politique, la bourgeoisie impose la prééminence de ses intérêts, le prolétariat, au pouvoir, doit imposer la prééminence de ses intérêts. Marx utilise cette formule à partir de 1875 dans la "critique du programme de Gotha" du parti socialiste allemand (SPD) qu’il accuse d’avoir sacrifié certains intérêts du prolétariat dans un compromis avec un autre parti allemand. Cette dictature s’applique d’abord aux dirigeants. De même que Sarko, en se rasant, se demande ce qu’il va pouvoir faire dans l’intérêt des bourgeois, un dirigeant du prolétariat doit d’abord penser aux intérêts des prolos.
>https://fr.wikipedia.org/wiki/Critique_du_programme_de_Gotha]

09/11/2015 20:03 par CN46400

@pascal de nice

Le pacte de 39 n’est ni plus ni moins que la réponse de Staline à celui de Munich de 38. Tout le reste n’est que filouterie diplomatique de nos "synarchistes" qui voulaient 70 ans après la commune de Paris, lever, pour un nouveau temps, l’hypothèque des "partageux" rouges.

Sauf que du début à la fin, Staline, contrairement au roman de Kroutchev de 56, a maitrisé son pb (voir Joukov). Devant lui, il avait le complexe militaro-industriel franco-allemand au grand complet. Sa stratégie était arrêtée des années avant 41, exact inverse de Hitler, tout venant, largement sacrifiable, à l’avant, élites derrière Moscou et Leningrad qui sont sanctuarisées. Ces soldats qui viennent d’étriller les japonnais en Manchourie n’interviendront que lorsque les élites allemandes seront usées. En juin 41, il observe que la fenêtre, pour les nazis, est en train de se refermer, c’est pour cela qu’il reste de marbre devant tous les signes annonciateurs de l’agression. Retarder l’échéance d’un an, en terme de défense aurait changé la donne (Les nazis mettront un mois avant d’investir Brest-Litvosk bien préparée...).

Reste que la situation diplomatique européenne aurait sans doute été fort différente si la NEP, en intéressant une partie de la bourgeoisie mondiale, notamment allemande, au développement de l’URSS, avait survécu à Lénine....

09/11/2015 20:40 par Nicolas

@ CN 46400
J’ai l’impression que vous mélangez tout. Comment prétendez vous nous expliquer la NEP et l’histoire soviétique en nous disant qu’Arcueil Télécom en 1974 était une entreprise ?
Non monsieur c’était une administration, celle des PTT, et située au 64 av Lénine.
J’y ai moi même commencé ma carrière.
Quant à la remarque de Marchais je dirais qu’il a eu des hauts et des bas, avec heureusement le globalement positif de 1980.

09/11/2015 20:44 par SEPH

En réponse à cette émission de propagande ignoble : aujourd’hui, plus de 52% ,des Russes considèrent positif ou très positif la politique menée par Staline, il est considéré , à juste titre, comme un très grand homme d’État.

Ceux qui ont gouverné, par la suite, n’ont pas été à la hauteur des espérances du peuple soviétique : Khrouchtchev un clown déviationniste, Gorbatchev a liquidé le parti communiste soviétique et Eltsine a liquidé l’URSS. qui ont tous abandonné les valeurs de la révolution d’octobre.

09/11/2015 21:35 par Paul Euzière

A lire :
"Le socialisme trahi. Les causes de la chute de l’URSS".
Roger KEERAN, Thomas KENNY
Edition Delga.

09/11/2015 22:24 par xpfo

@CN46400
Merci pour votre réponse rapide et le lien. La notion de dictature du prolétariat et de lutte des classes me sont familières, je vous rassure. Je me suis mal exprimé. C’est plus à propos de ces élections perdues 3 semaines après la prise du pouvoir que je me questionne. D’après ce que j’avais lu et cru comprendre, les aspirations de la majorité de la population et les desseins des bolcheviks concordaient au moment de la révolution d’octobre. ça me semble incompatible avec une raclée électorale 20 jours plus tard comme le prétend le documentaire (à moins qu’il ne s’agisse pas de suffrage universel bien entendu ou que le scrutin soit biaisé). Pour reprendre le site d’universalis : "Durant un bref mais décisif instant, l’action des bolcheviks, minorité politique agissant dans le vide institutionnel ambiant, alla dans le sens des aspirations du plus grand nombre : la terre, la paix, le contrôle ouvrier, tout le pouvoir aux soviets, l’émancipation des nationalités. Momentanément, coup d’État politique et révolution sociale confluèrent, avant de diverger (.....)". Voilà ce que j’avais en tête avant de visionner ce "machin".
Donc je précise mon interrogation : Y a-t-il mensonge gros comme un camion de la part du documentaire, ou interprétation d’un fait historique sous un angle à charge de Lénine, ou Lénine-le-monstre gouverna-t-il contre la volonté populaire dès décembre 1917 ?
Pour ma part et sans être un spécialiste, je n’avais jamais entendu parler de ces élections.

10/11/2015 00:01 par CN46400

@ pascal de nice

Il s’agit de la constituante prévue par la révolution de février, convoquée par Kerenski en juin 17 dont les opérations de vote se sont étalées sur de nombreuses semaines. Première élections dans un pays en guerre et en révolution d’où divers pb de fiabilité avec des résultats variables, proclamés en décembre 17, mais toujours favorables aux SR, plus connus dans les campagnes que les bolchevics .hhttps://fr.wikipedia.org/wiki/Assem...

10/11/2015 05:33 par Luniterre

Bonjour,

@CN46400

Et à tous ceux qui lui ont fort bien répondu à ma place...

En effet, certains aspects de ce débat ressemblent forcément à celui que nous avons déjà eu sur Agoravox...

CN46400, tu veux toujours et absolument faire porter à Staline la responsabilité de la défaite du socialisme en URSS...

Je n’essaye pas de faire une défense inconditionnelle de Staline, mais simplement une recherche basée sur le matérialisme historique et la dialectique.

Je suis donc amené à te remettre en réponse un quasi copié-collé d’un précédent post sur ce point, car si nos analyses peuvent évoluer, la réalité historique, elle, ne change pas...

Mais auparavant, je rajouterai, en fonction du débat nouveau, ce simple argument... :

(Déjà évoqué dans https://tribunemlreypa.wordpress.com/2015/11/06/en-reponse-au-mensonge-mediatique/ )

En termes d’accumulation de forces productives, il y a un effet concret qui vient nécessairement au secours du processus "stalinien" d’industrialisation rapide et intensive :

Dès Décembre 1941 les nazis se sont grave cassé le nez aux portes de Moscou...

Et donc, malgré toutes les difficultés immenses qu’ont eu à affronter les bolchos "staliniens", et aussi les erreurs qu’ils ont pu commettre, et qu’il serait stupide, sectaire et dogmatique de nier, on ne peut qu’en conclure, même sans être un expert en économie, qu’il se battaient vraisemblablement avec autre chose que des haches de pierre, des arcs et des flèches...

( Vu le surnom, je suis tranquille, ce n’est pas "T34" qui me démentira...)

Mais évidemment, l’histoire de l’URSS va bien au delà, et c’est pourquoi je t’avais répondu, à l’époque, pourtant toute récente :

"Entre 1945 et 1991, il y a presque un demi-siècle, et de 1953, mort de Staline, à 1991, effondrement de l’URSS, plusieurs générations de dirigeants se sont succédé en Union Soviétique.

Vouloir absolument lui imputer les causes de ce désastre ne ressort donc tout simplement pas de la logique, mais du préjugé…

Staline a laissé derrière lui une URSS puissante et encore en pleine ascension dans tous les domaines, malgré l’adversité redoutable de l’impérialisme US et de son emprise usurpée sur l’Europe grâce à son attentisme primitif dans le conflit mondial, où il a ainsi préservé l’essentiel de ses forces pour « tirer les marrons du feu » !

Assimiler la politique de Khrouchtchev et ses successeurs à celle de Staline, même s’il ne s’agit pas de faire le panégyrique absolu de Staline, relève manifestement de la contre-vérité historique.

Des études existent à ce sujet, même si elles sont encore incomplètes. Mais le mieux est de s’en reporter au dernier bouquin de Staline lui-même sur le sujet : « Les problèmes économiques du socialisme en URSS ». Ce livre contient en grande partie des polémiques avec les révisionnistes déjà largement actifs de son vivant, mettant à mal la théorie de Staline « dictateur absolu » et incapable de confrontation idéologique.

Les thèses révisionnistes combattues dans cet ouvrage sont celles qui furent mises en œuvre dans les années suivant la mort de Staline, et qui ont « inspiré » différentes révisions du « Manuel économique » de l’Académie des sciences soviétiques."

Pour ceux que cela intéresse, ce débat est encore visible, à la suite de l’article de CN46400 sur Agoravox :

http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/55-annees-avant-dallas-un-coup-de-172369

Son article et cette partie du débat sont également repris sur TML :

https://tribunemlreypa.wordpress.com/2015/10/21/en-reponse-a-un-adepte-de-deng-xiaoping-et-successeurs/

La fin du débat sur Agoravox, qui porte sur les incidents en Mer de Chine, est en grande partie à l’origine de cet autre article :

https://tribunemlreypa.wordpress.com/2015/10/28/tous-sur-la-syrie-mais-quest-ce-qui-fait-bouger-le-panier-de-crabes-imperialistes/

repris sur Agoravox :

http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/tous-sur-la-syrie-mais-qu-est-ce-173503

Mais c’est déjà une autre histoire...

Luniterre

10/11/2015 08:04 par macno

A mon humble avis, mais n’étant vraiment pas un pilier du petit écran je n’ai pas pu voir ce "documentaire", disserter sur son fond politico-historique c’est s’éloigner complètement du sujet, du problème plus précisément.
Il faudrait plutôt se poser 2 questions :
- Celle du pourquoi un tel "documentaire", d’après ce que j’ai compris pour le moins orienté, passe en un moment d’une géopolitique brûlante, où la position de la France vis à vis de la Russie est des plus troubles, que ce soit en Syrie en Ukraine ou ailleurs.
- Celle du pourquoi un documentaire, de plus nettement orienté, arrive sur une chaîne publique, oserai-je dire comme "un cheveux sur la soupe", sans mise en perspective mondiale et sans contradiction. À ce que j’ai cru savoir, à la suite de cette soirée est passé un documentaire (lui aussi "orienté" ?) sur Poutine...
Orienté ou pas, beaucoup de "couche tôt" feront "naturellement" l’amalgame sur une soirée-dictateur-fou-soviétique...
J’ai pu très souvent me rendre compte que beaucoup des réactions de personnes "normalement" informées par nos "courageux" journalistes, tendent à prouver qu’elles ne sont pas sorties de la vision guerre-froide-soviétique-le-couteau-entre-les-dents, et qu’elle reporte systématiquement ces clichés sur la Russie actuelle...
Ben voilà, de Staline à Poutine la boucle est bouclée...C’est-y pas beau ça ?
Vous avez dit "république bananière" ?
La différence principale entre un documentaire (même honnête) et un film de propagande pure, réside dans le choix du moment où il est (décidé d’être) diffusé...
S’attaquer à relater au moyen d’une "série télévisée" ce que furent les 80 ans d’Histoire dans la tourmente d’un siècle fou de ce presque Continent que fut l’Union Soviétique, même au moyen d’images colorisées, ne peut aboutir qu’à produire une œuvre de malfaiteurs.
Mais que fait le CSA ?
Il en est au dessert...

10/11/2015 09:55 par Ardwenn

ll est quand même assez remarquable qu’un régime aussi orwellien que le régime français, dont les méthodes évoquent de plus en plus les méthodes staliniennes, vitupère autant contre celui qu’il devrait, en bonne logique, considérer avec le respect qu’on doit à un inspirateur de génie...
Mais bon. restons orwelliens, et suggérons donc que pour eux, "dénigrer c’est glorifier".

10/11/2015 10:13 par Luniterre

"Durant un bref mais décisif instant, l’action des bolcheviks, minorité politique agissant dans le vide institutionnel ambiant, alla dans le sens des aspirations du plus grand nombre : la terre, la paix, le contrôle ouvrier, tout le pouvoir aux soviets, l’émancipation des nationalités. Momentanément, coup d’État politique et révolution sociale confluèrent, avant de diverger, ouvrant la voie à un affrontement entre la société et le nouveau régime, et, à terme, à des décennies de dictature politique. "

Cette "approche" n’est en réalité que celle de Nicolas Werth, auteur de cet "article" Universalis et co-auteur du "Livre noir du communisme".

Elle a néanmoins sa part de vérité historique... Le processus électoral qui a conduit à ces élections était déjà engagé (Kerensky, juin 1917) bien avant l’insurrection d’Octobre, et sur les base du parlementarisme bourgeois, encore relativement nouveau en Russie.

Il y a incontestablement une contradiction de nature de classe entre le processus démocratique des soviets et ce type de parlementarisme. Au lendemain de l’insurrection, décidée en accord avec les soviets, une réaction "unitaire" s’est réellement opérée dans ce processus parlementaire, combinant majoritairement les voix des droites et des gauches modérées, autour du programme des SR...

L’assemblée, ainsi élue, ne s’est réunie qu’en janvier 1918, pour être rapidement dissoute sur décision du Congrès des Soviets.

Lénine, Thèses sur l’Assemblée constituante

https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1917/12/vl19171225.htm

Luniterre

10/11/2015 12:32 par CN46400

@ luniterre

Vous dites que je charge exagérément Staline sur le chute de l’URSS. Ce que je charge c’est le choix que Staline a fait, après la disparition de Lénine, de troquer la NEP contre le "socialisme dans un seul pays" et qui, à mon avis, conditionne le reste de l’histoire de l’URSS jusqu’au bout. Parcequ’à moins qu’on me prouve le contraire, aucun des dirigeants successeur de Staline, Gorbachev y compris, n’a mis en cause ce choix. Staline n’a même pas eu besoin d’argumenter, il a trouvé une majorité de communistes, que je qualifie de neo-communistes en fonction de leur age et de leur connaissance limitée du marxisme dont le spécimen le plus achevé est sans doute Kroutchev. Parmi les anciens, seul Trotski à réagi et est parvenu, mais sans parler de la NEP, à faire disparaître le flacon du "socialisme dans un seul pays", mais pas le contenu. Pourtant comme Boukharine, Trotski avait largement débattu avec Lénine de la NEP et du "capitalisme d’état" qui la soustendait . Du coup, leur responsabilité se trouve engagée, bien qu’ils aient comme les autres, Zinoviev, Kamenev ...etc, payé de leur vie ce "laisser faire".

10/11/2015 15:05 par Luniterre

@CN46400

Re-bonjour,

On ne peut pas refaire entre nous le même débat sur tous les forums, et je ne souhaite pas monopoliser le forum de LGS, mais d’abord essayer de compléter l’info des lecteurs.

Tu dis avoir suivi le lien, mais apparemment, c’est encore de façon sélective, car le Pr. Grover Furr explique déjà, fort bien la contradiction entre le discours de Staline sur le projet, et la réalité sur le terrain, où les bureaucrates réacs et les trotskystes restent très actifs, et alliés objectifs contre la réforme, si l’on lit simplement Trotsky...

"Staline qui semble, en 36, prêcher la modération, a fait exécuter 790 000 individus, dont beaucoup de communistes, catalogués "ennemis du peuple".

Quelles sont tes sources, concernant ces chiffres ?

Dans mon article je fais allusion aux archives de Smolensk. Les connais-tu et connais-tu leur histoire et ce que les chercheurs US et notamment John Arch Getty on put en tirer ?

Voici un lien vers un article suédois, mais en français, qui s’appuie sur ces sources :

http://www.mariosousa.se/LutteClassesUnionSovietique.html

Encore plus simple, car basé froidement sur les stats de la mortalité, (mais en anglais)
ce forum, apparemment à dominante trotskyste, sur le fond, mais qui remet les vrais chiffres en ligne. Si la "purge" 1937-38 est déjà à relativiser en termes d’exclusions et, selon M. Sousa, politiquement explicable, elle est, par contre, carrément inexistante en termes de mortalité... :

http://www.soviet-empire.com/ussr/viewtopic.php?f=107&t=52250

Ce qui ne veut probablement pas dire "zéro exécutions", mais ramène la proportion réelle à ce qui était tragiquement inévitable dans le contexte de l’époque, et équivalent à d’autres situations historiques du même type. (Et de fait, complètement indétectable dans les chiffres réels de mortalité...)

Ce qui n’est pas équivalent, par contre, c’est précisément la construction du premier état socialiste. Alors, tout en restant lucides et historiquement objectifs, les vrais communistes ML doivent d’abord défendre cet héritage, et réfléchir aux leçons qu’il nous apporte pour le faire fructifier.

Comme je te l’ai déjà expliqué, CN48400, capitalisme ou socialisme, c’est le fond du débat, et il faut choisir.

Choisir son camp, et mener le combat idéologique en conséquence, et cela sans opportunisme ni dogmatisme, qui servent d’armes contre nous, dans tous les cas, et plus que jamais, avec la crise.

Luniterre

10/11/2015 15:52 par ozerfil

Il ne s’agit pas pour les journalistes, zélés vassaux du libéralisme économique, de tuer le communisme, qui est déjà mort, vaincu par le capitalisme, qui correspond mieux à la nature égoïste de l’Homme ; il s’agit de faire accepter aux masses le désastreux monde actuel en leur martelant qu’il peut y avoir pire...

C’est dans cet esprit qu’on nous rabâche sans arrêt la douloureuse expérience soviétique qui a finalement fait plus de bien au capitalisme que lui-même ne pouvait s’en faire et plus de mal aux idées progressistes que le capitalisme ne pouvait leur en faire...

10/11/2015 18:07 par CN46400

790 000 exécutions entre 36 et 38 , c’est le nombre de lignes du listing établi par l’association Mémorial (fondée par Sakharov). Je suppose que, si listing il y a, on peut vérifier la cause du déces de chaque nom... Moi j’en suis évidemment incapable.

Mais ce qui compte, c’est la fonction qui était dévolue à ce terrorisme de masse : faire endosser les échecs économiques aux voleurs en tous genres, de poules comme les comploteurs de haut vol imaginaires. Quand on ne peut plus embellir la réalité, on noircit l’imagination. L’important, pour les foules dépolitisées, c’est le contraste entre le paradis et l’enfer. A Rome ça dure depuis une vingtaine de siècles, mais il y a des signes d’essoufflement, à Moscou çà a duré moins longtemps....

Soljenitsine dont, au passage, on aurait pu circonscrire facilement l’impact politique, simplement en publiant la lettre, interceptée par la censure militaire en 45, qui l’a envoyé au goulag, a eu, pour la période 36-38 la formule ; "on en tuait 200 alors que 50 auraient suffit pour produire le même effet..."

J’ai suivi votre lien "Souza", il faudrait lui dire que ALR traite, bien mieux que lui, l’affaire Toukhatchevski qui était, parmi les quatre procés de Moscou, le seul qui reposait sur une réalité. Le reste c’est de la mise en scène populiste mis à part l’interview de Boukharine qui montre que les flics de Staline, pour les basses oeuvres, étaient bien plus efficaces que la plupart des prolos du "socialisme dans un seul pays"....A la Loubianka les pièces avaient les bonnes côtes !

10/11/2015 21:40 par Luniterre

@CN46400

"790 000 exécutions entre 36 et 38 , c’est le nombre de lignes du listing établi par l’association Mémorial (fondée par Sakharov). Je suppose que, si listing il y a, on peut vérifier la cause du déces de chaque nom... Moi j’en suis évidemment incapable. "

Je n’en ai pas les moyens non plus, mais je ne me contente pas de supposer que les ennemis du socialisme et du communisme ont raison, ni qu’ils ont forcément tort sur tout, d’ailleurs, même si la raison me dit qu’ils ont tort sur l’essentiel...

Je cherche simplement à comprendre, notamment par le recoupement des infos et des sources.

Sur ce forum anglophone,

http://www.soviet-empire.com/ussr/viewtopic.php?f=107&t=52250

où la tendance trotskysante dominante est assez similaire, sur les idées économiques, à celles de CN46400, il semble clairement établi, par le recoupement des sources sur les statistiques de mortalité, que rien ne vient corroborer la propagande occidentale sur les exécutions massives.

Faire des listes de gens effectivement morts pendant ces années et imputer ces morts à des exécutions massives, cela devient donc deux faits tout à fait différents si on ne peut les faire coïncider dans les stats de mortalité...

Le bon sens me dit qu’il faut arrêter de battre sa coulpe à chaque campagne d’intox de la bourgeoisie, et en ce moment, il y a une pression idéologique énorme de mise la dessus... Il faut aussi s’interroger à ce sujet, et plutôt contre-attaquer, sur les bases solides de l’histoire soviétique, au lieu d’aider le système à la saper...

J’ai personnellement eu l’occasion d’échanger avec Nicolas Werth, devant un public qui lui était tout acquis d’avance... Il a néanmoins convenu que les seules sources fiables concernant le Goulag sont celles établies par Arch Getty, accessibles par ce lien, que j’ai déjà mentionné dans l’article :

http://www.cercec.fr/materiaux/doc_membres/Gabor%20RITTERSPORN/Victims%20of%20the%20Gulag.pdf

Il a même reconnu, devant ce public, la validité statistique de la comparaison faite par Getty en 1996, année où les statistiques US donnaient 2,8 % de la population incarcérée, alors que la pire année de l’époque stalinienne atteignait 2,4%. (repris par M. Sousa http://www.mariosousa.se/lesmensongessurlunionsovietique.html )

Après, le reste est donc une question d’appréciation politique. La sienne et la mienne divergent au possible.

Il semble néanmoins avoir pris quelques distances avec les délires de Courtois. Ce qui ne l’empêche pas de cautionner un navet comme "Staline le tyran rouge", projeté carrément dans les écoles, avec la bénédiction de l’Éducation Nationale...

Est-ce que notre but est de valoriser l’expérience du socialisme pour en tirer des leçons et l’améliorer, ou bien continue-t-on à se tirer des balles dans le pied en rafales, pour complaire au bourgeois ?

Luniterre

11/11/2015 09:08 par CN46400

Je déteste la comptabilité des victimes. Les chiffres seraient-ils divisé par 2, 10, 100 ou 1000 qu’ils sont toujours excessifs. Qui peut croire que 75% des délégués au congrès "des vainqueurs" de 34 étaient des traîtres, ou des incapables au point d’être exécutés ? Sur les 115 élus au comité central 90 furent exécutés avant 41 ! Et Staline n’y serait pour rien ?
En fait, incapable d’obtenir assez de soutien politique pour son projet, par un raisonnement simplement marxiste, il a décidé, de l’obtenir par la terreur ! On est à des kms de la pédagogie de Lénine sur le sujet qui expliquait aux fileuses d’un usine de Moscou, que la NEP c’était pour plusieurs générations, que la concession à l’américain Vanderlip du Kamtchaka, c’était pour 50 ou 60 ans.....et qui pestait contre Krassine qui tardait à conclure une concession à l’allemand Krupp ( bien connu des ancien combattants de 14-18...) dans le domaine ...agricole !
Staline s’exonérait des lois économiques et sociales mises à jour par Marx. Exactement comme si Korolev, pour construire ses fusées, avait négligé la loi de la chute des corps de Newton.
D’ailleurs, ses succésseurs n’étaient pas en reste, Kroutchev nous avais promis le communisme pour 1980 en URSS, et Brejnev a prétendu un jour que les africains pourraient se passer du capitalisme avant d’atteindre le socialisme. Et tout ça en inaugurant une foison de statues de Lénine ou de Marx.... Marx dont l’enseignement était obligatoire en URSS avec comme produits finis ultimes : Gorbatchev et Eltsine...
Mais c’était le passé, parlons de l’avenir. Personne n’envisage sérieusement une reprise du système stalinien. Le monde est un village, dans 50 ans l’accumulation primitive du capital sera partout terminée. Sauf à se priver de l’apport sociétal de millions, ou de milliards, de chômeurs, il faudra bien que la raison, simplement raisonnable, triomphe pour dépasser le système capitaliste devenu obsolète, il l’est déjà en Occident, pour tout le monde. A ce moment là le système stalinien ne sera plu qu’une marque sur le sol : Attention Danger !

11/11/2015 09:08 par macno

@ CN46400 et @ Luniterre
Je ne veux pas interrompre votre discussion qui est intéressante, mais il se trouve que j’ai pu avoir l’opportunité et le temps de regarder le premier volet de ce que "je n’ose qualifier", sinon de "truc" sur "l’Apocalypse".
Il y a quelques années ayant eu pour but d’y voir plus clair, et surtout sans à priori, sur toute l’histoire de l’URSS, je m’étais lancé via Internet à faire des recherches. Devant la complexité de la tâche, j’avais sinon renoncé, du moins tout remis à plus tard...
Alors ce n’est peut-être pas ici le lieu idéal pour revoir tous les points en détails même importants, alors qu’à l’évidence « Apocalypse Staline » n’est pas un documentaire historique sérieux, c’est un objet de propagande, conscient ou inconscient, je n’en sais encore trop rien, mais qu’il faut prendre comme tel.
Toujours est-il que ce "documentaire" est pire que de la provocation, pire que mauvais, bien pire que ce que j’avais pu imaginer, et il est donc à mon avis vain de le commenter sur le fond ; le mépris et l’indignation sont les deux attitudes adéquates devant un tel "monument" que j’ai qualifié d’œuvre de malfaiteurs et je le maintiens, j’aurais d’ailleurs pu dire pire...
Tout y est mauvais, même Mathieu Kassovitz, en qui j’ai pourtant une certaine estime, a du faire un boulot sacrément alimentaire car cela se sent rien qu’à sa façon inhabituelle d’ânonner le commentaire, qui lui aussi est mauvais...
Il faut donc à mon avis, insérer ce "truc" de propagande dans le présent.
L’Occident a clairement et ouvertement déclaré la guerre de l’information, prétendument contre la propagande russe de Russia today, Sputnik et Cie, qui rassemblent en occident de plus en plus d’auditeurs.
La panique est réelle dans le camp de l’Occident, et il faut s’attendre à ce que tous les coups soient permis, même les plus improbables, incongrus ou autres, comme cette affaire qui vient de tomber sur le dopage des athlètes de la Fédération de Russie, mais curieusement en occident personne n’est concerné...
Dans ce C dans l’air, il se dit (pour une fois) des choses fort intéressantes : Argent et corruption :
http://www.france5.fr/emissions/c-dans-l-air/diffusions/10-11-2015_432938
C’est parti !

11/11/2015 11:36 par Luniterre

@macno

Effectivement, la question est de savoir si on tombe dans le piège de cette propagande grossière ou pas.

Mais aller dans le même sens, voire même en rajouter, comme certains qui se disent "de gauche", c’est carrément choisir son camp...

@CN46400

Je ne suis pas non plus pour une défense inconditionnelle de Staline, comme certains. Il a tenté de faire son possible dans des conditions quasiment extrêmes en permanence, et il a donc été amené à commettre des erreurs, incontestablement tragiques pour ceux qui en ont été victimes.

Mais la vérité historique exige de les remettre en proportion. Concernant l’affaire des "purges" de 1936-38, il se confirme qu’elles n’ont aucunement pu avoir un caractère massif, contrairement aux allégations des réacs.

Je viens de mettre en ligne sur TML un graphique qui en atteste, en complément des stats déjà évoquées sur le site :

http://www.soviet-empire.com/ussr/viewtopic.php?f=107&t=52250

L’intérêt est en outre qu’il provient d’une source tout à fait différente :

http://www.persee.fr/doc/pop_0032-4663_1958_hos_13_2_5812

Pour ceux que cela intéresse, le tout est en ligne sur TML, avec un lien vers le présent débat :

https://tribunemlreypa.wordpress.com/2015/11/11/lacroix-riz-histoire-sovietique-suite-du-debat-sur-lgs_1936-38_les-purges-expurgees/

Luniterre

11/11/2015 14:37 par xpfo

Au final, ce "documentaire" m’aura permis de me plonger dans cette époque historique et d’en approfondir la compréhension. Un travail absolument nécessaire pour tout qui se réclame de gauche et qui subit les attaques clichés habituelles sur tous les thèmes servis par les médias aux foules...qui ne lisent pas LGS (Corée du nord, Lider Maximo, Staline, Goulag, dictature syndicale, Pol Pot, prise en otage du brave citoyen et ainsi de suite, pour ne reprendre que ce que j’ai déjà entendu de mes oreilles sur le lieu du travail).

Merci à LGS de rendre possible une autre compréhension du monde, une autre lecture des événements, et aux commentateurs pour leur expertise. Un passage par ici me permet très souvent d’affûter les arguments qui sont d’une importance cruciale alors que nous subissons une attaque sans précédent contre le syndicalisme et que le droit de grève est gravement menacé ici en Belgique (jusqu’à 2 ans de prison pour un piquet de grève dans une proposition de loi émanant du parti du 1e ministre).

Tout ça vaut bien une contribution

Pour info https://www.facebook.com/CSC.Ens/posts/1644493329161677:0

11/11/2015 15:42 par macno

@ Luniterre
Je ne pense même pas qu’il y a de "piège grossier".
J’avoue ne pas trop savoir que penser.
Il se peut tout simplement aussi que ce "documentaire" ait été une œuvre de pure...bêtise, dit ainsi vraiment pour rester poli.
Il est ahurissant d’avoir sorti un tel documentaire sur un sujet (Staline) encore (et plus que jamais) à fleur de peau en Russie, et surtout en ces moments de relations diplomatiques tendues entre la France (l’Occident) et la Russie...
Qu’auraient dit certains si un succulent documentaire sur la joyeuse collaboration de l’État français, des industriels français, des banquiers français, et des producteurs de vins de Champagne par exemple, avait été produit en Russie ?
Il y avait en plus un choix énorme de sujets "sanglants" (1789, les vendéens, les colonies, l’Algérie, Madagascar, etc), les différences entre les nombres de victimes ne sont dues qu’à une différence de moyens et de populations, mais à l’arrivée...
« La France a choisi son camp (l’Otan), tu peux toujours causer ! » C’est en gros la réponse qui est portée à Poutine, avec ce style de production sur la plus grande chaîne de télévision nationale. Mais au nom de qui ?
La diabolisation de tout ce qui vient de l’Est, de la Russie et donc de l’Union Soviétique est tellement incrustée dans les cerveaux qu’aucun doute n’est raisonnablement possible, sauf pour les "déraisonnables", les fous.
Et il faut être fou pour douter sur de très nombreux sujets dans le Royaume de France...
C’est un phénomène qui stupéfie une bonne partie du reste du Monde qui observe notre liberté d’expression fondre plus vite que les glaces de l’Arctique ; cette fonte est due aussi au réchauffement climatique je suppose ?
Et quand la liberté d’expression fond, c’est la mémoire qui s’évapore.
Bien sûr qu’il faut douter sur Staline, car il y a matière à douter, il y a toujours matière à douter dans le chaos de l’Histoire et surtout de celle de ce XXème siècle, mais en fait peu importe, car de toute façon c’est aux intéressés à faire le ménage en premier chez eux, ils ont priorité absolue sur leur histoire, car en condamnant ses dirigeants, qu’on le veuille ou non, on condamne son peuple, un documentaire même colorisé (dérisoire !) n’en a pas le droit.
"Mais voyez comme il est vilain : il boite, il a la peau grêlée, il a un bras plus court que l’autre et en plus il est obsédé sexuel" (portrait de Staline, extrait de ce fin chef d’œuvre "historique")
Je n’exagère pas le niveau.
Ouf ! On a eu chaud, heureusement que "notre" Toulouse Lautrec n’a fait que de la peinture...
Quand j’ai posé comme question "que fait le CSA ?", j’avais omis de signaler que des scènes de pendaison en gros plan n’avaient même pas été épargnées au spectateur, c’était uniquement "pour l’Histoire", mais surtout pas pour bien enfoncer le clou, non...

Et notre "ménage" à nous, il n’est pas souvent fait en "prime time" sur nos étranges lucarnes ? Il faudrait voir à ne pas oublier de dépoussiérer...la mémoire.

11/11/2015 16:08 par Jérôme Dufaur

Ce "documentaire" (disons "truc", ce sera peut-être plus descriptif) aura donc eu deux vertus :

- montrer que l’anticommunisme (couplé à un manque d’honnêteté intellectuelle et de rigueur scientifique assumé sans aucun scrupule) reste une composante centrale de la doxa médiatico-journalistique

- montrer qu’il existe encore des staliniens (encore plus raides qu’un communiste au temps des grandes purges)

De ces deux révélations, la première n’a rien d’un scoop.
La seconde ne lasse pas d’épouvanter... Alors continuez les stal’ dans votre stupéfiant combat d’avant garde qui réussira à redonner du crédit aux idées communistes !

11/11/2015 17:04 par CN46400

Je ne crois pas, je n’ai jamais cru aux chiffres mortifères de Courtois et consort sur le goulag, pour la simple raison, qui est constitutive de la fonction assignée, pendant la période stalinienne, à cette administration, qui était de fournir de la main d’oeuvre à bas coût aux chantiers des plans quinquennaux. Il fallait donc la nourrir et l’héberger à peu près correctement si on voulait qu’elle continue d’être quelque peu productive. Donc rien à voir avec les camps d’extermination nazis auxquels les raisonnements de Courtois et consort veulent nous ramener. D’ailleurs, il faut noter que, contrairement à un idée couramment admise, les camps étaient plus souvent installés dans la Russie d’Europe (ex Région de Moscou) qu’en Sibérie, ou le grand nord.

Ceci dit, observons le tableau de la pyramide des ages présenté à la page 50 de votre document. Comment, autrement que par les perturbations produites par la collectivisation (exode rural forcé), peut-on expliquer le brusque déficit des naissances entre 1931 et 1936 ? (5/10 ans en 1941-10/15ans en 1946 - 15/20 ans en 1951-20/25 ans en 1956) J’ajoute que je ne crois pas davantage aux "famines paysannes" de la collectivisation, donc à un moment où, du fait des déportations, le nombres de bouches à nourrir baissait drastiquement. Et encore moins en Ukraine où la fertilité de la terre est exceptionnelle !

Quand à la non visibilité démographique de la répression, cela parait logique si on reste sur des chiffres inférieurs au million (200° de la population totale) mais ça ne veut pas dire qu’elle n’a pas existé. 1 million dans l’URSS de l’époque, c’est 250 000 dans la France d’alors et donc loin d’être négligeable.

11/11/2015 20:53 par Luniterre

Bonsoir à tous,

Il ne s’agit pas d’être "stalinien" ou pas, mais d’abord de chercher à comprendre, et de ne pas s’en tenir à de la propagande, précisément. Il ne s’agit pas de nier les aspects répressifs du système soviétique, mais de les remettre en proportion.

CN46400 nous dit :

"Quand à la non visibilité démographique de la répression, cela parait logique si on reste sur des chiffres inférieurs au million (200° de la population totale) mais ça ne veut pas dire qu’elle n’a pas existé. 1 million dans l’URSS de l’époque, c’est 250 000 dans la France d’alors et donc loin d’être négligeable."

Effectivement, 1 million, c’est considérable, et, non, ça ne peut pas "disparaitre" dans les stats de mortalité. Comme son nom l’indique, une courbe de mortalité étudie la variation ... du nombre de morts, et non la variation du total de la population...!

Ci-dessous, les chiffres que j’ai pu trouver, pour l’URSS, dans les liens déjà mentionnés, sur la période concernée. On constate que la variation reflète assez bien le graphique. Si l’on prend le chiffre de 1936, 1 million sur 3,2 cela représente 31,25% du total, en 1937, sur 3,6, cela fait encore 27,77%. une telle variation, en plus ou en moins, serait donc visible sur le graphique, où précisément sont notées les causes de celles qui y apparaissent.

Deaths in USSR (M)
1927 4.0
1928 3.9
1929 4.1
1930 4.3
1931 4.5
1932 4.8
1933 11.5
1934 3.4
1935 3.3
1936 3.2
1937 3.6
1938 3.5
1939 3.8
Source : E. Andreev, L. Darsky & T. Khar’kova, ’Opyt otsenki chislennosti naseleniya SSSR. 1926-1941 gg

Je continue donc à chercher à comprendre...

Luniterre

12/11/2015 08:56 par CN46400

@luniterre

Lisez les paragraphes 3 et 4 de la page 37 qui expliquent qu’il n’y a pas de chiffres fiables pour les années 30 et que ceux qui sont fournis découlent de calculs adjacents. Du pain bénis pour les Courtois et consort qui vont expliquer, c’est déjà fait, que c’est un camouflage de Staline pour faire disparaître les morts. Pour ma part, sans autre preuve que mes lectures, je penche vers une conséquence de la pagaille bureaucratique générée par l’exode rural forcé des plans quinquennaux "des vainqueurs"... Staline, pour tromper les Courtois de service, aurait facilement faire publier des chiffres trafiqués.

Par contre la pyramide des ages, réalisée ultérieurement dans le calme (sic) de l’après guerre dénote un brusque déficit de naissances entre 31 et 36 ce qui dénote de profondes perturbations familiales dans cette période. Enfin la répression 36-38 ne peut pas être concentrée sur une seule année mais au moins sur trois ce qui n’aide pas à la visibilité, d’autant que les chiffres annoncés ne sont pas au dessus de toute critique (voir plus haut)

12/11/2015 19:22 par Luniterre

Bien évidemment, il reste une marge d’incertitude sur ces chiffres, mais l’histoire, à défaut d’être une science exacte, repose sur la concordance des sources, et celles dont on dispose sont cohérentes avec ce graphique, qui indique plutôt un creux, et non un "pic", qui serait, lui, cohérent, pour les années 37-38, avec la thèse des "grandes purges" comme crime de masse.

Donc les tenants de cette thèse n’ont pas d’autre moyen que de persister dans l’outrance où bien d’en revenir aux "estimations basses" du nombre des victimes, et en plus, de relativiser le prétendu "pic" des années 37-38.

C’est sans doute ce qu’a tenté Nicolas Werth lui-même, avant de s’impliquer dans le "Livre noir", selon Wikipedia :

"Cependant en 1993, Nicolas Werth, coauteur en 1997 du Livre noir du communisme, avait publié une estimation encore inférieure : « peut-être un demi-million d’exécutions » sur un total de 642 980 entre 1921 et 1954 ( Nicolas Werth, « Goulag, les vrais chiffres », in L’Histoire, septembre 1993. )"

Sur cette base, (500 000/33 ans) ,il est évident que l’impact devient quasiment indiscernable sur les courbes de mortalité.

Et même si cela reste une tragédie qu’il ne faut pas sous-estimer, il est également évident que cela détruit fondamentalement l’argumentation occidentale, qui a tant de massacres à son "actif", ou sous sa responsabilité directe, comme le Rwanda (estimation "basse" : 800 000 morts entre Avril et Juillet 1994)

Criminaliser le Communisme, même "stalinien", n’a pas plus de sens que criminaliser la République pour la violence de ses débuts.

La 1ère République bourgeoise est tombée, assez vite, avec Napoléon, qui s’en réclamait pourtant, et dont on veut oublier les crimes... Et elle ne s’est relevée que sur le sang et les cadavres innombrables de nos guerres coloniales.

On peut rêver de révolution pacifique, mais le rêve se brise toujours sur les canons, comme au Donbass, et l’on est ramené à ce choix : céder ou résister ?

Trouver la stratégie la plus appropriée et la moins couteuse en vie humaines n’est jamais facile, et rejeter l’héritage historique du socialisme sans en tirer intelligemment les leçons utiles ne mène qu’à l’échec et/ou à la capitulation.

Luniterre

13/11/2015 08:50 par CN46400

Le dilemne n’est pas entre céder ou résister , il est entre la résistance idéaliste et la résistance intelligente. Devant une situation analogue (défaut du capital primitif), Staline et Mao ont choisi la solution 1. Deng a choisi la solution 2. A ce jour, il n’y a pas franchement photo, mais l’histoire n’est finie que pour la solution 1.....

13/11/2015 12:01 par Luniterre

@CN46400

A réponse schématique, correctif schématique :

"Pas photo" ?? ...

Staline=Mao><Deng , autre face de Deng=Lénine/NEP

Sur la déconstruction de ces images:

https://tribunemlreypa.wordpress.com/2015/09/01/de-la-structuration-maoiste-de-la-bulle-chinoise/

Capitalisme ou socialisme, cela reste le choix fondamental, dans une crise sans issue autre que la guerre et la misère.

Tes "photos" ne sont jamais que des clichés empruntés à la société spectaculaire marchande, y compris chinoise...!

C'est ton choix...

En voici d'autres, qui répondent à ta vision de la fin de l'histoire...

https://tribunemlreypa.wordpress.com/2015/11/12/union-sovietique-nouvelle-russie-le-chemin-la-vie-et-le-combat-continuent/
( + Video)

https://tribunemlreypa.wordpress.com/2015/05/12/le-11-mai-en-dnr-a-donetsk/

https://tribunemlreypa.wordpress.com/2015/05/22/_le-9-mai-en-georgie-photos-de-manif_/

Pour comprendre le lien entre l'histoire et l'actualité, il faut abandonner les clichés de la propagande télévisuelle...
Et faire un choix en fonction de sa propre conscience de classe, et non de la doxa médiatique, qui n’aboutit qu'à un seul choix, même en Chine...

En fin de compte, quelle que soit le média, l'église ou la chapelle, la messe n'est jamais dite que pour les croyants...
C'est pourquoi la lutte de résistance idéologique est aussi importante...

En Géorgie, la messe est régulièrement dite, littéralement, pour Staline...

Les journalistes occidentaux en concluent généralement que les géorgiens sont maso ou qu'ils n'ont pas de mémoire...
Alors que, comme beaucoup de citoyens de l'ex-URSS, concernés au premier chef, ils savent, précisément, quel est le bilan de l'histoire...

http://www.liberation.fr/planete/2013/11/26/georgie-staline-pope-star_962219

http://www.vice.com/fr/read/a-la-recherche-de-la-statue-de-staline-disparue-182

En fait, si ces "journalistes" prenaient la peine de creuser un peu l'histoire, il pourraient très vite remonter à deux causes:

Staline a fait un pacte antinazi avec l'église orthodoxe, et de coexistence avec le socialisme, (version russe de la laïcité, directement inspirée de Lénine: https://tribunemlreypa.wordpress.com/2015/05/04/la-laicite-selon-lenine-toujours-dactu/ ) pacte qu'il a maintenu jusqu'à sa mort.

Pacte détruit par Khrouchtchev (><Staline/Lénine)

Staline a protégé la spécificité culturelle et linguistique géorgienne.
Khrouchtchev>>>"russification" forcée
etc...

Pour la gauche en occident, reste à faire un bilan objectif et constructif.

A défaut, elle se condamne à disparaitre, derrière le spectaculaire marchand, même venu de Chine...

Luniterre

25/10/2016 23:59 par antoine kerzu

Annie Lacroix-Riz est une historienne révisionniste. Quel intérêt à publier un tel article ?

26/10/2016 07:09 par babelouest

Antoine Kerzu, Annie Lacroix-Riz est une historienne, une vraie, elle. L’êtes-vous, pour contester ce qu’elle sait pour avoir passé sa vie à chercher ? Ou n’êtes-vous qu’un Furet de plus ? (à qui le qualificatif que vous employez serait sans doute adéquat)

13/12/2016 09:53 par Le Breton

Pour ceux qui ne pensent pas que le stalinisme était une dictature impitoyable, je leur conseille de lire les 2 livres de Margareth Buber_Neumann (Prisonnière d’Hitler et de de Staline) qui fut déportée en Sibérie puis à Ravensbruck suite au traité de non-agression entre Hitler et Staline en 1939. Les 2 autres livres sont "Le vertige" et "Le ciel de Kolyma" de Evguenia Guinzbourg. Ces 2 femmes étaient des communistes qui furent accusées de dévationnisme lors des grandes purges de 1936 à 1938.
Une chanson de Hubert Felix Thiefaine évoque Karaganda, région de Sibérie où se trouvait l’un des plus grands goulags soviétiques.
https://www.youtube.com/watch?v=9iKRkgUu5_Y

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