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Lakhdar Brahimi : un homme de paix écoeuré de voir ses frères arabes s’entre-tuer en Syrie

Le miracle de Brahimi à Genève II Une lueur pour le peuple syrien ?

« Il n’y a qu’un passé et il n’existe qu’un seul présent, par contre il y a une multitude de futurs, mais seul l’un d’eux se réalise. » Philippe Geluck

Genève abrite depuis trois jours un nouveau round de négociations devant aboutir en théorie à la paix en Syrie. Des milliers de morts, des centaines de milliers de blessés, un peuple traumatisé qui a vu sa population s’enfuir hors de ses frontières et vivre un deuxième hiver dans le froid, la faim et la mitraille. Depuis quelques mois la coalition anti-Assad se fissure du fait de luttes internes des milices islamistes contre dit-on, une opposition laïque. Il semble que le pouvoir syrien gagne des points et la situation d’affaiblissement de la coalition l’arrange. Les parrains du malheur syrien sont les pays du Golfe qui inondent chacune les factions anti-Assad avec les armes occidentales. De l’autre côté, la Russie ravitaille le pouvoir syrien. Enfin le Hezbollah et l’Iran jouent le même rôle que la Turquie envers la coalition anti-Assad. Résultat des courses : les Occidentaux et la Russie disent qu’ils veulent la paix en Syrie, ils devraient peut-être commencer par un embargo sur les armes aux belligérants qui se retrouveraient à se battre avec des arbalètes, des épées ou des frondes comme au bon vieux temps des croisades, mais ceci est une autre histoire.

Un impair de taille : l’absence de l’Iran dé-invitée au dernier moment. L’invitation lancée par le Secrétaire général de l’Organisation des Nations unies Ban Ki-moon à l’Iran à participer à la conférence de Genève 2, a bien failli faire annuler cette conférence avant même qu’elle ne débute. En fin de journée, le porte-parole du Secrétaire général revient sur cette invitation, et la retire, purement et simplement. Le même jour, la Grande-Bretagne dit « demeurait disposée à travailler avec l’Iran sur la question syrienne » selon Chine Nouvelle (Xinhua) du 21/01/2014

Les débuts chaotiques de Genève II

Personne ne pouvait parier un kopeck sur cette conférence, la première victoire de la paix est que la coalition anti-Assad plus divisée que jamais a accepté sous la pression américaine de venir à Genève avec une interprétation différente concernant la transition telle que décidée à Genève I. « La première journée de la conférence de paix sur la Syrie s’est achevée, mercredi 22 janvier à Montreux, sur une promesse des délégations du gouvernement syrien et de l’opposition de s’asseoir à la même table des négociations à partir du 24 janvier. (...) D’entrée de jeu, Sergueï Lavrov, le premier à prendre la parole, a planté le décor de cette rencontre. D’un ton sec et tranchant, il s’est livré à un réquisitoire contre l’opposition syrienne et ses parrains occidentaux.. Dans une allusion claire aux pays du Golfe, principaux bailleurs de fonds de la rébellion, et aux États-Unis, le chef de la diplomatie russe a vilipendé ceux qui « tentent de l’extérieur d’imposer leur modèle » à la Syrie. « Il ne faut pas regarder très loin », a-t-il poursuivi en faisant référence à la situation en Irak, pour comprendre que ces « tentatives ne peuvent que nuire »aux négociations engagées à Montreux. »
Le chef de la diplomatie russe est rapidement passé sur l’ordre du jour officiel de la rencontre, à savoir la mise en place d’une transition politique, pour souligner que l’urgence du moment est d’éviter que la Syrie devienne une « base arrière du terrorisme international », reprenant ainsi l’argumentaire du régime. De surcroît, M. Lavrov a balayé d’un revers de la main les demandes d’ordre humanitaire réclamées par l’opposition, les qualifiant « d’artificielles ».(...) John Kerry a ensuite répondu au discours combatif de Sergueï Lavrov, dans une intervention aux antipodes de celle de son homologue russe. Il a salué la décision« courageuse » de la CNS de se rendre à Montreux et a clairement recadré l’enjeu de la rencontre : le départ de Bachar Al-Assad. « Il n’est pas envisageable qu’un homme qui a conduit la répression brutale de son propre peuple puisse retrouver la légitimité de gouverner. Le droit de conduire un pays, a-t-il insisté, ne peut pas venir de la torture, des barils d’explosifs et des missiles Scud. Il provient du consentement du peuple. » (1)

Les enjeux

Nahed Attar nous décrit la situation : « Les deux seules interventions significatives de « Genève 2 » écrit-il sont celles du ministre syrien des Affaires étrangères, Walid al-Mouallem, et de son homologue saoudien, M. Saoud al-Fayçal. La plaidoirie historique du premier pour la défense de l’État syrien - fondée sur ses valeurs nationales et civiles, son rôle régional, et sa combativité face à une horrible agression criminelle qui dure depuis bientôt trois années - s’est heurtée à celle du second, venu confirmer la politique haineuse du Royaume saoudien à l’égard de la Syrie, de sa civilisation et de son peuple. » (2)

Pour le journaliste, « le Président Bachar al-Assad n’est plus un sujet de litiges pour la majorité des Syriens. Et, alors qu’au début de 2013 il n’était qu’acceptable jusqu’à la fin de son mandat actuel, sa candidature aux présidentielles de 2014 est devenue une nécessité autant pour la Syrie que pour l’International. Plus personne ne discute du fait qu’il peut gagner les élections. Le gouvernement syrien est resté solidaire, et a progressé dans sa bataille politique ; et l’État syrien a retrouvé sa capacité de gestion du pays avec une efficacité raisonnable en temps de guerre. L’opposition syrienne s’est désintégrée et s’est dispersée dans des pays moribonds ; à savoir, le Qatar, la Turquie, et les derniers de ses sponsors atteints de la démence du perdant, dont l’Arabie Saoudite, la France, et les services troubles du renseignement régional et international ; cette prétendue opposition étant désormais logée sous l’enseigne du takfirisme et du terrorisme bestial, qu’il s’agisse de Daecht, de Jabhat Al-Nosra, ou du Front Islamique, factions aussi monstrueuses les unes que les autres !(2)

L’interprétation différente de Genève I

Après les rodomontades du premier jour, les Occidentaux ont laissé Lakhdar Brahimi seul pour gérer l’ingérable. Il n’empêche qu’il réussit à mettre les belligérants à la même table. Les délégations de l’opposition et du régime syriens se sont retrouvées pour la première fois samedi autour de la table des discussions pour tenter de trouver une issue au conflit qui mine le pays depuis trois ans. Il s’agit des premières discussions en face-à-face entre les deux camps depuis le début du conflit il y a trois ans. Conformément au plan de Lakhdar Brahimi, les deux camps se sont retrouvés peu après 9 heures (GMT) dans la même pièce pour écouter pendant une trentaine de minutes le discours d’introduction du médiateur de l’ONU et de la Ligue arabe. Les négociations auraient dû commencer vendredi, mais l’ONU et les Syriens ont perdu 24 heures après le refus de l’opposition de s’asseoir à la même table que le chef de la diplomatie syrienne Walid Mouallem. Damas n’a pas accepté ce qui constitue une ligne rouge pour l’opposition et les Occidentaux : la reconnaissance par le régime du principe d’un gouvernement de transition conformément au texte adopté par les Russes et les Américains en juin 2012 lors de la conférence de Genève-1. Après d’intenses discussions avec les deux délégations, Lakhdar Brahimi avait finalement convaincu les protagonistes d’être présents samedi pour une première rencontre.

Qui est Lakhdar Brahimi ?

Qui est cet illustre « inconnu » que les Occidentaux découvrent sur le tard en l’encensant du fait que c’est lui qui fait le difficile boulot de recoller les morceaux du puzzle syrien après les échecs de l’ONU et la compromission éhontée de la Ligue arabe qui a exclu la Syrie de la Ligue ?

Olivier Ravanello nous en parle : « Il s’appelle Lakhdar Brahimi. « Brahimi l’Algérien » est un diplomate dans l’âme. Un homme de paix écoeuré de voir ses frères arabes s’entre-tuer en Syrie. Alors il a dit « oui » quand l’ONU lui a demandé l’impossible : être un pont entre le régime du dictateur Bachar el-Assad et l’opposition syrienne. Ce pont, il l’a toujours été. Ministre des Affaires étrangères algérien, il est l’artisan des accords de Taef qui marquent la fin des guerres du Liban. Déjà. Il fait aussi partie des Elders, groupes de vieux sages de la planète où l’on trouve aussi Jimmy Carter ou Kofi Anan, et que l’on envoie quand la diplomatie traditionnelle a échoué. Parce qu’ils connaissant tout le monde, qu’ils ont vu les dirigeants actuels en culottes courtes et qu’ils n’ont pas d’arrière-pensées. En l’occurrence, l’image est vraie. Bachar, Brahimi l’a vu en culottes courtes, enfant au palais de son père Hafez. (...) Brahimi voyage, parle, essaie de convaincre, de rapprocher les contraires. Inlassablement. Au début, les micros se tendaient devant lui. Mais rien. Brahimi est mutique et c’est comme cela qu’il a pu maintenir un climat de confiance avec ses interlocuteurs. » (3)
« Vendredi, à Genève, dans les salons d’un hôtel de luxe, le silence sera pesant. Et Brahimi sera seul au milieu. La délégation de l’opposition syrienne d’un côté et la délégation du régime envoyée par Bachar el-Assad de l’autre. Neuf d’un côté, neuf de l’autre. Entre eux, un abîme de haine. Brahimi n’a sûrement pas la réponse, mais il sera là. Et ses petits-enfants, de loin, le regarderont en se disant sûrement que papy est un sacré bonhomme... » (3).

Il est vrai que connaissant la susceptibilité des uns et des autres, l’ancien chef de la diplomatie algérienne, lit-on dans le journal Liberté, aura toutes les peines du monde à rapprocher les positions (...) Demeurant toutefois optimiste, Lakhdar Brahimi a, de son côté, qualifié les réunions d’hier à Genève de ´´semi-pas´´. ´´Demain il y aura un pas complet´´, a-t-il ajouté. (...) Ainsi, régime et opposition divergent sur l’interprétation du contenu de Genève I, signé entre les grandes puissances en 2012 et prévoyant une période de transition. Les opposants à Bachar al-Assad réclament que celle-ci implique nécessairement un départ du président, tandis que Damas rejette ce scénario et parle d’un gouvernement d’union. ´´Nous parlons d’un gouvernement d’union élargi mais pour y arriver, il faut voir qui représente cette opposition´´, a indiqué le vice-ministre syrien des Affaires étrangères Fayçal Moqdad. » (4)

Le bon début des négociations

Comment l’envoyé de l’ONU a-t-il fait pour réconcilier les deux parties, chose impensable à peine quelques heures auparavant. C’est que ce diplomate algérien chevronné s’est livré à un tour de passe-passe diplomatique des plus habiles. Afin de contourner le refus du régime de signer tout document écrit attestant de la mise en place d’une autorité de transition, il a en réalité obtenu des deux parties qu’elles se contentent d’une déclaration orale de l’envoyé de l’ONU prononcée l’après-midi en conférence de presse. « Si le régime ne le contredisait pas dans la foulée, alors cela équivalait implicitement à une acceptation des termes de Genève I »,(...) Un exercice diplomatique de haut vol permettant de contourner, certes provisoirement, cette épineuse question, sans mettre aucune délégation en porte-à-faux ».

Grâce à un tour de passe-passe diplomatique de haut vol, l’envoyé de l’ONU Lakhdar Brahimi devrait permettre aux deux camps de véritablement négocier. Tout avait fort mal commencé à Genève. Jeudi soir, veille de la rencontre historique annoncée entre le régime de Bachar el-Assad et ses opposants, pour la première fois en trois ans de guerre, l’opposition recule, et indique qu’elle ne s’asseoira pas en face de responsables syriens. En cause, le refus de ces derniers d’accepter les termes de Genève I, première conférence internationale sur la Syrie, organisée sans Damas, qui avait conclu, résolution de l’ONU à l’appui, à la formation par « consentement mutuel » d’une autorité de transition ayant les « pleins pouvoirs exécutifs ». (5)

L’infatigable Lakhdar Brahimi, a pourtant tout fait pour réunir les deux camps dans la même salle, sans pour autant qu’ils s’adressent la parole. Rien n’y fait. Des positions irréconciliables Pourtant, en fin de journée, c’est avec une excellente nouvelle que Lakhdar Brahimi revient de son marathon diplomatique. « Nous allons nous retrouver demain dans une même salle », annonce-t-il, soulagé, aux journalistes. « 
Autre bonne nouvelle : à en croire les diplomates présents dans les coulisses du palais des Nations, les deux délégations se seraient mises d’accord pour travailler jusqu’à dimanche sur un accès humanitaire aux populations syriennes, tout d’abord dans la ville de Homs, avant de se pencher à nouveau sur les questions politiques. « Homs est vraiment dans une situation d’encerclement terrifiante », soulignent-ils. « Elle possède, de surcroît, une dimension symbolique et politique forte. Si le régime ne fait pas obstacle, l’aide peut s’acheminer très vite », préviennent-ils.
On s’acheminerait a minima vers une aide humanitaire multiforme notamment des couloirs humanitaires. Les médias occidentaux qui reprennent les positions des Occidentaux martèlent que la solution n’est pas militaire, les mêmes qui ont armé la coalition tant qu’ils ont pu, ils s’aperçoivent que cette coalition est affaiblie par l’apparition des milices islamiques qui commencent à faire réfléchir l’Occident qui pense que la solution Bachar El Assad « laïc » n’est plus définivement à rejeter en tout cas dans une période de transition, le temps d’éliminer les factions islamistes.
Bachar Al Assad qui ne méritait pas de vivre selon le ministre français Fabius, est en train de renaître de ses cendres. Il reste que l’alternance au pouvoir est inéluctable 12 ans de pouvoir, c’est trop. Il faut laisser la place mais dans des « élections propres et honnêtes » pas de celles que nous avons connues en Algérie en 1991.

Par qui se ferait alors l’alternance ? Certainement pas par l’opposition off shore des Burhan Ghalioun le Franco-Syrien, plus inspiré en tant que chercheur, et les Kodmani qui se découvrent à 3000 km du Quartier Latin, une âme de révolutionnaire après avoir profité du système Assad père par leur père ancien ambassadeur du régime. Est-ce par l’opposition interne qui elle est restée à demeure, est nationaliste et qui n’accepte pas de vendre la Syrie à la première offre venue ? La question reste posée.

Chems Eddine CHITOUR

1. A Genève 2, la promesse d’un dialogue entre Syriens Le Monde.fr | 22.01.2014

2 .Nahed Hattar23/01/2014 Nahed Hattar http://www.mondialisation.ca/bye-bye-geneve-bonjour-damas-1/5366177,

3. Olivier Ravanello http://fr.news.yahoo.com/blogs/ravanello/geneve-lakdhar-brahimi-seul-f...

4. http://www.liberte-algerie.com/international/du-pain-sur-la-planche-po...

5. http://www.lepoint.fr/monde/syrie-geneve-ii-comment-regime-et-oppositi...


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