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Médias et conflit en Colombie : les retombées de l’affaire Langlois

Fin avril, au cours d’un affrontement dans le Caquetá entre des unités de l’armée et le Front 15 des FARC-EP, le journaliste français Roméo Langlois a été capturé alors qu’il accompagnait l’armée dans le cadre de son travail. Sa capture puis sa détention ont encore une fois remis sur le tapis, sous les yeux de la communauté internationale, le conflit armé toujours occulté qui se déroule en Colombie.

Les insurgés, après avoir écarté des suspicions initiales (en effet dans un premier temps, ils ont cru que Langlois pourrait être un des agents israéliens ou usaméricains qui accompagnent et conseillent l’armée colombienne [1]), ont publié un communiqué déclarant : « Roméo Langlois portait des vêtements militaires de l’armée régulière en plein milieu d’un combat. Nous pensons que le minimum qu’on puisse espérer pour qu’il recouvre sa totale liberté de mouvement, c’est l’ouverture d’un large débat national et international sur la liberté d’information » [2].

La réponse des médias colombiens à la proposition des insurgés a été caractéristique : l’éditorial d’El Espectador l’a qualifiée de « condition saugrenue », en insistant sur le fait qu’ils ne débattraient de rien par la force [3]. A son tour, El Tiempo a considéré que c’était une « exigence inacceptable » qu’il fallait rejeter énergiquement et que les FARC-EP n’avaient de leçon à donner à personne sur les principes du journalisme [4]. Ces réponses ne sont que la variante médiatique de la position habituelle vis-à -vis de la guérilla, du point de vue des institutions : il n’y a rien à négocier en dehors de sa démobilisation. Les portes à toute forme de dialogue sont fermées car avec des « terroristes » on ne discute pas, on ne parle même pas [5].

Dans une chronique sensée, Carlos Cortés Castillo [avocat et journaliste colombien, NdT], décrivait ainsi la réponse des médias :

« Les FARC conditionnent la libération de Roméo Langlois à l’ouverture d’un « large débat national et international sur la liberté d’information et, comme il fallait s’y attendre, nous nous indignons tous : les journalistes (Darà­o Arizmendi [Directeur de la chaîne Caracol, NdT] en boucle), les organisations pour la liberté de la presse et nous, les citoyens. C’est à qui trouvera le qualificatif le plus dur contre cette guérilla et qui, après l’avoir prononcé, se sent nettement mieux (…) Aujourd’hui les journalistes vilipendent la guérilla de leur indignation (…) la guérilla qui assassine, qui séquestre, qui vole. La réponse des directeurs des médias est identique : les FARC ne vont pas venir nous expliquer comment faire du journalisme. Il ne manquerait plus que cela. On éteint les micros et voilà toute l’information qui nous reste.

Il y a peu, sur un forum, quelqu’un disait que le legs laissé par le gouvernement de à lvaro Uribe est, avant tout, mental .Je suis d’accord. Maintenant nous regardons la télé en noir et blanc. Dans le cas de la guérilla, nous avons appris à nous autocensurer et à répéter le petit livre officiel de la lutte terroriste au point de nous surveiller nous-mêmes - la privatisation de la censure dont parle Coetzee - et nous nous méfions de celui qui déserte le bunker » [6].

Finalement Langlois a été libéré le 30 mai, et malgré le pesant blocus que les médias ont tenté d’imposer sur un débat autour de leur rôle dans le conflit, le débat a commencé. Bien que la proposition ait paru à Langlois « osée » et » provocatrice » [7], ce qui est certain malheureusement c’est que le débat sur le rôle des médias n’aurait sans doute pas eu lieu sans sa capture et détention.. C’est Langlois lui-même qui, par des déclarations sur le conflit qui ne suivent pas le manuel officiel appliqué de façon uniforme par les médias colombiens, a jeté les bases de ce débat, qui a été lancé, même timidement.

Manque de liberté d’information et censure informelle

Un regard plus attentif à la situation du journalisme en Colombie démontre qu’un tel débat n’est ni « osé », ni « inacceptable ». La Colombie, bon an mal an, est un pays dans lequel, au cours de la période 1979-2009, plus de 130 journalistes ont été assassinés (pour 98 d’entre eux dans la période 1992-2006) ; un pays qui occupe selon le rapport de Reporters Sans Frontières de 2011, le 143ème rang sur 179 pays en termes de liberté d’information [8]. Dans le rapport de cette organisation de 2009, la Colombie occupait la 126ème place dans le classement du manque de liberté d’information sur les 175 pays analysés- ce qui signifie que, loin d’une amélioration, on constate une détérioration accentuée [9].

Mais ce n’est pas qu’on tue tant de journalistes. La terreur paramilitaire et officielle, ainsi que la campagne systématique d’attaques, de menaces et de stigmatisation envers des journalistes indépendants au cours des trois dernières décennies ont déjà atteint leur objectif : réduire au silence les journalistes. D’après Hollman Morris, l’un des rares reporters ayant couvert le conflit dans les zones où il se déroule et qui remettent en cause de façon critique les discours officiels, lui-même victime d’une persécution brutale à cause de son travail d’investigation : « Le gouvernement dit avec fierté que sous cette administration le nombre de journalistes assassinés a diminué, ce qui est certain, non parce qu’il y a davantage de démocratie en Colombie mais simplement parce que ce qui se produit, c’est que les journalistes s’autocensurent (…) les journalistes colombiens cessent progressivement de parcourir les zones de conflit, puisque le gouvernement a accusé à plusieurs reprises les journalistes qui parcourent ces zones d’être "liés au terrorisme’.(…) En général, la censure n’est pas frontale, elle ne s’exerce pas de façon publique, par exemple en fermant les émetteurs, les médias, mais c’est la stigmatisation, la menace que tu reçois par courrier, chez toi, à tes employés, ou la stigmatisation publique de la bouche du président lui-même , à ton encontre, sur ton travail, mais également la stigmatisation de certains sujets par le gouvernement. » [10]

Cette « autocensure », qui n’est ni plus ni moins qu’une forme de censure informelle, par le biais de la terreur et de la menace plutôt que par décret, est clairement symbolisée par les propos d’un journaliste anonyme quand il affirmait, en 2001, que « lorsque j’écris quelque chose, je me demande quelle va être la réaction de Castaño [c.-à -d., un chef paramilitaire défunt] » [11]. Depuis cette époque, particulièrement depuis l’échec du processus de paix de Caguán et le début du régime de « Sécurité Démocratique » d’à lvaro Uribe, les journalistes ont été forcés à se taire ou à répéter docilement le discours officiel. On les a forcés par des moyens officiels et para-officiels, également en exerçant sur eux la pression du marché du travail, contrôlé par une poignée de groupes économiques liés au bloc au pouvoir.

Le président Uribe en personne, qui s’est fait remarquer pendant son mandat en proférant de multiples menaces et des accusations imprudentes contre des détracteurs, des critiques ou des journalistes essayant d’accomplir leur tâche professionnelle, a clairement imposé les limites à l’exercice du journalisme dans un discours prononcé à Tres Esquinas, le 31 janvier 2003 : « Les journalistes vont devoir aider le peuple colombien, en s’autolimitant, en évitant l’imprudence, en comprenant que ce qui compte c’est le droit du peuple colombien à préserver sa sécurité avant leur course au scoop journalistique » [12]. Le journalisme d’investigation se transformait alors en « scoop » et le journalisme dit « sérieux » était subordonné à la stratégie militaire (c-à -d., de « sécurité ») du gouvernement. Ce point a aussi été formulé par le conservateur Juan Gómez, alors sénateur (et ex-directeur du journal El Colombiano) quand il a dit en 2004 : « Un point important est de savoir quoi faire quand on reçoit des informations sur des attaques ou des occupations de lieux par la guérilla ; ne pas chercher seulement le scoop, l’exclusivité et à cause de cela attenter sans le vouloir, à la démocratie. Il faut savoir que dans certains cas la prudence est plus importante que la vérité » [13].

Le Général Mario Montoya est allé encore plus loin en exposant clairement comment les médias devaient servir la propagande pour les forces armées et policières de l’État : « Nous avons aussi besoin que notre travail soit davantage reconnu, car dans bien des cas on glorifie plus la violence que le travail des renseignements et les opérations de l’armée, de la police, du ministère public, du CTI [Cuerpo técnico de investigación], du DAS [Departamento administrativo de seguridad.] et des services du Procureur. Nous regrettons que l’on méconnaisse ce que nous nous efforçons de faire et que l’on donne une autre connotation à notre travail, simplement pour aller à la pêche aux nouvelles. Cela porte préjudice à nos relations.  » [14] Les alliances de l’armée avec les paramilitaires, qui ont coûté en deux décennies 175.000 victimes reconnues, sont insignifiantes d’après Montoya. Sans parler des 3000 jeunes exécutés extrajudiciairement sous l’appellation de « faux positifs » [15]. Par ailleurs, la persécution brutale du DAS contre l’opposition, contre les organismes des droits humains et contre les journalistes trop « infiltrés » (comme le susnommé Morris) devraient être considérés comme des faits mineurs et non des crimes monstrueux [16].

C’est peut-être dans l’absence d’humour politique dans ce pays que l’on plus facilement constater l’existence de cette camisole de force sous laquelle se développe l’activité journalistique en Colombie. L’humour politique requiert une vision critique, de la perspicacité, un esprit de révolte et de l’irrévérence. Toutes ces qualités qui font défaut aux médias colombiens chez qui (à quelques exceptions très louables près) règnent l’adulation, l’asservissement et le culte des autorités. Morris nous dit : « Je crois personnellement que l’assassinat de Jaime Garzón a été un message au journalisme critique en Colombie. Que nous ne nous mettions pas en travers de certains pouvoirs de la société colombienne, voilà quel était le message d’après moi. A partir de l’assassinat de Jaime Garzón, la critique politique disparaît de la télévision, l’humour politique disparaît de la télévision et jusqu’à aujourd’hui, dix ans après son assassinat, il n’existe pas d’humour politique à la télévision colombienne ». [17] Il n’y a pas de comparaison possible entre le génie d’un personnage comme Heriberto de la Calle, interprété par Jaime Garzón, le cireur de chaussures qui interviewe et défie des personnalités publiques, avec les incroyables génuflexions face au pouvoir d’un William Calderón dans « La Barberà­a » [programme de la télévision Cable Noticias, NdT] : une telle adulation, un tel asservissement, un tel culte de la personnalité (propre d’une dictature) comme celui qu’on mesure dans son « interview » honteuse d’Uribe Vélez (2010), en plus de son manque de talent abyssal, de créativité et génie, sont la preuve de « l’envoûtement autoritaire » dans les médias qui répète le manuel « officiel » au pied de la lettre. [18]

12 ans sans Jaime-Justice

L’État contre le journalisme d’investigation

Dans le cas des menaces et attaques contre des journalistes en Colombie, l’État ne s’est pas contenté de proférer des menaces télévisées ou de faire appel à un éventuel sicario [tueur à gage, NdT] engagé par un « fonctionnaire d’Etat corrompu ». En Colombie, l’État a mis en mouvement une stratégie délibérée, par le biais du Département Administratif de Sécurité (DAS) qui dépendait directement de l’exécutif, afin de réduire au silence les journalistes, de désinformer les masses, de manipuler l’information, de discréditer ceux qui le critiquaient. Cette stratégie connue sous le nom de scandale de la politique DAS, a été appelée « plan pour détruire le pays » par Le journaliste Juan Gossain dans un célèbre éditorial pour RCN Radio [19]. Hollman Morris nuance un peu cette position : « Il ne s’agissait pas d’un plan contre tout le pays : par exemple, le parti de la U [Parti social d’Unité Nationale] n’a pas été touché. Plinio Apuleyo Mendoza n’a subi aucune persécution, ni Ernesto Yamhure, les directeurs des grands médias de communication n’en furent pas non plus victimes (…) Quiconque a exprimé une opinion contraire à ce gouvernement a été l’objet d’une persécution criminelle, ce fut le cas de milliers voire de millions de personnes. Il s’agit d’une pratique propre aux dictatures les plus terribles du monde. » [20] Cette stratégie n’aurait pu être développée sans la participation active de plusieurs journalistes et présentateurs, qui pour beaucoup d’entre eux sont enkystés dans des programmes vedettes en prime time - « Il y a des journalistes qui ont reçu de l’argent du DAS et ont collaboré à des campagnes de discrédit contre leurs victimes » [21]

Exemple de propagande visant à faire de Hollman Morris un "propagandiste des FARC"

Hollman Morris a été accusé à plusieurs reprises directement par le président de l’époque, Uribe, d’être un soutien à la « guérilla » à cause de son travail de journaliste ; l’actuel président colombien aussi, Juan Manuel Santos, alors ministre de la Défense, a accusé Morris de faire l’apologie du crime parce qu’il couvrait le conflit et commettait « l’hérésie » d’interviewer des guérilleros en 2009 [22]. Il ne pouvait échapper à un chroniqueur averti comme Alfredo Molano, l’ironie du fait que le gouvernement de Santos se soit offusqué quand les insurgés ont retenu Langlois au milieu d’un combat, alors que l’État a poursuivi et criminalisé d’autres journalistes : « Maintenant que tant d’eau est passée sous les ponts, il est opportun de rappeler que le 2 février 2009, dans la même localité d’Unión Peneya où a disparu Langlois, le bataillon Héroes de Guapi a retenu les journalistes Hollman Morris, Leonardo Acevedo et Camilo Raigozo, les accusant de faire l’apologie du crime et la propagande des FARC alors qu’ils couvraient en civil la remise des séquestrés à Piedad Córdoba et à Daniel Samper Pizano. » [23] Le bureau du DAS avait un dossier contre Hollman Morris et la persécution à son encontre a été désignée du nom de code « Opération Puerto Asà­s » par la « police politique ». [24]

Cependant Morris n’a pas été le seul journaliste contre qui l’État s’est acharné [25]. D’après le chroniqueur Ramiro Bejarano : « de nombreux journalistes ont essayé d’exercer leur profession en enquêtant sur le conflit de façons très diverses et ont été stigmatisés en échange, ont reçu des menaces de toutes sortes, y compris de la part de hauts dignitaires de l’État. » [26] Il existe une liste d’au moins 15 journalistes qui au cours des dernières années de la décennie ont été soumis à un espionnage minutieux de la part du DAS [27]. Un autre cas emblématique a été celui du journaliste de Noticias UNO et chroniqueur de Semana, Daniel Coronell qui a dû quitter le pays en 2005 lorsqu’il a commencé à recevoir une série de menaces à cause de ses enquêtes sur la corruption du régime d’Uribe et de ses liens avec le narcotrafic et le crime organisé : ces menaces prenaient la forme de coups de fil menaçants, de courriers électroniques de même nature, de couronnes funéraires à son nom, à celui de son épouse ou de sa fille, et des lettres dans lesquelles on lui expliquait comment on lui rendrait sa petite fille découpée en petits morceaux. [28]

Claudia Julieta Duque raconte son calvaire dans la presse

Le « manuel de menaces » qui est sorti au grand jour lors des investigations du Ministère public sur cet organisme démontre qu’il s’agissait de pratiques systématiques édictées par le DAS. On y donne des instructions très précises sur la manière de menacer la journaliste Claudia Julieta Duque en ordonnant de :

« - Passer l’appel près des installations du service de renseignements de la police.

- Ne pas bégayer, ni dépasser 49 secondes pendant l’appel.

- Appeler de préférence à partir d’un téléphone à cartes ETB, en cas de renvoi d’appel immédiat.

- Vérifier l’absence de caméras de sécurité et de surveillance de la circulation dans le périmètre.-Celui qui passera l’appel doit le faire seul et se déplacer en bus jusqu’au lieu de l’appel.

- renforcer les mesures préventives sachant que Claudia Julieta préviendra immédiatement de l’appel le Colonel Novoa de la police nationale (le même qui dans d’autres occasions nous a visés institutionnellement) » [29].

Ensuite, dans ce document officiel, on donne des instructions sur la manière de réaliser un appel de menaces.

« Salutations : Bonjour. (Matin ou après-midi) Est-ce que Madame le Docteur Claudia Julieta est là  ?

Message : Madame, vous êtes bien la mère de Marà­a Alejandra ? (attendre la réponse). Bon, je dois vous dire vous ne nous avez pas laissés le choix, on vous l’a dit de toutes façons et vous n’avez pas voulu en tenir compte, maintenant ni les voitures blindées ni les petites lettres merdiques ne vous serviront. On a dû s’occuper de ce qui vous est le plus cher, c’est ce qui arrive aux chiennes de votre espèce qui s’occupent de ce qui ne les regarde pas, vieille poufiasse, fille de pute… ». [30]

Duque a reçu l’appel en novembre 2004, appel fidèle aux instructions. « L’agresseur de Duque, en plus de ce qui était prévu dans le manuel, a ajouté qu’il allait violer et assassiner sa fille de 10 ans. Dans une des phrases, il a dit : " Votre fille va souffrir, on va la brûler vive, on va éparpiller ses doigts dans toute la maison.’Devant cette situation, la journaliste n’a eu d’autre choix que de quitter le pays. » [31]

Ces menaces et agressions, émanant parfois de médias paraétatiques et parfois étatiques, ont permis de mettre au placard et d’anéantir pratiquement le journalisme d’investigation en Colombie, en réduisant le rôle du journaliste face au conflit à celui de courroie de transmission entre le public et le ministère de la Défense. Pendant ce temps, l’Etat a investi des millions en propagande au service de sa politique, essentiellement, pour tout ce qui touche au conflit : en 2007, on sait que 12.800.000.000 de pesos [=6 millions d’€] ont été dépensés en propagande pour le compte de l’État - dont 42% pour le ministère de la Défense - [32]. C’est ainsi que nous sommes arrivés à la situation où le journalisme colombien, loin d’informer et d’analyser la réalité du conflit, reproduit le discours officiel en même temps qu’il ramène la brutalité de la guerre à une espèce de « Reality Show » prévisible et manichéen. D’après la journaliste Marà­a Teresa Herrán, « La guerre, en termes audiovisuels, est décrite comme une série d’attaques successives (…) à partir des vidéos fournies par le ministère de la Défense, le DAS et la police. Les espaces d’opinion sont relégués à la stratosphère d’après minuit. (…) C’est cela qui en fait un « reality show », où ce qui importe, ce n’est pas tant ce que l’on dit ou fait mais le faux-semblant. » [33]

Contrôle des médias par les monopoles

Dans l’édition électronique de la revue Insurrección, de l’ELN (Ejército de liberación nacional de Colombia), il est dit que les trois grands thèmes qui se recoupent dans le traitement du conflit par les médias sont : (a) la négation du conflit armé, sauf quand il est reconnu pour des raisons conjoncturelles, (b) la profonde collusion qui existe entre les médias et le monopole de la propriété en Colombie, (c) ainsi que l’intrication des intérêts entre les monopoles économiques, les moyens d’information et les gouvernants. [34]

Il n’y a pas grand-chose à dire sur le premier élément puisque les médias de manière dogmatique ont apporté leurs voix au choeur qui a réduit le conflit social et armé colombien à une caricature sortie d’un manuel pour débutants sur "la lutte anti-terroriste’ - qu’ils acceptent à contrecoeur seulement par intérêt, soit pour éviter des procès à la Cour Pénale Internationale (sans conflit, les attaques de l’armée seraient contre des « civils », non pas contre des « combattants » avec tout ce que cela impliquerait), soit pour limiter la portée des initiatives comme la Loi des victimes. A ce sujet, Rubén Darà­o Zapata, du journal alternatif Periferia, écrit : « Les mass-médias ont fait leur les maximes du discours d’Uribe : en Colombie, il n’y a pas de conflit et les guérillas ne sont qu’un groupe de factieux qui terrorisent la population civile. » [35]

Quant aux deux autres points, ils sont étroitement liés. Ce n’est un secret pour personne que les quatre familles qui contrôlent la Colombie contrôlent également les plus grands médias. Caracol Televisión et le quotidien El Espectador sont la propriété du groupe Santo Domingo ; El Tiempo appartient au groupe Sarmiento Angulo ; RCN appartient au groupe Ardila Lulle ; et la multinationale Prisa est propriétaire de Caracol Radio et Radio W. Le rôle de la famille du président Juan Manuel Santos dans les médias colombiens n’est un mystère non plus pour personne : sa famille est un important actionnaire du quotidien El Tiempo, dont son frère Enrique Santos a été en le directeur ; Francisco Santos, cousin germain du président, est directeur de RCN Noticias.

Luis Carlos Sarmiento Angulo, PDG du Groupe Grupo Aval et...
..son héritier Luis Carlos Sarmiento Gutiérrez
Debout, de gauche à droite : Eduardo Pacheco, du Groupe Colpatria ; Carlos Enrique Cavelier, d’Alquerà­a ; Jerónimo Castro, de Colfuturo.Assis : Alejandro Santo Domingo, du Groupe Santo Domingo ; Carlos Ardila Lülle, de l’Organisation Ardila Lülle, et Luis Carlos Sarmiento Angulo, du Groupe Aval.
Alejandro Santo Domingo, PDG de Valórem
Enrique et...
...Francisco Santos

Peut-on penser qu’avec un tel contrôle des médias et une telle intrication avec les élites au pouvoir, les médias puissent exercer un rôle critique, être le censeur du travail des gouvernants ? Une affaire qui démontre cette conjonction d’intérêts entre gouvernants et groupes économiques contrôlant les médias s’est produite mi-octobre 2009, quand Claudia López, une des rares voix critiques du journal proche du pouvoir El Tiempo a été remerciée sans préavis, suite à une chronique dans laquelle elle remettait en question la partialité de ce journal par rapport aux aspirations présidentielles de Juan Manuel Santos [36].Il a suffi d’une chronique dans laquelle elle questionnait la façon dont le journal couvre l’information, ainsi que sa préférence claire pour un des membres du clan Santos, pour que le journal « interprète » cette chronique comme une « lettre de démission », qu’ils « ont acceptée » « immédiatement »(sic). Le cynisme pour justifier un licenciement arbitraire et un acte de censure si éhonté ont rarement atteint de telles extrémités.

De la même façon, il est impensable que ces médias, entre les mains de secteurs économiques puissants, avec de multiples intérêts en jeu dans le conflit [37] et alliés proches d’un gouvernement engagé dans une solution militariste, observent une position critique, impartiale, ou même neutre face au conflit social et armé colombien. Dans un moment de franchise exceptionnelle, le journaliste de Caracol Radio, Héctor Rincón a dit : « Nous produisons des contenus extrêmement pauvres, (…) nous avons un langage qui ne relève pas de la rigueur journalistique, qui ne joue pas son rôle de neutralité » [38]. Inutile de dire que depuis qu’il a fait cette autocritique, en 2004, la situation, loin de s’améliorer, a ostensiblement empiré. L’adulation et la médiocrité sont récompensées, pendant qu’on persécute et on attaque l’investigation et la critique.

"Piedad suce Chavez. Chavez suce le Pôle (démocratique), et le Pôle suce les FARC. Et moi, j’en ai marre de ces fils de pute" : exemple du haut niveau du bloc réactionnaire colombien

Tous contre les FARC !

Evidemment, les médias ne sont pas impartiaux ou neutres dans le conflit colombien, mais ils le couvrent plutôt avec une hystérie qui fait que quoiqu’on dise sur les guérillas, du moment que c’est négatif, c’est crédible, même les histoires les plus incroyablement absurdes. Comme lorsqu’en 2008, les médias, pour tenter de convaincre le monde que les FARC-EP sont une « menace globale » ont inventé une histoire selon laquelle les guérilleros avaient projeté de se procurer de l’uranium pour élaborer « des armes de destruction massive » - ce qui aurait été « corroboré » par la « découverte » d’environ 30 kilos d’uranium à Bogotá, sur la base d’une information sortie du chapeau de magicien qu’étaient les ordinateurs du défunt commandant Raúl Reyes ( à propos duquel, on a inventé d’autres mensonges sinon moins gros, moins créatifs) [39].Que même des citoyens normalement instruits et intelligents aient cru de telles idioties, démontre le niveau d’endoctrinement auquel sont soumis les Colombiens, à qui les médias n’arrêtent pas de rabâcher ce genre d’absurdités. Naturellement, cette « information-fiction » n’a finalement débouché sur rien, mais le message subliminal de « guérillas perverses » prêtes à n’importe quelle action diabolique est ce qui reste dans le « disque dur » du citoyen lambda, de classe moyenne, vivant dans les grandes villes et qui ne connaît le conflit qu’à travers les nouvelles.

Dans les médias, on reproduit une série de lieux communs dont on ne vérifie jamais la véracité, qui font partie de la propagande de guerre contre-insurrectionnelle officielle : les guérillas et principalement les FARC-EP, ne seraient pas des organisations révolutionnaires ou insurgées, mais plutôt des « narcoterroristes » [40] (l’affirmation qu’ils ne démontrent jamais avec évidence, ce serait que les guérillas trafiquent effectivement, en dehors de l’impôt qu’ils touchent « de force », auprès des narcos - lesquels, eux oui, ont de nombreux amis au parlement et dans les grands groupes économiques- de la même façon qu’ils en touchent d’autres activités économiques dans leurs zones d’influence [41], qu’ils ne mènent pas des actions mais « commettent des crimes » [42], dans des « zones marginales » déterminées du pays (même s’ ils se trouvent dans le centre géographique du pays comme à Tolima, Huila, Valle, etc..) et leurs actions militaires, même quand ils respectent pleinement les règles de la guerre moderne, sont toujours des « actes terroristes » et non des attaques.

Le président Juan Manuel Santos lui-même a déclaré, récemment sur son compte twitter que : « 417 terroristes des FARC, 60 de l’ELN » se sont démobilisés et qu’on a capturé 1.723 membres des Bacrim (Bandes criminelles émergentes, nouvelle appellation des groupes paramilitaires inventée par Uribe en 2006, après la démobilisation officielle des Autodéfenses unies de Colombie, NdE) en 2012. C’est-à -dire que les terroristes, ce sont les guérilleros, pas les paramilitaires.

Selon les médias, la guérilla n’aurait pas d’idéologie : « Non seulement les FARC manquent de chefs comme Arenas et Marulanda, mais elles n’ont pas non plus un discours qui séduit, à part les criminels, les narcotrafiquants et délinquants de toute sorte (…) Les FARC ne sont plus la guérilla d’avant aux convictions idéologiques inébranlables avec une grande connaissance du terrain et une grande capacité à créer la surprise durant ses combats avec l’armée. C’est une association criminelle, contre laquelle se battent non seulement les Forces militaires et la police mais le pays tout entier, lassé de leurs mensonges et infamies » [44]. El Tiempo partagerait ces points de vue car selon lui, les FARC seraient pourries par le narcotrafic et n’auraient plus aucune idéologie [45]. Dans le meilleur des cas, l’insurrection déguiserait son « obstination » sous le terme d’idéologie [46]. Mais curieusement, la gauche est accusée fréquemment d’être une façade du mouvement guérillero, et tout aussi fréquemment tombent des « idéologues » de la guérilla [47]. Personne ne peut expliquer alors dans les médias pourquoi une guérilla « sans idéologie » chercherait des liens avec la gauche ou pourquoi un cartel de narcotrafiquants supposés s’attacherait à avoir des « idéologues » - chose dont les paramilitaires n’ont jamais eu besoin. En réalité, l’oligarchie colombienne n’a jamais accepté la nature politique du mouvement insurrectionnel en Colombie : auparavant, ils les appelaient « bandits », « racaille », puis « communistes » (non pas pour insister sur l’aspect idéologique mais plutôt sur le caractère supposé d’agitateurs dans « l’idyllique » campagne colombienne, au service d’une puissance étrangère dans le contexte de la Guerre Froide, ennemis de l’ordre et de la morale) et maintenant ils sont des « narcoterroristes ». Les puissants n’ont jamais réellement accepté la légitimité politique de ceux qui les interpellent et en tous temps et partout, ils les ont discrédités sous des termes identiques à ceux qu’utilise l’oligarchie colombienne [48].

Chaque fois que se produit un attentat ou qu’un civil est assassiné, sans chercher à vérifier les preuves ou à enquêter sur le terrain sur les faits, les médias incriminent immédiatement les FARC-EP, en retransmettant l’information (intéressée, partielle et propagandiste) servilement et sans la mettre en doute, de sources militaires ou émanant du gouvernement. Incriminer les FARC-EP de tout ce qui arrive dans le pays, est une attitude réfléchie des médias, qui s’avère très utile à la stratégie propagandiste du gouvernement, mais en aucun cas ne participe à la formation d’une citoyenneté critique et réfléchie.

Dans de nombreux cas, on a accusé les FARC-EP de crimes qui finalement ont été perpétrés par des paramilitaires ou l’armée : tel a été le cas des bombes du Barrio Gaitán pour la réélection d’Uribe, le massacre de Jamundi, la bombe d’Ituango, le massacre de San José de Apartado etc On peut en dire autant de toute la confusion qu’ils sont en train de semer autour de l’affaire du massacre des enfants de Tame, Auraca, où l’armée est clairement impliquée [49]. Rubén Darà­o Zapata illustre cette situation et explique l’attitude adoptée par les médias quand on a découvert que ces crimes ne sont pas de la responsabilité du mouvement insurrectionnel : « Quand on a su que certains de ces crimes étaient le fait de bandes de délinquants de droit commun, les médias ont persisté dans leur version, ils ne se sont pas sentis tenus de la rectifier », l’illustration de cette affirmation en est l’affaire emblématique du « collier bombe » : « un exemple, le 15 mai de l’an 2000, deux délinquants ont menacé une femme, Madame Elvia Cortés , avec une bombe exigeant de son mari la somme de 15 millions de pesos. Cette image a fait le tour du monde à la télévision et a été reproduite dans de nombreux journaux. L’histoire a été tellement connue que la productrice Huella Latente l’a recrée pour la télévision, ce qui a fait perdre du prestige aux FARC et au processus de paix(…). Ils n’ont pas fait le même effort de diffusion pour autant quand on a pu vérifier que les auteurs du collier-bombe étaient des délinquants ordinaires et ne faisaient pas partie des FARC » [50].

Jusqu’à aujourd’hui, quand je parle avec des gens, certains continuent à croire que le « collier-bombe » était l’oeuvre des FARC-EP, preuve irréfutable de leur « plus absolue dégradation ». Quand je leur dis que cet acte a été le fait de délinquants ordinaires, ils sont surpris : « Et pourquoi El Tiempo n’a rien dit ? »… à quoi, on ne peut répondre que par un sourire…

Massacre en Colombie, Fernando Botero

Exagération des violations commises par la guérilla, minimisation des violations de l’État et des paramilitaires

La partialité des médias est mesurable. J’ignore si une étude quantitative a été réalisée sur les médias et le conflit dans la presse colombienne, mais une analyse quantitative réalisée par le journaliste canadien Garry Leech sur la couverture par les médias des violations des différents « acteurs armés » colombiens dans le New York Times, est significative. D’après les chiffres du CINEP [Centre d’investigation et d’éducation populaire], vers la fin du premier gouvernement d’Uribe Vélez, la force publique était :

« Responsable de 56% des abus(…) tandis que les paramilitaires et les FARC étaient respectivement responsables de 29% et 10%, des abus.

Ces statistiques sont fréquemment en totale contradiction avec le panorama présenté par les médias, dans lesquels une liste interminable de déclarations de représentants du gouvernement colombien, et des USA se réfèrent souvent à "la brutalité’ des " terroristes’ des FARC, sans mentionner, à quelques rares exceptions près, les violations par les paramilitaires et militaires. Par exemple, chaque fois qu’un civil est assassiné, des membres du gouvernement colombien accusent immédiatement les FARC. Les mass-médias reproduisent docilement les accusations sans mener leurs propres investigations sur les crimes. Dans ces occasions où finalement il y a assez de preuves pour pouvoir conclure que les paramilitaires ou l’armée sont en réalité les responsables des crimes, le manque d’intérêt du gouvernement face à une telle nouvelle preuve fait que les mass-médias taisent l’information rectifiée, laissant planer en conséquence l’impression que les FARC ont été les coupables.

(…) Une étude sur des civils assassinés démontre clairement l’existence de ce fossé entre la réalité et le terrain, et la manière dont les médias la présentent. Au cours de la première période du gouvernement Uribe (2002-2006), le New York Times a publié 21 communiqués qui se rapportaient spécifiquement à l’assassinat de civils en Colombie. Sur ces communiqués, 17 incriminaient la guérilla des assassinats, alors que 2 rendaient responsables les paramilitaires et 1 l’armée, et autant dans le reste pour les paramilitaires que pour les rebelles. Sur chacun des 17 articles qui incriminaient la guérilla, les seules sources consultées ont été celles des officiers de l’armée ou du gouvernement colombien.

Cependant, d’après le rapport de la Commission Colombienne des Juristes(CCJ) de 2007, les guérillas ont été responsables de 25% des assassinats de civils pendant la première période du gouvernement Uribe. Pendant ce temps, les paramilitaires ont été responsables de 61% des assassinats et l’armée colombienne des 14% restants. Ces statistiques diffèrent de façon dramatique du panorama présenté par le New York Times, qui fait croire que les guérillas sont responsables de 80% des assassinats et non de 25%. A son tour, le New York Times donne l’impression que les paramilitaires étaient seulement responsables des 10% des assassinats et l’armée de simplement 5% » [51].

Cette étude démontre, de manière irréfutable, le rôle des médias qui créent une perception déformée du conflit chez des personnes qui n’ont pas d’expérience directe avec lui (aussi bien en Colombie qu’à l’extérieur). Je ne crois pas que les résultats qu’apporterait une étude similaire sur les médias en Colombie seraient très différents. S’ils sont différents à certains égards, cela ne m’étonnerait pas que les médias colombiens soient encore plus partiaux que ceux des USA [52].

Viva la Muerte, Fernando Botero, 2001

On ne met pas en doute les sources « officielles »

Nous avons dit qu’en général la presse et les médias colombiens, fonctionnent comme des porte- paroles efficaces des classes dominantes. Ceci n’est pas exagéré et a été reconnu, par exemple, dans le Projet Antonio Nariño, élaboré en 2001 pour déterminer le degré de liberté d’expression en Colombie. Une analyse réalisée en 2003 sur treize journaux colombiens sur la manière de couvrir le conflit armé avec des résultats substantiels, en plus de révéler la médiocrité du journalisme colombien en général, a émis l’opinion suivante : « 47% de l’information est construite à partir d’une source unique tandis que 21% ne cite aucune source. Des informations qui sont construites à partir de plus d’une source, lesquelles représentent 31%, 88% ne vérifient pas l’information, donc n’offrent qu’un seul point de vue, il n’y a pas d’antithèse. La majeure partie de l’information procède de sources officielles, ce qui devrait garantir la transparence de l’information. Malheureusement, il n’en va pas ainsi - nous avons trouvé de nombreux exemples - évidemment puisque c’est un État en guerre » [53].

Rubén Darà­o Zapata dit qu’ « une des caractéristiques des mass-médias qui s’est accentuée au cours de ces huit années de gouvernement Uribe résulte de l’adoption des sources officielles comme unique source et l’adoption du discours officiel comme manuel de style » [54]. Nous pouvons dire qu’avec l’arrivée au pouvoir de Santos, la situation n’a absolument pas changé.

Selon Ramiro Bejarano « ce que nous savons de cette guerre, nous, les Colombiens, ce sont tout juste les données que reproduisent les médias à partir des communiqués militaires ou du gouvernement, qui évidemment sont partie prenante » [55]. A son avis, par conséquent, la présence de journalistes étrangers, qui parce qu’ils le sont devraient avoir une certaine « distance » et davantage d’objectivité, serait essentielle pour mieux comprendre le conflit. Dans une autre chronique, Daniel Pacheco insiste aussi sur le besoin de journalistes étrangers pour couvrir le conflit, car celui-ci, bon gré mal gré (par cooptation ou sous la menace) est devenu un terrain miné pour les Colombiens : « deux journalistes étrangers, Karl Penhaul et Carlos Villalón, un Anglais et un Chilien, se sont rendus dans la zone de la séquestration (sic) et ont rapporté une vidéo dans laquelle un chef d’escouade de la guérilla lisait le communiqué dans lequel la guérilla reconnaissait détenir Roméo . A Bogota, on n’a pas connu le froid malaise que l’on ressent quand un scoop vous échappe, il semblait qu’il y avait une acceptation tacite qu’il s’agissait d’une tâche hors d’atteinte pour les médias colombiens. C’est sans regret que les journalistes étrangers sont devenus la source des médias colombiens » [56].

La tendance à accepter les sources officielles comme les seules légitimes est devenue tellement naturelle que même quelqu’un comme Jaime Abello, directeur de la Fondation Nouveau Journalisme Ibéro-américain en arrive à se poser la question extrêmement rhétorique qui démontre que le journalisme en Colombie se fait à la façon d’un « monde à l’envers » :

"L’Etat colombien et les Forces Armées se sont-ils demandé quel était leur rôle, plus précisément leur responsabilité sociale et légale, dans la production de l’information, en tant que source la plus importante de tout ce qui est en train de se produire dans le conflit armé de notre pays ? J’aimerais savoir par exemple, quel type de questionnement, de révision, font les Forces Armées aux commandants des Brigades qui inventent ou font des montages, nous savons bien que ces montages existent, qui montrent qu’il y a vingt morts, dont on change les photos ou je ne sais quoi, et total on ne sait pas si ce sont des guérilleros ou des paramilitaires, ou encore des personnes innocentes et ils disent :’voilà les guérilleros que nous avons éliminés’ . Quel type de réflexion ? Pourquoi le pays n’a-t-il pas ouvert un débat sur la responsabilité juridique, sociale, légale des Forces Armées colombiennes qui fournissent l’information institutionnelle ? Là alors, il y a un autre rôle, celui des sources.

Les médias travaillent très près des sources, et ne nous leurrons pas, lorsque nous parlons de sources, nous pouvons pratiquement dire pouvoirs :pouvoirs économiques, pouvoirs des entreprises, pouvoirs politiques qui occupent 8O% de l’espace informatif des médias et qui sont les plus grands fournisseurs d’information » [57].

Si c’est cela le « nouveau journalisme ibéro-américain », nous avons vraiment un grave problème. Non seulement on accepte les pouvoirs économiques, politiques et ceux des entreprises comme sources privilégiées, mais on accepte que la source « la plus importante » d’information sur le conflit colombien soit les Forces Armées, c’est-à -dire une des parties prenantes au conflit. Sans aucune honte, par conséquent, le journalisme se met du côté d’une des parties du conflit et ensuite il lui demande s’ils font des « montages » ou s’ils « mentent ». L’État ment toujours ; l’armée fera toujours une propagande qui lui sera favorable et elle essaiera de mentir sur son adversaire, l’insurrection. Le problème n’est pas là , mais c’est que le journalisme soit incapable de vérifier les sources, de faire des investigations, de mettre en doute, d’aller voir plus loin que les chiffres officiels. Que nous puissions nous limiter simplement à exiger de l’État qu’il soit une « source d’information plus fiable » est la preuve de la banqueroute du journalisme colombien. Un journalisme qui se différencie à peine de l’irresponsabilité du journalisme usaméricain pour la couverture de l’agression en Irak- Judith Miller, une journaliste du New York Times qui pendant des mois a écrit des articles sur « les armes de destruction massive de Saddam Hussein », en répétant comme un perroquet les déclarations du gouvernement Bush, préparant ainsi le terrain pour l’invasion de l’Irak, créant les conditions pour préparer l’opinion usaméricaine à l’aventure guerrière, s’est justifiée de la manière la plus cynique, quand il est apparu au grand jour que ses articles étaient pleins de mensonges, en disant : « Mon travail ne consiste pas à évaluer l’information du gouvernement ni à être une analyste de renseignements indépendante. Mon travail consiste à raconter aux lecteurs du New York Times ce que croyait le gouvernement au sujet de l’arsenal de l’Irak » [58]. De cette façon, on construit un journalisme au service des puissants et des politiques des gouvernements en place, et non au service de la vérité, de la critique ou de la formation d’une opinion publique informée et consciente.

Langlois met le doigt sur la plaie du journalisme du conflit colombien : le conflit lui-même

A peine libéré, Roméo Langlois a commencé à faire une série de déclarations sur le conflit et sur le rôle que doivent avoir selon lui les journalistes vis-à -vis de celui-ci : « Je dis en tant que journaliste qu’il faut continuer à couvrir le conflit de toutes parts (…) Pourvu que l’armée continue à emmener des gens dans les zones de conflit (…) Pourvu qu’il y ait des personnes qui aillent aussi avec la guérilla pour montrer le quotidien des combattants » [59]. En critiquant l’invisibilisation des zones de conflit dans les médias colombiens, Langlois s’est exprimé ainsi : « Je trouve triste qu’il faille détenir quelqu’un pour que les gens viennent dans cette zone » [60]. En toute logique, ses opinions ont créé un choc dans la majorité des médias, tout en l’accusant du syndrome de Stockholm , d’avoir des relations avec l’insurrection, et d’autres choses que l’on dit toujours quand quelqu’un s’éloigne du manuel officiel qui dit que les insurgés sont la personnification de Satan et les seuls responsables de tous les malheurs de la Colombie et du monde [61]. Avant Langlois, l’ex-gouverneur du Meta, Alan Jara, avait également suscité des réactions hostiles quand il a donné son opinion objective et avec un point de vue sur sa captivité de plusieurs années entre les mains des FARC-EP, sans surenchérir sur le manuel officiel [62]. De « pauvre victime » Langlois est devenu un « étranger indiscret » pour ceux qui se prosternent devant le régime.

L’un après l’autre, voici les préjugés et lieux communs qui règnent dans les médias colombiens.

  • A la différence de ceux qui assurent que l’insurrection manque d’ « idéologie », ou que ses objectifs relèvent de la délinquance et non de la politique, Langlois a émis l’avis que les guérilleros « lui ont semblé encore plus politisés qu’avant » [63].
  • Face à ceux qui ont parlé d’une « menace terroriste », comme si il n’y avait pas de conflit en Colombie, à ceux qui se contentent de donner des informations de la seule perspective de l’État, Langlois a affirmé sans équivoque que « le conflit est devenu invisible ; nous devons réfléchir à la manière de le couvrir (…) le gouvernement a vendu l’idée que le conflit est terminé, et il n’en est pas ainsi » [64] ; « nous, nous partons et ce conflit va continuer. Les paysans n’auront toujours pas de routes » [65].
  • Face à ceux qui ont parlé d’une guerre inhumaine et qui prend des otages, Langlois a affirmé au sujet du traitement des insurgés « je ne peux pas me plaindre, j’ai été traité, je pense, comme n’importe quel combattant aguerri, c’est-à -dire à la dure, avec peu de choses, ils m’ont plutôt donné bien à manger avec le peu qu’il y avait, mais ils ne m’ont jamais entravé , ils m’ont toujours traité comme un invité et ont toujours été respectueux, de ça je ne peux vraiment pas me plaindre » [68].
  • Sur la nature de l’opération militaire au cours de laquelle ont été détruits des laboratoires soi-disant capables d’extraire des tonnes de cocaïne (et pendant laquelle a été capturé le journaliste européen), Langlois a dit que « c’était ni plus moins qu’un modeste laboratoire comme la plus part de ceux qu’ils détruisent à chaque fois… c’était un modeste laboratoire d’un paysan qui comptait dessus pour survivre… sur cela on a dit des tas de choses qui sont inexactes » [69] . Dans une autre déclaration, il a dit également qu’il s’agissait « d’un laboratoire assez petit, familial, artisanal…, ce que je peux dire, oui, c’est que j’ai entendu des membres du commando dire qu’il y avait 400 kilos de coca liquide, un autre dit "mais il n’y en a pas autant’, puis un autre "mais nous allons le brûler, ça ne gêne personne’… il semble vraiment, et cela je le savais déjà avant d’assister à tout cela, qu’il y a une grande manipulation des chiffres, manipulations des faits, dans cette soi-disant guerre contre le narcotrafic, qui est un grand échec » [70].
  • Face aux médias qui disent que la paix n’intéresse pas l’insurrection, parce que la guerre est devenue pour elle "un fonds de commerce" ou bien quand cela l’intéresse, c’est seulement parce qu’elle est "aux abois" et "affaiblie", Langlois a été clair « [l’insurrection] veut une solution négociée au conflit intérieur avec la participation d’autres pays (…) ils veulent la paix, mais on ne les achètera pas avec un beau discours pour qu’ils rendent les armes (…) ils sont prêts à continuer la guerre 50 ans encore, ils veulent une paix négociée mais ils n’ont confiance ni dans le gouvernement ni dans l’armée » [71] ; « mon impression sur ce qui s’est passé, c’est que les FARC veulent la paix, mais pas n’importe laquelle. Ils peuvent continuer armes à la main encore pendant 50 ans (…) les gens les plus haut placés dans l’insurrection pensent à la paix, mais avant tout, ce qui est clair pour eux c’est qu’ils se sentent très forts » [72].

Il n’est pas difficile alors de comprendre pourquoi les déclarations de Langlois ont tellement dérangé les médias. D’autant plus qu’il a été assez critique vis-à -vis des médias colombiens, se faisant l’écho des plaintes qu’émettent les paysans eux-mêmes sur le traitement qui est fait du conflit dans les médias :

  • « Quand on va là -bas c’est un autre monde car les paysans disent des choses qu’on ne voit pas à la télé, ils disent que c’est l’État qui est terroriste (…) Les paysans m’ont interpellé et m’ont dit "vous les médias, vous ne dites pas la vérité, dites la vérité, l’armée arrive ici et nous met des vêtements militaires et ils nous tuent (…) Quand on y va comme journaliste international, les gens racontent tout ce qu’ils ne peuvent pas raconter parce qu’on les tue » [73].
  • « C’est toujours dans la campagne que les gens se plaignent et disent "les choses ne sont pas comme les médias les racontent’ c’est-à -dire qu’ils sont courageux quand arrivent les journalistes à qui ils disent "vous dites des choses qui n’existent pas, notre vie n’est pas comme vous la décrivez, les choses sont complexes, sont difficiles, laissez-nous vous expliquer comment c’est » [74].
  • A propos du manichéisme dont font preuve les médias pour simplifier le conflit, Langlois a été acerbe : « Il y a encore beaucoup de gens qui croient en Colombie que la guérilla, ce sont des terroristes infâmes qui mangent des enfants mais la réalité est plus complexe… ce qui se passe c’est qu’on a fait taire très souvent les voix un peu différentes » [75].
"Ne maltraitez pas les enfants : ils sont l’avenir", FARC-EP

Grâce à l’attention internationale sur son cas, Langlois a eu la chance de faire connaître la réalité d’un conflit sur lequel il fait des enquêtes depuis des années comme très peu de journalistes colombiens se risquent à le faire ; à dos d’âne, sur des sentiers impraticables, au sud du Bolivar, dans le Bas Cauca d’Antioquia, dans le Cauca, le Caquetá etc. Dans ses déclarations, il ne dit rien qu’il n’ait déjà dit dans ses documentaires. Ces opinions qui lui ont valu les foudres de l’ex-président Uribe qui n’a manqué de fustiger Langlois dans ses insupportables rengaines sur twitter [76] offrent une vision plus complexe du conflit, où l’armée n’est pas « héroïque » mais plutôt vécue comme des « terroristes » dans de nombreux endroits, et où les » terroristes » de la guérilla sont vus souvent comme « un gouvernement parallèle » ou comme une véritable « armée du peuple ». Ceci a été mis en évidence par les déclarations de quelques paysans de la zone de San Isidro qui disaient le jour de sa libération « le gouvernement ne vient que pour nous balancer du poison (glyphosate) ou du plomb, ils n’ont pas fait les routes et ne les réparent pas, ils nous font crever de faim. Notre gouvernement, c’est la guérilla » [77]. Cette facette du conflit, délibérément occultée par les médias, nous aide à mieux comprendre pourquoi il y a persistance de la lutte de la guérilla après des décennies de guerre sale et de programmes de guerre totale financés par les USA. Au cours d’une interview donnée pour le programme Hora 20 de Radio Caracol, Langlois a donné une vision du conflit qu’on ne livre jamais dans les médias officiels, mais qui reflète la réalité des dites « zones rouges », les zones du conflit où l’insurrection est profondément enracinée :

« Les guérilleros sont aussi des Colombiens et c’est un conflit où il n’y a ni bons ni méchants, je crois qu’il y a des gens pauvres qui prennent les armes pour des raisons déterminées et tous croient agir pour ce qui est juste( …) je crois que les guérilleros ont beaucoup à apporter au pays, de différentes façons(…) je crois que réellement quand on se rend à la campagne, dans les "zones rouges’ et qu’on voit que les choses sont très différentes et ce dont je parle, moi, c’est de la préoccupation qu’ont les paysans, je ne parle pas là de la guérilla mais je me fais le porte-parole des paysans…ils disaient toujours aux journalistes qui allaient dans leurs zones que les choses sont beaucoup plus compliquées que ce que vous la presse en général êtes en train de décrire… pour eux, il y a encore un soutien à la guérilla, c’est quelque chose de fort, mais c’est quelque chose qu’il faut reconnaître, et eux ne veulent toujours pas de l’État, ils le voient souvent comme une force d’occupation (…) je crois qu’il est très important que le pays connaisse la vérité, que le pays sache ce qui est en train de se passer et ce que ressentent les paysans à qui personne ne tend un micro…. C’est-à -dire, que peut bien penser un homme qui possède un petit chongo [78] quand arrivent les forces spéciales et qu’on le lui brûle. ...C’est à dire que la guérilla tire sur les hélicoptères et les gens sont contents, c’est triste, c’est dur mais c’est ainsi » [79].

Langlois a aussi mis en doute la vision d’une guérilla désespérée, au bord de la déroute militaire, sans convictions, vision alimentée par les médias depuis presque une décennie, avec des chroniqueurs médiocres, élitistes et ignorants de la réalité du conflit, comme Héctor Abad Faciolince (« un gaucho de base » passé à l’extrême-droite « progre » de Santos), qui parle de choses aussi absurdes que le soutien aux FARC qui « est plus près du zéro que des 3% » [80]. Difficile alors d’expliquer comment un groupe de « terroristes » isolés, sans base sociale, peut tenir en échec, dans de nombreuses régions du pays, l’armée la plus puissante de toute l’Amérique du Sud [81]. Ces mensonges, répétés à satiété et sans aucune honte par les médias et les apologues du régime le plus inégalitaire du continent (même s’ils se cachent derrière une apparence de « progrès »), se banalisent dans le subconscient des citoyens qui, dans les grandes villes colombiennes, sont étrangers à un conflit qu’ils ne connaissent que par les actualités. Langlois, une de ces voix marginales des actualités-spectacle, fournit une vision différente à partir de son expérience sur le terrain du conflit et avec une vision critique, sans compromission avec la défense du statu quo dont des gens comme Faciolince profitent de façon obscène. Langlois nous dit de la « guérilla » :

« Elle est très très forte, ces huit années du Plan Patriote, Plan Colombie, ils disent "c’est le meilleur entraînement que nous n’ayons jamais eu"… ou encore ils ont confiance, ils aiment les FARC, ils aiment leur organisation, ils en sont fiers. Tout le monde les taxe de terroristes et eux ils sont fiers de leur armée populaire comme ils l’appellent. Cela fait quarante ans qu’on essaye de les tuer et de les exterminer et personne n’a réussi. Les paysans continuent de les aimer (…) comme ils ont perdu du terrain militaire, ils ont perdu des gens, ils tentent de retrouver encore plus d’audience parmi la population… ils changent leurs structures politiques (…) c’est plus qu’un groupe armé, c’est aussi un gouvernement parallèle dans de nombreuses régions de la campagne colombienne (…) la guérilla est quelque chose de très fort, qu’on aime beaucoup , eux aiment leur organisation, c’est un autre aspect qu’il faut prendre en compte. Ils sont fiers, ils disent qu’ils vont mourir. Il y a des désertions, bien sûr, mais on peut se demander, pourquoi n’y a-t-il pas davantage de désertions ? Des désertions, il y en a très peu, il y en a eu beaucoup à l’époque du Caguán et ils disent , "cela a fait du bien, cela a épuré la guérilla, maintenant ce n’est plus la quantité, c’est la qualité " (…) ils sont revenus à la guérilla mobile, ils sont prêts à frapper, ils se retirent, ils ont beaucoup changé… et encore, ce qu’on se dit quand on voit la vie qu’ils ont, comment ces gens ne se démobilisent-ils pas, moi, j’y suis resté trente-trois jours, et il n’y a pas plus horrible, eux-mêmes le disent "notre vie est dure, horrible, on en a marre, dans la boue toute la journée, mais si on doit encore faire trente ans de plus, on fera trente ans’ [82].

"Plan Colombie = Intervention yankee"

Cette vision du conflit et ce travail pour comprendre avec un esprit critique ce qui se passe au-delà des grandes villes et au-delà des instances du gouvernement et des casernes, cette volonté de faire un journalisme critique et ne pas servir de courroie de transmission de l’establishment, contraste fortement avec l’attitude de subordination qui prévaut dans les moyens de communication traditionnels. Caracol Radio, par exemple, a envoyé en septembre 2009, 25 correspondants pour participer à un programme appelé « Soldats d’un jour » réalisé à Malambo (Département atlantique) par le Bataillon d’infanterie N°4, « Antonio Nariño », dans le but de « renforcer des liens » et d « réunir l’institution avec les moyens de communication [pour que] ils soient un appui dans la diffusion de la campagne de démobilisation ». Dans ce programme « instructif » et « ludique », on leur a fait des discours d’endoctrinement, on leur a appris à marcher en rangs serrés et à obéir au commandement. On a leur également enseigné d’autres belles choses de grande utilité pour le travail journalistique comme armer et désarmer un fusil Galil [83]. Est-ce que des correspondants qui cultivent des affinités avec l’armée peuvent être des journalistes sans même parler d’impartialité mais au moins critiques ? Ceux qui obéissent aux « ordres » de l’armée peuvent-ils avoir quelque forme d’indépendance ? Quel rapport existe-t-il entre le travail journalistique et le soutien à des stratégies militaires comme celles qui visent la démobilisation ? Pourquoi les médias autorisent-ils l’intégration active de leurs travailleurs (civils) dans une des parties du conflit ? Que diraient ces mêmes médias si un média alternatif faisait lui aussi un programme " ludique’ et "instructif’ appelé "guérilleros d’un jour’ ?

Au-delà de la critique des médias : la bagarre pour l’espace informatif

Au-delà du fait que la presse colombienne soit mauvaise, partielle, belliqueuse, qu’elle désinforme, qu’elle soit frileuse et limitée, et au-delà du rôle extraordinaire de certains journalistes étrangers comme Roméo Langlois ou des quelques cas de journalistes colombiens qui travaillent pour des mass-médias comme Hollman Morris, Alfredo Molano, Claudia Julieta Duque, Daniel Coronell etc ;, il est certain qu’il faut avancer dans le débat sur la raison pour laquelle les médias alternatifs ne réussissent pas à disputer un espace plus grand par rapport aux médias officiels. Étant bien entendu que la répression, la menace et l’assassinat jouent un rôle important. On peut citer le cas de Carlos Lozano, du journal communiste Voz , constamment menacé pour sa vie, qui a révélé récemment l’existence d’un plan pour l’assassiner mobilisant des moyens de l’ordre de 200.000 $ [165 000 €] [84].Des histoires de menaces et d’attaques contre des radios communautaires, contre des médias alternatifs sont nombreuses [85]. Il reste certain cependant qu’il est nécessaire d’essayer de façon plus ambitieuse, plus sérieuse de construire un puissant réseau de médias qui à partir de la base fasse connaître la réalité du conflit social et armé colombien qui est bien plus qu’un simple affrontement militaire entre la guérilla et l’État.

Si personne ne parle pour les paysans, pour les marginaux, il est nécessaire que ceux-ci élèvent fortement la voix pour se faire entendre. Naturellement, il existe dans des espaces des médias officiels quelques lueurs de critique et quelques expériences intéressantes qu’il faut défendre et soutenir. Il est certain que beaucoup de ces mouvements ont des canaux de communication, lesquels, on peut le regretter, sont très limités à leur cercle immédiat d’influence - leurs quartiers, leurs communautés, leur travail, etc…-Il faut faire un pas en avant, réunir des volontés et des moyens, même s’ils sont limités, et contrecarrer l’effet nocif produit par les médias de désinformation de masses qui sont en faveur des intérêts politiques, militaires et économiques d’une infime minorité de la société colombienne - cette infime portion du pays qui s’enrichit avec la guerre et qui a transformé en terreur son mécanisme privilégié de contrôle social en plus d’un demi -siècle d’application de la guerre sale contre le peuple tout entier. Il est fondamental de discuter davantage du rôle des médias alternatifs : que transmet-on ? Comment ? Dans quel but ? A quel public ? Il faut : débarrasser notre pensée critique, alternative des discours faciles et des formules rebattues, des qualificatifs excessifs ; abandonner la rhétorique stérile au profit de la reconnaissance des faits et de l’analyse exhaustive de la réalité ; abandonner l’aspect viscéral sans laisser de côté la nécessaire indignation et développer une presse dont l’objectif ne doit être l’endoctrinement mais plutôt le développement des facultés critiques des personnes, endormies par l’effet abrutissant des médias partisans du gouvernement. Nous devons nous réapproprier la dénonciation basée sur des données fortes et crédibles, reprendre l’investigation abandonnée par les journalistes au service du système, investigation que nous pouvons faire de la meilleure façon à partir de nos territoires, de nos réalités, de notre engagement. Nous avons tous notre goutte d’eau à apporter à cette tâche.

Pour l’instant, saluons le fait que l’épisode Langlois ait servi, au moins, à commencer à mettre en évidence la partialité du discours proche du gouvernement qui se cache sous le nom de « presse » en Colombie. Nous saluons également le fait que cet épisode ait permis de montrer à la Colombie et au monde cette autre Colombie qui respire, vit et se développe dans les villages ruraux qui affrontent et résistent depuis un demi-siècle à tant de violence de l’État, ainsi qu’à la voracité des entreprises, des latifundistes, des multinationales. Il est cependant important que nous passions de l’étape de la critique à la construction d’alternatives et nous espérons que cet épisode sera aussi un premier pas vers la construction d’un espace informatif, journalistique, d’investigation à partir duquel on pourra faire connaître la réalité déchirante du conflit social et armé comme contribution à son dépassement.

José Antonio Gutiérrez D.

Original : http://www.es.lapluma.net/index.php?option=com_content&view=articl...

Traduction Pascale Cognet http://www.tlaxcala-int.org/article.asp?reference=7800

Notes

[1] http://cromos.com.co/personajes/actualidad/articulo-144365-romeo-langl... La position des FARC-EP à propos de la détention de Langlois et des confusions sur sa présence aux côtés des troupes de l’État, est explicitée par Colacho Mendoza, commandant du Front 15 . http://www.youtube.com/watch?v=ro8DUMdgmDQ

[2] http://www.rebelion.org/noticia.php?id=149277&titular=las-farc-con...

[3] http://www.elespectador.com/opinion/editorial/articulo-344813-una-cond...

[4] http://www.eltiempo.com/opinion/editoriales/exigencias-inaceptables-ed...

[5] Une version particulièrement pathétique de cette position a été écrite quelques mois après par Héctor Abad Faciolince, qui dans sa chronique d’El Espectador (dans laquelle, il convient de préciser qu’il n’accepte pas de commentaires de participants à des forums) compare le fait d’interviewer des guérilleros avec le fait d’en être complices - en attaquant, au passage Jorge Enrique Botero et Piedad Córdoba avec le même acharnement et de façon aussi minable que le partisan d’Uribe le plus paumé. Il suffit de dire que dans sa chronique il se consacre à attaquer sans pitié la gauche conséquente et à excuser l’extrême-droite, le tout enveloppé de rhétorique pseudo-progressiste, il n’est pas le seul dans ce cas. Cette chronique est une défense honteuse du journalisme "proche du pouvoir " et au service de la propagande de l’État. Sa position concorde parfaitement avec la dissimulation du conflit opérée constamment par les médias, et ce n’est pas par hasard qu’on l’appelle, pour se moquer « Facholince ». (facho-lynx) Ver http://www.elespectador.com/impreso/opinion/columna-296688-hablar-asesinos

[6] http://www.lasillavacia.com/elblogueo/ccortes/33150/cubrir-la-guerrill...

[7] http://www.elespectador.com/noticias/paz/articulo-35010...n-gol

[8] Voir le rapport annuel 2011 de Reporters Sans Frontières , p68.Il faut souligner que toutes les violations de la liberté de la presse et des journalistes cette année - là , ont été réalisées par des paramilitaires. Voir les rapports sur http://www.rsf-es.org/

[9] Voir rapport de RSF de 2009.

[10] http://www.anarkismo.net/article/14779

[11] Taussig, Michael, "Law in a Lawless Land : Diary of a "Nettoyage en Colombie’ (Limpieza’ in Colombia" ), Ed. New Press, 2003, p.9. La source est anonyme par nécessité de protéger la source en pleine campagne d’extermination conduite par les paramilitaires des AUC totalement alliés à l’armée nationale.

[12] http://www.presidencia.gov.co/prensa_new/discursos/esqu...s.htm

[13] http://www.pnud.org.co/img_upload/9056f18133669868e1cc3...2.pdf p.8

[14] http://www.pnud.org.co/img_upload/9056f18133669868e1cc3...2.pdf p.8

[15] http://www.anarkismo.net/article/10199

[16] Pour plus d’informations sur le cas du DAS et la persécution politique déclenchée par cet organisme de l’Etat, consulter http://www.anarkismo.net/article/16405

[17] http://www.anarkismo.net/article/14779

[18] http://www.youtube.com/watch?v=eKDP2jf8Fmo

[19] http://www.anarkismo.net/article/16405

[20] http://www.anarkismo.net/article/16450

[21] http://www.elespectador.com/impreso/cuadernilloa/entrev...audia

[22] http://www.elespectador.com/audio-juan-manuel-santos-ac...elito

[23] http://www.elespectador.com/impreso/opinion/columna-343...glois

[24] http://www.contravia.tv/article/detalles-de-la-operacio...uerto

[25] Sur le cas de Hollman Morris et sur les risques du travail journalistique en Colombie, voir un documentaire intitulé « Témoin indésirable » (« Testigo Indeseable ») http://www.temoinindesirable-lefilm.com/

[26] http://www.elespectador.com/opinion/columna-350523-el-r...ances

[27] http://www.derechos.org/nizkor/colombia/doc/quince.html

[28] http://www.flip.org.co/alert_display/2/720.html

[29] http://www.semana.com/nacion/manual-para-amenazar/13256....aspx

[30] Ibid

[31] Ibid. Le cas de la journaliste ne s’arrête pas là . Plusieurs années après elle a continué à recevoir des menaces et des attaques. Voir :http://www.derechos.org/nizkor/colombia/doc/julie12.html et une interview de Cécilia Orozco dans laquelle elle donne davantage d’antécédents sur son cas http://www.elespectador.com/impreso/cuadernilloa/entrev...audia

[32] http://www.elespectador.com/opinion/columnistasdelimpre...do-16

[33] http://res.uniandes.edu.co/view.php/319/view.php

[34] http://www.eln-voces.com/index.php?option=com_content&v...id=69

[35] http://www.revistapueblos.org/spip.php?article1910

[36] http://www.anarkismo.net/article/14780

[37]Par exemple, Ardilla Lulle est un puissant agro-industriel. http://www.youtube.com/watch?v=ro8DUMdgmDQ

[38] http://www.pnud.org.co/img_upload/9056f18133669868e1cc3...2.pdf p.32

[39] http://www.eltiempo.com/archivo/documento/MAM-2862701

[40] http://www.elespectador.com/noticias/judicial/articulo-...umayo

[41] Je ne pense pas qu’il soit la peine d’insister sur le fait que cette accusation est plutôt cynique, de la part de fonctionnaires d’un État intimement lié aux cartels et aux paramilitaires, lequel était financé, selon ses propres leaders , pour 70% par le narcotrafic. Les récents scandales de la famille Uribe et de son ex-chef de la sécurité avec les narcos, ne sont qu’un rappel du caractère mafieux de ce régime surnommé par les USA eux-mêmes pendant le gouvernement de Samper « Narco-démocratie ».

[42] http://www.elespectador.com/noticias/judicial/articulo-...-farc

[43] http://www.eltiempo.com/politica/ARTICULO-WEB-NEW_NOTA_....html Important selon nous.

[44] http://www.eluniversal.com.co/cartagena/editorial/la-es...logia

[45] http://m.eltiempo.com/justicia/reconocer-el-conflicto-no-cambia-estatus-de-las-farc/9547384

[46] http://www.elespectador.com/opinion/editorial/articulo-...glois

[47] http://www.elespectador.com/noticias/judicial/articulo-...-farc Les médias dénigrent aussi les idées du mouvement insurrectionnel sans prendre sérieusement en compte ses positions, comme le prouve cette chronique médiocre de Patricia Lara :
http://www.elespectador.com/impreso/opinion/columna-320...achos ou comme le démontre un "reportage" sur l’insurrection écrit par Hécto Abad Faciolince (reportage "a la colombienne" qui ne compte pas une seule visite aux guérilleros ou sur leurs zones d’opérations), dans lequel l’écrivain élitiste se plaint de la syntaxe des communiqués des guérilleros, sur quoi il se base pour déduire " la pauvreté idéologique" de ces paysans « va -nu-pieds » qui n’ont pas dû être éduqués dans les meilleurs centres éducatifs comme lui et qui pour ces mêmes raisons n’ont pas le droit de faire de la politique, activité réservée aux patriciens colombiens : http://www.elespectador.com/impreso/cuadernilloa/politi...selva

[48] Il est intéressant de citer un exemple : en 1876, le libéral Giovanni Nicotera, ministre de l’Intérieur italien, a éliminé le terme " délit politique’ pour employer "charges pour délits de droit commun’ dans la répression contre les membres de la section italienne de l’Internationale, organisation fondamentalement socialiste libertaire et révolutionnaire. Sa justification devant le parlement est identique à celle qui est utilisée en Colombie pour criminaliser la rébellion et l’assimiler à la délinquance de droit commun de nos jours. Nicotera, avec le même élitisme que celui des médias colombiens a affirmé :" les grands principes de la liberté ne s’appliquent pas aux internationalistes (…) parmi lesquels, on ne trouve aucun homme ayant des idées politiques (…) la majorité des internationalistes en Italie sont quasiment analphabètes , on ne devrait pas prendre ces gens pour des penseurs, des scientifiques ou des propagandistes (…) il ne sont qu’une association de malfaiteurs" . Cité dans Nunzio Pernicone "Italian Anarchism, 1864-1892" AK Press 2009, p.133.

[49] A propos des confusions entretenues par les médias sur le massacre de Tame, http://www.kaosenlared.net/america-latina/item/21836-co...de-crà­men-de-niños-pese-a-haberse-encontrado-su-semen-en-las-và­ctimas.html voir également les deux articles sur ce cas et sur le massacre http://www.anarkismo.net/article/17919 yhttp://www.anarkismo.net/article/19272

[50] http://www.revistapueblos.org/spip.php?article1910 Soit dit en passant, les médias ont utilisé l’incident du collier-bombe pour torpiller les négociations pour la paix à Caguá n et pour entraîner un secteur de l’opinion publique sur le chemin de la guerre, préparant ainsi le terrain pour l’ « Uribisme ».

[51] Leech, Garry "The FARC -The Longest Insurgency" , Zed Books, 2011, pp.128-129. Il est nécessaire de préciser que même dans les chiffres dont disposent les organisations des Droits de l’Homme, les statistiques sur les violations par les paramilitaires ou l’armée sont sous-estimées, puisque beaucoup de gens ont peur de dénoncer la force publique (ou ses alliés paramilitaires) auprès des autorités qu’ils considèrent à juste titre complices. .

[52] Noam Chomsky a déjà travaillé, au cours de la décennie 70, sur la partialité des médias dans la couverture des atrocités commises par différents gouvernements dans le Tiers Monde. Ses conclusions sont que plus les USA appuieront ces régimes, plus ils cacheront leurs atrocités. Voir le documentaire "Manufacturing Consent" http://www.youtube.com/watch?v=3AnB8MuQ6DU : à un certain moment, ils font une étude comparative de la période 1975-1979 sur le nombre de pouces qu’"ont mesuré’ les articles sur les atrocités au Cambodge et ceux de l’Indonésie à Timor Leste dans le New York Times, ces dernières soutenues directement par les USA. Alors que les atrocités à Timor Leste ont été comparativement aussi horribles, sinon pires, que celles du Cambodge, ce pays n’a occupé que 70 pouces des rubriques d’information pendant que le Cambodge en a occupé 1.175 pouces (voir à 1:20:00 du documentaire).Il est évident que la couverture n’est d’aucune façon proportionnelle aux évènements, mais plutôt en rapport avec l’agenda politique usaméricain qui cache certaines atrocités et en reproduit d’autres jusqu’à satiété. Quelque chose de pas très différent au traitement donné par les médias locaux et internationaux au conflit colombien.

[53] http://www.pnud.org.co/img_upload/9056f18133669868e1cc3...2.pdf pp.8-9.Important selon nous

[54] http://www.revistapueblos.org/spip.php?article1910

[55] http://www.elespectador.com/opinion/columna-350523-el-r...ances

[56] http://www.elespectador.com/opinion/columna-346228-recu...talla

[57] http://www.pnud.org.co/img_upload/9056f18133669868e1cc3...2.pdf p.31

[58] http://www.guardian.co.uk/commentisfree/2011/feb/05/tra...ngton

[59] http://www.bbc.co.uk/mundo/noticias/2012/05/120530_colo...shtml

[60] http://www.elespectador.com/noticias/paz/articulo-34987...ombia

[61] Ver http://cnnespanol.cnn.com/2012/05/30/en-marcha-operativ...lois/ y http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=...DEl8# On peut lire dans une note d’Eduardo Mackenzie une des opinions les plus virulentes, opinion qui reflète bien celle de l’’uribisme’ sur Langlois et sur son travail de journaliste .http://www.periodismosinfronteras.com/el-curioso-period....html

[62] On peut consulter ses déclarations sur http://www.elespectador.com/noticias/paz/articulo114671...abras

[63] http://www.bbc.co.uk/mundo/noticias/2012/06/120610_entr...shtml

[64] http://www.elespectador.com/noticias/paz/articulo-34987...ombia

[65] http://m.eltiempo.com/justicia/nosotros-nos-vamos-y-este-conflicto-va-a-seguir-romeo-langlois/11912181/1

[66] http://www.citytv.com.co/videos/794266/primeras-declara...erado

[67] voir vidéo dans le reportage suivant http://cromos.com.co/personajes/actualidad/articulo-144...erado

[68] http://m.eltiempo.com/justicia/nosotros-nos-vamos-y-este-conflicto-va-a-seguir-romeo-langlois/11912181/1. Ses positions ont été assez proches des opinions d’Alan Jara, qui après plusieurs années de captivité a affirmé : " Il y a une différence entre la décision des chefs de la guérilla de nous garder aussi longtemps dans la forêt et le traitement au quotidien. Ils nous donnent ce qu’ils trouvent. Il n’y a pas de maltraitance, pas de grossièreté, pas d’humiliations rien de tel, simplement ce qu’il faut (…) Les chaînes, la plus part du temps sont utilisées comme moyen de sécurité. Ils n’ont pas l’habitude de nous mettre les chaînes pour nous torturer. Quand nous nous trouvons dans des camps fermés, avec des grillages et des lignes de sécurité, il n’y a pas de chaînes. Quand nous sortons dans la zone, on nous met les chaînes pour marcher, oui dans ce cas on a les chaînes. Les guérilleros eux-mêmes chargés de nous les mettre rechignent à le faire quand ils ont cette mission. Je préfère me souvenir d’eux le lendemain quand ils nous les enlevaient. " http://www.elespectador.com/noticias/paz/articulo114671...abras

[69] http://www.citytv.com.co/videos/794266/primeras-declara...erado

[70] Voir vidéo dans le communiqué suivant http://cromos.com.co/personajes/actualidad/articulo-144...erado D’après ce qui est écrit dans le communiqué, au moment de la libération de Langlois, le 30 mai sur le chemin de San Isidro, dans le Caquetá, "le paysan , propriétaire du laboratoire de traitement qui a été brûlé avant le combat a parlé et il a raconté que c’était une petite cuisine et qu’il n’avait pas les moyens de traiter 400 kilos de pâte base et encore moins de la cocaïne. On appelle « cuisine » un laboratoire artisanal pour le traitement de la pâte base de la cocaïne. Dans les enregistrements de Langlois, on peut se rendre compte de l’aspect rudimentaire de ces cuisines. http://www.france24.com/en/romeo-langlois-colombia-farc...sfire Dans un autre communiqué de presse, on cite Langlois qui donne plus d’éléments permettant de comprendre les abus et exagérations dans lesquels on tombe au sujet de la politique de guerre contre les drogues : "Actions, humiliations, aux gens qui ont une provision moyenne de coca, on enlève tout ce qu’ils ont pour manger » http://www.avn.info.ve/contenido/langlois-confirma-denu...ianas

[71] http://www.telesurtv.net/articulos/2012/05/31/langlois-....html

[72] http://www.jornada.unam.mx/2012/06/01/mundo/033n1mun

[73] http://www.telesurtv.net/articulos/2012/05/31/langlois-....html Au cours de leurs déclarations, les paysans de la zone du Caquetá où a été libéré Langlois, ont dénoncé une série de violations commises par l’armée colombienne , jamais révélées dans les médias http://www.youtube.com/watch?v=UxVAVjnD_CE&feature=relmfu

[74] http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=...DEl8# !

[75] http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=...DEl8# !

[76] http://www.rcnradio.com/noticias/uribe-asegura-que-rome...-2764

[77] http://cromos.com.co/personajes/actualidad/articulo-144...erado

[78] Un "chongo" , c’est comme la "cuisine" (cocina), un laboratoire de type artisanal, de faible capacité, pour le traitement de la pâte base de la cocaïne.

[79] http://www.caracol.com.co/noticias/los-guerrilleros-tam....aspx Dans les citations de Langlois entendues à la radio ou dans des dossiers audios, il y a quelques erreurs grammaticales et syntaxiques minimes dues à la nationalité française du journaliste .De telles erreurs sont insignifiantes et ne nuisent pas à la compréhension du message, j’ai préféré rester le plus fidèle possible à ce qui a été dit par Langlois lors de la transcription.

[80] http://www.elespectador.com/impreso/cuadernilloa/politi...selva

[81]Le journaliste Garry Leech, dans son livre cité sur les FARC-EP, décrit la schizophrénie de la droite colombienne et des moyens de communication, qui d’une part disent que les guérillas n’ont aucun soutien populaire, mais d’un autre côté, que presque tous les mouvements sociaux sont infiltrés par les guérilleros, que les universités sont des antres remplies de "terroristes" , que les syndicalistes et les ONG sont aussi des façades de la "guérilla" , que les zones rurales occupées par l’armée sont des secteurs où il existe des sympathies pour les guérillas, etc…Mais la réalité n’est pas si contradictoire - ou bien l’ insurrection a un soutien ou bien elle ne l’a pas : Il n’est pas possible qu’elle ait un soutien lorsqu’il s’agit de justifier la répression, et qu’elle ne l’ait pas , lorsque qu’il faudrait justifier le refus d’établir la négociation politique. Voir cette polémique dans Leech, op. cit, pp.92-93.

[82] http://www.youtube.com/watch?v=_eJEM_m87q0

[83] http://www.primeradivision.mil.co/?idcategoria=232245

[84] http://www.redglobe.org/america/colombia/16/2990-narcop...ozano

[85] Sur Internet, Anncol est fréquemment harcelé au point que le délit d’opinion soit utilisé quand Dick Emanuelsson , collaborateur d’Anncol, est poursuivi et que son directeur Joaquin Pérez Becerra est arrêté ( arrêté au Venezuela puis extradé illégalement vers la Colombie, sans aucune preuve solide en dehors de ses opinions politiques).

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