Un poète, un homme hors du commun.

PEY, PEY, PEY

Serge Pey est un extraordinaire poète, dans tous les sens du mot : qui sort de la règle, de l’usage ordinaires, qui n’est pas courant, exceptionnel, inhabituel, qui étonne par sa bizarrerie, son étrangeté, son originalité, qui s’écarte énormément du niveau moyen, ordinaire, qui, par ses qualités, sort de la moyenne, qui est très grand, intense, immense.
C’est un militant qui a mené la lutte clandestine dans le Chili de Pinochet.
C’est un de mes amis.
C’est un lecteur assidu du Grand Soir qu’il a défendu quand nous étions sous la grêle des calomnies.

Quelle bonne nouvelle que l’attribution du plus grand prix littéraire pour la poésie à cet homme-là !
Son ami Jean Ortiz (qui se ressemble s’assemble) lui rend hommage dans un article publié par l’Humanité.
Lisons, nous en serons meilleurs. Et plus heureux.

Maxime Vivas

Serge Pey, préfacier de notre « Vive le Che ! », vient d’être couronné à l’unanimité du Prix Apollinaire de poésie 2017, prix prestigieux s’il en est, équivalent d’un Goncourt de poésie. Créé par Cocteau en 1941. Couronné ! Le libertaire Serge Pey a dû goûter comme il se doit la saveur du mot, lui, le coupeur de têtes non-pensantes.

Il est difficile d’écrire sur un copain. Nous savons tous que Serge et son œuvre méritent... un mausolée, ou le Nobel !! Pour le mausolée, il y est réfractaire ; et comme l’homme au chapeau noir ne se vend pas, le Nobel n’est pas pour deux mains.
 
Ce prix lui a été décerné sur la terrasse du célèbre café littéraire Les deux magots, où Apollinaire avait ses alcools. Nul doute que Serge adore les magots !! Il a passé une vie à s’enrichir, à s’enrichir des autres, des luttes, des rêves, des résistances, des roseaux de pluie des indiens mexicains, des hallucinations au peyotl, des combats avec le MIR de Miguel Henríquez... Il y a trente ans, je l’avais invité pour réaliser une « performance poétique » dans mon établissement secondaire. Il performa si bien qu’il y forma un sacré souk, mais toujours de qualité pour tous. Halluciné. Hallucinogène. Hallucinatoire.
 
Sous la coupole de Niemeyer à Fabien, il y a un mois, au siège du PCF à Paris (pour honorer le CHE), avec sa compagne comédienne sarde Chiara, il scotcha la foule des camarades présents. « Mes mots rables », dit-il. « C’est la première fois que je rentre dans un siège coco ». Et il put en sortir ! ÉMU. BOULEVERSÉ. Et photo avec Pierre Laurent !
 
Serge vient d’être couronné pour son récent recueil de poésie (il en a enfanté des dizaines, aussi telluriques, aériens, fougueux, les uns que les autres), et autres matériaux poétiques, autour et dans son dernier né : « Flamenco », l’histoire d’une grande danseuse toulousaine, exilée, Carmen Gómez, la « Joselito », la danseuse aux pieds ailés, au « duende » inaltérable. La « Joselito », la mère de tous les flamencos de Toulouse, et de tous les guitaristes de grande facture de chez nous, souvent fils de l’exil républicain ou antifasciste, la famille Sandoval, Serge López, Manolo Rodriguez, et beaucoup, beaucoup d’autres. De tous les danseurs et danseuses qui prennent le Capitole pour Triana. La « Joselito » est la mère de tous ces Andalous occitans, métissés, multi-culturalisés, comme la soleá reste la mère du flamenco.

 
Je me souviens encore -il y a si longtemps- d’un voyage « ida y vuelta » à Séville, pour écouter Enrique Morente chanter son « Estrella », et nous ouvrir un horizon d’utopie sensuelle, incandescente, mais noire à la fois. Comme Lebrijano, Pinilla, el Cabrero, el Cigala, Camarón... et « les vieux », la source sans cesse renouvelée, la Paquera de Jerez, la Niña de los Peines, Marchena, Mairena, la Carmen Linares, la Cristina Hoyos, la Yerbabuena... Olé pour tous ceux que j’oublie, « Olé por bulería »
 
L’écriture de Pey est flamenca, parce qu’elle vient des racines, du sang, qu’elle est rythmée, « compassée », toujours proche de la rupture, parce qu’elle est chair, parce qu’elle est libre, provocatrice, jusqu’à inventer des balades, des itinéraires poétiques pour rejoindre et ressusciter Antonio Machado à Collioure, Victor Hugo à Cuba, Neruda partout... ARTE. POUR LE PEUPLE. Et action ! La pensée en actes et le poème arme « por todas partes ». Serge est un poète, flingueur et pro fête, à Toulouse comme à Santiago du Chili, un « payador » de l’oralité. Un fouteur de bordel poétique. Donc : politique.

Jean ORTIZ

 https://www.humanite.fr/blogs/pey-pey-pey-645744

COMMENTAIRES  

18/11/2017 02:10 par Roger

Quel enthousiasme communicatif !
Merci de nous donner envie de (re) découvrir le poète.

18/11/2017 09:06 par legrandsoir

On a voulu vous éviter la douleur de le découvrir trop tard.
Pey dit que celui qui essaie de faire de la poésie fait de la mauvaise poésie. Lui, c’est de la"contre-poésie" qu’il écrit et déclame (en entrant littéralement en transe. C’est impressionnant et inoubliable).
Je le vois comme Picasso qui démantibulait ses modèles ("J’y comprend rien, il n’est pas accroché à l’envers, ce tableau, ma fille de 6 ans en fait autant." etc.). Pey chamboule tout ("Mais qu’es aco ? Mais qu’est-ce qu’il raconte ? Ma fille de 6 ans..." , etc.)
Bref, LGS a pris le risque de mettre cet article en "une" pour se la jouer initiateur, découvreur, prophète, ami des poètes, pour sortir un instant du monde des brutes de la politique et des médias.

19/11/2017 18:03 par act

Bref, LGS a pris le risque de mettre cet article en "une" pour se la jouer initiateur, découvreur, prophète, ami des poètes, pour sortir un instant du monde des brutes de la politique et des médias.

Et vous avez très bien fait, n’hésitez pas à le faire plus souvent, que serait la lutte sans la culture ?
Que serait une révolution sans musique ou l’amour sans la danse ?
Merci de rappeler que la poésie, les arts et la culture font partie des terrains et moyens de lutte des classes.

22/11/2017 09:03 par ozerfil

Pey, pour un militant de Gauche... Mode humour !

Sinon, outre le fait que je vais m’y intéresser, quelle frappante ressemblance avec Marlon Brando !!

Autre chose : superbe dessin du Che sur la couverture du livre de Jean Ortiz !

05/06/2018 15:18 par Tda

Et sinon elle a pas droit à son nom de famille, la "compagne sarde" ?

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