Ukraine : au cœur des rivalités impériales

Le scénario syrien semble bien se confirmer en Ukraine. Tous les ingrédients s’y rassemblent. D’abord la très forte et manifeste implication des Etats-Unis et de l’Union Européenne et de leur machine de propagande, ensuite le radicalisme des leaders de l’opposition, enfin le refus d’un pouvoir, élu démocratiquement celui-là, de souscrire à ce qui ressemble de plus en plus à une tentative de coup d’Etat.

Les Ukrainiens, eux, sont loin d’être consultés ou seulement d’intéresser les capitales occidentales qui font feu de tout bois pour obliger l’Etat ukrainien à se plier au diktat de Bruxelles, à celui des banques qui dirigent l’économie européenne. L’argument est le suivant : " les ukrainiens veulent rejoindre l’Europe ". Ils seraient dans le même temps désireux de se libérer d’un pouvoir " pro-russe ". Ce qui mérite pourtant un peu plus de circonspection, puisqu’un sondage réalisé en décembre 2013 ne donne que 46% d’opinions favorables à cette opération, contre 36 % pour l’intégration du pays à l’union douanière (russe).

Un sondage n’étant pas un référendum, il reste à démontrer si ces taux peuvent se maintenir s’il est expliqué que les clauses de l’U.E comportent un certain nombre de mesures qui sont loin de conforter cette image galvaudée du " rêve européen ", vivace notamment dans l’ouest du pays. A commencer par les sévères mesures d’austérité que le gouvernement doit appliquer, dont des coupes budgétaires drastiques sur les dépenses publiques avec l’impact qui s’en suivra sur les prestations de l’Etat, en matière de services aux citoyens ou de transferts sociaux par exemple, et sur l’emploi. Sans préjudice des conséquences désastreuses de l’ouverture débridée du marché national sur les entreprises locales, très peu préparées à affronter la concurrence des produits de leurs homologues de l’ouest, autrement mieux plus performantes et plus solides financièrement parlant.

Ceci expliqué et débattu démocratiquement, il est fort peu probable que les " pro-européens " restent aussi nombreux qu’il y paraît. Même poussés par la misère de masse endémique qui règne, les Ukrainiens, qui répondent à l’appel de ces partis de droite et d’extrême-droite, risquent fort d’être beaucoup moins séduits par les perspectives réellement offertes et qu’on leur cache. Soit ce qu’il serait juste d’appeler " l’offre européenne ". Une offre qui ne comporte pas en vérité une intégration au sein de l’Union, mais un simple accord d’association, assorti d’une aide de 610 millions d’euros.

Avec derrière, un plan de réajustement aux coûts de plusieurs milliards d’euros, qui ne prévoit aucun programme de développement économique et social, seulement des facilités offertes aux forces du marché, à la spéculation et aux " affaires " en général.

En prime, les Etats-Unis auront affaibli la Russie en créant une " zone tampon " de cette puissance avec l’Europe et un grignotage supplémentaire du territoire de l’ex- Union soviétique. Il reste cette grande inconnue que ne comprend peut-être pas cette démarche. Il s’agit de ce que Moscou envisage pour sa propre défense.

On peut lorgner, toutefois, vers ces 30 % d’Ukrainiens russes, qui peuvent demander une sécession de leur région en dernier ressort, si l’Alliance atlantique et ses relais intérieurs gagnent la partie.

Ahmed Halfaoui

 http://www.lesdebats.com/editions/260114/les%20debats.htm

COMMENTAIRES  

31/01/2014 14:17 par desobeissant

Merci de prendre connaissance et traduire le manifreste de l’opposition de gauche presente a Maidan

Manifesto :

Plan for Social Change, in ten points

Foreword, by the Left Opposition.

gaslo.info@gmail.com.

http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article30895

citée dans un article trés nuançé et serieux :

La société ukrainienne entre ses oligarques et sa Troïka

28 janvier par Catherine Samary

http://cadtm.org/La-societe-ukrainienne-entre-ses

Fuite en avant due a un president malade ?

Ukraine : l’armée appelle le président à prendre des mesures d’urgence pour stabiliser la situation

KIEV - L’armée ukrainienne a appelé le président Viktor Ianoukovitch à prendre des mesures d’urgence pour stabiliser la situation en Ukraine, dans un communiqué publié vendredi matin sur le site internet du ministère de la Défense.

Les militaires et les (autres) employés du ministère de la Défense ont appelé le chef suprême des armées (le chef de l’Etat, NDLR) à prendre des mesures d’urgence dans le cadre de la législation actuelle pour stabiliser la situation dans le pays, en proie depuis depuis plus de deux mois à un mouvement de protestation sans précédent contre le pouvoir, selon ce document.

Les militaires et les (autres) employés du ministère de la Défense ont jugé inacceptables la prise d’assaut de bâtiments publics et les tentatives d’empêcher le pouvoir de remplir ses fonctions, notant qu’une escalade de la contestation menace l’intégrité territoriale de l’Ukraine, poursuit le communiqué.

Viktor Ianoukovitch, confronté à une forte contestation depuis qu’il a renoncé, en novembre, à signer un accord de libre-échange avec l’Union européenne, a été déclaré jeudi matin indisponible par son service de presse en raison d’une maladie respiratoire aiguë.

Dans un communiqué publié quelques heures plus tard, le président a accusé l’opposition d’envenimer la situation en appelant la population à continuer de manifester en raison des ambitions politiques de quelques-uns de ses dirigeants.

De leur côté, les trois principaux chefs de l’opposition, Vitali Klitschko, Arseni Iatseniouk et Oleg Tiagnybok, ont affirmé dans une déclaration commune que M. Ianoukovitch avait violé la Constitution. Ils lui ont reproché d’avoir exercé un chantage sur les députés de sa propre formation politique, le Parti des régions, pour qu’ils votent, mercredi, malgré les réticences de certains d’entre eux, une loi accordant l’amnistie aux manifestants arrêtés.

Pour que l’amnistie entre en vigueur, il est imposé aux contestataires qu’ils évacuent d’abord dans les 15 jours les rues, places et bâtiments administratifs occupés à Kiev et dans plusieurs régions, ce que refuse l’opposition.

http://www.romandie.com/news/n/_Ukraine_l_armee_appelle_le_president_a_prendre_des_mesures_d_urgence_pour_stabiliser_la_situation_RP_310120141154-25-442575.asp

Precisions dans l’article de RIA NOVOSTI

...Le 28 janvier, le président a accepté la démission du premier ministre Nikolaï Azarov et a dissous le gouvernement qui poursuivra toutefois l’exercice de ses fonctions jusqu’à la formation d’un nouveau gouvernement. Le premier vice-premier ministre ukrainien Sergueï Arbouzov a été nommé chef du gouvernement par intérim.

http://fr.ria.ru/world/20140131/200355554.html

31/01/2014 22:19 par Geb.

A la différence de la Syrie, ou la Russie a pris le train en marche après l’avoir manqué en Libye, et ou la capacité de pressions économiques n’était pas déterminante il est probable que quitte à passer outre une campagne supplémentaire de diabolisation, la Russie interviendra en Ukraine. Par personne interposée ou pour "protéger se ressortissants". Ca lui a déjà réussi dans le conflit Géorgien.

Il avait d’ailleurs alors évité d’aller plus loin en occupant l’Ukraine ce qui lui était alors facile. Il a laissé décanter une situation qu’il risquait alors de ne pas maîtriser.

Pour l’instant Poutine, en bon joueur d’échec, laisse pourrir la situation qui reste "contrôlée" par le Pouvoir en Ukraine même si vu d’ici ça ne paraît pas évident.

Et il gère "Sotchi" qui contrairement à ce qu’on laisse à penser ici est plutôt un "shock-test" révélateur des stratégies adverses à venir plutôt qu’un handicap contraignant.

En effet dans le contexte géopolitique actuel l’"Indépendance" de l’Ukraine n’est plus à l’ordre du jour. L’Ukraine, en faillite totale, est devenue le point nodal qui, s’il bascule d’un côté ou de l’autre, déterminera TOUTE la stratégie à venir de l’Empire BAO et celle de ses Antagonistes. Et dans un cas comme dans l’autre ça sera une annexion informelle par l’un ou par l’autre.

L’Ukraine qui bascule vers l’OTAN c’est automatiquement des bases US sur place et la perte d’une base majeure russe en Mer Noire. Et d’un point de vue stratégique c’est même pas envisageable pour le Bloc Russie-Chine et Alliés.

Il faudrait aussi se rappeler qu’il suffirait que la Russie "ferme" le Gaz pour que toute l’Europe du Nord se les gèle gravement. Et pour l’Ukraine c’est encore pire. Il suffit qu’il leur vende le gaz au vrai prix et qu’il taxe les importations vers la Russie qui représente 80% du Marché ukrainien pour lui mettre le coup de grâce.

Donc tout ça ce sont des gesticulations. Et encore on ne prend pas en compte la situation financière à venir des USA et de l’Europe à la remorque.

Si ça pète à ce niveau, si le dollar perd sa valeur de référence comme ça va se passer tôt ou tard, même les sbire galiciens de la Place Maidan s’empresseront d’appeler la Russie au secours vu l’état ou l’Europe et nous-même allons nous trouver. Car si le dollar s’effondre la situation devient à l’avantage des pays du BRICS.

En effet avec la disparition de la valeur de référence du dollar il ne reste pour assoir la puissance prospective de états majeurs que leurs valeurs de réserves. En valeur de production et en valeur de ressources naturelles.

Il est vrai que la Chine perd ses réserves (virtuelles) en dollars de fonds US mais elle possède les capacités de production formées des capacités décentralisées chez elle du Bloc BAO et un marché intérieur de 1,3 milliards de consommateurs potentiels ; et la Russie et se alliés Iraniens et autres sont assis sur une montagne de ressources énergétiques et minières. Et tout ça sans avoir même à utiliser un bateau ou un avion pour le livrer.

Pour les Etats-Unis il leur restera une planche à billets, un déficit astronomique, 1000 base militaires à entretenir dans le Monde, et un pays en pleine récession sur un continent isolé qui leur est devenu hostile à plus de 50% en Amérique latine..

En tout cas aujourd’hui, ce qui va se passer là-bas c’est pas Ianoukovitch, ni même le Peuple ukrainien en général, ou les Fachos européanisants de Svoboda, qui vont le décider.

Ca sera simplement la capacité de coercition et de décision politique, économique, et/ou militaire, du Bloc antagoniste à l’Empire.

Et on retombera vraisemblablement dans une nouvelle version de la Guerre froide et des Blocs Est Ouest.

Attendons nous à des superlatifs outranciers dans la propagande médiatique à venir.

On vit une époque formidable.

Geb.

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