Venezuela : incitation à la violence (La Jornada)

La Jornada

Alors que Le Monde s’illustrait il y a quelques semaines avec un Edito qui pourrait figurer dans les manuels de désinformation/manipulation médiatique (« Les Vénézuéliens dans l'impasse du « chavisme » - 11/03/2014), rempli de tergiversations, demies-vérités, inexactitudes et mensonges éhontés, le quotidien mexicain La Jornada publie dans son éditorial du dimanche 30 mars une toute autre description des faits depuis une perspective certes engagée (sa ligne éditoriale se situe à gauche) mais toutefois non partisane, traduit ici pour les lecteurs du Grand Soir et toutes les autres personnes qui ont l’habitude d’y réfléchir à deux fois avant de gober l’info des agences de presse internationales ou bombarder un pays du tiers-monde ou en voie de développement. NdT

Le gouvernement du Venezuela a confirmé hier la mort de deux personnes après la journée de protestations qui ont eu lieu dans les villes de San Cristobal et Maracaibo. La première victime, d’après les informations du ministre de l’Intérieur Miguel Rodriguez Torres, a été un homme de 44 ans qui est décédé suite à une décharge électrique provoquée par un panneau publicitaire qui avait été déboulonné pour installer une barricade dans les rues de San Cristobal. La seconde mort a eu lieu dans une autre barricade de Maracaibo, elle correspond à celle d’un activiste de 33 ans dont l’explosif artisanal avec lequel il prétendait faire feu sur la police lui a explosé dans les mains.

Sans omettre le caractère lamentable de ces morts, et tout en reconnaissant que celles-ci s’inscrivent dans un contexte de mécontentement politique, économique et social persistant, les circonstances dans lesquelles elles ont lieu obligent à prendre un certaine distance avec le traitement médiatique réalisé par les médias internationaux –et tout particulièrement les chaînes télévisées étatsuniennes et leurs filiales latino-américaines- au sujet du conflit vénézuélien : à plus d’un mois du début des protestations antigouvernementales dans ce pays, ces consortiums médiatiques insistent à vouloir faire le parallèle entre la crise vénézuélienne et ce qui s’est passé en Ukraine, et même avec la Syrie, et s’obstinent à responsabiliser le gouvernement de Nicolas Maduro de toutes les morts survenues.

La réalité est pourtant différente : l’on trouve parmi les 39 personnes décédées durant les protestations au Venezuela aussi bien des morts victimes des abus policiers –qui doivent être punies selon la loi et pour lesquelles des enquêtes avec des mises en cause directes contre des éléments des forces de police vénézuélienne ont été ouvertes- que les assassinats de citoyens et membres des propres forces de sécurité par des groupes civiles armés. Parmi ces dernières, il est important de souligner la mort de six membres de la garde nationale bolivarienne (1) et de quatre personnes qui ont été atteintes par les bales de franc tireurs embusqués pendant qu’elles déblayaient les obstacles répartis dans les rues (par les activistes antigouvernementaux, NDT). Un élément de contexte très important à prendre en compte à ce sujet est la détention de plusieurs personnes liées à la vente d’armes et d’équipement à de présumés groupes paramilitaires.

Ces considérations renforcent, finalement, une autre perception des faits : le mécontentement social du pays sud-américain est attisé par d’autres intérêts obscurs et inavouables et avec des actions qui n’ont pas d’autre but que d’exacerber la violence, le nombre de morts et l’inconformité.

Avec en toile de fond la dialogue national convoqué par le gouvernement de Maduro et la médiation annoncée par les ministres des affaires étrangères de l’Union des nations du Sud, les agissement mentionnés ci-dessus peuvent paraître orientées à empêcher la possibilité d’un processus de paix et à mener le conflit vénézuélien à un point de non-retour.

Dans ces circonstances, le soutien international peut devenir crucial pour que le gouvernement de Caracas puisse atteindre un apaisement dans son panorama politique interne, désactive les logiques de confrontation et de violence impulsées par divers facteurs et agents, et évite que la crise vénézuélienne escalade vers des niveaux encore moins désirables. Ce soutien doit aussi inclure les sociétés des pays de la région, le nôtre inclus, et doit passer las la chute du mur de désinformation médiatique créé par les grands consortiums des communications autour de la situation de ce pays sud-américain.

La Jornada - Editorial

Traduit par Luis Alberto Reygada pour Le Grand Soir

NDT :

(1) La Garde nationale bolivarienne a pour principale fonction de maintenir et de rétablir l’ordre public, l’équivalent des Compagnies républicaines de sécurité françaises. Celle-ci est souvent appelée en renfort suite à l’inaction des forces de police locales qui ne remplissent pas leur rôle d’empêcher la levée de barricade et les différents troubles à l’ordre public réalisés par les activistes antigouvernementaux puisque la plupart de ces actions ont lieu dans des villes de classe moyenne et haute dont les maires, du même bord politique que ces activistes, loin d’endiguer le chaos l’encouragent. Lire les articles « Le Tribunal Suprême de Justice condamne le maire et le chef de la police de San Diego pour avoir désobéi à l’ordre d’empêcher l’installation de "guarimbas" » (AVN – 19/03/2014 - http://cubasifranceprovence.over-blog.com/2014/03/venezuela-le-tribunal-supreme-de-justice-condamne-le-maire-et-le-chef-de-la-police-de-san-diego-pour-avoir-desobei-a-l-ordre-d-empec) et « Le tribunal suprêmes de justice ordonne a 2 maires de l’opposition de faire leur travail » (AVN – 19/03/2014 - http://vivavenezuela.over-blog.com/2014/03/venezuela-le-tribunal-supremes-de-justice-ordonne-a-2-maires-de-l-opposition-de-faire-leur-travail.html). Evidemment les maires mis en cause dénoncent ensuite une « persécution politique » de la part du gouvernement, ce qui est repris d’abord par les médias vénézuéliens conservateurs (par exemple « Alcalde de Mérida denuncia persecución judicial por parte del Gobierno » El Nacional – 25/03/2014 - http://www.eluniversal.com/nacional-y-politica/protestas-en-venezuela/140325/alcalde-de-merida-denuncia-persecucion-judicial-por-parte-del-gobierno) puis par les médias internationaux, comme par Paolo Paranagua, spécialiste de la propagande étasunienne pour l’Amérique Latine au Monde : « Au Venezuela, le pouvoir chaviste vise désormais les élus de l’opposition » (Le Monde – 21/03/2014 - http://www.lemonde.fr/international/article/2014/03/21/au-venezuela-le-pouvoir-chaviste-vise-desormais-les-elus-de-l-opposition_4387230_3210.html). « Libération » ne rate pas le coche avec ce magnifique exemple de déshonnêteté journalistique : « Un maire de l’opposition emprisonné au Venezuela : Daniel Ceballos, maire de San Cristóbal, dans l’ouest du Venezuela, et opposant au régime du président Nicolás Maduro, a été condamné mardi à un an de prison par le Tribunal suprême de justice (TSJ). La justice lui reprochait de ne pas avoir mis fin à la vague de contestation contre le gouvernement dans sa municipalité. (...) » (Libération – 26/03/2014 - http://www.liberation.fr/monde/2014/03/26/un-maire-de-l-opposition-emprisonne-au-venezuela_990530).

 http://www.jornada.unam.mx/2014/03/30/edito

COMMENTAIRES  

08/04/2014 12:20 par Aldamir

Les Etats terroristes de nouveau en besogne à travers la planète en vue de déstabiliser les pays et semer le chaos chez les peuples non soumis au Nouvel Ordre Mondial.

08/04/2014 15:27 par Anne Wolff

Je crois - et je ne suis pas la seule - que cela reste bien trop gentil et bien trop "politiquement correct".
La sauce des manifestations étudiantes, la révolution de couleur, n’a jamais pris. Les manifestants et surtout leurs dirigeants appartiennent à des groupes oligarchiques d’extrême-droite et ont été formés aux méthodes Sharp à Harvard entre autres, et à ces mêmes méthodes incluant les techniques paramilitaires, de guérilla et de déstabilisation de gouvernement à Miami, en Colombie, et en Serbie où ils ont été envoyés par centaines ainsi que le rapportent Raul Capote, J.V. Rangel et bien d’autres.
D’autre part des paramilitaires principalement Colombiens,mais pas seulement et des terroristes sous mandat de recherche international ont été introduits sur le territoire ainsi que des mercenaires d’armées privées et des agent des Opérations Spéciales US et autres francs-tireurs d’origine locale ou étrangère qui appartiennent tous à une unique nébuleuse qui regroupent également des narcotrafiquants, des trafiquants d’armes, des gros entrepreneurs et des grands propriétaires terriens dont les bases se trouvent près des perméables frontières avec la Colombie comme l’état de Tachira.
L’ensemble des actions menées par cette armée qui inclus la cinquième colonne d’étudiants d’extrême-droite et des malfrats recrutés sur place et payés pour agir - on retrouve les composantes du coup d’état ukrainien - sont coordonnées par un commandement central dont de nombreux recoupements démontrent que la tête est à Washington et au Pentagone, qui par diverses fondations et ONG financent aussi tout ce beau monde, dans une opération qui s’est étalée sur des durées de plusieurs années plus ou moins longues pour les différents aspects et dont les frais se chiffrent au moins en centaines de millions de dollars.
En France comme en Belgique, en 40 des forces nationales - une cinquième colonne - ont facilité l’invasion nazie, qui n’en restait pas moins une invasion étrangère.
Au Venezuela, et de nombreux analystes le confirment, nous ne sommes plus face à des manifestations minoritaires et violentes, une nouvelle phase est entamée, elle correspond à une guerre militaire de basse intensité doublée d’une intense guerre médiatique et psychologique, les ingrédients incontournables de la guerre de quatrième génération.
Venir en aide au Venezuela, c’est reconnaître que le pays qui subit une invasion militaire étrangère, soutenue par une cinquième colonne est donc entré dans une phase de guerre non déclarée, une agression bien réelle, une atteinte sans équivoque à sa Souveraineté, concrète en termes de morts, de blessés, de destructions, de terreur semée dans la population. Une invasion dirigée par et depuis un pays étranger, les USA.
Une fois cela posé, il sera plus facile de comprendre pourquoi face à une armée d’invasion qui assassine des habitants du pays et tentent d’y prendre le pouvoir par les armes, l’armée du Venezuela - et sans doute bientôt les milices ouvrières qui se constituent - donnent une réponse armée, qui elle aussi fait des morts dans l’autre camp qui a montré son absolu manque de pitié, un de leur franc-tireur allant jusqu’à tuer une jeune femme enceinte de cinq mois.
Comme le dit Petras :

Malgré qu’une action ferme entraînera une réaction négative des amis libéraux de l’extérieur, la majorité des défenseurs de la démocratie pensent que la responsabilité du gouvernement est d’agir contre l’opposition qui continue à inciter à la rébellion armée.

Et j’ajoute, en écho de voix qui s’élèvent au Venezuela et dans la région : en plus une réaction ferme est urgente contre ceux qui ne sont pas une opposition nationale, mais les agents armés à la solde d’une puissance étrangère qui mènent une guerre dans le pays pour s’emparer du pouvoir dans l’intérêt de cette puissance.

(Commentaires désactivés)