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Auteur : Emilio ALESSANDRONI

Sur les rouges bruns et leurs alentours. Logique mécaniste et dialectique

Emilio ALESSANDRONI
par Emiliano Alessandroni, Comité central du PCI L'un des cas les plus fréquents où la logique binaire prend le pas sur la logique dialectique se trouve dans la tendance commune à réduire l'ontologie marxiste complexe au déconstructionnisme. Lorsqu'un terme est fréquemment utilisé par une force politique avec des connotations idéologiques précises, la force opposée a souvent tendance à nourrir un certain mépris à son égard et à le rejeter d'emblée. Or, le marxisme, qui constitue entre autres une "critique de l'idéologie", ne peut mener une telle opération de démasquage de la "fausse conscience" que dans la mesure où il oppose aux processus d'idéologisation une certaine objectivité. Le langage lui-même est soumis à des relations de pouvoir, qui agissent non seulement sur le processus de sélection des termes, mais aussi sur leur utilisation. "Liberté", "progrès", "démocratie" sont des lemmes qui ont connu de nombreuses variantes idéologiques, des usages instrumentaux multiples, (…) Lire la suite »

Losurdo : La paix : une longue histoire troublée entre idées et réalité

Emilio ALESSANDRONI

C'était en 2016. Ce livre inestimable de Domenico Losurdo venait de sortir, l'avant-dernier avant sa mort (survenue en 2018), qui retrace par étapes l'histoire philosophico-politique de l'idée de " paix " (mais aussi des guerres et des dangers de la guerre) de la fin du XVIIe siècle à nos jours. Voici l'entretien que j'ai réalisé avec lui dans un passé pas si lointain et qui pourtant peut peut-être nous faire comprendre bien des choses sur les conflits armés de notre présent. Je la reproduis ici dans son intégralité en espérant qu'au-delà de la diversité des opinions, elle pourra enrichir le débat actuel d'un contenu nouveau

Entretien avec Domenico Losurdo Alessandroni - Commençons par un lien immédiat : le thème central de votre nouveau livre (D. Losurdo, Un monde sans guerre. L'idée de paix des promesses du passé aux tragédies du présent, Carocci, Rome) ne peut qu'évoquer, pour les lecteurs qui ont un peu suivi votre parcours intellectuel, un autre thème auquel vous avez consacré de l'attention au cours de vos études : celui de la non-violence (cf. La non-violenza. Una storia fuori dal mito, Laterza, Roma-Bari 2010). Existe-t-il un fil conducteur entre ces thèmes et entre ces deux études ? Losurdo - Le livre sur la non-violence aboutit à un résultat très surprenant pour le lecteur ordinaire. Au moment du déclenchement de la Première Guerre mondiale, Gandhi s'est proposé comme "recruteur en chef" de troupes indiennes pour l'armée britannique et a lancé un appel à la mobilisation totale : l'Inde devait être prête à "offrir tous ses fils capables en sacrifice pour l'Empire en cette heure critique" ; (…) Lire la suite »

Losurdo : un comparaison entre Lénine et Gandhi

Emilio ALESSANDRONI

Emiliano Alessandroni est un jeune philosophe italien, élève de Domenico Losurdo, et militant communiste du PCI. Il enseigne à l'université d'Urbino comme son maître. Alessandroni a repris les principales catégories de Losurdo (sur le libéralisme, la démocratie, l'impérialisme et la lutte des classes) et continue à les développer dans la lignée de Losurdo. Il est l'auteur d'ouvrages très intéressants sur Hegel, Lukacs et Gramsci.

Il y a aujourd'hui 150 ans que Lénine est né. Et comme d'habitude, toute la presse libérale se lance dans une campagne de diabolisation et de criminalisation du leader révolutionnaire. Une campagne qui prend facilement racine même à gauche, où le léninisme devient souvent synonyme de violence et de penchant autoritaire, à opposer à la pureté du pacifisme gandhien. Un schéma qui ne convainc toutefois pas Losurdo et qui, dans "La non-violenza. Una storia fuori dal mito" est largement remis en question. Nous ne reprendrons ici qu'un extrait de ce qui est dit dans ce volume et la grande comparaison faite entre "le parti de Lénine" et "le parti de Gandhi". Au début de la guerre, bien que partant de positions très différentes, Lénine rend hommage aux milieux du "pacifisme anglais" et en particulier à Edmund Dene Morel, un "bourgeois exceptionnellement honnête et courageux", membre de l'Association contre la conscription et auteur d'un essai démasquant l'idéologie "démocratique" (…) Lire la suite »

Droite, gauche et régularisation des travailleurs migrants - Particularisme et universalisme

Emilio ALESSANDRONI

La bataille pour la régularisation des travailleurs migrants (dont ce que nous voyons ces jours-ci ne devrait être par nous-mêmes conçu que comme la première étape d’une longue série de revendications) constitue une bataille de civilisation. Mais aussi une lutte qui marque la lutte entre une culture de droite et une culture de gauche, c’est-à-dire entre particularisme et universalisme.

En effet, dans cette lutte est en jeu le principe selon lequel chaque individu en tant que tel, indépendamment de son appartenance à ce ou cet État, est titulaire de droits. Ceux qui refusent la régularisation des travailleurs migrants sont en fait en train de rejeter ce principe et de promouvoir des clauses d’exclusion sur la base de la race. Il défend en substance une conception non universelle mais partielle du droit. Et avec elle une conception non universelle mais partielle de l'homme. L’universalisme doit constituer le terrain conceptuel et de valeur minimum sur lequel peuvent naître ensuite des controverses, des affrontements et des discussions. Déjà ce terrain est à l’intérieur extrêmement problématique et en soi insuffisant pour empêcher le recours à la violence. Le terrain du particularisme, cependant, non seulement n’empêche pas l’avènement de la brutalité, mais constitue de fait le royaume de la cruauté perpétuelle, le règne de la violence devenue loi. (…) Lire la suite »

Où est le danger du fascisme aujourd’hui ?

Emilio ALESSANDRONI

Avant de distinguer entre " césarisme progressif " et " césarisme régressif " [1], avec une référence implicite à l’Union soviétique d’une part et aux régimes nazis-fascistes d’autre part, Antonio Gramsci avait un temps expliqué que le phénomène de l’inflexion autoritaire d’un gouvernement susceptible de connaître une intervention massive de "l’élément militaire dans la vie de l’État" [2], constitue le résultat non pas de l’arbitraire subjectif d’un seul despote, mais d’une condition objective qui voit les forces sociales en lutte tendre à s’équilibrer.

Ainsi, lorsque les classes subordonnées gagnent du terrain en termes de force économique ou politique et commencent à influencer la vie de la société, en prenant le pouvoir aux classes supérieures, il peut arriver que : 1) ils parviennent à créer un césarisme progressif prêt à soumettre par la violence les blocs sociaux supérieurs jusqu'à ce qu'ils soient rendus inoffensifs (c'est ce qui a été tenté, par exemple, en France, en Angleterre et en Russie après leurs révolutions respectives), ce qui implique que lorsqu'un système social en supplante un autre (lorsqu'on passe, par exemple, d'un système féodal à un système capitaliste ou d'un système capitaliste à un système socialiste), une phase temporelle despotique tend à être inaugurée, au cours de laquelle l'embryon du nouvel arrangement tente de se protéger contre les attaques de l'ennemi et de mettre en déroute tous ses ennemis engagés à abattre immédiatement l'édifice qui vient d'être laborieusement érigé. Ou, 2) que les (…) Lire la suite »

L’alphabet politique du libéralisme occidental : vouloir être démocratique ou vouloir être despote, comprendre ou ne pas comprendre le monde…

Emilio ALESSANDRONI

Emiliano Alessandroni est un jeune philosophe italien, élève de Domenico Losurdo, et militant communiste du PCI. Il enseigne à l'université d'Urbino comme son maître. Alessandroni a repris les principales catégories de Losurdo (sur le libéralisme, la démocratie, l'impérialisme et la lutte des classes) et continue à les développer dans la lignée de Losurdo. Il est l'auteur d'ouvrages très intéressants sur Hegel, Lukacs et Gramsci.

Le langage et les catégories employés par Zelensky dans ses discours publics sont directement calqués sur ceux de l'idéologie étasunienne, qui les emprunte à son tour à une longue et ancienne tradition coloniale de l'Occident : civilisés contre barbares, démocrates contre despotes, sains contre malades, intelligents contre stupides, etc. Ainsi, la façon dont Zelensky comprend le terme "démocratie" n'est pas différente de la façon dont les idéologues étasuniens les plus fervents le comprennent : "démocratie" signifie, selon leur lexique, "sphère d'influence étasunienne", tandis que tout écart par rapport à cette sphère est subsumé par ces idéologues sous la catégorie du "despotisme". Il en va de même pour les concepts de "comprendre" ou "ne pas comprendre le monde" (qui traduisent en termes différents les catégories "intelligent" ou "stupide" et "sain" ou "malade"). Ainsi, lorsque Zelensky accuse le président brésilien Lula de ne pas comprendre grand-chose au monde, il (…) Lire la suite »