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Auteur : Jacques FRANJU

Mouvement ouvrier et cinéma d’horreur. Aux origines : du gothique au romantisme

Jacques FRANJU
Le gothique désigne à l’origine des vestiges architecturaux de l’époque médiévale anglaise [1]. Un temps oublié et moqué, il devient au cours du XVIIIème siècle de plus en plus apprécié, notamment par les artistes et certains membres de la haute société qui trouvent de la mélancolie dans les ruines. En même temps que cette recherche d’architecture médiévale anglaise se développe une redécouverte des romans de chevalerie. Ces histoires, à l’instar des légendes de la Table ronde, font souvent appel au fantastique, à la tradition et aux nobles élans de l’âme. Elles sont peu en adéquation avec les idées des Lumières et la vénération pour l’art grec de l’époque. Tout naturellement, ce mouvement de retour sur le passé anglais se fait en antagonisme avec le mouvement philosophique en cours en Europe, qui se moque des clichés et des croyances ridicules d’un autre siècle. Pour les Lumières, ces histoires sont surfaites et pleines d’idioties. Les œuvres réalistes et à portée pédagogique sont préférées car il est d’avis qu’elles (...) Lire la suite »

Réflexions sur le mouvement ouvrier et le cinéma d’horreur

Jacques FRANJU

Un seul coup d’œil dans les programmations des cinémas (ou des plateformes) fera remarquer aux plus attentifs l’omniprésence du cinéma d’horreur. Il est vrai que le genre s’est particulièrement démocratisé. Les listes recensant sur les sites de cinéphiles les meilleures œuvres horrifiques sont devenues courantes. De même les vidéastes spécialement dédiés à l’horreur et les plateformes du type Shadowz. Hérédité (2018) d’Ari Aster a rapporté 80 millions de dollars. Get out (2017) de Jordan Peele en a lui rapporté 255 millions avec une critique unanime pour souligner les qualités et l’originalité du film. Le film Titane (2021) de Julia Ducournau a reçu la palme d’or l’année de sa sortie.

En toute honnêteté pour le lecteur, l’auteur de cet article est un amateur de films d’horreur. Depuis l’adolescence, j’ai visionné un grand nombre d’œuvres d’épouvante [1]. La terreur, le suspense, le travail sur l’image et l’ambiance, sont des choses qui me plaisent particulièrement. Un temps je ne regardais que ça, aussi bien des vieux films expressionnistes comme Nosferatu de Murnau ou plus récent comme Ogre d’Arnaud Malherbe, avant de m’ouvrir à des œuvres aux thèmes plus divers. J’ai encore une grande pile chez moi de numéro de Mad Movies, la revue française de référence en matière de cinéma de genre, et qui me permettait d’agrandir ma liste de films bis. Mes premiers pas vers la cinéphilie se sont faits via ce biais-là. Si je cherche à comprendre pourquoi j’apprécie tant le cinéma d’horreur (alors que mon entourage familial n’en était pas forcément fan), je dirais que c’est pour trois raisons : un intérêt pour les choses étranges, dérangeantes, hors du commun ; le fait que ces histoires sont très faciles (...) Lire la suite »

Vasilyok : les pertes de la guerre

Jacques FRANJU
Aujourd’hui en France, lorsqu’on pense au pays qui a vaincu l’Allemagne nazie, on pense immédiatement aux Etats-Unis. Dans un sondage de l’Ifop de 2015, 54% des personnes interrogées s’accordaient pour dire que l’Allemagne nazie avait été battue par les Etats-Unis (contre 20% en 1957) [1]. Des myriades de films comme Il faut sauver le soldat Ryan nous ayant fait imaginer que l’Europe avait été libérée par les EU, la vérité est tout autre. Comparativement aux nombres de morts, à l’effort de guerre et à la proportion de territoires libérés, c’est sans conteste l’URSS qui a vaincu l’Allemagne hitlérienne. Si 300 000 Étasuniens sont morts durant la Seconde Guerre mondiale, c’est 25 millions du côté de l’URSS [2]. Pour rappel les slaves étaient considérés par les nazis comme des esclaves pour les Ubermenschen allemands, et là où certains généraux de la partie ouest de l’Europe pouvaient être traité « convenablement », les soviétiques étaient massacrés et torturés. 87 % des pertes des nazis et de leurs alliés vient de (...) Lire la suite »

Cuban Network : l’histoire des cinq héros

Jacques FRANJU

« Ce qui m’a frappé, et nous l’avons dénoncé à l’ONU, c’est qu’il est inouï que le pays qui espionne le plus au monde accuse d’espionnage le pays le plus espionné du monde. Certes, parfois, nous avons envoyé des citoyens cubains pour infiltrer des organisations contre-révolutionnaires et nous informer d’activités qui nous intéressent beaucoup. J’estime que nous avons le droit de le faire tant que les Etats-Unis tolèrent que, sur leur sol, on planifie des sabotages, des incursions armées, des attaques contre nos installations touristiques, l’introduction d’armes et d’explosifs et surtout des attentats pour nuire à l’économie et au tourisme. Tous ces faits que nous avons dénoncés. » Fidel Castro.

Au début des années 90, l’Union soviétique et le bloc de l’Est s’écroulaient, laissant la petite île de Cuba dans l’embarras. En effet, coupé d’un partenaire de premier plan, l’île des Caraïbes se trouvait seule face à un blocus organisé par les Etats-Unis. Mis en place depuis l’année 1961, le blocus a selon l’ONU (rapport de novembre 2017) fait perdre à Cuba un chiffre d’affaires de 822 milliards 280 millions de dollars. Selon des économistes Cubains, c’est environ 12 millions de dollars perdus par jours à cause du blocus (1). Ces mêmes années concordent avec la période dite « spéciale » à Cuba, dans le sens où le pays était dans un état économique proche de celui d’une période de guerre mais en temps de paix, avec son lot de famine et de coupure d’électricité. En 1992, la loi Toricelli aux Etats-Unis interdit aux filiales des compagnies étasuniennes établies dans des pays tiers de commercer avec Cuba. En 1996, la loi Helms-Burton interdit à n’importe quelle personne ou entreprise dans le monde de faire usage ou de (...) Lire la suite »

Candyman : l’horreur sociale au cinéma

Jacques FRANJU
En 2020 nous avons vu aux Etats-Unis se développer les manifestations du mouvement Black Live Matters (« la vie des Noirs compte ») après l’assassinat de George Floyd, un Afro-américain, par des policiers. Ce qui a ressurgi c’est la question du racisme et celle du sort fait aux descendants d’Africains. Ces manifestations n’ont pas tardé à rencontrer un écho à l’international, dont en France, avec des thématiques plus hexagonale. Il faut se rappeler que la majorité des noirs aux Etats-Unis sont arrivés par l’esclavage et que la Révolution aux États-Unis est venue permettre d’assurer le droit de propriété des Blancs sur leurs esclaves noirs [1]. La guerre de Sécession a mis fin à l’esclavage mais dans les faits de nombreuses discriminations ont continué à perdurer, notamment dans le sud du pays. Les années 50 à 70 ont vu émerger des leaders noirs comme Martin Luther King et Malcolm X. Malgré certaines avancées, la vie des Afro-Américains restent encore difficile : sans faire de populisme et dire que tous les (...) Lire la suite »

La conquête du pouvoir par le prolétariat dans les trois premiers films d’Eisenstein

Jacques FRANJU
« Homme libre et esclave, patricien et plébéien, baron et serf, maitre de jurande et compagnon, en un mot : oppresseurs et opprimés, se sont trouvés en constante opposition ; ils ont mené une lutte sans répit, tantôt cachée, tantôt ouverte, une guerre qui chaque fois finissait soit par une transformation révolutionnaire de la société tout entière, soit par la ruine commune des classes en lutte. (...) « Toutefois, notre époque – l’époque de la bourgeoisie – se distingue des autres par un trait particulier : elle a simplifié les antagonismes de classes. De plus en plus, la société se divise en deux grands camps ennemis, en deux grandes classes qui s’affrontent directement : la bourgeoisie et le prolétariat. » Manifeste du Parti communiste de Karl Marx et Friedrich Engels. On ne présente plus Sergueï Eisenstein, réalisateur soviétique de génie qui a révolutionné le cinéma avec ses films. Eisenstein qui a révolutionné les conceptions du montage[ 1] ; il a d’ailleurs théorisé 5 types de montages : métrique, (...) Lire la suite »

La Marseillaise (3) : la production du film

Jacques FRANJU

Après avoir analysé le film, penchons-nous un peu sur la production de celui-ci. Tout d’abord, de qui provient l’idée du film ? Les avis divergent. En effet, l’un des collaborateurs du film, Jean-Paul Dreyfus, insinue qu’il s’agit de sa femme de l’époque, membre avec Jean Renoir de l’association Ciné-Liberté, qui aurait eu l’idée. Toutefois, d’autre sources tendent à faire penser que ce soit Renoir lui-même qui aurait présenté l’idée de la fiction lors d’une réunion du secrétariat de l’association en décembre 1936.

Jean Renoir (1894-1979) a un parcours plutôt atypique. Réalisateur français renommé de plusieurs films comme La règle du jeu, La chienne, La Grande illusion ou French Cancan, il est déjà à l’époque l’un des réalisateurs de l’Hexagone les plus acclamés par la critique. Atypique, car si à l’époque du film il fut un compagnon de route du PCF, il eut longtemps une tendance anarchisante, mais en 1940 il proposa ses services au nouveau pouvoir vichyste (qui fut refusé), avant de quitter la France pour les Etats-Unis, pays pour lequel il garda une amitié profonde et la double nationalité. Il est clair, sans plus de développement, que ce qui caractérise Renoir n’est pas une cohérence politique sur le long terme et ce que nous pouvons aisément lui reprocher. Toutefois au moment de La Marseillaise, Renoir se laissait enivrer par l’élan donné par le Front populaire. Sans aucun doute, c’est sa relation amoureuse avec sa monteuse Marguerite Houllé, communiste, qui l’influença dans le choix de ses thèmes et de son (...) Lire la suite »

La Marseillaise (2) : le retour de la Nation révolutionnaire

Jacques FRANJU

Une première chose frappe dans le film si l’on compare d’autres œuvres sur la Révolution française, c’est le choix des personnages principaux : celui de personnages humbles, de la petite histoire, les membres du bataillon des Marseillais se rendant à Paris pour représenter la province et faire accepter la volonté de la Nation au roi (« Monsieur veto »).

Ce n’est pas pour rien que le sous-titre du film est « Chronique de quelques faits ayant contribué à la chute de la monarchie ». Ainsi, à l’exception de Louis XVI et de Marie-Antoinette, nous ne trouvons pas les grands noms de cette époque, quand bien même ceux-ci peuvent être cités comme Robespierre, Danton ou Marat, une scène étant réservée à la lecture de l’Ami du peuple. C’était un effet voulu du réalisateur qui trouvait qu’il y avait déjà beaucoup de films sur les grands hommes et qu’il était intéressant de faire l’histoire à partir de simples soldats. Des personnages rendus très humains car dans tout le film nous les voyons vivre, à travers la scène du bivouac ou en rendez-vous amoureux devant un spectacle d’ombre [1]. Cela permet aussi de donner un visage humain à ces révolutionnaires, loin de l’image du bolchévique avec le couteau entre les dents. Selon les propres mots du réalisateur : « Ce public pourra constater que ces révolutionnaires sont de braves gens, fort bien tenus, disciplinés, sympathiques, de (...) Lire la suite »

La Marseillaise (1) : le Front populaire au cinéma

Jacques FRANJU
« Le commerce cinématographique classe les films en deux catégories : les films modernes et les films historiques. Les films modernes sont ceux qui prétendent se passer de notre temps. Les films historiques sont ceux qui prétendent se passer avant. [...] Quitte à me faire beaucoup d’ennemis je ne crois pas beaucoup à cette classification. [...] Aussi, (je) propose une grande simplification, c’est de réduire ces deux catégories en une seule et déclarer que les films ne doivent être ni « historiques » ni « modernes », mais tout simplement actuels. » Cette citation est issue du dossier de presse de La Marseillaise, film français sorti en 1938, et c’est son réalisateur Jean Renoir qui parle. Cette simplification énoncée, bien que partiale, s’applique très bien à son film, à la fois historique en décrivant des évènements de la Révolution française, et moderne car faisant référence à des événements se déroulant durant la production du film et dont les thèmes même du film sont liés à l’actualité. L’œuvre provient des (...) Lire la suite »